FAIF : la Suisse prépare son réseau 2050
Le réseau suisse est le plus densément circulé au monde avec le Japon, et les nouveaux objectifs de la Confédération en matière de performance et de qualité de service ferroviaire appellent de nouveaux investissements dans une perspective de plus forte coordination entre les politiques urbaines et de mobilité à moindre impact sur l’environnement. L'objectif défini est celui de l'horizon 2050 avec une étape intermédiaire en 2025.
La continuité d’une politique déjà plus que trentenaire
Après avoir cadencé le réseau principal en 1982, mis en œuvre l’imposant projet Rail 2000 aboutissant en 2008 à la mise en œuvre du cadencement généralisé et lancé la politique des Nouvelles Liaisons Ferroviaires Alpines totalisant 37,5 MM CHF depuis 1998, la Suisse souhaite mettre son réseau au diapason d’une perspective de 9 millions d’habitants en 2050 dans un contexte de renchérissement des prix de l’énergie.
Les deux enjeux majeurs sont donc d’abord la poursuite du développement des RER autour des grands bassins urbains et l’augmentation du trafic de marchandises.
Augmenter encore la capacité du réseau
La géographie générale du réseau suisse est caractérisée par une domination des courants est-ouest pour le trafic Intercity de voyageurs, alors que les flux de marchandises sont principalement orientés nord-sud et objet des NLFA. De même, les connexions aux lignes à grande vitesse sont également orientées nord-sud. Les enjeux sont considérables car la demande de déplacement de voyageurs devrait augmenter de 60% par rapport au niveau de 2007 et le tonnage transporté d’environ 70% pour atteindre les 100 milliards de tonne-kilomètre.
Face au risque de conflit entre les besoins du trafic voyageurs et ceux du fret, la Suisse privilégie aujourd’hui – contrairement à l’Europe – les services voyageurs cadencés sur les sillons de fret. La Suisse est également opposée à la libéralisation du transport routier de voyageurs, réaffirmant la primauté du ferroviaire sur l’autocar, devant assurer le rabattement et l’irrigation des interstices du maillage ferroviaire.
L’antithèse du tout-TGV
Dans un contexte où les ressources budgétaires sont plus rares, la Suisse développe sa théorie « Aller aussi vite que nécessaire et non aussi vite que possible » dans une nouvelle formule « La technique prime sur le béton ». Les infrastructures nouvelles sont d’abord destinées à répondre à un projet d’offre de transport : tout investissement est assujetti à une étude d’exploitation identifiant les nécessités réelles du service.
Quant au besoin, il est défini par une attractivité relative du rail par rapport aux temps de trajet routiers. La réduction du temps de parcours n’est pas un considéré comme un objectif mais comme le moyen de proposer de nouveaux nœuds de correspondance pour faciliter l’accès à toutes les lignes. En un mot, l’antithèse du tout-TGV dont la France peine à se défaire.
Sans les investissements envisagés, le réseau suisse serait saturé sur plusieurs sections : Genève – Lausanne, Lausanne – Yverdon, Berne – Zurich – Saint Gall, Lucerne – Zurich ainsi que les nœuds de Berne, Zurich et la région du Tessin.
Avec les investissements proposés, les liaisons internationales verront leur temps de parcours égaliser voire dépasser ceux des liaisons routières et dans certains cas aériennes si on intègre les parcours d’approche. Il s’agit notamment d’améliorer l’attractivité du rail vers le sud de l’Allemagne et vers la vallée du Rhône.
La cadence au quart d’heure sur les RER, la demi-heure sur les Intercity
Les opérations prévues dans le FAIF sont destinés à atteindre la cadence au quart d’heure en trafic Intercity entre Genève et Lausanne, et à la demi-heure jusqu’à Berne, et en misant sur une optimisation des correspondances systématiques.
Les opérations prévues à horizon 2025 sur le réseau ferroviaire suisse, objet du FAIF et des modalités de financement déjà engagées, notamment le ZEB. (cartographie CFF)
La cadence au quart d’heure est également visée sur les RER et le trafic régional sur Genève – Montreux, entre Berne et Thun et autour de Zurich vers Aarau, Brugg, Winterthur et Lucerne. Sur les autres axes, la généralisation de la cadence à la demi-heure sera engagée, notamment sur Lausanne – Bienne – Zurich, Berne – Olten, Berne – Lucerne, Bienne – Delémont – Bâle, Zurich – Saint Gall, Zurich – Lugano et Zurich – Wenfelden.
Martigny - 6 mars 2011 - Les CFF reçoivent les nouvelles rames à 2 niveaux Kiss fabriquées par Stadler, destinées aux RER et aux liaisons régionales. Dotées de performances très élevées en accélération (1,2 m/s²), cette aptitude est pleinement utilisée dans la marche des trains pour optimiser la capacité de l'infrastructure : on est très loin de la "marche molle" française. © Ph. Chappuis - photorail.ch
En outre, afin de proposer de nouveaux nœuds de correspondance systématiques, l’amélioration de la signalisation et le recours à la pendulation sur le matériel roulant permettront de tenir l’objectif de 55 minutes entre deux nœuds. Dans quelques cas, des opérations lourdes seront engagées, comme le tunnel de Brütten sur l’axe Zurich – Saint Gall.
Pour le fret, la généralisation des trains de 750 m et le relèvement de la vitesse au moins à 100 km/h constituent les deux missions principales sur l’infrastructure. En conception horaire, le réseau devra proposer 7 sillons par heure sur l’axe est-ouest entre Zurich et Olten, et 4 entre Bienne et Lausanne.
En outre, le FAIF prévoit des investissements lourds en gare, comme à Genève et Lausanne, pour généraliser les trains Intercity à 2 niveaux de 400 m de long, mais aussi être en capacité de gérer des flux nettement plus nombreux dans les gares.
Les futures automtorices à 2 niveaux Twindexx construites par Bombardier viendront augmenter encore la capacité de transport. Actuellement, la mise au point du système de pendulation suscite des retards dans la livraison des premiers éléments. (image Bombardier)
Quel budget ? Quels ressources ?
D’ici 2025, les investissements à réaliser atteignent 6,4 MM CHF, 13,5 MM CHF à échéance 2035 et 42 MM CHF d’ici 2050, sans compter les coûts d’entretien courant du réseau à hauteur de 2,5 MM CHF par an, incluant les réseaux secondaires. L’ensemble des leviers de financement sera mobilisé.