ET420 : la première génération moderne pour S-Bahn

Pour le service des S-Bahn de Francfort, Munich et Stuttgart, qui, dans les années 1970, bénéficièrent d'investissements importants pour favoriser une exploitation à haut débit par le biais d'une diamétrale souterraine, la DB avait passé commande d'automotrices composées de 3 voitures, comprenant chacune 4 portes par face. La DB privilégiait une solution à adhérence totale, les 6 bogies étant moteurs. Avec 2400 kW pour 129 tonnes, les ET420 étaient d'emblée hissées en tête des matériels les plus performants, même avec une vitesse plafonnant à 120 km/h, atteinte en 40 secondes seulement à pleine puissance.

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Webling - 5 août 2015 - Un élément ET420 rénové : le diagramme à 4 portes par face, parfaitement équidistantes, reste une référence pour les dessertes des grandes agglomérations à forte fréquence. Un métro régional. © F. Buchleitner

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Intérieur rénové d'un ET420 avec le traditionnel velours bleu à damier bleu sombre : le large couloir favorise les échanges et le remplissage équilibré du train. Il ne manque que l'intercirculation pour imaginer être dans un matériel moderne. (cliché X)

Ces dessertes, cadencées au quart d’heure ou la demi-heure, nécessitent un matériel très performant pour pouvoir s’insérer dans la trame, généralement fournie en Allemagne, des sillons ICE, IC, RE (trains régionaux) et du fret car la spécialisation des voies pour le trafic local n’est pas une règle générale, et quand bien même l’est-elle que cette mesure ne s’applique que rarement à l’intégralité du périmètre concerné par la S-Bahn.

Pas moins de 480 éléments ont été produits à partir de 1971, offrant un niveau de prestations particulièrement apprécié : vaste couloir intérieur, portes équidistantes, sans compter, pour l'époque, une livrée plus colorée, mariant le crème avec soit du bleu soit du orange, très à la mode à cette époque. Après rénovation à la fin des années 1990, les ET420 ont adopté la livrée rouge à filets et portes blanches caractérisant les trains régionaux de la DB : une opération qui a permis de lisser dans le temps les investissements en matériel neuf et d'éviter un trop grand écart de confort entre les ET420 et la nouvelle génération composée des séries 420 et 423.

ET423-425 : pied au plancher (mais à la bonne hauteur)

Quoique d’apparence similaire, les deux séries apparues à partir de 1997-1998 diffèrent par la hauteur de leur plancher. Plutôt que de faire une seule série polyvalente, la DB a choisi de distinguer les besoins en fonction des hauteurs de quais, selon un principe simple : une seule marche à franchir au plus entre le quai et le train, en acceptant le cas d’une « marche négative », c’est-à-dire que le quai soit plus haut que le train.

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Interface quai-train sur un ET425 depuis un quai à 760 mm. L'emmarchement intérieur est simple mais on voit que le dispositif pour l'embarquement des fauteuils roulant consomme 15% de la largeur de la porte, sans compter le temps de déploiement... © transportrail

Ainsi, la série 423, issue d’un marché de 462 rames attribuées à un consortium composé à l’époque d’ADTranz, Alstom LHB et ABB, a été conçue pour la desserte de quais de 760 mm ou un mètre de haut. De son côté, la série 425, produite à 249 exemplaires, relève d’un groupement piloté par Siemens avec ADTranz : avec un plancher à 780 mm, elles peuvent desservir des quais d’un mètre (auquel cas on « descend dans le train ») comme de quais de 55 cm, au moyen d’une marche intérieure, ce qui nécessite une certaine prudence lors de la desserte de quais hauts du fait de l’emmarchement intermédiaire. Assurant un trafic périurbain et régional à plus longue distance, les ET425 sont équipés d'un WC, contrairement aux ET423.

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Francfort Hauptwache - 24 septembre 2016 - La S-Bahn de Francfort comporte un axe diamétral souterrain orienté est-ouest, avec une desserte dense pouvant atteindre 20 trains par heure. Cependant, la non-maîtrise de la fermeture des portes constitue un loupé de conception qu'il faudrait intégrer au plan de rénovation de ces rames. © transportrail

Destinées aux S-Bahn les plus denses, les ET423 à plancher haut et plat sur toute la longueur du train, disposent de 3 portes équidistantes sur chacune des 4 voitures, alors que les ET425 n’en comportent que deux. L’objectif est évidemment de minimiser les temps de stationnement. Cependant, la conception de la commande des portes ne prévoit pas de fermeture forcée : tant que les cellules photoélectriques détectent une présence, la porte ne se ferme pas.

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 Diagramme des éléments ET423 à plancher haut.

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Diagramme des éléments ET425 à plancher intermédiaire. On remarquera la présence d'un WC en voiture d'extrémité à droite du schéma.

A l’intérieur, l’aménagement est sobre, presque monotone, avec une disposition en vis-à-vis en 2+2, à l’exception des extrémités avec des strapontins implantés longitudinalement, pour l’accueil des fauteuils roulants, des poussettes et surtout des vélos.

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Cologne Hautpbahnhof - 20 septembre 2010 - La gare de Cologne est un exemple pour la gestion de différentes hauteurs de quai. Les voies "nobles" accueillant le trafic longue distance (IC, ICE, Thalys) et régional disposent de quais à 550 mm autorisant la réception de trains à plancher de 380 550 et 760 mm, alors que les 2 voies "S-Bahn" avec quais de 1 m n'autorisent que les trains à plancher haut ou mi-haut. © transportrail

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Cologne Hauptbahnhof - 25 septembre 2013 - Cet ET425 assurant une mission régionale va être reçu sur les voies à quais bas. Il faut être observateur pour relever les différences entre les deux modèles, hormis le nombre de portes. © transportrail

Mais ce qui fait la singularité des ET423 et ET425, c’est sa motorisation. Pour des rames de 105 à 114 tonnes, disposer de 4 bogies moteurs sur 5 confère évidemment une forte adhérence en traction comme au freinage, et ce n’est pas de trop pour « dompter » pas moins de 2350 kW. Avec 20,6 kW par tonne pour les ET425 et 22,4 kW par tonne pour les ET423, aucun matériel suburbain ne dispose d’une telle puissance.

Parvenus à mi-vie, ces rames bénéficient d’un programme de rénovation, portant sur les assises, de sorte à augmenter à la marge le nombre de sièges. Le bleu du velours se fait plus sombre et des têtières en similicuir sont installées en seconde classe. En première classe, les voyageurs bénéficient dans cette opération de sièges en cuir. Sur les ET425, la DB prévoit la suppression de la marche intermédiaire pour améliorer les conditions d’accès depuis des quais de 760 mm et d’un mètre de haut, qui sont majoritaires. Sur le réseau de Hanovre, un dispositif amovible avait été installé de construction pour améliorer les conditions d’accès depuis des quais hauts.

ET422 et ET430 : la nouvelle génération

Après ces deux séries, la DB s’est dotée de 84 automotrices série 422, constituant une évolution des ET423, avec notamment la modification de la face frontale, afin d’intégrer les nouvelles normes de résistance aux chocs. Elles ont été concentrées sur le réseau Rhin-Ruhr. L’alourdissement des rames se limite à 7 tonnes.  En revanche, le fonctionnement des portes a été amélioré pour maîtriser les temps de stationnement.

Dans la foulée, la commande des ET430 a d’abord été destinée au remplacement des ET420, premières automotrices de grande performance destinées aux services suburbains. Encore un peu plus lourdes, ces nouvelles rames reprennent largement les acquis des séries 423 et 422. A l’intérieur, peu d’évolutions par rapport au modèle standardisé, si ce n’est la prise en compte des normes d’accessibilité.

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Francfort Hauptbahnhof - 24 septembre 2016 - Dans la gare centrale souterraine au quai central très largement dimensionné, un lément ET430, dont le fonctionnement des portes est meilleur que celui des ET423... mais le conducteur doit toujours observer directement les mouvements de voyageurs. © transportrail

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Interieur d'un ET430 à Innotrans 2012 : peu de fantaisie dans l'aménagement intérieur mais la reproduction de dispositions qui ont fait leurs preuves. On notera la présence d'écrans TFT pour l'information des voyageurs. Evidemment, devant les portes, pas de strapontins. © transportrail

France - Allemagne : des comparaisons limitées

S’il fallait faire une comparaison avec des matériels français, il faudrait commencer par regarder du côté de la RATP, mais avec une limite : depuis 1997, elle a concentré ses acquisitions de rames RER sur des architectures à deux niveaux (43 MI2N et 140 MI09), alors que, côté allemand, ce type de matériel est absent des dessertes S-Bahn. Il faudrait donc revenir une voire deux générations en arrière avec le MS61 et les « frères jumeaux » MI79-MI84.

L'architecture des caisses des ET420 et des MS61 présentent de notables similitudes : à longueur comparables (69,4 m pour les premiers, 71,2 m pour les seconds), des éléments de 3 caisses comprenant au total 12 portes de 1,30 m. En revanche, la RATP avait adopté une adhérence partielle avec 4 bogies moteurs sur 6, alors que la DB privilégiant l'adhérence totale et une puissance totale nettement supérieure, atteignant déjà 18,6 kW / t contre 10,8 kW / t pour le MS61. Côté SNCF, le meilleur matériel produit dans cette génération reste incontestablement les Z6400, mais avec 12,6 kW / t. Autant dire qu'en matière de haut débit, la DB avait déjà doté ses matériels de solides atouts.

Dans la génération actuelle, le MI09 de la RATP fait office de référence en matière de performances mais avec un ratio poids-puissance encore très inférieur aux ET423 puisqu'il plafonne à 14,7 kW / t. Quant au Francilien de la SNCF, avec 11,1 à 12,5 kW / t (version 112 m / version 94 m), il semble quelque peu "hors concours"...

Ceci dit, compte tenu du dimensionnement des installations électriques français, plus de puissance ne voudrait pas dire plus de performances... mais un bridage plus sévère !

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Heidelberg - 30 octobre 2016 - Les ET425 assurent par exemple la liaison quasi-circulaire entre Karlsruhe, Heidelberg, Mannheim et Germersheim. Avec 11 arrêts intermédiaires, les trains S3 relient Karlsruhe et Heidelberg en 47 minutes : une minute de plus seulement que les trains Intercity à 3 arrêts intermédiaires pour 57 km, et jeu égal de centre à centre avec la voiture. © E. Fouvreaux

Les ET420 à 430 illustrent donc la prise en compte d'une approche système "desserte - matériel - infrastructure" pour doter les services ferroviaires périurbains des solutions techniques les plus efficaces.