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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
transition energetique
29 septembre 2018

Electrifications frugales pour le transport régional

Mouvement de fond au cours d'Innotrans 2018 et c'est assurément l'une des grandes questions à laquelle devra répondre le transport ferroviaire régional dans les années à venir : comment concourir à la transition énergétique et plus précisément, comment s'affranchir de la traction Diesel, encore très présente, notamment en France, sans pour autant recourir à une électrification conventionnelle par caténaire ? En 2004, l'arrivée des AGC bimodes avait été un progrès considérable, destiné à éliminer les longs parcours en traction Diesel sous caténaire.

Alstom met évidemment en avant son expérience avec pile à hydrogène, mais ne met pas tous ses oeufs dans le même panier car l'accord de financement avec trois Régions françaises (Grand Est, Hauts de France et Occitanie) pour transformer un Régiolis bimode en remplaçant l'un des moteurs Diesel par des batteries. Le projet devrait aboutir d'ici deux ans avec une mise en service commerciale vers 2022.

Bombardier et Siemens ont opté tous les deux pour le développement de solutions à batteries, mais de type différent : lithium-ion pour le premier, titane pour le second. La durée de vie de ces équipements est évidemment au centre des recherches et des expérimentations grandeur nature.

Au-delà de l'évolution de la motorisation des trains, la quête d'une plus grande sobriété énergétique doit conduire à un large réexamen de l'ensemble des composantes du système ferroviaire, d'autant plus que cette logique environnementale doit aussi intégrer une autre frugalité, budgétaire cette fois-ci. 

Quels trajectoires possibles, entre continuité et ruptures ? Eléments de réponse dans notre nouveau dossier.

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27 septembre 2018

Régions de France : l'Etat à nouveau bousculé

Le cadre était presque parfait pour une réconciliation : le soleil de Marseille, la vue sur le Vieux Port, la Major et la Bonne Mère depuis un palais du Pharo plein à craquer.

L'an dernier, à Orléans, les Régions avaient décidé de quitter la Conférence Nationale des Territoires pour manifester leur désaccord face aux positions de l'Etat quant aux ressources des collectivités locales en général et des Régions en particulier. On se souvient même que Philippe Richert avait démissionné de la présidence du Grand Est et de Régions de France.

Cette année, le Premier Ministre avait à nouveau fait le voyage. Ce n'était pas prévu, mais la pression était forte. Jeudi 26 au soir, les présidents des associations des collectivités locales ont lancé un appel en faveur du rétablissement d'une politique de décentralisation respectueuse des territoires. En ligne de mire, un peu plus de 18 mois d'action d'un gouvernement considéré trop jacobin et cherchant à reprendre - parfois directement - la main sur des compétences décentralisées.

Les intervenants ont changé : Hervé Morin, Président de la Région Normandie, a tenu le micro pendant une heure pour dresser un réquisitoire d'autant plus sévère à l'encontre du gouvernement qu'il l'adressait à un de ses partenaires politiques de longue date. La même rudesse a été constaté dans la faconde - quoique franchement usée - de Jean-Claude Gaudin, toujours maire de Marseille, mais aussi de Renaud Muselier à la tête de la Région PACA. En guise de réponse, un Premier Ministre clairement sur la défensive, mais dont le discours est passé à côté de la cible : il fallait apaiser et jeter les bases d'une réconciliation... il n'y eut qu'une démonstration technocratique froide.

Au cours de cette journée, Elisabeth Borne est repartie avec les louanges affichées des élus régionaux sur la réforme ferroviaire mais le discours était un peu plus modéré en coulisse : s'agissait-il de créer un clivage au sein du gouvernement ? Le propos de la ministre, à l'expression toujours aussi serrée, était sans surprise, reproduisant les messages déjà diffusés, notamment le 10 M€ par jour pendant 10 ans, recouvrant bien trop d'éléments disparates. En revanche, il semble que se confirme une progression de la dotation de renouvellement du réseau à hauteur de 3,2 MM€ à horizon 2021 ou 2022.

A propos des transports, la question ferroviaire a occupé une partie de la matinée, avec en particulier le devenir des lignes de desserte fine du territoire (appellation SNCF). Patrick Jeantet en a profité pour réitérer l'inflexion de la politique du gestionnaire d'infrastructure, mais la question des moyens a été soigneusement esquivée... Pas tant que cela, car les élus régionaux n'ont pas manqué de préciser que jamais les CPER n'ont connu de si faibles taux d'exécution à mi-pacours... notamment en raison de la défaillance de l'Etat qui n'honore pas sa signature (et qui ne dote pas SNCF Réseau des moyens d'honorer celle qui est prise en son nom).

Surtout, avec l'évolution des compétences régionales, désormais élargies aux offres routières interurbaines jusqu'alors gérées par les Départements, il a été largement question d'intermodalité, de coordination des modes de transport et de fluidité dans le transport collectif mais aussi entre les moyens individuels, partagés et collectifs. La Loi d'Orientation sur les Mobilités qui sera présenté le mois prochain préfigure de nouvelles évolutions avec l'élargissement du périmètre de compétence : elles pourront envisager la création de services de transport collectif sur des territoires où ils ne sont pas organisés par des intercommunalités.

Autre élément, évidemment : l'ouverture du marché intérieur, singulièrement sur le transport régional. La position de la Région PACA a été singulière : sans convention TER avec la SNCF, elle continue de critiquer sa production de qualité insuffisante tout en se retrouvant dans une situation inédite et de surcroît en train de préparer le premier appel d'offres ferroviaire.

En fil conducteur de toutes ces interventions : un axe majeur a été maintes fois rappelé : transition énergétique - aménagement du territoire - poursuite des efforts en faveur du transport régional, et notamment du transport ferroviaire. Sera-t-il entendu ?

12 septembre 2018

LOM : de premières orientations très insuffisantes

Retardée en raison du mouvement de grève du printemps, la Loi d’Orientation sur les Mobilités (LOM) destinée à réformer la Loi d’Orientation sur les Transports Intérieurs de 1982, devrait arriver au Parlement à l’automne. Ses premiers axes ont été présentés par le Ministère des Transports, avec des annonces attendus sur 5 points principaux :

  • sur le renouvellement du réseau routier, suite à l’audit révélant la dégradation des routes non concédées ;
  • sur le renouvellement du réseau ferroviaire, suite à l’actualisation de l’audit mettant en évidence un déficit de 520 M€ dans le Contrat de performance, qui, outre la mise à l’écart des lignes UIC 7 à 9, n’assure pas la pérennité des UIC 5 et 6 pourtant intégrées au réseau structurant ;
  • sur la liste des grands projets retenus ;
  • sur le devenir d’un « Plan Vélo » afin d’accélérer la réalisation d’aménagements pour l’augmentation de la part de marché du vélo sur les parcours de courte et moyenne distance (pistes cyclables, stationnement vélo…) ;
  • sur le lancement d’un nouvel appel à projets pour le développement des transports urbains (BHNS, trolleybus, tramway, métro).

Des confirmations pas toujours rassurantes

Le gouvernement annonce une dotation totale, tous modes confondus, de 13,4 MM€ pour la première période se terminant en 2022 et de 14,3 MM€ pour la séquence 2022-2027. La dotation pour le rail, la route et la voie fluviale est annoncée en hausse de 300 M€ en 2019 et de 500 M€ par an à partir de 2020. Sur les 13,4 MM€ à horizon 2022, 51% seront consacrés au rail.

Le budget de 5 MM€ sur 10 ans annoncé pour le ferroviaire ne correspond à aucune réelle nouveauté, ne faisant que reprendre des engagements déjà annoncés (et pas forcément tenus), et intègre 3,7 MM€ de renouvellement « total » du matériel roulant des liaisons Intercités, incluant le financement des matériels acquis par l’Etat pour les Régions dans le cadre du transfert des TET de Normandie, Centre, Hauts de France et Grand Est.

Sur l’infrastructure ferroviaire, le message manque singulièrement de clarté : il est évoqué un engagement à hauteur de 3,6 MM€ par an sur 10 ans, alors que la trajectoire du Contrat de performance prévoit d'atteindre 3 MM€ en 2020. Une augmentation de 200 M€ par an à partir de 2022 est bien confirmée, dans le sillage des annonces suite à l'adoption de la réforme ferroviaire, dotation insuffisante par rapport aux besoins identifiés par l'audit du réseau.

Sont aussi annoncés 1,2 MM€  de la part de l'Etat en faveur des grands nœuds ferroviaires, mais avec un flou sur ce qui relève de la transcription d’engagements précédents et de mesures nouvelles. Il est aussi question de 2,3 MM€ pour le fret, dans un propos toujours aussi incantatoire et avec la même technique : on additionne des actions déjà programmées mais qui ne cessent de patiner...

En revanche, le désengagement de l'Etat du financement du renouvellement des lignes UIC 7 à 9 semble se confirmer. S'il est fait mention « d’une politique de cohésion des territoires reposant sur l’ensemble des modes de transports : modernisation du réseau ferroviaire, sur les lignes structurantes comme de desserte fine, liaisons aériennes d’aménagement du territoire », on ne sera pas dupe puisque les budgets annoncés ne couvrent pas les besoins et le flou sur ces dotations au secteur ferroviaire confirment l'adage du cardinal de Retz selon lequel « on ne sort de l'ambiguïté qu'à ses dépens ».

Position floue de l'Etat, qui par ailleurs a opéré un verrouillage croissant de la participation de SNCF Réseau à un niveau de plus en plus anecdotique. Voilà qui laisse présager de l’issue finale : la fermeture ou le transfert de propriété aux Régions. Quelques jours seulement après l’esquisse d’une inflexion de la posture de SNCF Réseau, la LOM dans sa version actuelle n’envoie pas un signal favorable, loin de là, et montre que les recommandations du rapport Spinetta n'ont pas totalement été oubliées. Avec un milliard d'euros pour le désenclavement routier des villes moyennes et territoires ruraux, l'orientation du gouvernement est belle et bien révélée. S'ajouteront 180 M€ supplémentaires par an pour augmenter à 850 M€ annuels le budget de renouvellement du réseau national non concédé.

Grands projets : étaler sans trop froisser

Concernant les grands projets, suite au rapport du Conseil d’Orientation des Infrastructures, la position de l’Etat est très prudente vis-à-vis des élus locaux. On notera – quand même – que l’A45 Lyon – Saint Etienne ne fait pas partie de la maquette présentée. En revanche, on retrouve la LGV Bordeaux – Toulouse, LNMP, LNPN, LNPCA, Creil – Roissy, Lyon – Turin et le canal Seine-Nord… mais selon un calendrier redéfini pour lisser l’investissement dans le temps. Par exemple, le schéma privilégie un phasage du projet Bordeaux – Toulouse commençant par les aménagements périurbains des nœuds de Bordeaux et Toulouse (AFSB et AFNT). La branche Dax ne figure pas dans la planification à horizon 2038.

Une copie à enrichir… encore faut-il le vouloir !

La FNAUT réagit assez sèchement en considérant que l’Etat passe la mobilité « à la paille de fer » en poursuivant une stratégie privilégiant ostensiblement le transport individuel et la voiture électrique qui ne peut être qu’une partie de la réponse mais pas l’axe prioritaire, devant selon elle être centrée sur les transports en commun.

Elle note aussi que le texte fait l’impasse sur l’usager qui n’apparaît uniquement que dans la composition du Comité des partenaires sous l’égide des autorités organisatrices.

Il reste donc de notables inconnues à lever, avant l’arrivée au Parlement et pendant les discussions à l’Assemblée Nationale puis au Sénat, sur l’engagement de l’Etat sur :

  • une politique d'aménagement du territoire sans laquelle une politique des transports n'a pas de cohérence ;
  • la confirmation d’une ambition de développement de l’usage du vélo et la sanctuarisation d’une enveloppe (évaluée initialement à 350 M€) ;
  • le soutien financier de l’Etat aux collectivités locales pour le développement des TCSP urbains (BHNS, trolleybus, tramway, métro) ;
  • l’ampleur de l’effort supplémentaire sur le renouvellement du réseau ferroviaire et la stratégie sur les lignes de desserte fine du territoire ;
  • le devenir du renouvellement du parc Intercités;
  • les ressources supplémentaires mobilisables, avec 2 sujets centraux qui ne manqueront pas d’être vilipendés : le ministère des Transports a esquissé plusieurs fois la piste d’une hausse de la fiscalité sur les carburants et l’instauration d’une vignette pour les poids-lourds en transit international.

Ce dernier point est évidemment crucial puisqu’il déterminera les marges d’évolution possibles sur les différents sujets d’investissement… mais dans le contexte actuel, il est assurément risqué ! Les hypothèses présentées sont inférieures au scénario 2 du Conseil d'Orientation des Infrastructures qui préconisait une hausse des investissements de 55%. Avec 40%, le compte n'y est pas. Certes, l'Etat annonce ne vouloir promette que ce qu'il peut concrétiser... mais le flou sur les ressources nouvelles fait craindre que l'intention ne soit guère suivie d'effet sans un sérieux coup de barre sur les moyens.

Enfin, on ne manquera pas de rappeler que certains éléments de la précédente réforme ferroviaire (celle de 2014) restent toujours lettre morte, comme par exemple le schéma national des dessertes ferroviaires de la responsabilité de l’Etat…

Bref, la copie est sérieusement à enrichir, mais le sera-t-elle ? La faible appétence du gouvernement pour le transport public est confortée, la maxime « pour le rail on réfléchit, pour la route on élargit » est confirmée par le lancement des travaux du Grand Contournement Ouest de Strasbourg, validé par l’Etat, en dépit de 7 avis négatifs (Comité national de protection de la nature, Autorité Environnementale, Concertation Publique et Enquête d’Utilité Publique)  et de recours suspensifs non encore examinés. S’il fallait encore un exemple pour étayer la faible prise en considération environnementale du gouvernement, celui-ci est particulièrement révélateur…

7 septembre 2018

UIC 7 à 9 : un début d'inflexion ?

Il y a un peu plus de 6 mois, le rapport Spinetta avait une nouvelle fois stigmatisé celles qu'on appelle tantôt les UIC 7 à 9, les petites lignes, les lignes régionales, ou les lignes de desserte fine du territoire. Le gouvernement avait prudemment temporisé face au caractère explosif de ce dossier avec les élus locaux, même si le ministère des finances y voyait un moyen de réduire les dépenses de l'Etat de façon commode.

Le président de SNCF Réseau a présenté hier une première série de modalités techniques applicables à ces lignes à l'occasion de leur renouvellement afin de maîtriser le coût d'investissement. Cela pourrait ressembler à un retournement de veste. Ce document sera présenté aux Régions, avec lesquelles SNCF Réseau souhaite engager un nouveau dialogue pour trouver des solutions, ce qui implique une certaine dose de réciprocité : les optimisations techniques pour ajuster le coût seront d'autant plus efficaces si la Région exprime clairement ses intentions d'utilisation de la ligne. Si on prend l'exemple récent et très médiatisé de la ligne Abbeville - Le Tréport, toutes les optimisations techniques possibles auront un effet limité sur l'utilité de la ligne si le service reste au niveau antérieur, soit 2 allers-retours par jour. Même chose sur d'autres cas comme Tours - Loches ou Epinal - Belfort. Bref, une planification croisée entre le niveau de service attendu et les solutions techniques devrait être l'objet central des discussions Régions - SNCF Réseau. Au passage, on pourra profiter de cette occasion pour analyser certaines possibilités que nous avons de longue date évoquées à transportrail :

  • mettre à voie unique des sections à double voie sous-utilisées, modalité mise en oeuvre au printemps dernier sur Avranches - Dol de Bretagne, prévue en 2021 sur La Roche sur Yon - La Rochelle, souhaitable dans le cas d'Epinal - Belfort ;
  • analyser la cohérence entre le profil de ligne et les vitesses nominales, souvent définies anciennement avec les performances des matériels de l'époque : on citera par exemple le cas de Rennes - Châteaubriant où un relèvement de 20 km/h serait possible, réduisant le temps de parcours nominal de 1h07 à 52 minutes, pour une cadence aux 2 heures avec un seul autorail ; même logique sur Bayonne - Saint Jean Pied de Port, où il semblerait d'ailleurs qu'un premier renforcement de la desserte à investissement minimal soit envisagé pour 2020.

Si l'amorce du virage sur le plan technique est plutôt bienvenue, le financement restera un levier déterminant. Indépendamment de signaux d'ouverture venant de SNCF Réseau et du ministère ("ce n'est pas à Paris qu'on décidera de l'avenir des lignes"), les Régions ne manqueront pas de souligner que la participation de SNCF Réseau reste anecdotique sur ces projets (pas plus de 8,5%) et que l'Etat n'honore pas ses engagements prévus dans les CPER, si bien que les Régions se retrouvent financeurs, ce qui peut leur donner l'idée de financer à 100%, sans l'Etat mais aussi sans la SNCF et d'envisager une autre forme de gestion des infrastructures ferroviaires utilisées essentiellement pour le seul trafic régional.

Il faudrait donc que l'Etat s'empare lui aussi de ce sujet, entre aménagement du territoire et transition énergétique, et que la Loi d'Orientation sur les Mobilités prévoie de nouvelles ressources pour financer le réseau ferroviaire... et pas seulement ce tiers de réseau à usage majoritairement local, mais aussi le réseau structurant puisque l'actuel Contrat de performance présente un vide abyssal d'un demi-milliard par an qui ne permet pas d'en garantir l'intégrité !

29 août 2018

Clermont-Ferrand garde (malheureusement) son train direct

Visite éclair de la ministre des Transports à Clermont-Ferrand aujourd'hui, au cours de laquelle la desserte de la capitale auvergnate et plus globalement du territoire auvergnat a été évoquée. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le résultat est à peu près intégralement à côté de la plaque.

Parmi les sujets étudiés dans le schéma directeur de l'axe Paris - Clermont-Ferrand, figure le devenir de l'unique aller-retour direct tracé en 2h59 minutes et 30 secondes pour satisfaire les élus clermontois afin d'afficher symboliquement un - mauvais - train en moins de 3 heures... Mauvais car fréquemment en retard en raison d'une marge de régularité tellement compressée que le moindre aléa en ligne se paie en minutes perdues, et, dans le sens pair, d'un positionné avec une arrivée immédiatement après le premier train caboteur. Il était donc question d'ajouter les arrêts de Nevers, Moulins, Vichy et Riom afin d'avoir une politique d'arrêt unique, au bénéfice de l'ensemble de l'axe, qui plus est à des horaires des plus attractifs. Regardons ce qu'il en est au service 2018, avec au passage un meilleur temps de 3h10 du fait de travaux :

  • le matin, le train 5954 direct arrive à Paris à 9h03, soit 6 minutes après le 5950 parti 18 minutes plus tôt de Clermont-Ferrand... mais derrière, aucune arrivée à Paris avant 11h58 !
  • le soir, le train 5977 quitte Paris à 17h57, générant pour Nevers, Moulins, Vichy et Riom un creux de desserte de 2 heures en pleine pointe de soirée, ces villes ne bénéficiant d'aucun départ entre 16h57 et 18h57 ;
  • évidemment, tout ceci requiert une rame supplémentaire pour ce seul aller-retour...

Le choix d'une desserte unique sur l'axe aurait permis d'instaurer un service de base toutes les 2 heures avec un renforcement à l'heure en pointe du matin et du soir. Le bilan économique d'un tel scénario à 9 allers-retours, avec donc un aller-retour de plus pour Clermont-Ferrand et 2 pour les autres gares desservies, aurait même été jugée positivement par l'Etat (soucieux de ne pas dépenser un centime de plus sur les TET) et SNCF Mobilités (c'est dire !). Sans être pour autant conforme avec les préconisations du rapport Avenir des TET (12 allers-retours), les bases d'une desserte plus attractive auraient enfin été posées.

Mais ce n'est pas tout : pour rassurer les élus des villes moyennes d'Auvergne, la ministre a demandé à Air France de travailler, avec sa filiale Hop!, à l'amélioration de la desserte d'Aurillac et du Puy en Velay (ville chère au président de la Région)... ce qui prouve que la transition énergétique reste encore dans le verbe (et encore du bout des lèvres) plus que dans les actes :

  • le bilan énergétique d'un voyageur en avion sur de telles relations doit être assurément des plus vertueux ;
  • il faut continuer à maintenir ces petits aéroports à coup de subventions des collectivités locales ;
  • le maintien de ces dessertes, voire leur développement, suppose aussi des subventions indirectes supplémentaires au transport aérien, ne serait-ce que la détaxation du kérosène.

Personne n'a évidemment eu l'idée d'associer les sujets dans un plan ferroviaire auvergnat articulé, notamment, sur une meilleure offre Paris - Clermont-Ferrand et des relations ferroviaires améliorées en nombre sur une infrastructure renouvelée et optimisée à destination d'Aurillac et Le Puy pour se limiter uniquement à ces deux villes évoquées dans les discussions de ce jour (on ajouterait Montluçon, mais aussi les liaisons vers Saint Etienne, Lyon, Limoges, Brive, Nîmes, Mende et Béziers pour faire bonne mesure) : ah oui, c'est vrai, au-delà de Clermont-Ferrand, c'est le domaine des UIC 7 à 9, donc de ces lignes dites sans avenir... (en plus, ce n'est même pas vrai, car la section Clermont-Ferrand - Issoire est classée UIC 6...)

Un ministre de la transition écologique aurait démissionné pour moins que cela...

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2 juillet 2018

Transition énergétique : et le train ?

Pour que le train ne soit pas oublié de la transition énergétique, il ne faut pas oublier la transition énergétique...

transportrail vous recommande la lecture de cet article bien documenté sur la contribution potentielle du chemin de fer à la transition énergétique.

Comme souligné dès l'introduction, les récents débats sur le transport ferroviaire n'ont absolument pas pris la mesure du rôle essentiel de ce mode de transport dans l'évolution de l'empreinte environnementale des transports, sujet lui-même de plus en plus absent, malgré les autosatisfecits qui ont suivi l'accord de la COP21, aussitôt signé et aussitôt bafoué (pas seulement par les Etats Unis). On peut avoir la fâcheuse impression que la fameuse phrase « L’écologie, ça commence à bien faire » de Nicolas Sarkozy reste toujours d'actualité. Ce n'est pas le tout de faire un coup politique en prenant une vitrine de l'écologie médiatique, encore faudrait-il qu'on arrête de regarder ailleurs alors que la planète brûle (tiens, pour le coup, on cite Jacques Chirac !) de toutes parts.

On a parlé du chemin de fer de façon comptable et par le biais d'un rapport de force entre l'Etat et les syndicats sur le devenir du statut des cheminots. Deux aspects tout de même assez secondaires par rapport au défict sociétal et humanitaire de la transition énergétique et de la maîtrise du réchauffement climatique.  Il est normal qu'on oublie le rôle du train dans la transition énergétique puisque celle-ci a disparu des radars...

Dans le domaine des transports, la transition énergétique est d'abord incarnée par la voiture électrique, mise à toutes les sauces, alors qu'elle est cependant loin d'être la réponse universelle et encore moins d'être la plus vertueuse. L'impact sur la consommation d'énergie serait bien plus fort par un report modal ambitieux (tout en étant lucide sur la part des déplacements pouvant être objectivement concernés) mais cela suppose une réelle volonté politique et, il faut le dire, des moyens importants.

Le réseau ferroviaire français n'est pas aujourd'hui à la hauteur du défi qui est devant lui, en raison de son état général moyen voire médiocre et, en particulier autour des grandes métropoles, d'un déficit de capacité illustrant des décennies d'orientations en faveur de la seule vitesse des liaisons longue distance : on en a un peu oublié la desserte de proximité de ces bassins urbains si bien que créer des dessertes de type RER autour des grandes métropoles, si nécessaire soient-ils, constitue un travail de longue haleine à l'issue malheureusement encore trop incertaine. Manque de volonté politique, lobbying industriel de l'automobile, des producteurs de batteries, passivité du système ferroviaire : tout le monde a sa part de responsabilité.

Le train, acteur d'un aménagement du territoire plus responsable

Le chemin de fer peut être un des outils au service d'un territoire plus économe en énergie, parce que c'est un des moyens de transport qui en consomme le moins, que ce soit pour les marchandises ou les voyageurs. Il peut aussi être le vecteur de nouvelles politiques territoriales qui devraient faire des gares des centralités de services et d'habitat, de nature à encourager un modèle d'aménagement local fondé sur les petites distances, compatibles avec des trajets à pied ou en vélo.

Il ne s'agit pas de faire état d'un quelconque intégrisme : on n'éliminera pas la voiture mais on doit pouvoir nettement réduire la dépendance quotidienne de la population. Tout le monde ne peut pas prendre les transports en commun pour tous ses déplacements, tout le monde n'a pas la possibilité d'aller à la gare à pieds ou en vélo, mais il y a assurément moyen de changer une partie des pratiques. Nos villes et surtout les couronnes périurbaines manquent de trottoirs et de pistes cyclables pour aller facilement vers les réseaux de transports en commun structurants (tramways, trains). Nos campagnes sont pour la plupart très mal desservies et la complémentarité entre le train et l'autocar a des marges de progrès considérables moyennant peu d'investissements mais une dose de bon sens. Certes, il faudra bien entrer dans le vif du sujet avec le retard abyssal d'investissement sur le réseau ferroviaire.

Evidemment, on ne trouvera pas facilement les milliards d'euros pour préserver le maillage du territoire par le rail et lui procurer les capacités nécessaires pour accueillir ces fameux RER métropolitains. La transition énergétique n'est pas une mission régalienne de l'Etat au même titre que la police, la justice, l'éducation ou la protection sociale. C'est un tort : il en va tout simplement de la préservation de la santé publique, de la biodiversité et finalement de l'espèce humaine !

Grande vitesse ferroviaire, construction européenne et report modal

Dans ce contexte, le récent rapport de la Cour des Comptes Européenne, cité par le site Médiarail peut aussi être lu à travers ce filtre : le déficit de coordination entre les Etats membres sur le développement des réseaux à grande vitesse a de fait laissé le champ libre à la voiture et surtout à l'avion sur les parcours au travers de l'Europe. Là aussi, un peu de pragmatisme ne peut faire de mal. Si le discours sur la pertinence du mode ferroviaire en deça de 3 heures à 3h30 doit être relativisé, il est difficile d'envisager des parcours transeuropéens sans un rôle assez conséquent de l'avion : Thalys, Eurostar et même Lyria sont de bons exemples de coopération mais sur des pays géographiquement proches et sur des distances malgré tout moyennes à l'échelle du continent. C'est peut-être aussi pour cela qu'il est le seul. A contrario, le rail a encore du mal à être compétitif face à l'avion et à la voiture entre la France et l'Espagne, ou même entre la France et l'Allemagne (au-delà du bassin de la Ruhr), par des temps de parcours encore relativement élévés (pour les longs trajets) et des fréquences insuffisantes (pour les relations de proximité).

Le gouvernement français se cherche une jambe gauche pour équilibrer sa politique et le Président de la République se retrouve en première ligne sur le volet européen compte tenu de la situation politique parmi les pays pionniers : voici peut-être que le rail et la transition énergétique pourraient être le moyen de concilier les deux, non ? Serions-nous trop terre à terre ?

9 juin 2018

Réforme ferroviaire : après le Sénat

Sans surprise, après l'Assemblée Nationale, la réforme ferroviaire a été adoptée par le Sénat qui a introduit de nouveaux éléments dans le contenu du texte, en particulier l'incessibilité des parts du capital de la holding SNCF, de SNCF Mobilités et SNCF Réseau, entièrement détenues par l'Etat, et l'ensemble du volet social, au sein du groupe SNCF et pour les cas à venir liés aux appels d'offres pour l'exploitation des trains.

Le Sénat complète le "sac à dos social"

Ainsi, les salariés au statut pourront bénéficier d'un délai de réintégration au sein de la SNCF pendant une durée de 8 ans. Pour le Sénat, le transfert automatique n'est pas la meilleure solution et il a donc renforcé la notion de volontariat en cas de perte d'un marché par SNCF Mobilités : il s'agit sur le fond d'adapter une pratique déjà existante de détachement ou de mise à disposition de personnels (actuellement vers des Régions par exemple), à l'évolution du contexte institutionnel et à l'arrivée de nouveaux opérateurs. Surtout, le Sénat a élargi le périmètre du volontariat à l'ensemble de la Région et plus seulement aux seuls établissements gérant les lignes concernées par un changement d'opérateur.

D'autres sujets, moins visibles, mais tout aussi sensibles, restent à approfondir, comme par exemple l'absence étonnante de représentation des collectivités locales (communes, Régions), en particulier pour l'élaboration du projet stratégique du groupe ferroviaire. Il apparaît tout bonnement inconcevable de ne pas associer le premier client du ferroviaire français à ces réflexions. Même chose pour la nouvelle gestion des gares. Compte tenu des budgets importants consacrés par ces dernières à ce volet, ce serait tout de même la moindre des choses que de leur procurer une place significative dans les instances dirigeantes de cette branche nouvelle de SNCF Réseau. Bref, dans cette réforme, il y a aussi insidieusement une mise à l'écart du processus de régionalisation, et même de décentralisation, sans que l'Etat n'assume véritablement ses missions essentielles. Curieux... et inquiétant !

Les fondamentaux sur l'ouverture à la concurrence, la transformation en Sociétés Anonymes et la fin des recrutements au statut n'ont cependant pas été remis en cause.

Dette et financement du renouvellement : entre confirmation et déception

En revanche, deux éléments forts ont été introduits : d'une part la reprise de 35 MM€ de dette de SNCF Réseau, soit 25 MM€ à la création de la SA en 2020 et 10MM€ en 2022, et l'augmentation du budget de renouvellement du réseau de 200 M€ par an sur la période 2022-2027, abondant ainsi le Contrat de Performance de 1 MM€. Sur ce point, la position de l'Etat est très en retrait des préconisations de l'audit de l'état du réseau, qui mettait en évidence un besoin de l'ordre de 500 M€ par an. Dans les conditions actuelles, la perennité du réseau structurant n'est toujours pas garantie (ne parlons même pas des lignes secondaires).

Et si on s'intéressait maintenant aux vrais sujets ?

Il reste une dernière étape parlementaire : la commission mixte paritaire afin de faire converger les deux versions du texte produits par chacune des assemblées.

Cette réforme ferroviaire passera sans aucun doute, et on peut prendre le temps de la réflexion. De l'avis de nombreux observateurs, l'Etat a eu une attitude floue, brouillonne, qui a fait perdre du temps. Pourquoi attendre aussi longtemps pour annoncer la reprise partielle de la dette et un effort - certes insuffisant - sur le renouvellement du réseau ? Pourquoi ce cafouillage sur l'incessibilité des titres des 3 SA du groupe ?

Sur le fond, le jugement peut être encore plus sévère : l'Etat donne la fâcheuse impression que la transformation des EPIC en SA et la fin du statut spécifique des cheminots sont l'alpha et l'oméga de la remise en ordre du système ferroviaire français. Cela donne une impression de déjà vu... pas si lointain. Nous écrivions sensiblement la même chose en 2014 à propos de la précédente réforme marquée par la disparition de RFF réintégrée dans le groupe SNCF.

La séquence ferroviaire du gouvernement a - une fois de plus - focalisé l'attention sur des détails (et le statut en est un). Reste toujours en suspens la question suivante : quelle politique des transports en France en général, ferroviaire en particulier ? Le chemin de fer peut - doit ! - être un des axes forts d'une politique nationale engagée dans la transition énergétique et valorisant l'ensemble des territoires, pas seulement les grandes métropoles, agissant pour procurer un maillage équitable du territoire. On cherche le positionnement du chemin de fer et on espère qu'il ne soit pas cantonné aux déplacements domicile-travail, dont on sait qu'ils sont minoritaires dans le volume total des déplacements, à la fois très consommateurs de moyens de production et faiblement générateurs de recettes (du fait des abonnements). Où est la stratégie d'intégration du transport ferroviaire dans l'économie des territoires ?

La rupture avec le malthusianisme ferroviaire ne pourra se limiter au seul plafonnement de la hausse des péages au niveau de l'inflation (laquelle ? au sens de l'INSEE ou celle du secteur ferroviaire trois à quatre fois plus élevée ?).

Où est la révolution numérique du système ferroviaire, en particulier ses applications pour le fret ? On sait que Fret SNCF n'est pas inactif quant aux recherches en ce domaine, qui pourrait profondément impacter l'organisation logistique et proposer une nouvelle relation entre un opérateur et ses clients.

La dimension européenne est également absente, alors que le chef de l'Etat essaie d'endosser le costume de rénovation de l'institution communautaire mal en point : ERTMS, dimension européenne du TGV du futur, maillage des territoires, développement d'un nouveau réseau Eurocity, maillage de proximité des bassins de vie transfrontaliers... En voici des sujets pour une Europe ferroviaire !

Alors qu'au sein même de l'entourage du chef de l'Etat, on considère - non sans raisons - que sa politique tire un peu trop à droite, une réussite dans le domaine ferroviaire aurait pu être considérée comme un signal de rééquilibrage. On l'attend...

15 février 2018

Lignes régionales : nouvelle mise à jour de notre dossier

Il tombe à point nommé... et à vrai dire on l'a fait exprès. Voici donc une nouvelle mouture de notre étude sur cette partie du réseau ferroviaire que nombre de têtes pensantes voudraient voir disparaître car coûtant trop cher pour un trafic trop faible et sans utilité face à la révolution des mobilités promises à coup d'Hyperloop et de véhicules autonomes. Dans la médecine ancienne, la saignée était la solution miracle des médecins... mais elle a fait plus de victimes que de miracles. Dans le domaine ferroviaire, c'est pareil. Ne nions pas que dans les 21 000 km de lignes d'intérêt général supprimées depuis 1930, nombre d'entre elles étaient justifiables. Mais on est allé trop loin par dogmatisme et il faudrait continuer ?

transportrail ne mange pas de ce pain là et considère que le train dispose encore de leviers de renaissance sur la majorité des petites lignes. Peut-on raisonnablement envisager de supprimer un tiers du réseau ferroviaire français quand on évoque la transition énergétique, l'arrimage des territoires de faible densité aux grands bassins urbains, une notion d'équité territoriale, plus lucide que l'égalité amenant à des impasses, des mensonges électoralistes et à des gabegies financières ?

Le chemin de fer a son avenir devant lui à condition qu'il ne lui tourne pas le dos et qu'il utilise les bons utils pour connaître l'usage, la vocation et l'avenir de chacune de ses sections.

La suite à lire dans ce grand dossier sérieusement mis à jour. Nul doute que les commentaires seront nombreux... et tant mieux !

Nous vous invitons également à lire l'enquête du site Reporterre sur les petites lignes, qui rejoint largement notre analyse.

 

13 septembre 2017

SPECIAL ASSISES DE LA MOBILITE

Les Assises de la Mobilité s'ouvrent le 19 septembre prochain et doivent aboutir en principe au printemps prochain avec l'adoption d'un paquet législatif :

  • réforme de la Loi d'Orientation sur les Transports Intérieurs
  • programmation financière avec une première déclinaison à 10 ans des investissements
  • ouverture à la concurrence du marché ferroviaire intérieur

Beaucoup d'espoirs donc, mais aussi de la prudence et même un peu de circonspection : l'aménagement du territoire reste le cadet des soucis des gouvernements depuis au moins 20 ans, la vision financière est étriquée, l'approche par le besoin généralement absente ou déformée et les discours regorgent d'une nov'langue faisant la part belle aux mobilités "innovantes" ou "intelligentes".

On peut même être très pessimiste, si on se souvient que la loi sur la Transition écologique adoptée par le précédent gouvernement ne disait pas un mot sur les transports en commun quels qu'ils soient. Bref, on peut avoir l'impression que cette nouvelle loi est surtout destinée à institutionnaliser une organisation des déplacements de personnes autour de l'automobile, notamment en institutionnalisant le covoiturage. On notera aussi qu'il n'est nullement question du transport de marchandises, qu'il s'agisse de logistique urbaine ou de flux de transit international.

Ces Assises doivent être l'occasion de remettre en scène les sujets ferroviaires. Il ne s'agit pas de faire de l'infrastructure pour elle-même, satisfaire les géants du BTP et certains élus qui pensent que couler du béton est le remède à tous les problèmes, sans se poser la question des besoins. Mais peut-on réellement imaginer conduire des Assises de la mobilité (bel oxymore au passage) sans évoquer les potentialités du mode ferroviaire, que manifestement certains cherchent à marginaliser, y compris parmi ceux qui devraient en être les premiers défenseurs ?

Dans notre série "qui ne tente rien n'a rien", différents dossiers à commencer par celui concernant les lignes régionales secondaires et différents enjeux de modernisation du réseau ferroviaire et du service aux voyageurs :

Naturellement, transportrail ne manquera pas de suivre l'actualité de ces assises, non sans espoir, mais aussi avec prudence et lucidité...

29 juin 2017

A45 - GPSO : une application concrète pour la transition énergétique !

Autoroute qui rit...

Vieux de 25 ans, le projet d'autoroute A45, doublant l'actuelle A47 entre Lyon et Saint Etienne, vient de franchir une étape supplémentaire avant sa réalisation avec l'avis favorable du Conseil d'Etat sur le contrat de concession attribué au groupe Vinci. Déclarée d'utilité publique en 2008, l'objectif est une mise en service en 2023. Le coût de cette autoroute atteint à ce jour 1,2 MM€ dont 790 M€ à la charge de l'Etat et des collectivités locales. La Région Auvergne Rhône-Alpes s'est engagée à hauteur de 131,6 M€.

Mais la réalisation de cette autoroute ne va faire que renforcer l'impact du trafic automobile sur la non-qualité de l'air dans les agglomérations lyonnaise et stéphanoise, conforter la primauté de la route sur les transports collectifs, tout en accroissant la saturation du réseau à l'entrée sud de Lyon puisque cette autoroute débouchera sur l'A7 à hauteur de Pierre-Bénite.

Si on prend un peu de hauteur, on remarquera quand même une accumulation de voies rapides sur un faisceau de 150 km avec les actuelles autoroutes A47 (Lyon - Saint Etienne) et A89 (Lyon - Bordeaux) puis la RN79 Mâcon - Moulins - Montluçon, maillon de la Route Centre Europe Atlantique reliant l'A6 à Nantes. Avec l'A45, il y aurait donc 4 voies rapides sur cette bande de 150 km. En a-t-on vraiment besoin ?

Oui, si on veut tuer le chemin de fer. Avec environ 100 000 véhicules par jour sur l'A47 et en intégrant l'effet d'induction généré par l'ouverture de l'A45, il suffirait qu'une voiture sur 10 ait un occupant de plus à son bord - application de la "mobilité intelligente" pour ne pas dire covoiturage déjà dépassé ou auto-stop franchement moyen-âgeux - pour récupérer les 18 000 voyageurs par jour des TER Lyon - Saint Etienne.

Assurément, la réalisation de l'A45 viendrait mettre à mal le discours sur la transition énergétique. Monsieur Hulot, vous avez ici un cas d'application de votre politique de transition énergétique. Soit l'A45 est abandonnée et on pourrait commencer à croire qu'il peut y avoir une rupture dans notre dépendance à l'automobile (mais il faudra aller au-delà des symboles), soit l'A45 est réalisée, dans la grande tradition qui veut qu'on n'arrête pas un mauvais projet, qu'importe la contradiction flagrante avec la COP21, objet de tant de fanfaronnades françaises.

790 M€, c'est à peu près l'estimation du coût de renouvellement de l'intégralité du réseau ferroviaire régional (les fameuses UIC 7 à 9) en Auvergne et Rhône-Alpes. A bon entendeur...

Chemin de fer qui pleure ?

A moins de 3 jours de l'ouverture des LGV Bretagne  Pays de la Loire et Sud Europe Atlantique, vient de tomber l'annulation, par le Tribunal Administratif de Bordeaux, de la DUP relative à une partie du projet GPSO, à savoir les aménagements prévus au sud de Bordeaux jusqu'à Saint Médard d'Eyrans (AFSB, Aménagements Ferroviaires Sud de Bordeaux). Pour mémoire, il s'agit d'une troisième voie permettant de dissocier les flux périurbains du courant rapide ayant vocation à emprunter la LGV étudiée vers Toulouse et Dax.

En visant AFSB, c'est bien évidemment GPSO qui est dans le collimateur, et c'est ce que recherchaient les opposants à GPSO à l'origine de ce recours.

Pour autant, il ne faudrait pas que les adversaires de GPSO ne s'emballent trop vite. La décision du Tribunal Administratif est d'abord fondée sur un bilan socio-économique jugé insuffisant et sur l'absence de clarification des modalités de financement. Bref, la jurisprudence Poitiers-Limoges semble avoir joué son effet, tout comme l'état réel du financement de SEA. La parution de l'audit des comptes publics par la Cour des Comptes, tirant le signal d'alarme sur la dérive considérable des finances publique, aurait-elle aussi joué dans la décision ?

En revanche, sur le fond, l'annulation de la DUP ne vaut pas validation de l'argument principal des opposants à la LGV qui voudrait qu'on puisse gagner quasiment autant de temps en améliorant la ligne existante. Cet argument a été clairement réfuté en son temps par RFF, qui avait pointé les faiblesses d'une contre-étude bien peu rigoureuse.

Cette annulation retarde un peu plus encore la perspective d'une amélioration de la desserte périurbaine de Bordeaux, pour proposer une alternative à la voiture... mais le veut-on réellement serait-on tenté de s'interroger ?

Bilan de la journée : feu vert pour une autoroute, feu rouge pour un projet ferroviaire. Elle est bien partie, la transition énergétique !

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