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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires

22 juillet 2022

Luchon : retour des trains à l'été 2024 ?

C'est du moins l'annonce de la Région Occitanie, qui deviendra le 1er janvier prochain gestionnaire de la section Montréjeau - Luchon en lieu et place de SNCF Réseau. On apprend également que la facture finale de la réouverture atteint 67 M€ : il est intéressant de noter que SNCF Réseau avait essuyé de sérieuses critiques en présentant un devis de 55 M€ quand une ingénierie extérieure évaluait l'opération à 33 M€. L'inflation n'est pas seule responsable de cet écart.

L'enquête publique aura lieu durant le mois d'août, un choix étonnant, mais contraint par l'objectif de remise en service en juin 2024. Le niveau de desserte reste à préciser, mais la Région annonce que la ligne accueillera des Régiolis bimodes fonctionnant en traction autonome avec piles à combustibles alimentées à l'hydrogène entre Montréjeau et Luchon. Une partie de l'offre sera amorcée à Toulouse, avec circulation en traction électrique sous caténaires. A priori, dans un premier temps, il serait envisagé d'assurer une navette avec une seule rame entre Montréjeau et Luchon, en correspondance avec les autres trains de la transversale pyrénéenne, avec un aller-retour direct vers Toulouse pour l'acheminement du matériel vers l'atelier de maintenance. Reste à savoir également où sera située la station de recharge en hydrogène, compte tenu des fortes contraintes d'implantation de telles installations.

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21 juillet 2022

On parle ferroviaire sur France Culture

Le temps du débat, programme de fin d'après-midi sur France Culture, a consacré aujourd'hui son émission au réseau ferroviaire et à l'épineuse question du financement des infrastructures. Pour réécouter cette émission, c'est par ici.

 

21 juillet 2022

Suisse : réception des nouvelles rames Kiss Interregio

Les CFF avaient commandé en 2021 pas moins de 60 automotrices Kiss composées de 6 voitures destinées, pour 41 d'entre elles, à assurer des relations Interregio. Le reliquat ira renforcer les parcs engagés sur les liaisons régionales.

Une partie des Kiss série RABe 511 est déjà engagée sur ce type de prestations mais avec une faible cote de popularité car le niveau de confort est jugé insuffisant, que ce soit l'absence de prises électriques à toutes les places même en seconde classe et surtout la configuration à 4 places de front des espaces de première classe. Ajoutez des critiques sur les modalités de transport des vélos et la nécessité d'améliorer encore les conditions d'accueil des voyageurs en fauteuil roulant. Il en résulte une capacité de 466 places contre 535 dans l'actuelle version, renchérissant le coût du matériel rapporté à la place offerte.

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Les nouveaux éléments arborent évidemment la dernière version de la livrée des CFF, à forte dominante blanche. © D. Haeusermann

Les 11 premières rames seront mises en service pour le service 2023 et le reste de la commande arrivera progressivement jusqu'en fin d'année 2026. Les actuelles rames vont être réaménagées pour passer en aménagement à 3 places de front en première classe, comme le stipule le contrat confédéral et ajouter des prises de courant en seconde classe.

19 juillet 2022

Retour des trains sur la rive droite du Rhône le 29 août

Ils avaient disparu en septembre 1973. Ils seront de retour le 29 août. Les trains de voyageurs vont donc enfin desservir à nouveau la rive droite du Rhône, sur la partie la plus au sud de la ligne. Il aura fallu batailler dur pendant plusieurs décennies pour obtenir gain de cause, y compris lutter contre des fantômes, quand ce projet était accusé de nuire au développement du fret. Le dernier épisode en date aura concerné la securité aux passages à niveau.

Dans un premier temps, la réouverture est presque symbolique car elle ne concernera que la section entre Pont Saint Esprit et Avignon avec un unique arrêt intermédiaire à Bagnols sur Cèze, avec 5 allers-retours par jour en 30 minutes, dont l'un sera prolongé à Nîmes, toujours par la rive droite, et donc en rebroussant à Avignon, pour rejoindre l'atelier de maintenance du matériel. Le service sera assuré en AGC électriques série 27500.

Dans un second temps, la desserte passera à 10 allers-retours, et de nouvelles gares seront rouvertes : Laudun L'Ardoise, Roquemaure - Tavel, Villeneuve lès Avignon sur la section nord du parcours, puis Aramon, Remoulins et Marguerittes au sud.

Assurément, la création d'une liaison ferroviaire directe entre Avignon et la rive gardoise de la basse vallée du Rhône est utile compte tenu d'une circulation intense et de conditions de franchissement du Rhône pas toujours évidentes par la route. La section Avignon - Nîmes permettra de restaurer notamment la desserte ferroviaire de Remoulins, avec en ligne de mire l'accès au Pont du Gard, qui pourrait faire l'objet de réflexions ferroviaires (transportrail y a déjà pensé dans ce dossier).

Le démarrage avec 5 allers-retours apparaît assez timide, sinon faible, ce qui peut être un handicap pour attirer le plus rapidement possible un maximum de voyageurs. La coordination des offres routières et ferroviaires devra donc être adaptable dans la durée, de sorte à utiliser les autocars de plus en plus en complément en amont et en aval du trajet ferroviaire. La desserte à 10 allers-retours devrait déjà être un peu plus attractive mais elle n'est pas envisagée avant 2026.

S'il faut évidemment saluer les efforts de la Région Occitanie pour aboutir à cette réouverture, il faut en revanche préciser que les trains déposeront leurs voyageurs à Pont Saint Esprit, terminus commercial de la desserte, mais monteront à vide au Teil, à 37 km plus au nord, pour aller faire leur demi-tour. La section parcourue sans voyageurs sera donc plus longue que la section parcourue avec voyageurs (32 km entre Pont Saint Esprit et Villeneuve). En matière d'optimisation de la dépense publique, on a certainement connu mieux...

Pourquoi ? Parce que Le Teil est en Ardèche, donc en Région Auvergne Rhône-Alpes, qui n'est pas sur le même rythme quant à la reprise du trafic voyageurs sur cette ligne. Elle étudie, avec plus ou moins d'acuité, l'intérêt d'une liaison entre Romans et Le Teil, franchissant le Rhône à Livron, créant une liaison directe entre la gare TGV valentinoise et les villes ardéchoises de la vallée du Rhône : cependant, cette desserte entrainerait une correspondance de plus pour les voyageurs actuellement dans les autocars de la liaison Valence - Privas par exemple, ce qui en réduirait logiquement la portée.

Pour la basse vallée du Rhône, il devrait donc être évident qu'une desserte interrégionale devrait être instaurée entre Romans et Avignon, mais elle ne semble pas partagée par les exécutifs régionaux qui font chacun chez soi... quitte à s'approcher de très près de l'absurdité.

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Viviers - 12 août 2013 - Un train régional Rhône-Alpes sur la rive droite du Rhône, conséquence de travaux de maintenance sur la ligne de rive gauche, amenant à maintenir une partie du service grâce au doublet de ligne, mais avec la desserte de la seule gare du Teil adaptée pour le service aux voyageurs. Le retour des trains dans ce secteur n'est pas encore prévu, car il se situe en lisière des deux Régions, qui manifestement n'arrivent pas à s'entendre sur un projet unique. © transportrail

Enfin, la Région Auvergne Rhône-Alpes planche aussi sur l'opportunité de prolonger les trains Lyon - Givors en face de Vienne, peut-être jusqu'à Condrieu, pour étendre le RER lyonnais.  Il va donc quand même falloir vérifier que ces individualité clochemerlesques soient cohérentes entre elles, car pour le coup, le risque est de sérieusement altérer la capacité à tracer correctement les quelques trains de fret qui empruntent la rive ardéchoise du Rhône, si les circulations voyageurs ne sont pas alignées sur l'ensemble du parcours, de sorte à n'utiliser qu'une section d'un sillon tracé de bout en bout. Compte tenu des vitesses autorisées sur la rive droite, les trains de voyageurs et les trains de fret ne devraient pas présenter de différence majeure de vitesse moyenne.

Le retour de trains de voyageurs sur cette ligne pourrait véritablement sauver cette ligne sous-utilisée: avec en moyenne 15 trains par jour, son trafic pourrait être assez facilement reporté sur la rive gauche du Rhône. Moyennant la modernisation de cet axe, avec ERTMS et banalisation, un renforcement de l'alimentation électrique et la restauration de quelques garages fret, il aurait été probablement possible de se passer des voies ferrées côté ardéchois puisque côté drômois, le trafic reste inférieur à 100 trains par jour. Pour corridor européen, c'est quand même léger...

13 juillet 2022

Des VB2N pour le Grand Est

Afin de compenser un déficit chronique de matériel roulant, la Région Grand Est profite de la libération du duo BB27300 - VB2N en Ile de France en récupérant 4 compositions. Si les locomotives, âgées d'une quinzaine d'années, sont encore modernes, les VB2N ont plus de 40 ans et leur dernière rénovation remonte au début des années 2000. Néanmoins, elles avaient bénéficié d'une ventilation réfrigérée.

Par ailleurs, Grand Est va récupérer également 5 voitures Corail de réversibilité qui vont être libérées par la Région Bourgogne - Franche-Comté à la faveur de la livraison des Régiolis 6 caisses pour Paris - Dijon - Lyon. A priori, ces voitures seront engagées sur les liaisons Paris - Vallée de la Marne en remplacement des Coradia Liner, qui pourront être concentrés sur leur territoire de prédilection, à savoir l'axe Paris - Troyes - Belfort - Mulhouse.

Pour mémoire, Grand Est doit également récupérer les 16 TER2Nng pentacaisses de Normandie, pour utilisation sur le sillon mosellan de Luxembourg à Nancy. Elles seront compensées par la seconde tranche de 27 Omneo Premium unifiant à terme le parc Paris - Normandie. Mais le mouvement n'est pas possible avant 2024, alors que la Région doit faire face à un épisode amianté sur les Z2 série 11500 (en fin de vie tout de même) et à l'engagement des opérations de rénovation des TER2Nng tricaisses de Lorraine.

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12 juillet 2022

Bientôt la traction électrique au-delà de Gretz-Armainvilliers

Du 2 au 3 juillet, SNCF Réseau a procédé à la mise sous tension de la caténaire 25 kV entre Gretz-Armainvilliers et Nogent sur Seine ainsi que sur l’antenne de Longueville à Provins. Le nouveau poste d’aiguillage informatisé de Gretz-Armainvilliers a été mis en service à cette occasion. Les signaux vont être renouvelés durant la période estivale, avec adaptation des installations à la présence de la traction électrique. Les pantographes pourront être levés au mois de septembre : les AGC seront remplacés par des Franciliens sur la relation Paris – Provins, qui gagnera en capacité, mais perdra en confort (pas de siège 1650 mm contre 1750 mm, assise et dossier plus raides, pas de toilettes à bord) et en performance, puisque le nouveau matériel plafonnera à 140 km/h sur les 30 km aptes à 160 km/h).

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Paris Est - 4 mars 2022 - L'un commence à partir, l'autre finit d'arriver : 11 AGC série 82500 vont être libérés par Ile de France Mobilités, tandis que le dernier chaudron de la 360ème et dernière rame de la série Z50000 vient de sortir de l'usine de Crespin. © transportrail

Sur les relations Paris – Troyes – Belfort – Mulhouse, le seul changement concernera évidemment la réduction du périmètre d’utilisation des moteurs Diesel, ce qui diminuera leur sollicitation. La transition d’effectuera à l’arrêt en gare de Nogent sur Seine, où est implantée la nouvelle sous-station.

La phase 2 entre Nogent sur Seine et Troyes a encore ripé dans le calendrier, faute d’un portage soutenu de l’Etat et de SNCF Réseau.

11 juillet 2022

Suisse : des déconvenues sur le matériel roulant

Deux séries récentes des CFF connaissent des revers techniques en renonçant à certaines de leurs fonctionnalités.

Les EC250 Giruno de Stadler ont été conçues pour circuler à 250 km/h. Cependant, ce matériel s’avère trop lourd pour être autorisé à cette vitesse de façon systématique. Ainsi, sa vitesse maximale d’exploitation est limitée à 200 km/h en Italie, compte tenu d’une masse à l’essieu excédant 17 tonnes. Ce n’est pas une difficulté puisque ces rames ne circulent pas sur des lignes à grande vitesse. En revanche, côté suisse, la vitesse d’exploitation dans le tunnel du Gothard a finalement été limitée à 200 km/h alors qu’il était initialement envisagé d’y faire rouler les Eurocity à 250 km/h. Compte tenu du coût élevé de ces rames de conception complexe (notamment pour satisfaire aux exigences extrêmement élevées de certaines associations de handicapés), c’est un repli fonctionnel majeur, même si, fonctionnellement, seul le tunnel du Gothard était potentiellement concerné par l’aptitude à 250 km/h.

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Brunnen - 3 septembre 2018 - Une livrée évenementielle ne suffit pas nécessairement à lever tous les obstacles techniques : les EC250 sont un peu trop lourdes pour être admises à 250 km/h sur le réseau italien. Ce sera donc 200 km/h maximum, d'autant que la vitesse dans le tunnel du Gothard est aussi finalement limitée à ce taux. © P. Bertschi

Autre recul sur du matériel longue distance, les automotrices FV-Dosto ont été équipées d’un système de compensation du roulis (baptisé Wako par Bombardier), afin d’augmenter la vitesse sur certaines courbes, avec une forme de pendulation. Il s’agissait d’une première sur un matériel à deux niveaux. Sa mise au point apparaît trop complexe sur une série qui a déjà suscité de vifs débats entre les CFF et Bombardier. Cela signifie que certains gains de temps escomptés avec ce matériel ne seront pas atteignables sur les sections où ils étaient attendus : Lausanne – Berne et St Marghreten – Winterthur.

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Haldenstein - 29 juillet 2020 - Le système de pendulation de la série 502 semble oublié, tout comme les minutes qu'il devait procurer. Le feuilleton de ce matériel n'est donc pas totalement terminé. En revanche, il est encore un peu moins probable que de nouvelles rames soient commandées... © A. Knoerr

Les CFF souhaitent dans un premier temps trouver d’autres moyens de gagner les minutes recherchées (5 sur la première section, 2 sur la seconde), mais n’écartent pas non plus la possibilité d’utiliser un autre matériel : reste à savoir lequel, car la problématique capacitaire reste prépondérante sur les axes où circulent ces automotrices.

C’est aussi et enfin un argument pour les partisans de la réalisation de nouvelles infrastructures pour réduire à la fois les temps de parcours et la congestion de certaines sections du réseau. Cependant, les premières réflexions sur la vision stratégique à horizon 2050 semblent écarter cette piste, car assurément très onéreuse. Sur le seul cas de Genève – Lausanne, la proportion de linéaire en tunnel pour envisager une ligne apte à au moins 200 km/h pourrait être très majoritaire…

10 juillet 2022

Belgique : Namur - Luxembourg en 25 kV

Durant 3 semaines pendant le mois d'août à venir, le trafic sera totalement interrompu sur la ligne 162 du réseau ferroviaire belge entre Ottignies et Arlon, dans le cadre de la modernisation de l'axe Bruxelles - Luxembourg. Décidée en 2006, l'opération s'appuie sur le renouvellement complet de l'infrastructure avec un relèvement de la vitesse, alors de l'ordre de 130 km/h, pour atteindre 160 km/h autant que possible, grâce à des rectifications de courbes. L'entrevoie est également élargi pour accroître le gabarit et conforter ce programme de relèvement de vitesse. La signalisation est évidemment adaptée en conséquence. Elle comprend aussi la modernisation de l'alimentation électrique : depuis 2006, la caténaire a été progressivement remplacé par des équipements compatibles avec une migration en 25 kV entre Namur et Luxembourg dès lors que la totalité du parcours aura été équipé et les nouvelles sous-stations construites.

L'ensemble de la modernisation Bruxelles - Luxembourg a été évalué à 1,15 MM€, dont 155 M€ pour pour la seule réélectrification. Elle procurera un gain de temps de près de 20 minutes, avec une liaison Bruxelles - Strasbourg potentiellement comparable au parcours via la France en TGV, mais passant par l'aéroport de Roissy, et malgré un profil pas toujours facile puisque comprenant des rampes de 16‰. Il faut cependant être patient car cette modernisation se déroule par étapes, et a fait l'objet de plusieurs remises en cause compte tenu de son coût. Le projet ne sera achevé qu'en 2027.

La ligne 162 supporte un trafic d'intérêt européen puisqu'elle se situe sur le corridor depuis les ports de la mer du Nord vers l'Allemagne, la Suisse et l'Italie. Les lignes 165 et 166 entre Dinant et Athus, parallèles mais passant au plus près de la frontière franco-belge, ont déjà été converties au 25 kV. Côté luxembourgeois, l'élimination de la zone en 3000 V avait été décidée dès 2016, et mis en oeuvre en 2018, pour unifier le réseau en 25 kV.

La démarche est intéressante vue de France, puisque des questions similaires se posent sur les lignes alimentées en courant continu, mais à 1500 V seulement : la conversion au 25 kV revient fréquemment dans les discussions, notamment au sud de Bordeaux pour remplacer la caténaire bientôt centenaire d'origine Midi et sur des axes aux installations à peine plus récentes comme Paris - Le Mans. Jusqu'à présent, la seule opération de ce type a concerné la section Bellegarde - Genève, car elle présentait un intérêt significatif pour les CFF dans le cadre de Léman Express, afin de se contenter d'un système sous 15 kV 16 2/3 Hz et sous 25 kV 50 Hz.

Néanmoins, l'opération belge est facilitée par le maillage du réseau et l'existence d'itinéraires alternatifs pour gérer les reports de trafic pendant les travaux : c'est bien plus difficile en France. Qui plus est, avec le sous-financement structurel du réseau ferroviaire français et une conception étroite des projets créant une frontière infranchissable entre renouvellement et modernisation, de tels schémas semblent assez peu probables.

 

7 juillet 2022

Les auspices de (Clément) Beaune

Le portefeuille des Transports incombe donc désormais à Clément Beaune, l'un des fidèles macronistes, qui avait souhaité passer à un domaine plus en prise avec le terrain après les Affaires Européennes. Point positif : une personnalité qui a manifestement fait preuve de sérieux et de rigueur et qui n'a pas trop abusé des réseaux sociaux pour assurer son auto-promotion. C'est déjà ça.

Mais au-delà ? Son nouveau périmètre est évidemment en première ligne par rapport aux questions écologiques, puisque ce quinquennat « sera écologique ou ne sera pas ». Le principal risque est celui auquel nombre de ses prédécesseurs ont été confronté : l'injonction contradictoire entre le discours et les actes, avec évidemment les arbitrages, souvent perdus, entre un ministère technique et celui des Finances.

Justement, la première « patate chaude » concerne les ressources du système ferroviaire : le contrat Etat - SNCF Réseau a fait l'unanimité contre lui, mais à ce stade, on ne sent pas de réelle prise en compte de ces expressions pour revoir rapidement les moyens alloués au renouvellement du réseau. D'ailleurs, quand bien même l'Etat, subitement pris d'une poussée vertueuse, allouerait le montant nécessaire (de l'ordre de 4,5 à 5 MM€ par an), que le problème resterait à peu près le même car la difficulté réside aussi dans la disponibilité des ingéniéries d'études et de travaux du gestionnaire d'infrastructure, déjà plutôt à l'étiage, sévère dans certains domaines (comme la signalisation). Les Régions sont aujourd'hui confrontées à cette situation dans les opérations financées par le CPER : même si les budgets sont là, les délais s'allongent du fait d'effectifs insuffisants et d'un déficit des recrutements. Cependant, ce point, de plus en plus fréquemmment mis en exergue par la SNCF dans les médias ne doit pas faire oublier les orientations internes du groupe conduisant à réduire le nombre de postes de façon assez drastique.

Il y a ensuite la modernisation du réseau existant, à combiner évidemment avec le renouvellement pour éviter les fausses manoeuvres dispendieuses, et le développement. Sur ce dernier volet, la précédente mandature avait soufflé le froid en 2017 en annonçant la fin des grands projets, puis le chaud en ouvrant les vannes... mais pas totalement (voir la situation de plus en plus délicate des accès français au tunnel de base de la Transalpine). Les lignes nouvelles ont un effet éblouissant, détournant l'attention d'autres sujets, souvent plus techniques, mais potentiellement au moins aussi efficaces et assurément complémentaires : on pensera évidemment d'abord à la disparition progressive du gasoil et donc à l'électrification du réseau, à l'augmentation de performance des installations électriques, à l'adaptation du gabarit des grands axes pour développer le transport combiné avec les conteneurs grand format, au développement des RER autour des grandes villes ou au sauvetage des lignes de desserte fine du territoire.

D'ailleurs, depuis quelques jours, la presse relaie des alertes (auxquelles nous ne pouvons que souscrire) sur le risque de dégradation majeure des performances du réseau, et cette fois-ci des grands axes, du fait de l'insuffisance des budgets de renouvellement. Le réseau vieillit et à défaut de moyens budgétaires et humains à la hauteur des besoins, il n'y aura d'autres issues que d'engager une politique de ralentissement du réseau de grande ampleur pour réduire le risque d'accidents : ces derniers mois, des trains de marchandises ont déraillé, du fait de rails antédiluviens souffrant d'une sorte de cancer pour partie lié à des défauts métallurgiques dès la sortie des aciéries.

Il lui faudra donc construire ce qui n'a pas été fait sous la précédente mandature, ni sous la plupart des précédentes d'ailleurs : une stratégie ferroviaire et surtout la cohérence entre les ambitions et les moyens (y compris sur la réalisation des lignes nouvelles les plus utiles), ce qui signifiera évidemment une négociation serrée avec le ministère des Finances, pour admettre que ces investissements lourds à court et moyen terme pourront à terme dégager des économies, aux bornes du système ferroviaire mais plus globalement pour la collectivité s'ils apportent leur contribution à la réduction à la dépendance aux énergies fossiles. 

Il aura aussi, dans le domaine ferroviaire, à questionner profondément le modèle économique français, fondé sur des dessertes nationales aux risques et périls des opérateurs : toujours au titre de la transition énergétique, il y a probablement matière à remettre en cause cette stratégie qui évite à l'Etat de mettre les mains dans la créosote. 

Il lui faudra aussi tempérer certaines ardeurs conduisant à poursuivre des projets autoroutiers dont l'utilité apparaît plus que contestable et surtout contraires à la stratégie globale de réduction de la dépendance au transport individuel. Il aura aussi sur son bureau l'épineuse question de la complémentarité entre le train et l'avion, tant par la qualité de desserte des aéroports que par le choix de reporter une partie du trafic sur le mode ferroviaire (rappelons la suggestion de transportrail : commencer par un seuil à 3h30 au lieu de 2h30).

Bref, le nouveau ministre aura fort à faire pour que le ferroviaire français ne finisse pas... à l'hospice.

5 juillet 2022

Un trop-plein de succès pour Léman Express ?

La dynamique de fréquentation du RER genevois devient de plus en plus forte : l'objectif de 50 000 voyageurs par jour a été atteint en novembre 2021 et les trains sont de plus en plus remplis au point qu'on y voyage debout sur des parcours de plus en plus longs. Sans surprise, derrière les chiffres, il n'y a pas toujours les mêmes individus : les voyageurs réellement quotidiens sont assez nettement minoritaires.

Le succès conduit à réaffirmer la nécessité de développer la desserte côté français, avec notamment la modernisation de la branche de Saint Gervais afin d'y envoyer un train toutes les heures, en remplaçant le block manuel La Roche sur Foron - Sallanches par un block automatique numérique à métazones avec un relèvement de la vitesse aux limites des possibilités du tracé.

L'autre volet de ce succès concerne la gare d'Annemasse, dont la capacité devient - déjà - insuffisante pour gérer les correspondances entre les différentes branches, notamment entre les Léman Express et les trains régionaux venant de Bellegarde. Le développement urbain autour de la gare et la synergie avec le réseau urbain, bénéficiant de l'arrivée du tramway 17 dans Annemasse, augmente fortement la fréquentation de la gare, mais aussi des accès aux quais. Le développement des fréquences est donc un des leviers permettant de lisser le trafic et d'éviter des flux trop importants par train mais la demande augmente. La généralisation des UM2 pourrait être une piste. Qu'il est dommage d'avoir fragmenté le parc entre Régiolis et Flirt...

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Annemasse - 28 février 2020 - Correspondance intense entre le Coppet - Saint Gervais assuré en Régiolis et le Bellegarde - Evian qu'on aperçoit à droite, assuré en AGC. Elle est assurée quai à quai ce qui facilite les échanges. La capacité de la gare et des couloirs d'accès est en revanche devenue très rapidement insuffisante face au succès de Léman Express. L'engagement de trains plus capacitaires risquerait d'amplifier ce constat. © transportrail

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