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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
cadencement
12 mars 2020

Il y a de la place sur nos LGV !

Voici un dossier de transportrail qui va probablement intéresser de futurs opérateurs ferroviaires qui envisageraient de se lancer dans une aventure à grande vitesse, si périlleuse soit-elle compte tenu de la mise de départ assez élevée.

En comparant le trafic sur les principales LGV françaises (LN1, LN2, LN3) sur leurs sections les plus chargées, il est de prime abord étonnant de constater une régression assez sensible, qui peut atteindre 20%, du nombre de circulations par rapport à l'année 2008 qui peut être considérée comme l'apogée du trafic. Pourtant, la SNCF met en avant l'essor de Ouigo et de bons chiffres de fréquentation. C'est vrai, mais il faut d'abord noter qu'une majorité des circulations low-cost n'ont pas été créées mais résultent de la transformation de circulations préexistantes.

En outre, la quasi-généralisation des rames à 2 niveaux a objectivement augmenté la capacité proposée à desserte équivalente et la SNCF en a profité pour ajuster à la baisse son offre, focalisée par le coefficient d'occupation de ses trains et surtout la marge par place-kilomètre offerte : conséquence, nombre de relations ont été passées au peigne fin. Ce fut notamment le cas sur l'axe Nord en décembre dernier, mais on sait que plusieurs relations ont été dégraissées : Paris - Annecy et Paris - Grenoble par exemple au sud-est. Sans compter les liaisons Intersecteurs, premières concernées par la conjonction du phénomène Ouigo et du malthusianisme de SNCF Voyageurs. C'est oublier un peu vite que ce qui intéresse d'abord le voyageur, après la vitesse et le prix, c'est la fréquence ! Mais faut-il rappeler les tensions à l'époque entre la SNCF d'un côté, feu-RFF et les Régions de l'autre à propos du cadencement ?

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Vellechevreux-et-Corbenans - 8 mars 2020 - Evidemment, illustrer ce dossier avec une vue de la LGV Rhin-Rhône revêt un aspect caricatural. C'est la moins fréquentée des lignes à grande vitesse et elle n'a pas échappé au mouvement de contraction de l'offre, essentiellement sur les liaisons Intersecteurs : il ne reste que 5 allers-retours Strasbourg - Lyon (et encore, une rotation a été ajoutée à l'horaire 2020 le matin su pression des élus locaux) soit un de moins qu'à l'époque des Corail... A noter sur ce cliché que la rame Réseau-Duplex 607 arbore la livrée Carmillon. Il y a encore 18 mois, il était prévu de réassocier les tronçons Duplex avec les motrices 4400 auxquels ils étaient associés à la sortie d'usine, et de réformer les motrices Réseau et les segments voyageurs formant les rames POS avec les motrices 4400. La SNCF a changé d'avis in extremis... © S. Meillasson

Certes, 7 allers-retours Paris - Annecy en TGV Sud-Est sont équivalents en capacité à 5 allers-retours en TGV Duplex... mais pour le voyageur, ce n'est pas vraiment la même chose. La comparaison sur cette période est donc d'autant plus intéressante que la séquence précédente, entre 1995 et 2008, avait plutôt été celle du développement de l'offre.

Résultat, il sera difficile de plaider la congestion - sinon la saturation - pour contrer les tentations de certains opérateurs européens de venir concurrencer l'opérateur historique français... qui ne se prive pas d'afficher ses intentions chez nos voisins, notamment en Espagne. On le sait, Trenitalia et la RENFE se préparent, le premier avec des ETR400, le second avec des S100, mais attention à ne pas avoir l'appétit plus gros que le ventre. (nos dossiers sur la grande vitesse en Espagne et en Italie). Ce sera aussi par les temps qui courent une bonne mise à l'épreuve du nouveau groupe SNCF sur la question de plus en plus sensible de l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure.

Bonne lecture du nouveau dossier de transportrail.

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11 mars 2020

Paris - Toulouse ou les méfaits du morcellement tarifaire

Le gruyère n’est pas une spécialité gastronomique toulousaine. En revanche, la relation Paris – Toulouse illustre de façon criante la politique commerciale de la SNCF et sa segmentation par l’horaire entre InOui et Ouigo.

Ainsi, à l’horaire 2020, on compte 6 allers-retours à grande vitesse entre Paris Montparnasse et Toulouse Matabiau, au demeurant assez mal cadencés :

  • Départs de Paris à 6h47, 8h52, 12h27, 14h04, 16h52 et 18h52
  • Départs de Toulouse à 6h47, 8h44, 11h54, 14h12, 17h50 et 18h47

Le temps de parcours oscille entre 4h06 et 4h48. Pas très lisible non plus.

Mais ce qui est encore plus révélateur, c’est la décomposition de l’offre puisque sur ces 6 allers-retours, 2 sont des Ouigo :

  • Au départ de Paris à 8h52 et 12h27
  • Au départ de Toulouse à 14h12 et 17h50

Résultat, il n’y a qu’un seul départ InOui de Paris en matinée, à 6h47. Pas de report possible avant 14h04. Au départ de Toulouse, un seul InOui en fin de journée à 18h47. Le précédent est à 11h54.

La fragmentation tarifaire par l’horaire amène donc à des creux d’offre de 7h17 dans le sens impair et de 5h56 dans le sens pair, qui sont évidemment inacceptables et concourent au passage à renchérir le prix du billet sur InOui, puisqu’il n’y a qu’une seule fréquence utilisable en pointe.

Dans une vision plus large, on peut supposer que l’élargissement de l’offre Paris – Toulouse, comptant 2 allers-retours Intercités de jour, 1 aller-retour de nuit et un Intercités Eco, pourrait être bousculée par l’arrivée de Flixtrain sur 2 allers-retours, également via Limoges, avec une concurrence directe non seulement sur les Intercités de la SNCF mais aussi sur les Ouigo.

Conclusion : si Toulouse a gagné un aller-retour et une heure de trajet avec SEA, en réalité, avec la logique de la SNCF, elle dispose de 5 types de service commercialement étanches comprenant respectivement 4 (InOui), 2 (Ouigo et Intercités de jour) et 1 aller-retour (Intercités Eco et Intercités de nuit). Dans ces conditions, le trafic aérien peut être relativement tranquille, même dans la perspective d'une LGV entre Bordeaux et Toulouse. Pour mémoire, Air France propose 22 allers-retours par jour entre Blagnac, Orly ou Roissy.

16 décembre 2019

Service annuel 2020 : l'Occitanie dynamise les dessertes régionales

11% d’offre supplémentaire soit 72 trains : cela fait bien longtemps qu’on n’avait pas vu pareille augmentation du service ferroviaire régional dans une Région. Elle concerne les grands axes électrifiés : POLT, la Transversale Sud, la ligne du piémont pyrénéen et l’arc languedocien.

Nous avions déjà présenté les évolutions sur l’arc languedocien et la transversale pyrénéenne : nous y revenons pour préciser certains points et les interactions avec les autres évolutions de desserte. L'ampleur de ces évolutions mérite bien que transportrail y consacre un nouvel dossier de nos Chroniques de l'horaire.

2 novembre 2019

Perpignan - Villefranche de Conflent : des trains en mars ?

Enfin. La justice a rendu à SNCF Réseau l'infrastructure entre Perpignan et Villefranche de Conflent, qui va maintenant pouvoir procéder aux travaux - conséquents - pour que les trains puissent à nouveau circuler. En deux ans, les installations se sont notoirement dégradées et la végétation a bien poussé comme nous le montrions récemment.

De son côté, la Région Occitanie a accordé 1 M€ pour procéder à quelques travaux de court terme sur la ligne. Elle souhaite une refonte de la desserte mais à court terme, il semble difficile de procéder à des évolutions significatives. Qui plus est, le schéma de desserte du territoire devrait être entièrement repensé, en faisant du train l'épine dorsale de l'offre dans la vallée du Têt, et en organisant les autocars en rabattement. D'ailleurs, le pôle d'échanges de Prades constitue un des maillons de cette stratégie.

Avec un temps de parcours potentiel de 48 à 51 minutes avec 8 arrêts intermédiaires, une seule rame pourrait assurer une trame de base cadencée aux 2 heures, avec une exploitation en navette. Cependant, le schéma préexistant s'approchait d'une fréquence horaire sur les heures de pointes et qu'il faut maintenir... voire même de généraliser car le trafic routier sur la RN116 est important : 10 000 au comptage de Ria, entre Villefranche de Conflent et Prades, près de 16 000 à celui de Bouleternère, à l'ouest d'Ile sur Têt et 22 000 à Saint Féliou.

Il faudrait alors 2 rames et un point de croisement... au bon endroit. A première vue, ce n'est pas le cas : celui d'Ile sur Têt comme celui de Prades, qui a été déposé, semblent tous les deux trop proches des terminus. Il faudrait aussi abandonner le cantonnement téléphonique assisté par ordinateur et signaliser la partie aval de la ligne, entre Perpignan et le point de croisement, le reste étant géré sous le régime de la navette.

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Au passage, si on examine le tracé, la section Perpignan - Prades, apte en principe à 100 km/h, pourrait admettre des vitesses plus élevées, mais le gain de temps serait relativement modeste compte tenu d'arrêts relativements rapprochés.

De la sorte, il serait possible d'améliorer significativement les correspondances avec le Train Jaune et de pouvoir organiser une complémentarité entre la ligne de la basse vallée et celle de la haute vallée, sachant que la cité de Villefranche de Conflent mérite aussi qu'on s'y arrête pour son patrimoine touristique... Bref, le train au service des territoires !

18 septembre 2019

Amiens - Compiègne : une autre transversale en Picardie

Si toutes les lignes de desserte fine du territoire étaient dans la situation d'Amiens - Compiègne, alors il y aurait bien moins de débats sur la pérennité du maillage ferroviaire. C'est la conséquence d'investissements soutenus de longue date par la Région Picardie, depuis une vingtaine d'années, modernisant la signalisation, renouvelant une partie de la voie, et d'un renforcement assez sensible de l'offre pour atteindre 12,5 allers-retours en semaine et 8 le week-end. Avec un peu plus de 2300 voyageurs par jour, il est difficile de mettre en cause l'utilité de la desserte ferroviaire.

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Moreuil - 21 juin 2019 - C'est l'un des trois évitements de la ligne, sur la section Boves - Estrées Saint Denis, qui devra faire l'objet de travaux de renouvellement d'ici 6 ans pour maintenir les performances très correctes de la relation Amiens - Compiègne. © transportrail

Amiens - Compiègne fait partie de ces transversales picardes, avec Amiens - Laon, déjà abordée par transportrail, et Creil - Beauvais (que nous allons prochainement mettre au programme de nos périples). Son rôle est bien plus local que la grande rocade, dont on ne cesse de rappeler le rôle potentiel pour le fret afin d'éviter la convergence de flux ne faisant qu'y transiter. Dans le cas présent, il s'agit d'abord de relier Compiègne à la principale ville de Picardie, et de desservir le petit chapelet de localités intermédiaires, dominé par Moreuil, Montdidier et Estrées Saint Denis.

L'histoire de cette ligne n'est pas totalement anodin puisqu'il fut un temps question, dans les années 1950, de l'électrifier, à l'époque où il fallait démultiplier les itinéraires ferroviaires pour l'expédition du charbon nordiste. Ce temps-là est bien révolu...

La suite est à découvrir dans le nouveau dossier de transportrail...

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18 juillet 2019

Fret, voyageurs, maintenance : une autre concurrence

La concurrence, ce n'est pas seulement entre opérateurs ferroviaires du fait de la libéralisation progressive, qui concernera dès l'année prochaine le trafic intérieur. Elle existe aussi depuis bien plus longtemps, et à vrai dire depuis l'origine du chemin de fer, entre les différents usages du réseau : entre les circulations et les travaux. C'est à ce sujet que s'intéresse transportrail, dans le sillage de notre étude sur les raisons de la diminution de la capacité du réseau.

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Donzère - 1er août 2018 - Des trains pas comme les autres... pour les propres besoins du réseau, mais une consommation de capacité de plus en plus importante et qui pourrait poser problème s'il fallait absorber les effets d'une politique plus restrictive à l'égard du transport routier et de l'avion, car le réseau souffre à la fois d'un retard de renouvellement encore important et d'un équipement faible pour concilier travaux et circulation, investissement et recettes... © transportrail

Le réseau ferroviaire français est confronté d'une part à la nécessité de mener rapidement d'importants chantiers de renouvellement et de modernisation pour rattraper le retard accumulé par des années de sous-investissement sur le réseau classique, et d'autre part à la convergence de mouvements qui pourraient donner lieu à une tension croissante sur son utilisation, qu'on peut résumer en 3 catégories :

  • les RER des grandes agglomérations,
  • les liaisons longue distance de voyageurs pour réduire la part du transport aérien sur les courtes et moyennes distances,
  • une relance du fret entre qualités intrinsèques du mode ferroviaire et contrainte accrue sur le transport routier.

Le président de SNCF Réseau, Patrick Jeantet, souhaite à juste titre qu'un plus grand nombre de trains circulent sur le réseau. Personne ne pourra lui donner tort sur ce point mais il va falloir bousculer les pratiques actuelles, notamment sur la maintenance, dont l'empreinte capacitaire est de plus en plus forte, ce qui laisse de moins en moins de place pour les circulations commerciales... d'autant plus qu'il est difficile de combiner les deux activités du fait du sous-équipement français en installations de contre-sens ou en banalisation des voies. Or de tels investissements ont du mal à être justifiés selon les méthodes actuelles... en dépit des pertes de recettes générées par des plages-travaux de plus en plus gourmandes.

Pour aller plus loin sur cette autre concurrence sur le réseau ferroviaire, lisez donc notre nouveau dossier...

10 juillet 2019

La citation de l'été

Merci à la FNAUT et à son éditorial du dernier numéro de son bulletin consacré au maillage du territoire par le réseau ferroviaire. Nous reproduisons l'intégralité de la citation d'un ancien président de la SNCF, resté malheureusement trop peu longtemps en poste, rattrapé par les affaires de son passé dans un grand groupe pétrolier national. Vous aurez reconnu évidemment Loïk Le Floch-Prigent.

« Le train est un outil essentiel et nous avons la chance d’avoir conservé un réseau très maillé. Il va falloir apprendre, non à vouloir fermer les lignes, mais à les valoriser en multipliant les cadences et en diminuant les prix pour les clients : c’est cela le monde moderne vers lequel nous allons, celui du développement durable. Dans l’avenir, c’est le train qui globalement sera le mode de transport le moins coûteux pour la collectivité : encore faut-il que celle-ci accepte d’investir comme l’ont fait nos voisins ».  

12 avril 2019

Grand Est : nouvelle desserte en Champagne-Ardenne

La Région Grand Est a décidé de toiletter les dessertes régionales sur l'étoile de Reims avec une augmentation globale de l'offre de 15%, principalement sur Reims - Châlons-en-Champagne et Reims - Charleville-Mézières. L'opération, présentée dans les comités régionaux des services de transport, est réalisée à moyens constants et à contribution régionale maintenue à l'identique. Dans cette opération, la Région fait aussi le ménage sur les arrêts les moins fréquentés avec le choix de reporter la desserte sur des services d'autocars : 9 gares perdent donc toute desserte par train, qui était de toute façon assez anecdotique jusqu'à présent.

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Reims - 26 mars 2016 - La gare de Reims verra son activité renforcée par la mise en oeuvre de ces nouvelles dessertes vers Epernay, Sedan et Chaumont. L'évolution du schéma de desserte doit aussi faciliter les connexions entre les principales villes de Champagne et des Ardennes, et de donner sens à la nouvelle collectivité Grand Est. © transportrail

C'est sur l'axe Reims - Charleville-Mézières que l'offre progressera la plus avec une augmentation de 27% avec la desserte systématique de la gare TGV rémoise. La ligne bénéficiera d'une cadence 30 minutes en pointe et à l'heure en journée avec alternance de trains à 2 ou 4 arrêts, avec une amorce systématique à la gare TGV rémoise.  Au-delà de Charleville-Mézières, un train sur deux sera prolongé à Sedan. En complément, la Région développera une liaison Charleville-Mézières - Luxembourg au moyen de 4 allers-retours vers Longwy assurant une correspondance en 10 minutes vers Luxembourg.

Sur l'axe Reims - Châlons-en-Champagne, la nouvelle offre sera cadencée à l'heure en journée et à la demi-heure en pointe, avec l'alternance de missions à un seul ou 4 arrêts avec 20,5 allers-retours par jour dont 9 seront prolongés à Saint Dizier. Parmi ceux-ci, 7 iront jusqu'à Chaumont, formant une longue diamétrale entre Reims et Chaumont, avec des correspondances possibles sur les trains de l'axe Vallée de la Marne et l'axe Paris - Mulhouse. En complément, 6 allers-retours d'autocars seront mis en oeuvre entre Saint-Dizier et Joinville, et 4 entre Joinville et Chaumont.

Entre Reims et Epernay, la Région a adopté le principe d'une desserte omnibus systématique cadencée à la demi-heure en pointe et à l'heure en journée, avec une grille rationalisée (-5% de trains-km). Les arrêts de Trois-Puits et Montbré sont supprimés. Des correspondances seront organisées à Maison-Blanche pour rejoindre la gare TGV Champagne-Ardenne.

Vers Fismes, le volume de desserte progresse légèrement avec 10,5 allers-retours positionnés toutes les 30 minutes dans le sens de la pointe et toutes les 4 heures en journée.

Vers Laon, la desserte conçue avec la Région Hauts de France demeure à 9 allers-retours par jour. Statu quo également sur Charleville-Mézières - Givet dans l'attente de la fin des travaux en 2021, qui procurera l'occasion de restructurer la desserte.

21 février 2019

TER : 200 000 voyageurs de plus en 2025, vraiment ?

Flash back. En 2008, la SNCF lançait un groupe de travail avec les Régions, baptisé TERx4, avec l'ambition de quadrupler la fréquentation des trains régionaux à horizon 2030. Sur la décennie 1998-2008, le trafic avait augmenté de 60% et la SNCF se fondait sur les perspectives de croissance économique et d'évolution des comportements pour lancer cette démarche. Quatre questions avaient été mises en exergue, sur l'augmentation de capacité du réseau, sa fiabilité, l'aménagement de ses gares et son financement. Si le trafic a augmenté depuis 2008, les prévisions de l'époque ne se sont pas réalisées.

Premiers effets pour le plan Cap TER 2020

Deux ans après le lancement de ce programme (un de plus...), articulé autour de la réduction des coûts de production, SNCF Mobilités met en avant une régularité à la hausse (autour de 92,2% en moyenne nationale), une baisse de 10% de la fraude et une trajectoire économique qui se rapproche progressivement de l'objectif. Un discours très synthétique, agrégeant des situations très variées : il n'est pas sûr que toutes les Régions se retrouvent dans ce portrait plutôt flatteur...

SNCF Mobilités affiche une nouvelle ambition, celle de transporter quotidiennement 200 000 voyageurs de plus qu'aujourd'hui à l'horizon 2025. Manifestement, l'ouverture à la concurrence du transport régional d'une part et le positionnement de plus en plus affirmé de la majorité des Régions d'autre part incite la SNCF à muscler son discours pour se présenter sous un jour un peu plus favorable vis à vis des autorités organisatrices. Mais il faut partir de loin...

La négociation des nouvelles conventions d'exploitation se poursuit. Après être parvenue à un compromis avec la Région PACA, c'est avec la Nouvelle Aquitaine que la SNCF s'est engagée sur une trajectoire de réduction assez sensible des coûts, le montant de la subvention annuelle devant passer de 300 à 264 M€ au cours de son exercice, tandis que la qualité de la production devra suivre, elle, une pente ascendante : 95% de régularité à 5 minutes en 2024, une réduction d'un tiers des suppressions de trains, alors que la Région prévoit d'augmenter la desserte d'environ de 5 à 8% sur les différents axes régionaux. SNCF Mobilités s'engage également à un accroissement de recettes de 24% alors que la Région a décidé la stabilité des tarifs sur la durée de la convention. Autant dire qu'il va falloir remplir les trains, surtout en heures creuses et le week-end.

La nouvelle stratégie repose en outre sur une nouvelle étape de décentralisation avec la création de 44 directions de ligne, soit un maillage plus fin que les 11 directions TER existantes, et qui auront le contrôle de l'ensemble du processus de production de l'offre sur leur territoire.

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Cenon - 4 octobre 2018 - Le périurbain est assurément un des principaux gisements de trafic. Encore faut-il que l'offre suive, et surtout que les tarifications soient coordonnées pour intégrer le train dans la palette des offres. © transportrail

Pour capter de nouveaux clients, il faut commencer par ne pas les considérer par principe comme des fraudeurs !

SNCF Mobilités essaie au travers de cette démarche de tempérer les critiques sur la fermeture de gares et de guichets mais aussi sur la suppression du tarif de bord pour l'achat de billets dans le train, considérant le voyageur en situation de fraude même quand le point d'arrêt ne dispose d'aucun dispositif de vente de titres de transport. Cette mesure assurément scandaleuse va complètement à l'encontre de la stratégie de conquête de nouveaux clients. Si le voyageur ne peut pas acheter son billet en gare avant de monter dans le train, ce n'est pas de sa faute : c'est au transporteur de lui mettre à disposition les moyens de l'obtenir, soit en gare, soit à bord du train. A moins que SNCF Mobilités n'envisage de supprimer les points d'arrêt dépourvus de dispositif de vente ?

SNCF Mobilités s'appuie évidemment sur l'usage du smartphone et annonce une plus grande polyvalence des agents : 50% du personnel devra être habilité à vendre des billets contre 20% actuellement, et plus uniquement dans les gares. SNCF Mobilités propose de développer des boutiques mobiles - il en existe 15 actuellement - et d'amplifier le mouvement de dépositaires - comme sur les réseaux urbains - pour assurer la vente de billets régionaux dans les commerces pour rapprocher le service de la population. Il en existe actuellement 140 dans toute la France.  Il est aussi prévu d'expérimenter des espaces de service par visioconférence. Enfin, les Centres régionaux de relations avec les clients vont évoluer pour assurer également de la vente de titres de transport par téléphone avec acheminement du courrier par voie postale. Des idées intéressantes... mais vous êtes priés de ne pas être pressé de prendre le train...

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Aspres sur Buech - 28 septembre 2018 - Pour atteindre les objectifs d'augmentation du trafic, il va falloir cesser la tendance malthusienne consistant à élaguer l'offre surtout en journée et le week-end, alors que ces créneaux horaires sont potentiellement très porteurs du fait de l'évolution des rapports au temps de la population. Illustration type avec la ligne des Alpes pour laquelle le devenir est encore loin d'être assurée... © transportrail

Il y a donc quelques idées qui méritent d'être miss en oeuvre, mais elles sont à la marge des sujets les plus élémentaires : ce n'est pas en attendant 3 jours son billet expédié par courrier qu'on pourra faciliter l'usage du train, surtout si on culpabilise en parallèle le voyageur qui - pour diverses raisons parfaitement valables - a un besoin d'immédiateté dans son déplacement. Le considérer par principe comme un fraudeur en puissance est tout simplement honteux !

A ce jour, les Régions Occitanie et Auvergne Rhône-Alpes ont rejeté cette méthode de SNCF Mobilités, imposant la vente à bord des trains au tarif normal pour les voyageurs montant dans des gares ne disposant d'aucun moyen de vente. En Bourgogne Franche-Comté, la Région semble faire machine arrière, demandant in fine à SNCF Mobilités de revenir à une vente à bord : quoi de plus logique quand près de 40% des points d'arrêt sont dépourvus de tout système de vente.

Des fondamentaux à ne pas perdre de vue

En matière d'offre, SNCF Mobilités réitère son schéma comprenant 3 niveaux de dessertes pour le périurbain (Citi), les liaisons intervilles (Chrono) et la desserte des territoires ruraux (Proxi). Sur ce point, au-delà des appellations, les véritables attentes portent d'abord sur la consistance de l'offre : pour que de nouveaux voyageurs viennent au train, il faudra arrêter de considérer qu'en dehors des heures de pointe et des abonnés (à faible contribution aux coûts d'exploitation), il n'y a pas de marché pour le transport ferroviaire régional. La conquête de nouveaux voyageurs suppose donc un véritable effort sur la fréquence et sur l'amplitude. Mais si en parallèle, on les culpabilise en les considérant comme des fraudeurs, il est inutile de vouloir renforcer les dessertes !

Pour l'instant, Occitanie et Auvergne Rhône-Alpes ont refusé

Voilà qui rappelera aussi à certains, non sans malice, les fortes réserves sinon les franches réticences de SNCF Mobilités sur le cadencement, alors porté par les Régions et RFF. Sa position reste relativement confuse car dans les faits, les offres sont encore souvent panachées et peu répétitives. La refonte des offres autour de ces trois segments fera-t-elle redécouvrir les bienfaits d'une offre structurée et lisible, tant pour l'exploitant que le client actuel (et surtout futur ?)

Evidemment, la qualité du service devra encore progresser : la régularité d'abord, mais aussi la conformité du service et le confort. Difficile d'attirer des clients quand la composition du train n'est pas conforme, imposant à des centaines de voyageurs un trajet debout, entassé, comme c'est encore trop souvent le cas.

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Lyon Jean Macé - 15 juin 2018 - Le développement des RER dans les grandes métropoles est un des puissants leviers thériques d'augmentation du trafic mais la capacité du réseau en heures de pointe est insuffisante pour que les services soient à la hauteur des besoins : dans un premier temps, il sera cependant possible d'activer les sillons en journée et le week-end. © transportrail

Enfin, l'attractivité du train passera par sa meilleure intégration dans un cycle de déplacement pouvant intégrer d'autres modes de transport (du vélo à la voiture en passant par l'autocar ou le réseau urbain), avec donc un enjeu d'intégration tarifaire et d'aménagement des pôles d'échanges...

Autant dire que SNCF Mobilités a du pain sur la planche pour concrétiser l'objectif annoncé et largement repris par la presse, d'autant qu'il n'est franchement pas impossible qu'il y ait, en 2025, d'autres opérateurs sur le réseau ferroviaire français, notamment dans le domaine du transport régional, pour venir dynamiser l'utilisation du réseau ferroviaire...

14 décembre 2018

Le ferroviaire - vraiment - autrement ?

Titre à peine évocateur pour ce colloque organisé à Bordeaux le 28 novembre dernier par la Région Nouvelle Aquitaine et Mobilettre : derrière « Le ferroviaire autrement », beaucoup pouvaient comprendre « Le ferroviaire sans la SNCF ». Avaient-ils raison ?

Un peu plus de 250 participants ont assisté dans l’hémicycle du conseil régional à des débats intéressants, parfois animés, mais surtout animés d’un soutien affirmé au chemin de fer. Un sujet évidemment en écho avec une actualité remettant sur le devant de la scène des questions d’aménagement du territoire et de dépendance à l’automobile…

Large consensus politique sur le rôle structurant du chemin de fer, pour la transition écologique des mobilités, de l'aménagement du territoire et de la qualité de vie de la population, dans un contexte de frugalité budgétaire... mais il ne fut étonnemment guère question de l'impasse du Contrat de Performance liant l'Etat et SNCF Réseau. Dans ces conditions, la posture de la SNCF (et en particulier de SNCF Réseau), a pu apparaître très prudente, voire conservatrice. Mais pour autant, tous les acteurs du système ferroviaire, et en particulier les Régions, sont-ils prêts à s'engager sur le chemin de la rupture : ouverture à la concurrence pour l'exploitation des TER, voire transfert de propriété de certaines lignes à vocation locale...

La suite dans ce dossier spécial de transportrail.

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