Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
amenagement du territoire
15 mai 2021

Toulouse - Auch : les vertus miraculeuses de la route

Rien ne ressemble plus au « monde d’avant » que le « monde d’après » : à l'approche des élections, c'est la grande braderie pendant laquelle on promet à qui veut l'entendre tout et son contraire.

Après avoir validé le plan de financement de la première phase des aménagements de LNPCA, annoncé la participation de l'Etat à la LGV Bordeaux - Toulouse et soutenu l'accélération du calendrier de LNMP, le Premier Ministre en déplacement dans le Gers, y est allé de son couplet sur l'aménagement du territoire, mais ses manuels ne sont plus vraiment d'actualité.

Dans la plus pure tradition française, « maillon manquant du désenclavement et voie de l'avenir de nos enfants », M. Castex a promis aux élus gersois l'achèvement de la mise à 2x2 voies de la RN124 reliant Toulouse à Auch : moyennant 46 M€ de financement de l'Etat, complétés par les apports des collectivités locales, le trajet s'effectuera intégralement sur voie rapide d'ici 2027. « Au delà des emplois que cela va créer et permettre, cette route est un symbole. Il ne faut plus qu’il y ait de territoire oublié par la République. » : un discours qui sent vraiment la naphtaline, et qui n'augure rien de bon pour la liaison ferroviaire parallèle. Car c'est bien connu, la République, c'est la route. Vous l'aurez compris, à transportrail, on préfèrerait que ce soit la gare et qu'on arrête d'augmenter la capacité et les performances du réseau routier quand existe une voie ferrée parallèle en activité. Ce qu'on dit à propos de Toulouse - Auch est parfaitement transposable à d'autres axes, comme par exemple Rodez - Millau pour rester en Occitanie et sur le thème des lignes de desserte fine du territoire.

Pourtant, le terrain est relativement propice : Auch dispose de 7 allers-retours vers Toulouse, en 1h30, soit 16 minutes de plus que par la route. La desserte est plus fournie à partir de L'Isle Jourdain, quand on arrive dans l'aire d'influence quotidienne de Toulouse, avec 18 allers-retours. Et à partir de Colomiers, on est au coeur du RER toulousain avec 4 trains par heure. Il est d'ailleurs envisagé de prolonger le périmètre de la cadence au quart d'heure jusqu'à Pibrac ou Brax-Leguevin compte tenu de l'évolution de la demande. En outre, avec plus de 80 trains et 11 000 voyageurs par jour, cette section mériterait amplement d'être électrifiée, couplée avec l'usage de trains à batteries pour assurer en traction électrique les missions pour L'Isle Jourdain et Auch. La desserte de la préfecture du Gers pourrait être etoffée, avec un renforcement à l'heure, y compris le week-end à des fins touristiques.

Mais l'Etat, une fois de plus, excelle dans l'art de la contradiction, entre l'affichage d'un soutien au ferroviaire et des actions qui vont à l'envers des propos.

Publicité
Publicité
29 mars 2021

La Cour des Comptes s'inquiète pour la SNCF

C'est quand même assez rare pour être souligné et à transportrail, on a déjà eu l'occasion d'observer une propension au grand écart des Sages de la rue Cambon en matière ferroviaire, avec des analyses à la pertinence assez inégale. Et cette fois-ci, il y a tout lieu de considérer que le chapitre du rapport annuel 2021 intitulé SNCF : mobilisation réussie mais un modèle fragilisé pourrait se situer du bon côté de la barrière.

Outre son titre qui souligne que la SNCF a globalement réussi à tenir le cap dans la crise sanitaire en dépit d'obstacles de tous ordres, la Cour s'inquiète de la situation du groupe ferroviaire dans les prochains mois et prochaines années. En 2020, l'excédent brut avant impôts, taxes et amortissements (Ebitda si vous êtes rompus aux finances), a plongé à -5 MM€.

Le rapport s'inquiète à plusieurs titres, et pas seulement financiers :

  • le spectre d'une SNCF qui continue de s'endetter, alors que l'Etat s'est engagé à reprendre 35 MM€ de dette historique dans la réforme ferroviaire de 2018 ;
  • les 4,05 MM€ de recapitalisation annoncés par l'Etat dans le plan de relance ne concernent que SNCF Réseau, essentiellement pour couvrir des dépenses identifiées mais démunies de ressources, et donc absolument pas pour financer les investissements de modernisation nécessaires du réseau ferroviaire ;
  • les efforts de productivité demandés à SNCF Réseau vont peut-être au-delà de sa capacité réelle de restructuration et ne sont en aucun cas suffisants pour couvrir les besoins de modernisation ;
  • la situation de SNCF Réseau est aussi fragilisée par la diminution des recettes liées aux circulations (-1,11 MM€ en 2020) ;
  • SNCF Voyageurs a pu résister grâce au concours des activités subventionnées, notamment les TER et Transilien, mais la chute du trafic est forte, le rythme du retour est incertain car les évolutions de comportements de la population pourraient laisser des traces : aussi, les autorités organisatrices doivent être soutenues et donc bénéficier de la compensation des coûts induits par la crise sanitaire, car les impacts pourraient être assez durables et on n'en connaît pas encore totalement la vigueur ;
  • la situation des activités commerciales de SNCF Voyageurs, et donc du TGV, devient dans ce contexte particulièrement préoccupante puisque l'exploitant ne pourra pas rétablir un niveau de desserte tel que celui d'avant le 16 mars 2020 si la clientèle ne revient pas (surtout si elle en est empêchée...) : pour la Cour des Comptes, une activité TGV structurellement déficitaire ferait courir le risque d'un effondrement du financement du système ferroviaire français.

On retient donc de ce rapport qu'il pointe assez clairement les responsabilités de l'Etat, ce que la réponse du Premier Ministre ne semble pas apprécier. La critique d'un Contrat de Performance (du moins qualifié comme tel...) conçu dans l'unique objectif de limiter les engagements de l'Etat au financement du réseau ferroviaire tombe au bon moment, même si elle ne doit irriter nombre d'oreilles ministérielles. La relance de l'activité ne pourra faire l'économie de puissants investissements publics et ce principe d'inspiration keynesienne ne semble guère être contredit. Ce serait l'occasion pour l'Etat de rattraper le retard ferroviaire français. Cela tombe bien, la loi Climat et Résilience a débuté son cycle parlementaire. Malheureusement, elle est d'une déprimante pauvreté en la matière. L'Etat n'arrive toujours pas à considérer le chemin de fer comme une industrie et non comme une administration... alors qu'il a imposé le passage en Société Anonyme dans la dernière réforme.

On savait de longue date qu'il y avait urgence sur les infrastructures. Il y a aussi un sujet de fond, plus complexe, sur les dessertes, et pour l'instant, Etat et SNCF Voyageurs semblent jouer leur propre partition mais sans vision d'ensemble, il est vrai plus difficile à établir avec malgré tout l'ouverture du marché intérieur. 

7 mars 2021

Et si on parlait de Railcoop ?

Assurément, la communication de la coopérative Railcoop est assez réussie puisque dans le petit monde ferroviaire, l'initiative s'invite fréquemment dans les conversations, et la plupart des amateurs de la chose ferroviaire ont déjà été sondés par leurs proches (oui ça sent le vécu) pour savoir ce qu'ils en pensaient.

Pas facile d'aborder le sujet : la médiatisation importante, la focalisation sur des territoires et des liaisons « délaissés » par la SNCF et l'Etat, la structure coopérative véhiculant une image désintéressée en font un objet difficile à appréhender sans s'exposer à des critiques sur des présupposés orientés. Le projet de relance d'une première liaison Bordeaux - Lyon, un axe d'ouest en est traversant le Massif Central, est très symbolique.

Essayons donc de l'aborder le plus factuellement possible dans ce nouveau dossier de transportrail, au moment où la coopérative annonce avoir recueilli les fonds suffisants pour entamer le processus d'obtention d'une licence d'opérateur ferroviaire.

Si vous n'avez pas le temps, en résumé : l'analyse territoriale, la compréhension du besoin de liaisons entre villes de taille moyenne dans une logique autre que celle tournée vers Paris est cohérente et bien formulée. En revanche, les aspects techniques font émerger de nombreux sujets sur :

  • la construction du service et donc l'évaluation a priori des coûts de production sur des hypothèses horaires trop ambitieuses par rapport à ce que permet l'infrastructure ;
  • la gestion du matériel roulant, le choix même des rames,
  • le dimensionnement humain des besoins de l'exploitation,
  • le modèle économique aux risques et périls pour des liaisons à cabotage dominant et la présence de collectivités locales parmi les sociétaires.

Enfin, Railcoop se retrouve - à son corps défendant - assimilé à la solution universelle de la relance des liaisons transversales en France. C'est double tranchant...

25 février 2021

Loi Climat : un texte décevant

Le moins que l'on puisse dire, c'est que, communication gouvernementale mise à part, le projet de loi Climat ne suscite guère d'enthousiasme. Ce n'est pas seulement l'avis de mouvements associatifs ou de membres de la Convention Citoyenne, mais c'est d'abord celui du Haut Conseil pour le Climat : le projet de loi est jugé trop limité dans ses actions et dans les délais de mise en oeuvre. Il ne permet pas de respecter l'engagement de la France de réduire en 2030 les émissions de gaz à effet de serre de 40% par rapport au niveau de 1990. Bref, les objectifs de l'accord de Paris ne sont pas respectés : à vrai dire, ce n'est pas une surprise !

Cette mise en garde du HCC intervient alors que l'Etat a été reconnu responsable dans l'insuffisance de la lutte contre la pollution. Autant dire que pour étoffer le bilan écologique de ce quinquennat, il va falloir accélérer.

La FNAUT juge elle aussi ce projet trop édulcoré dans ses ambitions et trop conservateur sous certains aspects : ainsi, le texte conforte le primat du transport individuel, avec en tête d'affiche la voiture électrique mais aussi l'essor du vélo. En revanche, l'amélioration des transports en commun urbains et interurbains, épine dorsale d'un nouveau partage de la voirie dont bénéficieront aussi les piétons et les cyclistes, reste mal considérée dans ce texte et ne permet pas de donner un coup d'accélérateur : celui-ci serait d'ailleurs parfaitement compatible avec un soutien puissant à l'activité économique pour compenser les dégâts de la crise sanitaire.

Ainsi, l'Etat est très conservateur dans son hostilité à abaisser la TVA à 5,5% sur l'ensemble des transports en commun, comme l'a fait l'Allemagne il y a plusieurs mois. Il est particulièrement frileux sur le report du trafic aérien vers le train, en maintenant un seuil à 2h30 qui ne concerne que quelques liaisons où le TGV a de longue date pris une position dominante. Ne pas aligner le projet de loi sur une vision pragmatique est incompréhensible : le train est déjà le mode de transport dominant sur des trajets de 3 heures et même 3h30. Il serait donc assez cohérent de s'aligner sur ce seuil, concernant évidemment la plupart des liaisons au départ de Paris (Nice, Toulouse, Perpignan, Bayonne, Pau et Tarbes étant les principales exceptions), mais aussi des liaisons transversales (Lille - Lyon ou Strasbourg - Lyon).

Le projet de loi se focalise sur la création d'une nouvelle forme d'écotaxe, gérée à l'échelon régional, ce qui pourrait s'avérer assez délicat : ce serait rejeter la responsabilité du manque de ressources pour financer des projets de transports plus propres sur les Régions (à l'approche des élections régionales, c'est malin !) mais aussi un risque de pagaille si chaque Région décide de son propre système (les collectionneurs de vignettes, en manque de créativité sur leur pare-brise seront en revanche satisfaits).

Autre point que l'on peut souligner : l'objectif de division par 2 de l'artificialisation des sols est un premier pas, mais il est lui aussi timide car, pour les zones commerciales, une franchise a été établie, en-deçà de laquelle les promoteurs peuvent continuer leurs activités : elle correspond à environ 80% des cas d'extensions !

En revanche, les zones à faibles émissions seraient généralisées à partir de 2025 pour toute agglomération d'au moins 150 000 habitants : il faudra juger des moyens que ces collectivités mettront en oeuvre pour développer des solutions alternatives, notamment pour les transports en commun, mais on ne peut nier que ce projet tend à accroître le clivage entre les citadins d'une part, les rurbains ensuite (ces habitants de communes rurales qui travaillent en ville quitte à faire des grands trajets) et les ruraux enfin (ceux qui vivent hors des grands centres urbains... mais qui en sont de plus en plus dépendants).

Voir également le dossier de transporturbain Urbanisme, déplacements et choix modaux.

Reste donc à voir quelles améliorations seront proposées par le Parlement... et celles qui seront acceptées par le gouvernement. Mais après une LOM assez timorée, critiquée par le HCC, la loi Climat ne semble pas sur les bons rails...

14 janvier 2021

2021 : année européenne du rail, même en France ?

Des anniversaires symboliques

C’est à la fois le 175ème anniversaire de la liaison ferroviaire Paris – Bruxelles, les 40 ans du TGV français et les 30 ans de la grande vitesse allemande. C’est aussi la première année d’entrée en application complète des dispositions du quatrième paquet de mesures de libéralisation des activités ferroviaires. C’est aussi peut-être une modeste contribution à la vie du collectif européen, passablement malmené ces dernières années (mais le Royaume-Uni n’est pas le seul fautif…).

La Commission Européenne semble considérer le rôle du chemin de fer dans une activité économique qui a été bousculée comme jamais depuis 70 ans par la crise sanitaire mondiale, mais ne perd pas de vue qu’une autre crise, beaucoup plus grave encore, n’a pas été confinée – elle – durant l’année 2020 : la question environnementale est chaque jour plus urgente. Beaucoup soulignent avec insistance l’opportunité de la conjonction entre la relance économique et l’écologie. Le Green Deal proposé par l’Union Européenne essaie d’impulser cette direction, mais le démarrage reste laborieux dans une Europe désormais à 27 où l’unanimité est devenue non seulement un vœu pieu mais un obstacle à son fonctionnement.

Si l’Union Européenne veut concrétiser cette louable intention, il faudrait donc qu’elle ouvre sa tirelire et cible des actions fortes : beaucoup auront en tête ERTMS, dont l’avancement fluctue aujourd’hui du fait d’une implication très variée des Etats, sur l’infrastructure et à bord des rames. Un financement soutenu de l’interopérabilité permettrait donc d’avancer plus rapidement. On pensera aussi évidemment à des projets d’infrastructure concourant notamment à l’amélioration des liaisons internationales. Beaucoup pensent à la Transalpine, mais elle est déjà largement financée par l’Union. L’effet sera probablement bien plus perceptible sur des projets plus opérationnels et à une échéance plus courte, tant sur le passage des points-frontières (pour la France, songeons un instant à Hendaye…), ou à l’amélioration des corridors européens pour le fret, que ce soit sur le gabarit, la longueur des voies de garage, la qualité des voies de service, ou encore la création d’itinéraires contournant les grands nœuds (vous devriez avoir VFCEA en tête…).

En France, toujours autant d’incertitudes

Tout au long de l’année 2020, le gouvernement français n’a pas lésiné dans ses discours à mettre en avant ses préoccupations en matière ferroviaire. Mais dans les faits ? Il a fallu le supplier de venir en aide à la SNCF pour compenser les conséquences du premier confinement, mais l’entreprise sait qu’elle y laissera des plumes, car les montants annoncés par l’Etat début septembre dans le plan de relance anticipent des cessions d’actifs.

De ce plan de relance, personne n’a encore réussi à en déchiffrer précisément le contenu. Sont annoncés 4,7 MM€ pour le secteur ferroviaire dont 4,05 pour recapitaliser la SNCF (modalité liée au statut de Société Anonyme). Cette opération assure selon le gouvernement une trajectoire de renouvellement du réseau à 2,9 MM€, couvre les effets de la sortie du glyphosate et la sécurisation des ouvrages d’art ainsi que l’intégration de 14 lignes de desserte fine du territoire dans le réseau structurant dont le renouvellement sera pris en charge par l’Etat. Les crédits supplémentaires portent sur le fret (250 M€ dont un quart pour la prise en charge des péages jusque fin 2021), les lignes de desserte fine du territoire (300 M€, principalement pour apporter des crédits en souffrance dans les CPER) et 100 M€ pour la relance des trains de nuit). D’autres moyens seront obtenus… par des cessions d’actifs, sujet pour le moins délicat tant sur le fond (cela revient à faire payer les effets du confinement à l’entreprise) que sur la forme (toujours en référence au « quoi qu’il en coûte »…)

Cependant, les pertes d’exploitation liées au confinement sont pour l’instant évaluées à 5 MM€ et le trou continuer de se creuser. Sur ce point, pas de clarification en vue… mais pour autant, il faut maintenir l’objectif de retour à l’équilibre financier en 2022 pour le groupe, en 2024 pour SNCF Réseau. Il se murmure que face l’érosion du trafic, et en particulier de la clientèle d’affaires, SNCF Voyageurs étudierait un scénario de rabotage sévère des dessertes nationales. Mais en parallèle, les TGV2020 sont en production : un effet de ciseau infernal !

Bref, 2021 ne commence pas vraiment comme une année « pro-rail » en France : disons tout au plus que ces enveloppes évitent tout au plus que la situation n’empire ! De l’autre côté du Rhin, le propos d’Angela Merkel est intéressant : « Ce n’est qu’avec le rail que nous atteindrons nos objectifs climatiques ». Avec 8,6 MM€ d’investissements annuels sur le réseau, cela ne semble pas trop mal parti…

Autre sujet d’inquiétude, la revoyure du contrat Etat – SNCF Réseau qu’on a quand même du mal à qualifier de « contrat de performance ». Il va falloir s’entendre sur cette notion : elle ne peut se réduire au renouvellement à l’identique comme c’est trop souvent le cas…

Un bon sujet mettant l’Etat face à ses propres responsabilités est le développement de RER dans les grandes agglomérations : quels moyens est-il prêt à engager pour passer de la théorie à la pratique ? Le fret aussi est de tous les discours, de façon encore quasi incantatoire, mais il va falloir passer au concret, ce qui va nécessiter plus qu’une étrenne à la géométrie imprécise : parlons gabarit, installations électriques, voies de service, longueur des garages en ligne, ERTMS… ce qui sera l’occasion de penser à la globalité des besoins de l’ensemble des activités ferroviaire. Puisque tout ceci finit sur des rails, les bénéfices « pensés » pour une action peuvent aussi bénéficier à une autre…

Le rail, plus que jamais au cœur des enjeux de société

Les atouts du chemin de fer demeurent plus que jamais d’actualité : la crise du covid-19 a un peu relégué – malheureusement – une autre crise, bien plus sévère et bien plus durable. Seulement 5 cinq ans après la signature de l’accord de Paris à l’issue de la COP21, la température moyenne de la planète n’a cessé d’augmenter, battant record sur record. La France n’est pas du tout dans la trajectoire à laquelle elle s’était engagée dans cet accord en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre. « Les diseux et les faiseux » comme on dit parfois encore dans nos campagnes… Ceci dit, le bilan à l’échelle de la planète n’est pas meilleur, battant là encore record sur record.

Alors, à l’échelle des transports, si on profitait – vraiment – de l’occasion qui se présente pour infléchir les politiques publiques vers des modes de transport plus vertueux ? Investir dans la modernisation du système ferroviaire français, tordre un peu le bras à une lecture un peu trop financière de court terme, rappeler que les investissements d’aujourd’hui – à condition qu’ils soient bien pensés – font les économies de demain, se méfier du penchant français pour « la solution universelle miraculeuse », resserrer les liens entre le réseau ferroviaire, les services qu’il accueille, les populations et activités qu’il dessert, et naturellement regagner la confiance des utilisateurs (actuels et potentiels) par une offre structurée, attractive avec une tarification lisible et équitable : voici ce qu’on peut souhaiter au système ferroviaire français pour cette nouvelle année.

Publicité
Publicité
23 octobre 2020

Mobilisation pour Saint Etienne - Clermont-Ferrand

Les élections régionales appochent - en principe... - et c'est donc le moment de mobiliser les troupes pour se faire entendre des candidats. Exemple : une mobilisation d'élus locaux et d'associations d'usagers pour rétablir la continuité de la ligne Saint Etienne - Clermont-Ferrand, coupée en 2 depuis 2016. Certes, la Région a financé les travaux de rétablissement de la desserte entre Montbrison et Boën, mais peut-on durablement laisser dépérir une ligne reliant deux agglomérations de plus de 250 000 habitants ? La réponse est évidemment non - en principe... - mais en France, tout est possible.

Au-delà du principe de défense de la ligne, au sens de l'infrastructure, se pose aussi la question de l'usage. Il n'est de voie ferrée viable que si le service qu'elle accueille répond aux attentes des populations et activités qu'elle irrigue. Dans un premier temps, il faudrait donc a minima restaurer une cadence aux 2 heures entre Saint Etienne et Clermont-Ferrand, complétée par un renfort sur le bassin clermontois jusqu'à Vertaizon et Thiers d'une part, sur le bassin stéphanois jusqu'à Montbrison d'autre part.

La balle est bien d'abord dans le camp de la Région.

 

4 octobre 2020

Réflexions sur le Périgord touristique... et ferroviaire

L'horaire 2021 devrait apporter des évolutions assez nettes sur la desserte ferroviaire régionale dans cette belle région, entre les vallées de la Dordogne, de l'Isle et de la Vézère. Il y a effectivement matière à améliorer l'organisation des services sur les lignes Bordeaux - Sarlat, Bordeaux - Périgueux - Limoges / Brive et Pérgieux - Agen, afin de renforcer l'attractivité des dessertes. Sur ce territoire, la dimension touristique est toute particulière : c'est à en donner le vertige ! Peu de Régions peuvent s'enorgueuillir de proposer un panorama de 20 000 ans d'histoire en quelques dizaines de kilomètres. De Lascaux aux forteresses de Beynac et Castelnaud, des vestiges gaulois de Vésone à la cité Renaissance de Sarlat, on comprend le succès des émissions télévisées sur le patrimoine périgourdin (rassurez-vous, on arrête ici le côté Stéphane Bern...).

270720_82500saint-cyprien2

Saint Cyprien - 27 juillet 2020 - Lumière matinale sur ce B82500 ex-Poitou-Charentes franchissant la Dordogne avec ce TER Bordeaux - Sarlat. Une des lignes de prédilection de notre dossier pour son haut potentiel touristique. © transportrail

Cette richesse touristique est une dimension encore peu prise en compte dans l'organisation de la desserte ferroviaire, très axée sur les flux domicile - travail / études. Si cette clientèle représente aujourd'hui la majorité des voyageurs dans les trains, il ne faut pas oublier qu'il s'agit de motifs de déplacements aujourd'hui minoritaires. En revanche, le succès du tourisme vert - encore un peu plus cette année pour les raisons que l'on sait - devrait inciter à mieux desservir en journée et le week-end ces territoires, et à développer l'intermodalité avec le réseau d'autocars, mais aussi avec les randonnées cyclistes, pour profiter de l'une des plus belles régions de France : la clientèle occasionnelle dans les trains génère une recette supérieure à celle des abonnés, ne l'oublions pas... et cela ne peut pas faire de mal, surtout sur les lignes de desserte fine du territoire, une fois de plus à l'honneur dans transportrail.

Voici donc un nouveau volet de notre série consacrée aux liens entre le train et le tourisme.

24 août 2020

Allemagne : des mises à jour

Quelques travaux estivaux sur 2 dossiers de transportrail en Allemagne :

  • l'étude sur la grande vitesse en Allemagne et son modèle territorial polycentrique a été fractionnée en 2 parties pour en améliorer la lisibilité et intégrer certains nouveaux développements ;
  • celle sur le programme Zukunft Bahn a été complétée par les dernières décisions sur les investissements ferroviaires et le renforcement du rôle du chemin de fer : nous avons gardé le titre, même s'il n'est plus vraiment d'actualité (il faut plutôt parler de Bahn 2030 semble-t-il), mais la notion d'avenir du rail dans cette appellation nous plaisait...
17 juillet 2020

En même temps ou la gestion d'accomoder le mensonge ?

Mardi, au cours de son entretien à la télévision, le 14 juillet, le Président de la République a parlé - furtivement - d'écologie à 14h14, après 54 minutes de questions-réponses, et s'est soudainement mis à évoquer le sujet ferroviaire, avec le fret, les trains de nuit et les petites lignes à 14h23. Des paroles : « on va les sauver ! ».  Le lendemain, le nouveau Premier Ministre était évasif dans son discours de politique générale, évoquant simplement « les transports » dans les 20 MM€ du volet énergétique envisagé dans le plan de relance de l'économie. Cependant, en grattant à peine, on avait bien compris qu'il s'agissait surtout de la voiture électrique dont il était question.

Sans vraiment de surprise, étant donné que l'inflexion stratégique du nouveau gouvernement est des plus minimes, le lien entre transition énergétique, aménagement du territoire et transports publics, avec comme épine dorsale le réseau ferroviaire, n'arrive pas à imprimer dans le logiciel politique. Le nouveau monde ressemble bel et bien à l'ancien.

Le « en même temps » ne cesse de se décliner à toutes les sauces : de la même façon que, dans le domaine hospitalier, les accords intervenus cette semaine laissent bien des questions en suspens, comme par exemple l'absence de remise en question des plans de fermeture d'hôpitaux, de services d'urgence ou de réduction de capacité, dans le domaine ferroviaire, c'est un peu pareil : il y a les paroles, mais du côté des actes, c'est à peu près tout le contraire.

Seuls les naïfs pouvaient attendre quelque chose : après tout, l'actuel locataire de l'Elysée a commis les Services Routiers Librement Organisés en tant que Ministre de l'Economie et a oeuvré, tant comme conseiller à l'Elysée que comme membre du gouvernement, à l'actuelle situation, notamment les arbitrages financiers sur le Contrat de (non-)performance du réseau.

Les multiples annonces en faveur du fret ferroviaire restent pour l'instant des paroles en l'air : la démarche des opérateurs avec 4F vient jeter les bases d'un projet dans lequel les responsabilités de chacun sont identifiés. Mais quelle sera la concrétisation de la communication du gouvernement et du chef de l'Etat ? Pour l'instant, l'horizon est bouché.

Les incantations sur les trains de nuit ne valent guère mieux : l'essorage de la desserte a été accompagné d'un pseudo-appel à manifestation d'intéret qui été pipé d'avance, ce que les opérateurs privés avaient dénoncé. Qui plus est, sur ce seul sujet, les questions sont nombreuses : quel plan d'investissement sur le matériel roulant ? quel modèle économique, c'est-à-dire avec ou sans subvention partielle d'une autorité organisatrice qui devrait être l'Etat ? quel impact sur la gestion du réseau à l'heure où les plages travaux sont de plus en plus longues, surtout la nuit, et en simultané sur les 2 voies de surcroît, pour essayer de faire des travaux le moins mal possible avec le peu de moyens et des règles parfois kafkaïennes imposées par un contrat à logique financière et non économique (ce qui revient à préconiser des solutions qui rentrent dans le cycle des annuités budgétaires quitte à être in fine plus coûteuses) ?

Sur les lignes de desserte fine du territoire, tout a été dit et écrit ou presque depuis 15 ans, depuis l'audit de l'EPFL. La mission du préfet Philizot, omniprésent sur les questions ferroviaires, n'en finit pas d'être prolongée de façon évanescente. Le rapport au Parlement qu'il a produit reste un secret d'Etat digne du code de sûreté nucléaire de l'URSS au temps de Brejnev et les gouvernements Philippe - et semble-t-il déjà - Castex n'ont nulle envie de soumettre son contenu à la représentation nationale, ce qui était pourtant initialement prévu. Mais, comme le rappelle régulièrement la FNAUT, on attend aussi le rapport du gouvernement sur le schéma national des services de voyageurs, qui aurait dû être présenté en fin d'année 2014 !

Sur ces lignes, l'Etat joue les arlésiennes sur le financement : les Régions soulignent régulièrement qu'elles se retrouvent à faire l'avance de l'Etat pour faire avancer les projets inscrits dans les CPER, objet dévoyé de sa vocation initiale en matière de transport et qui se retrouve désormais outil principal de financement de ces lignes, en faisant supporter au moins les deux tiers de l'investissement aux Régions.

L'Etat avance l'hypothèse de transfert de la gestion de certaines lignes aux Régions qui en feraient la demande... mais il va falloir là aussi envisager le volet financier de ce qu'il faut bien considérer comme un transfert de compétence.

Toujours sur le financement, le gouvernement Castex a annoncé une réduction significative des impôts dits de production, dont la Contribution à la Valeur Ajoutée des Entreprise, qui constitue l'une des dernières ressources dynamique des Régions, de moins en moins indépendantes fiscalement et de plus en plus reléguées à la situation des Etablissements Publics Régionaux d'avant 1982. Pour qui veut faire de la décentralisation et du respect des collectivités locales sa marque de fabrique, cela commence bien... Et que le gouvernement rejette en bloc tous les amendements proposés par les Régions dans le 3ème projet de loi de finance rectificative n'augure rien de bon sur la confiance entre l'Etat et les Régions.

Mieux, la compensation des conséquences du confinement sanitaire imposé par l'Etat est en train de prendre des chemins des plus mesquins... et probablement contraire à la constitution puisque le gouvernement envisage de n'indemniser que les agglomérations où les transports sont gérés par un syndicat mixte dédié. Résultat, exit de nombreuses villes... mais aussi exit les Régions ! Débrouillez-vous. Mais que les syndicats mixtes se rassurent : il est loin d'être avéré que l'Etat compense à l'euro près les pertes, le fameux « quoi qu'il en coûte » du Président de la République. A moins que cette phrase ne veuille dire « peu importe qu'on supprime des services à la population » ? L'ambiguïté permet d'éviter l'accusation de mensonge...

Il reste maintenant moins de 600 jours au Président de la République pour se « réinventer ». La tâche est d'autant plus complexe que depuis mars, les inflexions sont faibles... si tant est qu'elles aillent dans le bon sens !

Il est évident que la situation actuelle est inédite, largement imprévisible et remet en question bien des schémas préétablis. Il ne s'agit pas de dépenser aveuglément, mais de mettre de la rationalité dans les décisions et surtout de la cohérence : c'est, il est vrai, beaucoup demander.

Pour conclure sur le seul domaine ferroviaire, les besoins sont de natures diverses :

Du fonctionnement d'abord

La compensation à l'euro près des pertes de recettes de l'ensemble des autorités organisatrices de transport et des activités commerciales de la SNCF (entreprise publique en SA) liées au confinement et à la moindre fréquentation : définir la date de référence est facile... mais la date de fin l'est moins ? 11 mai ?

De la fiscalité ensuite

Comme le réclame la FNAUT depuis 7 ans, et comme l'Allemagne l'a décidé, la TVA à 5,5% sur tous les transports en commun de voyageurs, y compris les billets longue distance de la SNCF, serait un signal incitatif favorable. Dans une logique d'équité environnementale, le manque à gagner pourrait être compensé par un point de TVA supplémentaire sur d'autres domaines à plus fort impact écologique.

Il faudra aussi, dans le cadre d'un vrai plan de décentralisation, repenser la gestion des ressources des collectivités locales : elles sont bien plus en capacité de gérer au plus près des territoires et des besoins les services à la population et aux entreprises qu'un Etat un peu trop orienté par un tableau Excel de synthèse.

De l'investissement enfin

Dans le domaine ferroviaire, un véritable Contrat de Modernisation et de Performance économique et sociale du réseau, réévalué à l'aune de l'audit de l'EPFL et des évolutions de périmètre à prendre en charge : une quinzaine de lignes pourraient être à nouveau éligibles à une prise en charge à 100% par l'Etat (un des résultats de la mission Philizot), s'ajoutant aux précédentes décisions (des ponts-routes au glyphosate), qui devrait porter la dotation annuelle de renouvellement de 2,77 MM€ (en 2020, contre 3 MM€ initialement prévus en 2017) à au moins 4 MM€ pour le réseau principal. Pour les lignes de desserte fine du territoire, le besoin est évalué à 750 M€ par an. L'Etat, redevenu propriétaire du réseau, devrait en assumer une part au moins majoritaire, soit un budget annuel d'environ 350 à 400 M€.

Et à cette enveloppe de renouvellement, il faudrait ajouter la part relative à la modernisation et au développement : l'augmentation de la capacité du réseau, que ce soit pour les besoins du fret ou des RER métropolitains, la réalisation de certaines infrastructures nouvelles, en lien notamment avec des enjeux de report modal à vocation environnementale. Un nouveau Conseil d'Orientation des Infrastructures devrait être prochainement instauré, en lien avec l'hypothèse d'un retour du Commissariat Général au Plan (créé en 1946 et disparu en 2006) : assurément, la réalisation de la LGV Bordeaux - Toulouse, des sections francilienne et rouennaise de LNPN, une première partie de LNMP et de LNPCA devraient légitimement être confortés.

Au total, il faudrait probablement que l'Etat consente à consacrer annuellement au moins 5 MM€ au système ferroviaire s'il voulait véritablement marquer une rupture. Sans compter un engagement financier consistant aux côtés des collectivités locales pour développer, en ville, BHNS, tramways et métros... dont on peut considérer qu'il devrait osciller entre 700 M€ et 1 MM€ pour commencer à avoir un effet réel.

Et qui d'autre que le Premier Ministre a déclaré que « dépenser pour transformer, c'est préparer l'avenir » ?

30 juin 2020

Les ambitions de Railcoop

Une Société coopérative d'intéret collectif, basée à côté de Figeac, commence à se faire un petit nom dans le monde ferroviaire : Railcoop. Pour l'instant, c'est un peu un objet ferroviaire inattendu, et l'effet de surprise joue à plein puisque plusieurs journaux se sont intéressés à ce projet.

Une coopérative ferroviaire française

Railcoop souhaite profiter de la libéralisation des dessertes ferroviaires intérieures pour relancer, sous la forme de Services Ferroviaires Librement Organisés, des liaisons ferroviaires transversales quelque peu délaissées par la SNCF. Librement organisés, donc aux risques et périls de l'entreprise puisque sans subvention publique. Comme les autocars longue distance (les fameux cars Macron).

Le marché existe, mais il échappe au train au profit de la voiture d'abord, avec le covoiturage, et de l'autocar dans une moindre mesure. La liaison de bout en bout est souvent minoritaire - voire très minoritaire en flux (de l'ordre de 5% au début des années 2000 sur un Lyon - Bordeaux) mais le trafic de cabotage peut y être plus dynamique.

L'ambition se veut aussi sociale. D'abord sur le plan des tarifs, avec l'intention de s'aligner sur les prix pratiqués par les plateformes de covoiturage et une gamme proposant des tarifs sociaux pour certains profils de voyageurs. Sur le plan de la responsabilité sociale de l'entreprise aussi : les sociétaires ne percevront pas de dividende, les bénéfices étant réinvestis dans la coopérative, alors que le statut prévoit la possibilité de leur verser une rétribution (dans la limite de 42,6 % du bénéfice annuel). Elle est évidemment enfin environnementale en essayant de capter vers le train des déplacements qui recourent aujourd'hui à des modes routiers à commencer par l

Sur le plan technique, Railcoop voudrait démontrer qu'on peut baisser les coûts de structure et les frais fixes de la production de services ferroviaires par une entité plus agile qu'un opérateur classique et un usage intensif du matériel roulant. Il est envisagé de louer des Régiolis en configuration 6 caisses avec une capacité d'au moins 200 places (les actuelles rames de la SNCF proposent 267 places) : une douzaine de rames serait nécessaire pour réaliser les dessertes étudiées dont 6 pour la première liaison Lyon - Bordeaux, pour un coût estimé à 66 M€. Le prestataire aura en charge l'acquisition des rames et le contrat de maintenance, Railcoop ne versant que des loyers pour leur usage.

Il faut déjà à Railcoop réunir 1,5 M€ pour obtenir la licence d'opérateur ferroviaire d'ici la fin d'année 2020, si l'entreprise veut lancer ses premiers trains en 2022... avant d'aller plus loin car la coopérative s'intéresse aussi au fret local.

Les dessertes étudiées

En tête d'affiche, Railcoop se lance dans la restauration d'une liaison ferroviaire directe entre Lyon et Bordeaux, sur l'itinéraire des turbotrains, via Montluçon et Limoges, avec rien de moins que 2 allers-retours diurnes et 1 aller-retour nocturne en places assises.

090991_RTG-saint-bonnet-de-rochefort_van-der-velden

Saint Bonnet de Rochefort - 9 septembre 1991 - La transversale Lyon - Bordeaux à l'époque des RTG a connu jusqu'à 3 allers-retours à la fin des années 1970. Le meilleur temps de parcours en 7h23 n'a été que marginalement amélioré lors de l'exploitation en X72500, procurant un gain de 6 minutes. Cette desserte était moins destinée au parcours entre les deux capitales régionales extrêmes qu'aux multiples parcours de court et moyen parcours comme Bordeaux - Périgueux, Limoges - Guéret ou Montluçon - Lyon pour ne citer que quelques exemples. C'est d'ailleurs entre Bordeaux et Périgueux et entre Roanne et Lyon que la charge des trains était la plus forte. © M. Van der Velden

Mais ce n'est pas la seule liaison qui intéresse Railcoop : d'autres déclarations d'intention ont été transmises à l'Autorité de Régulation des Transports :

  • un aller-retour Lyon - Bordeaux de nuit par un itinéraire inédit, via Roanne, Clermont Ferrand, Aurillac, Brive et Périgueux, au cas où l'un des 4 allers-retours via Montluçon ne serait pas possible ;
  • 2 allers-retours Rennes - Toulouse via Le Mans, Tours, Poitiers, Limoges et Brive ;
  • 1 aller-retour Lyon - Dijon - Nancy - Metz - Thionville.

Sur la relation Lyon - Bordeaux, l'horaire indiqué à l'ART attire l'oeil puisqu'en 6h47, il serait plus rapide de 36 minutes qu'à l'époque des RTG. Même avec 9 arrêts au lieu de 12 et de meilleures aptitudes dans la rampe des Sauvages, il est quand même peu probable qu'on puisse gagner autant de temps. On notera sur l'horaire transmis à l'ART que les rebroussements à Saint Germain des Fossés (pourquoi ne pas utiliser le raccordement direct ?), Gannat, Saint Sulpice Laurière et Périgueux sont affichés en 5 minutes. C'est osé, surtout pour des compositions en UM2 qui afficheraient 220 m de long, et avec une informatique embarquée quand même un peu chronophage au moment de désactiver - réactiver les cabines de conduite.

En outre, les modalités de croisement sur les sections à voie unique ne semblent pas totalement prises en compte, notamment sur le tronçon Périgueux - Nexon (où la gare de Thiviers est toujours d'arrêt général). Le cisaillement à l'entrée nord de Limoges Bénédictins sera à étudier précisément, les trains existants faisant terminus à Limoges sur les voies en impasse sur le flanc nord-ouest du plan de voies.

Sur la relation Rennes - Toulouse, le parcours est totalement inédit et plusieurs points seront évidemment à observer. Le rebroussement en 5 minutes à Tours semble là aussi un peu juste. Le temps de parcours de 1h43 entre Poitiers et Limoges est également à confronter avec le montage des autres circulations sur la voie unique, sachant que le meilleur train sur cette relation relie les deux villes en 1h54 avec 6 arrêts : 1h43 laisserait supposer un sillon sans arrêt intermédiaire... mais qui pourrait entrer en conflit avec les services régionaux existants. Il serait probablement plus simple de passer par Vierzon, mais il semble que le projet de Railcoop vise la desserte du Futuroscope (avec une arrivée en début d'après-midi quand même...). On note aussi que les trains du soir arriveraient à leur terminus après 1h du matin, ce qui est assez problématique car où sont les transports publics à cette heure à Rennes et Toulouse ?

220710_81590nieul

Nieul - 22 juillet 2010 - Un TER sur la ligne Poitiers - Limoges marque généralement au moins 6 arrêts intermédiaires. Si un train direct venait à circuler sur cette ligne, quelles seraient les conséquences pour la trame régionale... et sur le projet de Railcoop ? © transportrail

Même remarque sur les 5 minutes de rebroussement à Dijon et Nancy sur l'aller-retour Lyon - Thionville.

190719_RCR1uchizy2

Uchizy - 19 juillet 2019 - Un TER Lyon - Dijon assuré en rame Corail réversible Rhône-Alpes. Flixtrain voulait assurer 5 allers-retours Paris - Bourgogne - Lyon, Railcoop se contente d'un seul projet... mais qu'en pense les deux Régions oeuvrant à une desserte à peu près cadencée à l'heure ? © transportrail

Les trains Lyon - Bordeaux et Toulouse - Rennes seraient en correspondance à Limoges tandis que le Lyon - Thionville serait en correspondance avec la relation Lyon - Bordeaux.

L'avis des Régions

La Région Nouvelle Aquitaine se contente d'être observatrice, intéressée tout de même, veillant à ce que les circulations envisagées par Railcoop ne bousculent pas trop les trains régionaux existants et les évolutions de desserte envisagées à court ou moyen terme, ni la fréquentation - donc les recettes - de ceux-ci. Comme évoqué en début d'article, la majorité des trafics sur les liaisons transversales sont des voyageurs de moyen parcours en cabotage sur ces longues relations. Le sujet peut être assez sensible car une évolution sensible des horaires est prévue en Nouvelle Aquitaine en 2022 sur la trame TGV... et par conséquent sur toute la trame TER. Les autres Régions n'ont pas encore formellement commenté ces déclarations. Pour l'instant, les autres Régions ne semblent pas s'être exprimées.

Les Régions ont jusqu'à 25 juillet pour saisir l'ART, notamment pour solliciter un test d'équilibre financier des trains Railcoop sur les conventions TER en cours.

Très ambitieux ?

Si la formule est différente, Railcoop ressemble dans le principe d'un modèle ferroviaire alternatif à l'expérience allemande - de courte durée - de Locomore, née d'un financement participatif. L'initiative est à suivre mais elle pose quand même question au-delà des éléments techniques sur les dessertes annoncées et leurs temps de parcours. La mise de départ est élevée, même si le matériel roulant sera loué à une structure ad hoc et l'effectif requis est quand même assez conséquent avec un haut niveau de technicité de certains métiers, notamment la conduite des trains. Le souhait d'une tarification attractive, comparable au covoiturage, sera à analyser par rapport à d'autres tarifs, à commencer par ceux des TER déjà présents sur tout ou partie de ces axes.

La véritable question est la suivante : comment des liaisons ferroviaires transversales, où le trafic est d'abord le fait de courts et moyens trajets, pourrait-il arriver à vivre sans subvention publique ? C'est bien sur ce point qu'on est curieux de comprendre comment l'aventure Railcoop pourrait passer du papier au rail... mais on leur souhaite quand même bonne chance...

Publicité
Publicité
<< < 1 2 3 4 5 6 7 > >>
Publicité