TER2Nng : transformer l'essai
Les 80 TER2N livrées entre 1998 et 2000 ont donné toute satisfaction mais s’avèrent contraignantes dans leur usage car la formation à deux voitures conduit à les faire circuler le plus souvent en unité multiple. L’objectif est cette fois-ci de former des rames plus longues et plus accessibles en généralisant les accès de plain-pied et plus rapides en portant la vitesse maximale à 160 km/h pour assurer notamment des dessertes intervilles dans le grand bassin parisien.
Le consortium formé par Alstom et Bombardier remporte le marché de 200 rames de 2, 3, 4, ou 5 voitures.
Anthéor - 31 mars 2016 - Les TER2Nng acquises par la Principauté de Monaco arborent une livrée rouge et blanche éclatante (quand elle est propre) qui rompt avec la dominante bleue habituelle. Quand en plus le site est de toute beauté, cela donne un cliché réussi. © A. Sosio
Modularité et performance
Pour répondre à la demande de modularité des compositions, Alstom a développé une automotrice dont toutes les voitures comprennent un bogie moteur et un bogie porteur. De la sorte, l’évolution des compositions ne se traduit pas par une diminution de la puissance massique. La seule difficulté fut de concevoir une gamme variée, incluant une version à deux voitures, demandée par Rhône-Alpes de façon transitoire en attendant la livraison d’un atelier de maintenance plus long que celui des TER2N de première génération.
Ainsi, trois types de voitures forment la gamme TER2Nng : les « Z1 » et « Z2 » sont des voitures d’extrémité, la Z1 accueillant les deux pantographes, la Z2 en étant dépourvue. La Z3 est toujours placée au centre de la rame, pour les formations à 3 ou 5 caisses, tandis que les Z4 sont intercalées dans la version pentacaisse, ou placée à côté de la Z3 dans la version quadricaisse. Chaque voiture dispose d’un bogie moteur développant 850 kW et d’un bogie porteur : la puissance massique reste donc constante quel que soit la longueur de la rame puisque la version à 5 caisses atteint 4200 kW pour 310 t soit 13,54 kW / t .
Lille Flandres - 2 juin 2017 - Une Z24500 nordiste, à la livrée est quelque peu relevée par les portes jaunes. La Région Nord Pas de Calais avait retenu une version tricaisse, afin de pouvoir une modulation des compositions entre l'heure de pointe et la journée. © transportrail
Deux séries sont constituées : les Z24500 pour les versions à 2 et 3 caisses ; les Z26500 pour les versions à 4 et 5 caisses.
Les Z24500 ont été commandées par les Régions Rhône-Alpes, Lorraine, Nord Pas de Calais et Pays de la Loire, ainsi que les Chemins de fer Luxembourgeois ; les Z26500 sont destinées aux Régions Centre, Haute Normandie, Picardie, PACA et la Principauté de Monaco.
Andancette - 31 juillet 2012 - Assurant une liaison Lyon - Valence, une Z24500 descend la vallée du Rhône. Elle arbore la livrée Rhône-Alpes à base de vert pomme et aubergine, couleurs du logo régional. © transportrail
Les premières rames arrivent en 2004 et la livraison s’étale sur 6 ans : les dernières rames pentacaisses de Haute Normandie arrivent en 2010. La plus importante dotation arrive en région lyonnaise puisque Rhône-Alpes a commandé 60 éléments : 11 sont d’abord livrés en formation bicaisse, rapidement allongées en même temps que l’arrivée du reste du contingent. Avec la réforme territoriale, c'est désormais la Région Hauts de France qui se retrouve en tête des effectifs, par la fusion des parcs Nord Pas de Calais et Picardie.
Saint Sulpice Auteuil - 22 juillet 2012 - Les Z26500 quadricaisses de Picardie assurent la relation Paris - Beauvais où elles ont pris la succession de 3 rames Corail et d'éléments RIO modernisés. © transportrail
Beaulieu sur Mer - 30 octobre 2012 - Les Z26500 PACA assurent notamment la desserte du littoral azuréen caractérisé par un trafic dense sur une infrastructure noyée dans l'essor de l'urbanisation, aux gares rapprochées... et avec malheureusement son lot de dégradations (à commencer par les tags sur les rames). © transportrail
Quoique couplables avec les Z23500, cette fonction n’est que peu utilisée compte tenu des différences de performances : les TER2Nng sont aptes à 160 km/h contre 140 km/h pour les TER2Npg (première génération). Des UM hybrides circulent cependant régulièrement en Rhône-Alpes et plus épisodiquement en Nord Pas de Calais.
En revanche, en 2017, un accord entre Pays de la Loire, Centre et Grand Est a été conclu pour répondre aux besoins de cette dernière sur le sillon lorrain. Il prévoit la mutation des Z26500 quadricaisses de la Région Centre vers le Grand Est pour épauler les Z24500 tricaisses ex-Lorraine, en échange d'AGC permettant la réforme de Z2 Centre. Mais la commande de Régio2N par la Région Centre n'est jamais venue et la Région Grand Est s'est retournée vers la Normandie, qui lui a cédé ses 16 Z26500 compensées par de nouvelles commandes chez Bombardier...
Des missions régionales et Intervilles
Saint Piat - 21 juillet 2013 - Les Z26500 de la Région Centre sont engagées uniquement sur l'axe Paris - Chartres - Le Mans, en remplacement des Z5300. Leur puissance importante n'est cependant pas totalement utilisée du fait d'une alimentation 1500 V quelque peu ancienne (1937). © J. Sivatte
Les Z24500 sont plutôt orientées sur les relations à caractère périurbain, mais notamment en Rhône-Alpes, elles s’immiscent largement dans les relations intervilles, d’abord sur Lyon – Grenoble, puis sur Lyon – Marseille, du fait de coûts d’exploitation inférieurs aux rames Corail réversibles.
Orry la Ville - 22 mai 2010 - Les Z26500 pentacaisses de la Région Picardie assurent les relations TER Paris - Amiens. Elles arborent les bandes vertes, couleur régionale, et des portes d'un bleu étrangement différent du bleu TER. Quoiqu'un peu fatigué, le bâtiment voyageurs typique de cette ligne en impose encore. © transportrail
En revanche, les Z26500 sont majoritairement engagées sur des relations intervilles, sauf en PACA où elles sont engagées sur la desserte du littoral azuréen. Les rames de la Région Centre sont cantonnées à l’axe Paris – Le Mans ; celles de Haute Normandie sont pour partie louées à Intercités pour l’axe Paris – Le Havre ; les éléments picards à 5 caisses circulent sur Paris – Amiens et ceux à 4 caisses sont engagés sur Paris – Beauvais.
Toutefois, l’aménagement de ces rames s’avère exigu pour les relations de type Intercités : les caisses très longues n’offrent qu’une largeur de 2,82 m, serrant les places assises de part et d’autre d’un couloir étroit. Outre le pas de siège régional de 1750 mm, l'impression d'exiguïté est amplifiée en salle basse par la position des places sur une estrade et le choix de matériaux brillants Les bagageries sont notoirement insuffisantes sur les relations où les TER2Nng cohabitent avec des rames Corail. En revanche, les conditions d’accès sont améliorées par les portes larges de 1,30 m, identiques à celles des TGV Duplex, et grâce à la réduction de la lacune verticale. Leur grande capacité est un atout, mais au prix d'un aménagement peu adapté à la diversité des besoins sur les liaisons Intercités.
La TER2Nng confirme que l'automotrice à 2 niveaux est une solution plutôt adaptée pour des trajets à caractère périurbain, avec des voyageurs généralement peu chargés de bagages. Sur des relations plus longues, connotées Intercités (Paris - Rouen, Lyon - Marseille, Paris - Amiens), elles prouvent la limite de l'exercice consistant à maximiser la capacité sur une longueur définie, avec des exigences d'accessibilité. De quoi raviver le débat entre rame tractée et automotrice, d'autant plus si les rames sont appelées à circuler le plus souvent en UM2.
Salle basse d'une TER2Nng en version classique : les reflets dus au plafond brillant accentuent l'impression d'exiguïté liée au pas de siège et à la faible largeur des caisses. On notera la petite bagagerie sous l'escalier, qui rend ce matériel peu adapté aux longues relations où les voyageurs avec bagages ne sont pas rares. © transportrail
Salle haute d'une rame normande bénéficiant d'un aménagement amélioré : la structure des sièges est identique mais leur largeur en partie supérieure a été accrue, leur procurant un confort de meilleur niveau. En revanche, l'aménagement est identique en première et en seconde classe et le manque de capacité pour les bagages reste un défaut majeur. L'équilibre entre places assises et bagageries n'est pas simple sur les matériels à 2 niveaux. © transportrail
Focus sur l'évolution du siège basique TER pour la Normandie : il a d'ailleurs été retenu dans la rénovation Corail Haute Normandie pour homogénéiser le niveau de confort. L'ergonomie est assez correcte pour des trajets de moyenne distance même si l'assise est évidemment fixe. © transportrail
Vers la rénovation mi-vie
A partir de 2023, les TER2Nng débuteront les opérations mi-vie sur cette série de 201 rames. Sur le plan technique, leur fonctionnement s'avère satisfaisant et leurs performances de niveau très correct dès lors que les installations électriques n'astreignent pas à brider leurs performances.
Dans ce cycle de travaux, l'évolution des aménagements intérieurs pourrait être examiné. Le premier point porte sur l'impression de confinement de ces salles de faible hauteur, renforcée par les matériaux brillants à fort pouvoir reflétant.
Ensuite, il faudra traiter les sièges, car dans certaines Régions (au hasard en PACA...), elles s'avèrent parfois en très mauvais état. Sur les Z23500, la nouvelle structrure parvient à dégager un peu plus d'espace pour les genoux, ce qui est plutôt un bon point. L'expérience normande montre qu'il est possible de monter un peu en gamme un siège existant : ce point mériterait d'être examiné, en particulier dans des Régions où les TER2Nng peuvent avoir des missions de moyenne voire longue distance.
Enfin, il faudra s'interroger sur l'équilibre entre la capacité assise et les bagageries, car la situation actuelle est insatisfaisante. Il faudrait peut-être envisager un espace pour voyageurs avec bagages encombrants, éventuellement sur les espaces d'intercirculation, où il semble plus facile d'accéder avec des bagages.
A lire également, nos impressions de voyage comparées avec le Régio2N.
Alingsaas - 11 juillet 2021 - Pour conclure, une petite escapade suédoise avec cette automotrice X40 tricaisse des SJ, dérivée scandinave des TER2Nng françaises pour des liaisons Intercity pouvant circuler jusqu'à 200 km/h et naturellement adapté aux conditions météorologiques extrêmes de ce pays. © J. Sivatte