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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
ertms
3 mai 2020

Plans de soutien : l'avion, l'automobile... et le train ?

7MM€ par la France et 3 MM€ par les Pays-Bas : pas de nationalisation pour Air France KLM mais des prêts d'Etat et peut-être une montée ponctuelle au capital du groupe. Dans le secteur automobile, 5 MM€ pour Renault. L'opération pompiers est massive.

On espère qu'elle le sera tout autant dans le secteur ferroviaire et des transports en commun. L'avion restera un mode de transport utile, dont le périmètre va probablement être chamboulé, entre évolution des comportements et degré d'ouverture sanitaire des pays. Mëme chose pour l'automobile, mais dans les deux cas, il serait souhaitable d'adosser ces aides à des engagements dans la durée, notamment sur la trajectoire environnementale des entreprises soutenues.

Le 30 avril, le ministère de l'Economie a annoncé que les vols Air France devront être drastiquement réduits sur les liaisons où existe une liaison ferroviaire en 2h30 maximum. Le choix de ce seuil est déroutant car il est très restrictif et ne correspond pas vraiment à la situation du marché. Marseille et Montpellier sont au-delà de ce seuil et la part de marché du rail est très nettement supérieure à celle de l'avion. Il aurait fallu au contraire étendre ce seuil au moins à 3h30 pour :

  • intégrer d'autres liaisons, notamment sur des axes qui ont bénéficié d'importants investissements (LGV SEA et BPL),
  • avoir une vision non exclusivement parisienne : quid de Lille - Lyon et même de Strasbourg - Lyon où le train est à la peine malgré la LGV Rhin-Rhône ?
  • engager une dimension européenne sur certaines liaisons vers Amsterdam, Cologne, Genève, Francfort.

Bref, la jauge est un peu basse et pour l'instant, le chemin de fer est un moyen de transport de second rang dans l'esprit du gouvernement. Qui plus est, le gouvernement semble oublier qu'Air France n'est pas la seule compagnie aérienne à assurer du trafic intérieur...

Le train semble frappé d'ostracisme de la part du gouvernement : le Secrétaire d'Etat aux Transports considère qu'il faut attendre la dynamique de reprise pour évaluer la nécessité d'une aide à la SNCF... mais n'a pas pris autant de précautions pour venir en aide à Air France. En résumé, « pour l’avion, on vole au secours ; pour le train, on vole dans les plumes ! ». 

Gérer les pertes, remettre en route la production

Quant au secteur ferroviaire, il faudra d'abord accompagner le groupe SNCF face à la perte durable de recettes : la trajectoire de croissance du trafic est rompue et le rattrapage prendra du temps. La trajectoire financière - fragile - définie par la réforme de 2018 est probablement à reléguer au rang de voeu pieu sinon de souvenirs.

On scrutera de près la dimension relative aux investissements et d'abord sur le rythme des opérations de renouvellement du réseau. L'exercice de reprogrammation est un casse-tête mais il sera mené à son terme : il faudra juste ne pas avoir la mémoire courte et comprendre que les 2 mois de confinement pourront se traduire parfois en mois supplémentaires de décalage de certaines réalisation.

Les petites lignes retrouveraient-elles grâce aux yeux de l'Etat ?

Certaines lignes de desserte fine du territoire pourraient faire partie du plan de relance, par le fait que les besoins d'intervention sont à court, sinon à très court terme, et qu'il s'agit aussi de distiller sur l'ensemble du territoire les effets de cet instrument. Une participation accrue de l'Etat au financement de ces opérations serait souhaitable (d'autant qu'il s'agit de son réseau), délestant potentiellement SNCF Réseau de sa - maigre - participation et envoyant un signal aux Régions sur la prise en compte de ces lignes dans l'activité économique locale. Osons une proposition : 2/3 Etat, 1/3 Région... sachant qu'actuellement c'est plutôt le contraire !

Des investissements pour concrétiser une relance du fret

On surveillera aussi de près la prise en compte par l'Etat des appels multiples à une nouvelle politique sur le transport de marchandises, avec à la clé des investissements à réaliser sur le réseau. Se posera d'abord la quesiton du nombre de sillons, avec en filigrane la répartition de la capacité entre la maintenance et les circulations, leur qualité et leur performance en lien avec les engagements que peuvent prendre les opérateurs vis-à-vis de leurs clients.

En termes d'investissement, le prisme de lecture du fret amène à mettre en avant :

  • l'équipement du réseau en GSM-R, utile pour éviter le recours à un second mécanicien sur les lignes ne disposant pas de Radio Sol-Train ;
  • l'aménagement de positions de garages a minima standardisées à 750 m, influant sur l'exploitaiton mais aussi la productivité des sillons, et, au-delà, une analyse objective des opportunités et limites de trains de fret de 850 voire 1050 m ;
  • le gabarit, puisque la plupart des chargeurs ont P400 à la bouche : comment dégager des itinéraires continus compatibles avec ce nouveau standard intermodal ?
  • la signalisation, avec évidemment la trajectoire ERTMS, moyen de simplifier le passage des frontières et de gagner en performance par rapport à l'équipement actuel français et ses règles d'usage.

Les opérateurs auront naturellement besoin de soutien, qui n'aura réellement d'effet si, en parallèle, il n'y a pas de mesures destinées à engager un repositionnement du transport routier : c'est toute la complémentarité des modes sur une chaine logistique qui pourrait être repensée, à condition d'avoir un mode ferroviaire compatible avec les besoins des clients. D'où la nécessité des investissements... 

La dimension énergétique et intermodale

Le volet énergétique mériterait de s'inviter à cette liste avec la réduction de la dépendance aux énergies fossiles et un plan d'électrification de certains itinéraires à fort enjeu fret, équipement pas forcément caduc du fait du développement des locomotives bimodes, encore émergeant.

On pensera tout particulièrement à certaines sections périurbaines à fort trafic, qui ne sont toujours pas électifiées en dépit d'un trafic qui n'a rien à envier à certains grands axes, comme Toulouse - Colomiers, Vendenheim - Haguenau et Strasbourg - Molsheim. La transversale Nevers - Chagny mériterait d'en faire partie, afin d'amorcer un itinéraire alternatif au passage par l'Ile de France du corridor Allemagne - Espagne d'autant que la VFCEA est inscrite au réseau européen... donc potentiellement éligible à une participation conséquente de l'Union Européenne. Le laboratoire d'électrification partielle Marseille - Aix en Provence couplé à l'installation de batteries sur les trains au lieu des moteurs thermiques pourrait aussi faire école.

Au chapitre des investissements plutôt de long terme, certaines lignes nouvelles mériteraient d'être confirmées : on pensera d'abord aux liaisons Bordeaux - Toulouse, à l'arc languedocien et à Marseille - Nice, ayant deux points communs :

  • concourir à rééquilibrer train et avion par l'amélioration des performances ferroviaires non seulement sur les radiales mais aussi sur les liaisons entre grandes métropoles. Sur LNMP, le bénéfice sera probablement insuffisant sur Paris - Barcelone, mais potentiellement intéressant sur des liaisons depuis Lyon, Montpellier et Marseille;
  • une liaison sensiblement améliorée des métropoles du sud (Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Nîmes, Marseille, Toulon, Nice).

A cette liste, s'ajouterait évidemment LNPN (sections francilienne et rouennaise) au titre de la désaturation francilienne.

Le train, l'évolution des comportements de mobilité et la stratégie industrielle en France et en Europe

Au-delà, le transport de voyageurs est lui aussi face à de nombreuses inconnues, sur le comportement des individus face à un mode de transport collectif et l'évolution de leurs pratiques de mobilité. En milieu urbain, le vélo trouve de nouveaux arguments : combiné à l'augmentation du télétravail dans le secteur tertiaire, un écrêtement des pointes de trafic semble possible d'autant plus si sont mises en oeuvre des mesures de décalage des horaires, dans les entreprises qui le peuvent mais aussi dans les administrations et le monde de l'apprentissage (de l'école à l'université). Ce ne serait pas forcément une mauvaise chose... à condition d'en examiner l'ensemble des conséquences : sur le seul sujet du télétravail, ne plus aller systématiquement à un bureau fixe dans un bâtiment du lundi au vendredi ne signifie pas pour autant moins de déplacements... mais une autre façon de se déplacer (fréquence, horaire, fonctionnalités attendues...) et assurément encore une atténuation de la différence entre l'heure de pointe et la journée.

A plus grande échelle, quantités de facteurs pourraient modifier les pratiques, la demande et les choix modaux. Le train peut avoir durablement une belle carte à jouer : la fibre écologique croissante est un signal, les encouragements à soutenir l'économie du tourisme en France et en Europe en est un autre... En la matière, outre les questions d'ordre sanitaire, l'évolution de la stratégie commerciale des entreprises ferroviaires pour reconquérir des trafics et s'intégrer dans la nouvelle donne du marché sera évidemment décisive. En France, le train a trop souvent oublié qu'il n'était pas qu'un mode de transport de masse entre et au sein des grandes métropoles, mais aussi un outil de découverte touristique, y compris dans des régions plus rurales.

Enfin, les réflexions sur une mondialisation tempérée sinon régulée et une réindustrialisation de secteurs stratégiques, notamment en Europe, peuvent aussi donner de nouvelles perspectives pour le rail et en particulier pour le fret, avec probablement une forte composante territoriale impactant non seulement la consistance mais aussi la géographie des trafics : on mesure ici à quel point la préservation du maillage ferroviaire est devenu un impératif stratégique pour l'implantation durable d'activités en évitant le syndrome de l'hypermétropolisation dont on a déjà mesuré les limites et en assurant une mise en réseau des territoires pour leur dynanisme économique.

Cela montre bien qu'investir sur le réseau ferroviaire, c'est semer les graines d'une nouvelle économie des territoires.

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14 avril 2020

Après la crise : la relance par l'investissement ferroviaire ?

Un plan d'austérité ferroviare : c'est ce que craint la FNAUT après les déclarations du Secrétaire d'Etat aux Transports. Alors qu'on a le tournis devant les milliards d'euros annoncés par l'Etat pour soutenir une remise en marche de l'économie et accompagner les populations les plus frappées par la récession provoquée par les mesures de confinement, M. Djebbari met en avant la nécessité de maintenir une trajectoire financière pour le groupe SNCF et en particulier pour SNCF Réseau.

Voici la déclaration du Secrétaire d'Etat aux Transports interrogé par RMC-BFM et le communiqué de presse de la FNAUT.

Assurément, la reprise d'une activité économique et industrielle plus normale sera progressive et il faudra bien hiérarchiser les actions et l'affectation des moyens humains et matériels. Que cette étape aille d'abord à la remise en service du réseau est tout à fait normal. On note aussi que M. Djebbari souligne que les lignes de desserte fine du territoire devraient être en bonne position avec des opérations prêtes à partir en réalisation. C'est un aspect territorial important pour le plan de relance régulièrement évoqué par le gouvernement.

Mais, comme nous l'évoquions dès son annonce, ce plan de relance doit être aussi l'occasion d'engager un virage décisif, complètement lié à la transition énergétique et aux objectifs européens de réduction des émissions de CO². N'évoquer la situation du secteur ferroviaire qu'au travers d'une trajectoire financière quand il s'agit de surmonter une dépression économique, humaine et sociale sans précédent est un non-sens qu'on peut éventuellement mettre sur le compte de la faible expérience politique de M. Djebbari. S'il ne faut pas balayer d'un revers de main cette dimension, elle ne saurait être une finalité en soi.

Le secteur ferroviaire doit être un pilier de la relance économique tout simplement parce que son effet d'entrainement sur l'industrie est important et bénéficie à des entreprises françaises et européennes. Il serait donc particulièrement malvenu de contraindre le secteur ferroviaire à la disette, sous couvert d'une trajectoire financière dictée par le récent passage en Société Anonyme qui, pour SNCF Réseau, se révèle un contresens historique flagrant, qui n'a pas attendu cette crise pour être perçu par bien des acteurs du secteurs.

Le volet ferroviaire du plan de relance doit donc être comme une fusée à plusieurs étages avec une planification des investissements selon leur priorité opérationnelle, leur délai de mise en oeuvre (d'où la position favorable des petites lignes dont plusieurs sont à traiter dans les 3 ans à venir) et leur impact à la fois sur le service, l'économie des territoires mais aussi sur la réduction de l'empreinte environnementale des transports.

Dans ce cadre, l'élaboration du nouveau contrat de performance ne doit pas se contenter d'une reconduction des principes préexistants modifiés par le passage de SNCF Réseau du statut d'EPIC à celui de SA. La logique financière qui prévalait au détriment d'une approche économique et l'insuffisance des moyens ont bridé la modernisation du réseau. Le retard français se résorbe à un train de sénateur. Plus que jamais, le chemin de fer peut être Le moyen de transport du 21ème siècle, comme le lui souhaitait Louis Armand voici 70 ans.

Un nouvel air doit souffler sur le ferroviaire, d'autant que les attentes sont fortes tant du côté des voyageurs que du côté des opérateurs. Sans fermer les yeux pour autant sur une analyse rigoureuse des projets à la lumière de leur ratio coût / efficacité, c'est l'occasion de démontrer qu'un euro investi dans le ferroviaire ne l'est pas en pure perte compte tenu de la diffusion dans l'ensemble de l'économie du pays.

C'est aussi le moment de faire des choix forts sur la complémentarité des modes de transport et en repositionnant le transport aérien - mal en point - d'abord sur les longues distances intracontinentales et les parcours intercontinentaux, ce qui, pour le cas français, appellerait à remettre en cause une bonne partie des 75 aéroports du territoire, vivant pour la majorité de subventions publiques dont le niveau avait suscité - quand il s'agissait du train - de véhémentes critiques de la Cour des Comptes (les fameux 200 € par voyageur sur un Lyon - Bordeaux qui n'existait pas se retrouvent sur bon nombre de liaisons aériennes intérieures). Nous reviendrons prochainement sur ce point dans un dossier de transportrail.

En tête d'affiche, on pensera évidemment aux grands noeuds ferroviaires qui sont un verrou important dans le développement des dessertes voyageurs (notamment les RER dans les grandes métropoles) et pour l'essor du fret. En fil d'Ariane, l'équipement ERTMS niveau 2 des grands axes pourrait être conforté sur plusieurs grands axes : Marseille - Vintimille, Nantes - Angers - Le Mans, Paris - Le Havre, Ambérieu - Modane... Sur ce point, l'Europe, qui annonce aussi des montants élevés de soutien à l'économie, devrait être un levier d'accélération de cette intégration technique. Elle souhaite faire de 2021 l'année du rail : qu'elle le prouve autrement que par un pelliculage sur une rame Thalys !

Raisonner en trajectoire financière uniquement Le chemin de fer a une carte historique à jouer : passer à côté serait dramatique.

 

14 avril 2020

ERTMS : une trajectoire européenne à redresser

5733 km équipés en septembre 2019 pour un objectif de 15 665 km fin 2023 : l'Union Européenne constate qu'entre les engagements et les actes, l'écart est significatif et ne pourra probablement pas être rattrapé. Parmi les explications, le délai de mise au point d'une version stable, la désormais célèbre Baseline3 pour les initiés, peut être avancé mais ne saurait être suffisant. 

La Suisse vient d'achever l'équipement de son réseau avec le niveau 1 en supervision limitée. Même chose au Luxembourg. Mais il s'agit de réseaux de taille limitée par rapport aux principaux pays européens, et la démarche a été engagée et financée de longue date... sur les équipements au sol et à bord. En France, l'axe Luxembourg - Bâle est également prévu en niveau 1 en supervision limitée, mais ce stade est jugé finalement - et logiquement - peu pertinent.

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Mommenheim - 2 mars 2017 - La BB1301 belge traverse la gare française de Mommenheim avec un long convoi vers la Suisse se jouant des frontières. Ces machines sont très présentes sur cette dorsale entre la Lorraine et la Suisse, l'itinéraire français étant bien plus court que par l'Allemagne. © transportrail

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Kogenheim - 8 juillet 2017 - Circulation à droite en plaine d'Alsace pour la BB37052 en tête d'un convoi Sibelit aisément reconnaissable avec ses caisses mobiles Ambrogio, à destination de l'Italie. Les BB37000 tricourant aptes au 15 kV peuvent pénétrer en Suisse et en Allemagne et circulent également sous le 25 kV luxembourgeois. © N. Hoffmann

ERTMS pose effectivement plusieurs questions d'ordre économique, financier et technique. Sa valeur ajoutée n'apparaît réellement qu'avec le niveau 2 et avec la suppression de la signalisation latérale, pour bénéficier d'un gain de capacité d'une part et d'une réduction des coûts de maintenance d'autre part (bref, des recettes en hausse et des dépenses en baisse). L'installation nécessite une mise de fond assez élevée pour équiper l'infrastructure mais aussi le matériel roulant. Si le GSM-R, outil de communication essentiel dans ERTMS, est déployé sur 140 000 km d'infrastructures en Europe, les autres équipements amènent les gestionnaires d'infrastructures et les États à une certaine inertie. 

Dans certains cas, ERTMS même en niveau 2, même avec suppression de la signalisation latérale, ne présente pas dans l'absolu un bilan économique tranché lorsque des équipements performants existent : c'est le cas du LZB allemand et de la TVM française sur les LGV.

Il est effectivement plus important lorsque ERTMS doit venir remplacer des systèmes classiques à capacité limitée et lorsque le gain qu'il peut procurer élude - ou diffère - un besoin d'investissement élevé en voies supplémentaires ou en infrastructures nouvelles. 

Cependant, lorsqu'il faut envisager le renouvellement d'équipements, ERTMS s'impose comme un nouveau standard : plutôt qu'un remplacement à l'identique (par exemple refaire de la TVM), basculer en ERTMS prend tout son sens, comme cela a été démonté avec la LGV Sud-Est. Le gain de capacité procuré est ici réel, car il s'agit de la première version de la TVM (TVM300) et le renouvellement est l'occasion d'envisager un redécoupage, intégrant les performances des matériels de dernière génération. C'est en outre un axe majeur français et européen, où certains opérateurs préparent leur arrivée face à une SNCF qui leur a facilité la tâche en réduisant l'offre depuis plus de 10 ans. C'est tout le paradoxe français : la demande existe, mais valoriser un gain de capacité de l'infrastructure dans une conjoncture à la baisse en nombre de sillons effectifs s'avère objectivement un exercice difficile face à des comptables à courte vue. 

L'autre point sensible, c'est evidemment le matériel roulant : entre 27 500 et 30 000 engins (auto-)moteurs doivent être équipés d'ici 2030. Or les conditions de financement sont particulièrement variables entre les États. En outre, la progressivité dans l'équipement du réseau implique en phase transitoire la spécialisation des parcs. C'est par exemple un des éléments centraux du projet Marseille - Vintimille, facilité par la configuration de l'axe, finalement assez isolé. Ce n'est pas trop difficile pour les trains à grande vitesse, puisque le renouvellement naturel du parc devrait aboutir à un équipement général des relations empruntant l'ensemble LN1-LN4-LN5.

Cette situation résulte aussi d'un choix de pilotage par les États. Un portage européen aurait été intéressant, notamment dans la démarche industrielle avec la constitution d'une centrale d'achat mutualisant certains frais fixes et donnant une toute autre envergure au projet. Le consensus mou préservant le pré carré de chaque État a finalement engendré une partie des dérives techniques et financières de l'Esperanto de la signalisation ferroviaire.

En outre, ERTMS doit aussi prendre en compte ses propres limites et une nouvelle évolution à venir : le GSM-R a vocation à être remplacé par un nouveau système dérivé de la 5G : Future Rail Mobile Communication System pourrait émerger d'ici 4 ans. Pointe aussi à l'horizon une évolution d'ERTMS avec pilotage automatique pour les sections à fort trafic.

Le nouveau contexte de la décennie 2020 suite à la crise sanitaire recherche des projets pouvant être rapidement mis en oeuvre : le développement d'ERTMS mériterait d'en faire partie avec un concours européen significatif, surtout si le modèle économique et industriel venait à privilégier des circuits plus courts, à l'échelle du continent, avec un mode de transport plus vertueux.

28 février 2020

Suisse : début des essais dans le tunnel du Ceneri

Il reste un tunnel à ouvrir pour achever le grand programme suisse des Nouvelles Liaisons Ferroviaires Alpines. Le tunnel du Ceneri, long de 15,4 km, sera mis en service en décembre prochain. Il parachèvera l'amélioration de la performance sur l'axe du Gothard. Il autorisera une liaison Eurocity Zurich - Milan en 3h17 dans l'horaire 2021, sachant que les CFF visent un temps de parcours de 3h02 à l'achèvement des autres travaux capacitaires sur l'axe. En trafic régional, le trajet Lugano - Bellinzona ne prendra plus que 15 minutes contre 30 actuellement et la liaison entre Lugano et Locarno actuellement assurée en 51 minutes au mieux et 1h13 dans la plus mauvaise configuration, sera réduit à 30 minutes par la suppression de la correspondance à Bellinzona, puisqu'un raccordement direct a été intégré au projet.

Pour le fret, c'est évidemment une facilité supplémentaire pour améliorer la performance du trafic entre l'Allemagne et l'Italie. En rampe de 8 / 1000, il autorisera le passage de trains de 2000 tonnes. Le tunnel sera équipé en ERTMS niveau 2 avec signalisation en cabine, comme sur la ligne nouvelle Mattstetten - Rothrist, le tunnel du Lötschberg et le tunnel du Gothard évidemment.

6 janvier 2020

2020 et l'avenir ferroviaire français

Parallèlement à la dernière campagne présidentielle, la FNAUT et Mobilettre avaient organisé Rail 2020, une série de tables rondes sur l'avenir du secteur ferroviaire en France. 2020, nous y sommes et transportrail se livre à un petit bilan. Sans surprise, il n'est guère flatteur en dépit de la succession de réformes institutionnelles, qui n'ont qu'à peine masqué l'absence d'une réelle politique industrielle et territoriale.

Des réformes de structure ne sauraient faire une politique des transports et de l'aménagement du territoire

Les réformes se succèdent, sans être réellement abouties ni même parfois comprises. En 2014, le gouvernement de M. Ayrault avait réunifié le système ferroviaire en supprimant RFF et en regroupant l'ensemble des métiers de l'infrastructure dans SNCF Réseau. En lien avec cette réforme et face à la situation des dessertes nationales classiques, l'Etat s'était engagé à définir un schéma directeur des services nationaux de transports de voyageurs dont on n'a toujours pas vu la moindre ébauche. Pire, l'arrivée des Services Librement Organisés d'autocars, à l'initiative de M. Macron alors Ministre de l'Economie, a créé un nouveau secteur d'activité, totalement libre, bousculant encore un peu plus les repères de la population. Plutôt que de miser sur le rail, en revalorisant les dessertes Intercités, la SNCF a préféré investir dans Ouibus (avec quel argent ?) avec pour seul résultat un déficit chronique et un rachat par Blablacar.

Parallèlement, en 2017, les 4 lignes nouvelles validées pendant le quinquennat de M. Sarkozy ont été mises en service et la seule chose qui soit à peu près certaine, c'est que les nouvelles réalisations se feront attendre au moins jusqu'à la prochaine décennie, faute de moyens et d'une ambition stratégique qui ferait encore un peu plus du train une alternative à l'avion.

Sur le réseau classique, si de réels efforts ont été accomplis pour rattraper le colossal retard accumulé dans son renouvellement depuis le milieu des années 1980, la tâche reste importante et suppose une constance de l'action publique. Le Contrat Etat - SNCF Réseau qui n'a de performance que le nom n'a pas réglé les problèmes de dotations de financement. Sanctuarisant en apparence les moyens alloués au rail, son écriture budgétaire et non économique met à mal son efficacité. Le budget 2020 est venu casser l'engagement pris par l'Etat d'atteindre 3 MM€ pour le renouvellement, alors qu'il faudrait probablement en régime nominal de l'ordre de 5 MM€ par an pour pérenniser l'ensemble du réseau, et pas seulement les lignes structurantes.

Sujet particulièrement médiatisé ces deux dernières années, mais qui ont occupé le devant de la scène à plusieurs reprises depuis au moins deux décennies, les lignes de desserte fine du territoire ont au moins temporairement sauvé leur peau : le rapport Spinetta, reproduisant à la virgule près les considérations des argentiers de l'Etat des années 1960, a officiellement été mis à l'écart, mais dans l'arrière-cuisine, le moindre engagement de l'Etat sur une participation au renouvellement d'une de ces lignes nécessite d'âpres négociations. Leur sort est de plus en plus dans les mains des Régions, pressées de financer toujours un peu plus ces lignes, mais dont les capacités sont toujours plus réduites par un Etat recentralisateur qui n'a cesse de transformer des Collectvités Locales en Etablissements Publics Régionaux, bref de revenir à la situation de 1972 : on a connu mieux comme nouveau monde politique...

A ce sujet, il faudra donc statuer et c'est peut-être l'incarnation la plus forte des choix des années à venir : soit l'Etat assume son rôle, puisqu'en reprenant la dette de SNCF Réseau, il a aussi repris l'actif c'est à dire la propriété du réseau (retour à la situation d'avant 1997), et il finance la gestion de son patrimoine ; soit il continue de se défausser sur les Régions et dans ce cas, ces lignes - ou du moins une partie - devront leur être transférées en pleine propriété et donc sortir du réseau ferré national... ce qui suppose que l'Etat rende aux Collectivités Locales une certaine autonomie de ressources.

On en vient à la dernière réforme et on reste sur le dossier des LDFT. La réforme ferroviaire de 2018, transformant le groupe SNCF en Société Anonyme, est une illustration de plus d'un principe de réforme d'abord sur la forme plus que sur le fond... à tel point qu'elle se retourne contre ses propres instigateurs. Les négociations menées par l'habile Préfet Philizot, omniprésent dans le domaine des transports, sur le financement de ces petites lignes cherchent à trouver un compromis. Il apparaît difficile. La tentation est grande de faire de l'affichage à l'approche de 3 années électorales et de ne pas lésiner sur les effets d'annonce : comprendre charger la barque de SNCF Réseau, pour mettre en avant un Etat qui répondrait aux critiques des Régions. Sauf que SNCF Réseau vient de passer en Société Anonyme... et en changeant les règles du jeu, il se prive - en principe - des expédients habituels. L'Etat se retrouve donc coincé par ses propres décisions et devra donc faire une pirouette pour que la SA ne soit pas en défaut dès sa création...

Le passage en Société Anonyme est aussi l'occasion de remettre à plat ce Contrat qu'on dit de performance, signé en 2017 et qui fait l'objet de contestations récurrentes de l'ART (ex ARAFER) : les 2,77 MM€ de dotation pour 2020 pour le seul réseau structurant sont notoirement insuffisants : il manque 230 M€ sur lesquels le gouvernement s'était engagé en 2018, mais aussi le demi-milliard constaté par l'audit EPFL-IMDM... et les 700 M€ annuels pour renouveler les LDFT. Bref, il faudrait porter à au moins 4,2 MM€ annuels la dotation de renouvellement du réseau ferroviaire pour véritablement lui assurer les moyens de sa pérennité et de sa transformation. Sans cela, difficile de donner au chemin de fer la place qui devrait être la sienne... et elle est considérable. Evidemment, face aux 8,6 MM€ annuels accordés à DB Netz pour un réseau 11% plus étendu que le notre... l'ampleur du sous-investissement français est criant.

L'Etat n'a pas su prendre en compte le rôle potentiel du transport ferroviaire dans une nouvelle politique d'aménagement du territoire - expression totalement disparue depuis des années du langage ministériel - et dans la mise en oeuvre de la transition énergétique. Le rail est à la fois une filière d'emplois industriels à large palette, de métiers de main d'oeuvre à une ingéniérie à haute qualification. Il est un outil de structuration des territoires, de composition entre des métropoles dynamiques et des zones rurales parfois marginalisées et peut ainsi être le moyen de remettre du liant et de la complémentarité entre eux. Il est évidemment un puissant levier de transition énergétique non seulement par ses avantages intrinsèques que par sa capacité à intégrer de nouvelles technologies lui permettant de s'affranchir du gasoil. Cette nouvelle politique ferroviaire devrait reposer sur quatre piliers :

  • la modernisation du réseau, avec l'ambition de lignes structurantes à haute débit, incluant la sélection rigoureuse de projets de lignes nouvelles, à commencer par la LGV Bordeaux - Toulouse, la section francilienne de LNPN, les aménagements sur les axes Montpellier - Perpignan et Marseille - Nice, le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise ;
  • la création de RER pour la desserte périurbaine des grandes agglomérations, en lien avec une nouvelle étape de développement des réseaux urbains ;
  • la reconquête des lignes de desserte fine du territoire, soit au sein du réseau national, soit par l'accompagnement financier des Régions pour les lignes qui leur seraient transférées ;
  • une vraie relance du fret ferroviaire ciblée sur l'évolution de l'infrastructure pour la rendre plus disponible et plus adaptée aux besoins des chargeurs, notamment sur la question du gabarit, et en venant en soutien des opérateurs pour l'équipement des locomotives en ERTMS.

Le financement de ces mesures supposera évidemment des ressources nouvelles, sujet douloureux depuis le naufrage de l'écotaxe... qui, rappelons-le, a coûté au moins 800 M€ de recettes annuelles à l'AFITF...

Bref, les réformes de structure ne peuvent masquer l'absence de réelle politique industrielle et de son lien avec une dimension territoriale et naturellement environnementale, conséquence d'une vision uniquement financière et surtout annuelle, par nature antinomique avec un secteur des transports qui s'inscrit dans une temporalité au moins décennale...

L'an 1 de la concurrence ?

Depuis le 1er janvier, les dessertes ferroviaires intérieures échappent au monopole de la SNCF et entrent dans l'ère de la concurrence. Pour autant, pas de révolution depuis le début de l'année car, évidemment, cette nouvelle donne se mettra en place progressivement. Sur les liaisons nationales, plusieurs opérateurs sont déjà sur les rangs. Trenitalia voudrait se faire la main sur la liaison Paris - Lyon - Turin - Milan et prépare ses ETR400. Toujours dans le domaine de la grande vitesse, la RENFE vise les liaisons dans un triangle Barcelone - Lyon - Marseille avec des S100, répondant à l'appétit français pour les liaisons en Espagne. Au chapitre des liaisons classiques, Flixtrain a pris un temps d'avance et manifesté son intérêt pour des radiales depuis Paris vers Bruxelles, Lyon, Nice, Toulouse et Bordeaux.

Du côté du transport régional, PACA pousse ses pions, Grand Est avance avec les Länders voisins, Pays de la Loire devrait sortir du bois dans le courant du premier semestre. D'autres y pensent tandis que quelques Régions n'en voient pas l'intérêt : il est cependant vrai que l'expression des autres Régions incite SNCF Voyageurs à ouvrir des contre-feux pour montrer patte blanche.

Au plus tôt, les nouveaux trains longue distance n'apparaîtront pas avant 2021... et encore, cette échéance semble assez audacieuse. Pour le transport régional, le processus va s'étaler sur les 5 prochaines années pour une première vague. Nul doute que le paysage aura profondément changé à cette échéance, sans même imaginer la fin de la décennie.

Un nouveau patron belge pour le réseau ferroviaire français

C'est donc Luc Lallemand qui va succéder à Patrick Jeantet à la tête de SNCF Réseau. Un quatrième président en 8 ans. Difficle d'être pivot avec une telle instabilité... Jusqu'à présent directeur général d'Infrabel, le gestionnaire du réseau belge, sa nomination fait donc le choix d'un profil extérieur au système ferroviaire français, encore qu'il fut administrateur de RFF de 2007 à 2015 : la situation ne lui est donc pas vraiment inconnue. Il débarquera dans le contexte des négociations apparemment difficiles entre l'Etat et SNCF Réseau, grippées par un différend entre une productivité accrue pour dégager des marges de financement supplémentaires (point de vue du premier) et la nécessité préalable d'obtenir des dotations supplémentaires et un engagement ferme sur la décennie à venir pour engager une politique industrielle efficace (point de vue de la seconde).

Le tout dans un contexte de méfiance (pour rester poli) du régulateur : l'ART considère dans son avis du 13 décembre 2019 que l'indépendance du gestionnaire d'infrastructures n'est pas totalement garantie dans la nouvelle structure du groupe SNCF dont certaines fonctions mutualisées irritent le gendarme des transports.

Autant dire que le nouveau venu arrive dans un contexte ô combien glissant. Que changera le passage en SA face aux injonctions contradictoires de l'Etat qui reste non seulement actionnaire mais aussi décideur in fine ? Quelle sera la marge de manoeuvre de SNCF Réseau face à SNCF Voyageurs et SNCF Fret dans le contexte de marché ferroviaire désormais complètement ouvert ? Comment faire face aux défis sociétaux trop longtemps négligés dans un contexte de pénurie entretenue de moyens ?

Dans ses Mémoires, Louis Armand avait considéré que « s’il survit au 20ème siècle, le chemin de fer sera le mode de transport du 21ème siècle ». Puissent les décisions des prochaines années lui donner raison.

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12 décembre 2019

Vienne : 2 MM€ pour la S-Bahn

Le programme de modernisation de la S-Bahn de Vienne a été adopté. Reste à en formaliser le financement, qui pourrait être pris en charge à 80% par l'Etat.

Importants investissements sur l'infrastructure

Il est destiné à augmenter la capacité du réseau périurbain, notamment dans sa partie centrale. Ainsi, les ÖBB prévoient le renouvellement de la signalisation avec l'installation d'ERTMS niveau 2 sur 13,2 km entre les gares de Meidling et de Florisdorf, incluant l'allongement des quais à 220 m. La capacité de cette section devrait ainsi être portée à 900 trains par jour.

A l'ouest, la section Meidling - Hütteldorf sera elle aussi réaménagée avec la mise à double voie du raccordement avec la ligne de Linz, dans le but d'instaurer une cadence au quart d'heure sur ce maillon, sachant qu'en parallèle, une cadence similaire sera appliquée à une desserte vers la Westbahnhof.

Au sud enfin, la section Meidling - Mödling sera mise à 4 voies sur 11,8 km, pour un coût de 1,2 MM€, incluant la création de 2 gares supplémentaires. Sur cette section, la capacié sera accrue de 12 trains par heure et par sens.

 

Des trains toujours aussi peu adaptés à la zone dense

Ces investissements sur l'infrastructure mériteraient d'être prolongés par une réflexion de fond sur le matériel roulant engagé sur la S-Bahn. Les Talent de première génération avaient été initialement envisagés pour remplacer le matériel ancien et notamment les automotrices série 4020. Peine perdue : elles ont rapidement prouvé leurs limites, mais les ÖBB ont récidivé avec les Desiro, configurés d'abord pour du trafic régional avec une importante capacité assise et un niveau de confort de bon aloi. Certes, les 4020 sont à plancher haut (1200 mm) pour des quais de 760 mm et donc d'accès assez malaisé, mais en revanche, les couloirs sont relativement spacieux. C'est loin d'être le cas des Talent et des Desiro, certes accessibles de plain-pied, mais qui manquent cruellement d'espace à l'intérieur pour les voyages debout sur des courts trajets, et dont les plateformes ne sont guères compatibles avec des échanges rapides.

Ajoutons également l'emploi de rames tractées-poussées de voitures à 2 niveaux, certes courtes (maximum 5 voitures) avec des locomotives de bonnes performances, mais avec une mise en vitesse moyenne (sauf avec une Taurus...) et dont l'intérieur est encore plus aménagé pour les besoins du transport de moyenne distance.

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Vienne Mitte - 11 mai 2015 - Plus de la première fraicheur, pas très commodes d'accès avec 2 marches intermédiaires mais les automotrices 4020 sont encore les plus adaptées par la conception de leur intérieur. © transportrail

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Vienne Hütteldorf - 18 mai 2015 - Les Talent ont amené l'accès de plain-pied, mais leur configuration n'est absolument pas adaptée aux besoins de la S-Bahn. Sur environ 70 m de long, la rame de 4 caisses ne comprend que 6 portes. © transportrail

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Vienne Hauptbahnhof - 1er juin 2018 - Cityjet mais franchement inadapté au service urbain : 3 caisses, près de 70 m de long mais seulement 4 portes et des couloirs relativement exigus. Si les ÖBB sont en train de réussir la relance des trains de nuit, pour la S-Bahn, il va falloir prendre des cours du soir au chapitre Matériel Roulant ! © transportrail

Pour la S-Bahn de Vienne, il faudrait plutôt s'inspirer des automotrices ET425 de la DB, conçues pour la desserte de quais de 760 mm, avec des caisses plus courtes, un peu plus larges, avec 2 portes par face et une configuration intérieure plus équilibrée entre le souci d'une capacité assise relativement conséquente et des espaces de circulation suffisamment spacieux pour les besoins de la zone centrale.

31 octobre 2019

Madrid : réouverture en vue du tunnel de Recoletos

Si, en Ile de France, le RER A a connu 4 étés d'interception du trafic sur le tronçon central, le tunnel madrilène de Recoletos, le premier ouvrage reliant les gares de Chamartin et d'Atocha, a quant à lui été fermé en juin dernier pour renouveler l'ensemble de la voie, de la caténaire, de la signalisation et rénover les gares.

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Madrid Recoletos - 17 février 2013 - Avec l'ouverture du deuxième tunnel Chamartin - Atocha, le tunnel de Recoletos est moins intensément utilisé. L'interception a duré 4 mois pour la remise à neuf des 7 kilomètres du parcours. © transportrail

Mis en service en 1967 après des travaux qui se sont étalés sur plus de 30 ans, il accueille 250 trains par jour, essentiellement des Cercanias, l'ouvrage dispose désormais d'une voie sur dalle, d'un modèle différent de celle adoptée sur le tunnel plus récent via la plaza del Sol, puisqu'elle n'est pas accessible aux véhicules routiers de secours. La caténaire 3000 V a été remplacée par un profilé aérien de contact plus fiable. Enfin, le trafic est désormais géré par ERTMS comme le second tunnel. Ces opérations représentent 432 M€ d'investissement s'inscrivant dans le plan de modernisation des Cercanias.

30 septembre 2019

Alstom fournira l'ERTMS de la LGV Paris - Lyon

Dans le cadre de la modernisation de la LGV Paris - Lyon, SNCF Réseau a attribué au groupement Alstom - Setec le marché destiné à l'introduction des équipements ERTMS niveau 2, qui se substituera à la TVM300. La première ligne à grande vitesse deviendra donc interopérable à la faveur de cette opération qui dépasse donc le cadre du simple traitement du besoin de renouvellement.

SNCF Réseau profite donc de l'occasion pour moderniser les installations, pour améliorer la fiabillité mais aussi la capacité de l'infrastructure. Actuellement, la capacité nominale atteint 13 sillons par heure et par sens, pour un besoin maximal de 11 sillons, ce qui est moins qu'en 2008, du fait de l'évolution des dessertes TGV sur la dernière décennie. Elle pourra atteindre 16 sillons en 2030, après la mise en place d'ERTMS niveau 2 et la réalisation de travaux entre Paris et Valenton, dans le noeud ferroviaire lyonnais et le renforcement de l'alimentation électrique sur la LGV. Au total, le projet de modernisation représente un investissement de 607 M€, porté par SNCF Réseau et l'Union Européenne (à hauteur de 125 M€), et qui absorbe le coût élémentaire d'un renouvellement à l'identique. Même sans ERTMS, il aurait fallu consentir à d'importantes dépenses, y compris sur d'autres postes comme l'alimentation électrique : il faut rappeler qu'entre 1981 et 2019, la puissance des TGV circulant sur la LN1 a augmenté d'environ 25% et que leur nombre a fortement augmenté, même en intégrant le tassement observé depuis 2008.

Par ailleurs, cette opération repousse l'échéance de saturation de la LGV qui serait le facteur déclenchant du projet POCL : 607 M€ éludant durablement un dossier à 13 MM€, on mesure ainsi son intérêt stratégique. Qui plus est, il semble encore possible de repousser la limite capacitaire. Le système Atlas d'Alstom sera compatible avec une évolution en niveau 3 hybride et pourrait être doté d'une fonction de pilotage automatique supervisé par le conducteur, procurant un gain d'un à deux sillons supplémentaires par heure à condition que les noeuds encadrants puissent suivre.

 

27 juin 2019

Espagne : la grande vitesse atteint Grenade

La ligne à écartement européen de 122 km entre Antequera et Grenade a été – enfin - inaugurée le 25 juin, autorisant une vitesse de 300 km/h. Elle rejoint à Antequera la branche Cordoba – Malaga qui se greffe sur l’axe principal Madrid – Séville.

Sa réalisation aura été un feuilleton politico-technique espagnol entamé en 2006. Le projet a d'abord fait les frais des tensions politiques nationales et régionales du fait de divergences entre le gouvernement espagnol et la province d’Andalousie sur la consistance du projet. La difficulté des travaux a été largement sous-estimée : il aura quand même fallu revoir le tracé après approbation du projet et différer la réalisation de l'évitement de Loja. Ce maillon était à l'origine d'une interruption de la desserte de Grenade qui devait durer initialement 6 mois... et qui aura duré finalement plus de 4 ans à coup de reports successifs du fait d'enlisements techniques, politiques et financiers du projet.

Sur le plan technique, 81 km d'infrastructures nouvelles ont été mises en service, comrprenant une première section de la bifurcation de Bobadilla à Archidonda établie à double voie. La ligne nouvelle passe ensuite à voie unique jusqu'à Quejigares où elle rejoint la ligne historique, transformée pour le double écartement et électrifiée en 25 kV, sur 27 km, parcourus à 100 km/h incluant la desserte de Loja. Enfin, de Tocon à Grenade, la ligne est établie à voie unique jusqu'à l'arrivée en gare avec 2 km à double écartement. Les marchés pour la section contournant Loja et l'achèvement de la ligne à double voie ont été attribués en juin dernier.

LAV antequera-grenade

Les sections nouvelles comportent 6 tunnels (dont le plus long atteint 3355 m), 31 viaducs (dont 2 de plus de 2,5 km). Les trains desservent 2 gares intermédiaires à Antequera et Loja. L'intégralité du parcours est électrifié en 25 kV, équipée en ERTMS niveau 2 tandis que le système espagnol ASFA équipe la section de 27 km entre Quedigares et Tocon. 

Le coût de réalisation de cette ligne nouvelle et des aménagements sur le réseau classique atteint 1,675 MM€ et bénéficie d’un financement européen de 724,9 M€.

L’accélération de l’accès à Grenade revêt, comme dans toute la Région un enjeu économique et notamment touristique, couplé à une réflexion environnementale par un report modal potentiel vers le rail. Les liaisons Avant vers Séville amélioreront nettement les relations entre les principales villes d'Andalousie : elles seront mises en service en septembre. En attendant, la desserte établie par la RENFE se limite à 3 allers-retours Madrid – Grenade en 3h05 et un aller-retour Barcelone – Madrid – Grenade en 6h20.

Cependant, l’autorité de régulation ferroviaire déplore qu’à l’approche de l’ouverture du marché de la grande vitesse espagnole, l’usage des lignes nouvelles reste relativement faible en Espagne. La question de la tarification de l’infrastructure devrait assurément s’inviter dans les débats dans les prochaines mois…

16 juin 2019

Luxembourg : les transfrontaliers inquiets

Et il y a de quoi. Actuellement, 4 rames TER2Nng sur 25 ont été modifiées pour intégrer ERTMS, et il n'y en aura que 10 d'ici la fin de l'année. Conclusion, le service de bout en bout ne pourra pas être assuré au service annuel 2020 et il faudra changer de train. C'est la conséquence du refus des CFL de retarder la déposer des équipements préexistants de signalisation, considérant que l'opérateur français a été prévenu dans les délais impartis. La situation est d'autant plus ubuesque que les TER2Nng des CFL ont bien été équipées et qu'il aurait été judicieux de mutualiser les opérations.

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Ettelbruck - 28 septembre 2017 - Les Z2200 des CFL sont des TER2Nng tricaisses commandées en commun avec la SNCF. Néanmoins, l'intégration de l'ERTMS décidé en 2009 n'a été suivi d'effets côté français que très tardivement... en oubliant un peu l'intérêt des voyageurs... (cliché X)

Quelques rappels :

  • Le Luxembourg a décidé l'équipement de son réseau en ERTMS en 1999 ;
  • En juin 2007, à la mise en service de la LGV Est, les CFL décident de maintenir le système Mémor II+ pendant 10 ans en parallèle au déploiement de l'ERTMS. A cette époque, la conversion complète était prévue au 1er juillet 2017 ;
  • Côté français, le financement de l'équipement du matériel roulant n'est validé par la Région qu'en janvier 2016 ;
  • En avril 2016, les premières sections équipées ERTMS sont mises en service au Luxembourg, qui accorde un délai supplémentaire au système Mémoir II+  jusqu'au 30 juin 2021 ;
  • Suite à l'accident de Dudelange en février 2017, le gouvernement luxembourgeois annonce la généralisation de l'ERTMS et la fin de Mémor II+ au 31 décembre 2019.

Le problème vient donc moins de l'accélération du calendrier côté luxembourgeois que des lenteurs françaises sur la période 1999-2016, soit tout de même 17 ans ! Avant la réforme territoriale, la Région Lorraine était opposée à la prise en charge des modifications, considérant qu'elles devaient être financées par l'Etat qui avait naturellement fait un pas de côté. On notera aussi que la SNCF n'est pas totalement neutre dans ce dossier car elle a été longtemps très réservée sur l'intérêt de déployer ERTMS sur le réseau français.

La conversion est en cours... mais en attendant, ce sont les frontaliers lorrains qui vont payer les pots cassés...

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