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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
crise sanitaire
30 septembre 2020

Allemagne : les opérateurs privés protestent à leur façon

Oubliés par le gouvernement dans la prise en charge des conséquences de la crise sanitaire, les opérateurs privés de fret, qui assurent plus de la moitié des tonnages transportés par le rail en Allemagne, ont décidé de se faire entendre d'une façon pour le moins particulière... et très ferroviaire. Ils ont formé un train de 20 locomotives, portant chacune leurs couleurs, totalisant 1800 tonnes et développant une puissance totale de 100 000 kW, pour lui faire traverser toute la capitale sur l'axe Est-Ouest et une partie de la ligne de ceinture en klaxonnant de façon continue de façon à se faire entendre ! Railcolornews vous en dit plus...

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29 septembre 2020

Plan de relance : c'est clairement confus !

Près d'un mois après son annonce en fanfare, le plan de relance est-il en train de retomber comme le soufflé préparé par Gaston Lagaffe pour remonter le moral de Bertrand Labévue ?

C'est toujours la confusion quant au fléchage des 4,7 MM€ destinés au transport ferroviaire : aucune communication gouvernementale claire n'est exprimée pour clarifier les montants alloués. Il est toujours question d'un dosage entre l'amélioration du réseau structurant, notamment pour le fret, les lignes de desserte fine du territoire, les évolutions législatives ou encore plus simplement le traitement des compensations liées au confinement du printemps qui pèsent toujours sur les comptes des sociétés du groupe SNCF.

En outre, l'actualisation du contrat Etat - SNCF Réseau, avec la question fondamentale de la dotation pour le renouvellement du réseau (précisons qu'il s'agit du réseau structurant seulement), reste dans le flou le plus complet.

Il faut aussi ajouter que la FNAUT pointe aussi la faiblesse des moyens alloués aux transports urbains - 1 MM€ - et la consommation des deux tiers de cette enveloppe par l'Ile de France. En comparaison, près de 2 MM€ sont accordés au soutien de la filière des voitures électriques. Et on attend toujours les mesures de compensation du déficit engendré par le confinement pour les réseaux hors Ile de France !

Sur le volet ferroviaire, accorder - après plusieurs mois de suppliques - 4,7 MM€ au secteur ferroviaire mais en entretenant le flou sur sa destination est à mettre en regard de la rapidité avec laquelle plus de 7 MM€ ont été accordés à Air France, sans nier la nécessité d'une mesure de soutien. Mais encore une fois : deux poids, deux mesures.

4 septembre 2020

Plan de relance : 4,7 MM€ saupoudrés pour le ferroviaire

L'Etat fait lui aussi sa rentrée et manifestement, plusieurs ministres avaient des devoirs de vavances assez consistants...

C'est dans les vieux pots...

Néanmoins, « plan de relance », ça ne fait pas très « nouveau monde » puisque le premier du genre remonte à 1975 sous l'égide de Jacques Chirac.

Rappelons d'abord l'objectif de ce plan : donner un coup de fouet à l'économie dans la période 2020-2023 et amorcer - du moins est-ce la parole gouvernementale - une réorientation de l'activité vers des solutions agissant sur la réduction de l'empreinte environnementale. Le transport ferroviaire n'est pas oublié, mais ce chapitre du plan ne sera pas suffisant : il doit être complété et prolongé dans la durée par la finalisation du nouveau contrat Etat - SNCF Réseau (nous n'appelons plus l'actuel « contrat de performance » tant le terme est usurpé) pour l'entretien, le renouvellement et le développement du réseau. C'est plutôt à sa lecture qu'on pourra vraiment mesurer la réalité de l'effort de l'Etat.

Au total, les transports bénéficieront de 11 MM€ et le secteur ferroviaire devrait percevoir 4,7 MM€ étalés sur la période 2020-2023. Essayons de décomposer en fonction de ce qu'on a pu en comprendre... pour l'instant, sachant que les derniers calages sont prévus d'ici une dizaine de jours :

  • un volet lié aux pertes de recettes liées au confinement, avec notamment l'enjeu de préserver la trajectoire de renouvellement du réseau, en compensant les non-recettes de péage et l'absence à venir de dividendes reversés par l'opérateur, mais aussi la prise en charge de la sortie du glyphosate et le transfert à SNCF Réseau de la charge de certains ouvrages d'art (effet de la peu connue loi Didier). D'autres programmes nationaux pourraient être confortés (l'accessibilité par exemple ?). A lui seul, cet ensemble pèserait 1,5 MM€ ;
  • le fret devrait être concerné, et l'Etat avait déjà annoncé un montant de l'ordre du milliard d'euros : reste à en déterminer le fléchage précis entre l'aide aux opérateurs, la ristourne sur les péages et les investissements sur le réseau ;
  • les lignes de desserte fine du territoire, avec un effort très attendu de l'Etat, dont les participations dans les CPER sont généralement en retard, la concrétisation des protocoles Etat-Région suite aux travaux du préfet François Philizot et le devenir de la participation de SNCF Réseau à ces opérations. L'Etat apporterait directement 300 M€ supplémentaires et 300 M€ affectés à cet usage à SNCF Réseau ;
  • une relance des trains de nuit avec a priori une centaine de millions d'euros, qui pourrait inclure des investissements sur l'infrastructure, mais qui d'abord laisse penser à des opérations de court terme sur le matériel roulant. L'Etat laisse entrevoir la relance de 4 liaisons - Nice et Tarbes (manifestement sans extension à Hendaye ?) d'abord, Saint Gervais et Bourg Saint Maurice à plus long terme - mais sans clarification à ce stade du financement de ces dessertes. Ce matin sur RTL, M. Farandou a confirmé les liaisons vers Nice et Tarbes, en indiquant des discussions avec les ÖBB pour le matériel roulant. Une centaine de millions d'euros serait affectée à ce chapitre.

Il faut aussi ajouter 673 M€ pour les transports franciliens, en assurant les concours de l'Etat sur la modernisation du RER B, du RER D, le prolongement du RER E, de T1 et de T3

Pour terminer sur le ferroviaire, 30 M€ de crédits pour des études sur les Services Express Métropolitains (appellation officielle des RER des grandes métropoles) sont programmés par l'Etat.

Néanmoins, le compte ne semble pas bon et le groupe SNCF n'est pas forcément rassuré sur l'engagement de l'Etat à compenser intégralement les pertes liées à la crise sanitaire. Les alternatives sont donc soit une recapitalisation soit des cessions d'actifs, ce qui semble l'hypothèse privilégiée par l'Etat. Reste à savoir lesquels... Quant à la trajectoire de renouvellement et de modernisation du réseau, il y a encore beaucoup à faire et on pourrait considérer que le compte y serait avec un relèvement de la dotation de 2,7 MM€ (situation 2020 initiale, en recul de 300 M€ par rapport à ce qui était initialement prévu dans le contrat Etat - SNCF Réseau) à au moins 4 voire 4,5 MM€ selon la dose de développement d'une part et l'engagement de l'Etat sur les lignes de desserte fine du territoire d'autre part. Voeu assurément pieu !

Enfin, notons que le volet consacré aux transports urbains prévoit 100 M€ de plus dans l'appel à projets en cours (portant sur 400 M€) sur la période du plan en faveur des projets de TCSP, tandis que le vélo va bénéficier d'un sérieux coup d'accélérateur avec une dotation de 200 M€.

C'est donc encore un peu flou... mais on sent que le plan recourt à l'expédient habituel du saupoudrage en urgence. Pour la remise en ordre et les nouvelles perspectives, il va falloir attendre : serait-ce la tâche du nouveau Haut-Commissaire au Plan (diantre : la Quatrième République est de retour ?)

Nous reviendrons sur ces orientations dès qu'on y verra plus clair !

26 août 2020

Thalys - Eurostar : une fusion relancée ?

Brexit + covid-19 : ça commence à faire beaucoup

La question était apparue en fin d'année 2019, et semblait faire partie des mesures de consolidation face au risque d'une baisse du trafic sur Eurostar du fait du Brexit, tant dans le principe d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union Européenne que du fait d'un flou certain des conditions de circulations des individus. Une chose était d'ores et déjà certaine, la circulation des 15 allers-retours Eurostar entre Paris et Londres et des 7 allers-retours Bruxelles - Londres risquait d'être sérieusement mise à mal.

La crise sanitaire en a évidemment ajouté une couche au point que le trafic a été pendant le confinement quasiment totalement interrompu. La reprise a été progressive mais un nouveau coup d'arrêt a été donné : si les négociations sur un nouveau cadre relationnel entre l'Europe et le Royaume-Uni sont à l'arrêt, c'est cette fois-ci la tendance moins favorable de la gestion du covid-19 qui plombe à nouveau le service international : le Royaume-Uni ayant décidé 14 jours de confinement pour les ressortissants français à leur arrivée au Royaume-Uni, la desserte chute à 4 allers-retours Paris - Londres et 2 allers-retours Bruxelles - Londres.

Dans ces conditions, la situation d'Eurostar devient inextricable : gérer un Brexit intrinsèquement restrictif pour le transport de voyageurs entre le Royaume-Uni et le continent n'était déjà pas une mince affaire, mais l'incertitude liée à l'évolution de la pandémie de chaque côté de la Manche est en train de se hisser au même niveau de complexité. Certes, il ne s'agit que d'une restriction en principe conjoncturelle (ce satané virus va quand même bien finir par nous ficher la paix... mais quand ?) qui néanmoins est en train de mettre sérieusement à mal la soutenabilité économique d'Eurostar, déjà malmenée par les restrictions politiques liées au Brexit.

Si Eurostar devrait finalrment lancer la liaison directe Londres - Amsterdam (cette fois sans transbordement à Bruxelles pour contrôle douanier dans le sens Amsterdam - Londres) le 26 octobre prochain, la compagnie a d'ores et déjà annoncé que les circulations d'hiver Londres - Bourg Saint Maurice n'auront pas lieu cet hiver, tandis que la liaison vers Marseille ne sera pas rétablie.

Pour couronner le tout, le patron d'Eurostar a quitté le navire et vient de se faire embaucher par la DB pour prendre les commandes d'Arriva, qui finalement reste dans le giron du groupe public allemand.

La situation est pour l'instant un peu moins difficile du côté de Thalys dont le service n'est cependant pas totalement rétabli : à partir du 30 août, 11 allers-retours Paris - Bruxelles seront assurés dont 7 prolongés à Amsterdam et 3 vers Cologne et Dortmund, soit environ 60% de l'offre sur le tronc commun Paris - Bruxelles. En revanche, les liaisons vers Marne la Vallée, Bordeaux et Marseille ne sont pas rétablies.

Et si on ajoute l'évolution des pratiques professionnelles...

Dans ces conditions, la fusion envisagée depuis 2 ans prend une autre dimension. Les contraintes de circulation des personnes entre les pays de l'Union Européenne et le Royaume-Uni affectent par principe ce qui peut être considéré comme un succès technique et commercial, qui a simplifié les relations entre Londres, Paris, Bruxelles à la base.

Les incertitudes quant à l'issue d'un accord entre l'UE et le Royaume-Uni, mais aussi les bouleversements dans la circulation des individus avec la crise sanitaire affectent tout particulièrement Thalys et Eurostar, dont la clientèle d'affaires était particulièrement importante : l'essor accéléré du télétravail et des visioconférences depuis le printemps n'est pas non plus sans impact sur ce type de relations.

Par conséquent, la fusion de Thalys et d'Eurostar pourrait prendre forme dans les mois à venir car leur positionnement commercial est très similaire. Ce serait peut-être le moyen de préparer une reprise des liaisons avec le Royaume-Uni à un rythme un peu plus normal, en espérant que les crispations actuelles cesseront (mais ça fait plusieurs mois qu'on attend cette éclaircie en vain). En outre, cela simplifierait la commercialisation de certaines offres, ne serait-ce que parce qu'un trajet Amsterdam - Londres s'effectue en réalité par la combinaison d'un parcours Amsterdam - Bruxelles en Thalys puis d'un Eurostar Bruxelles - Londres. Ce serait aussi le moyen de consolider les positions de ces deux entreprises et d'envisager un développement européen, dans un contexte plutôt favorable au train.

Enfin, ce serait peut-être aussi le moyen d'utiliser un peu plus efficacement les Velaro d'Eurostar qui sont pour bonne partie cloués au dépôt et qui risquent d'être en sur-effectif compte tenu des nouvelles conditions de circulations entre l'Union Européenne et le Royaume-Uni : leur importante capacité pourrait par exemple être mise à profit sur certains Paris - Bruxelles... si le retour à une fréquentation telle qu'elle était jusqu'en mars revenait dans les prochains mois.

23 juillet 2020

Etat - SNCF : premières pistes post-covid

Est-ce l'effet du remaniement ou la surdité sélective qui connaît une accalmie ? L'Etat commence à avancer ses pistes pour soutenir la SNCF, mais continue d'entretenir une certaine confusion.

Pour ce qui est des conséquences du confinement sanitaire sur les pertes de trafic, l'Etat envisage deux solutions qui pourraient être combinées : la recapitalisation de l'entreprise et la reprise de la dette au-delà des 35 MM€ déjà prévus.

Dans leurs déclarations aux médias, la ministre de la Transition énergétique et le ministré délégué aux Transports assortissent cette compensation à des objectifs sur le renouvellement, la fiabilisation et l'augmentation de la performance du réseau. Attention à ne pas mélanger les sujets !

Ces trois points n'ont rien à voir avec les pertes de recettes, estimées autour de 5 MM€, de la SNCF, mais dépendent essentiellement des investissements et donc de l'ambition de l'Etat en la matière, ce qui renvoie à la nouvelle contractualisation, en particulier Etat - SNCF Réseau, le fameux Contrat de (non-)Performance.

Un autre sujet récurrent est en train de sérieusement s'inviter aux débats : le niveau des péages. L'Etat ne dotant pas suffisamment SNCF Réseau pour financer le renouvellement, c'est par une fraction des redevances d'utilisation du réseau que provient le complément. Or la tendance est plutôt à la hausse et dans des proportions jugées trop élevées par les opérateurs et les Régions, qui rappellent que leurs dépenses sont plafonnées par le même ministère des Finances. Une révision de la tarification, pour être plus incitative sur le transport de voyageurs, notamment en heures creuses et le week-end, mais aussi pour le fret (afin d'amorcer une dose de politique de volume) suppose que l'Etat compense par le contrat avec SNCF Réseau de sorte à maintenir la dotation d'investissement. Or celle-ci est fixée à 2,77 MM€ en 2020 (contre 3 MM€ initialement prévus suite au coup de rabot de l'année 2019) et, selon nos estimations, il faudrait qu'elle soit purement et simplement doublée pour être conforme aux déclarations du Président de la République et du gouvernement, que ce soit sur le fret, le réseau structurant et les petites lignes. Une chose est à peu près certaine : le ferroviaire n'obtiendra pas 5 MM€ par an pour le renouvellement de l'infrastructure...

Dernier point, le gouvernement semble esquisser le retour de certains trains de nuit en 2022. On commence à entendre parler du Paris - Nice, voire de liaisons Paris - Savoie. Reste à savoir avec quel matériel car les radiations et démolitions sont allés bon train depuis l'arrêt de ces relations.

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17 juillet 2020

En même temps ou la gestion d'accomoder le mensonge ?

Mardi, au cours de son entretien à la télévision, le 14 juillet, le Président de la République a parlé - furtivement - d'écologie à 14h14, après 54 minutes de questions-réponses, et s'est soudainement mis à évoquer le sujet ferroviaire, avec le fret, les trains de nuit et les petites lignes à 14h23. Des paroles : « on va les sauver ! ».  Le lendemain, le nouveau Premier Ministre était évasif dans son discours de politique générale, évoquant simplement « les transports » dans les 20 MM€ du volet énergétique envisagé dans le plan de relance de l'économie. Cependant, en grattant à peine, on avait bien compris qu'il s'agissait surtout de la voiture électrique dont il était question.

Sans vraiment de surprise, étant donné que l'inflexion stratégique du nouveau gouvernement est des plus minimes, le lien entre transition énergétique, aménagement du territoire et transports publics, avec comme épine dorsale le réseau ferroviaire, n'arrive pas à imprimer dans le logiciel politique. Le nouveau monde ressemble bel et bien à l'ancien.

Le « en même temps » ne cesse de se décliner à toutes les sauces : de la même façon que, dans le domaine hospitalier, les accords intervenus cette semaine laissent bien des questions en suspens, comme par exemple l'absence de remise en question des plans de fermeture d'hôpitaux, de services d'urgence ou de réduction de capacité, dans le domaine ferroviaire, c'est un peu pareil : il y a les paroles, mais du côté des actes, c'est à peu près tout le contraire.

Seuls les naïfs pouvaient attendre quelque chose : après tout, l'actuel locataire de l'Elysée a commis les Services Routiers Librement Organisés en tant que Ministre de l'Economie et a oeuvré, tant comme conseiller à l'Elysée que comme membre du gouvernement, à l'actuelle situation, notamment les arbitrages financiers sur le Contrat de (non-)performance du réseau.

Les multiples annonces en faveur du fret ferroviaire restent pour l'instant des paroles en l'air : la démarche des opérateurs avec 4F vient jeter les bases d'un projet dans lequel les responsabilités de chacun sont identifiés. Mais quelle sera la concrétisation de la communication du gouvernement et du chef de l'Etat ? Pour l'instant, l'horizon est bouché.

Les incantations sur les trains de nuit ne valent guère mieux : l'essorage de la desserte a été accompagné d'un pseudo-appel à manifestation d'intéret qui été pipé d'avance, ce que les opérateurs privés avaient dénoncé. Qui plus est, sur ce seul sujet, les questions sont nombreuses : quel plan d'investissement sur le matériel roulant ? quel modèle économique, c'est-à-dire avec ou sans subvention partielle d'une autorité organisatrice qui devrait être l'Etat ? quel impact sur la gestion du réseau à l'heure où les plages travaux sont de plus en plus longues, surtout la nuit, et en simultané sur les 2 voies de surcroît, pour essayer de faire des travaux le moins mal possible avec le peu de moyens et des règles parfois kafkaïennes imposées par un contrat à logique financière et non économique (ce qui revient à préconiser des solutions qui rentrent dans le cycle des annuités budgétaires quitte à être in fine plus coûteuses) ?

Sur les lignes de desserte fine du territoire, tout a été dit et écrit ou presque depuis 15 ans, depuis l'audit de l'EPFL. La mission du préfet Philizot, omniprésent sur les questions ferroviaires, n'en finit pas d'être prolongée de façon évanescente. Le rapport au Parlement qu'il a produit reste un secret d'Etat digne du code de sûreté nucléaire de l'URSS au temps de Brejnev et les gouvernements Philippe - et semble-t-il déjà - Castex n'ont nulle envie de soumettre son contenu à la représentation nationale, ce qui était pourtant initialement prévu. Mais, comme le rappelle régulièrement la FNAUT, on attend aussi le rapport du gouvernement sur le schéma national des services de voyageurs, qui aurait dû être présenté en fin d'année 2014 !

Sur ces lignes, l'Etat joue les arlésiennes sur le financement : les Régions soulignent régulièrement qu'elles se retrouvent à faire l'avance de l'Etat pour faire avancer les projets inscrits dans les CPER, objet dévoyé de sa vocation initiale en matière de transport et qui se retrouve désormais outil principal de financement de ces lignes, en faisant supporter au moins les deux tiers de l'investissement aux Régions.

L'Etat avance l'hypothèse de transfert de la gestion de certaines lignes aux Régions qui en feraient la demande... mais il va falloir là aussi envisager le volet financier de ce qu'il faut bien considérer comme un transfert de compétence.

Toujours sur le financement, le gouvernement Castex a annoncé une réduction significative des impôts dits de production, dont la Contribution à la Valeur Ajoutée des Entreprise, qui constitue l'une des dernières ressources dynamique des Régions, de moins en moins indépendantes fiscalement et de plus en plus reléguées à la situation des Etablissements Publics Régionaux d'avant 1982. Pour qui veut faire de la décentralisation et du respect des collectivités locales sa marque de fabrique, cela commence bien... Et que le gouvernement rejette en bloc tous les amendements proposés par les Régions dans le 3ème projet de loi de finance rectificative n'augure rien de bon sur la confiance entre l'Etat et les Régions.

Mieux, la compensation des conséquences du confinement sanitaire imposé par l'Etat est en train de prendre des chemins des plus mesquins... et probablement contraire à la constitution puisque le gouvernement envisage de n'indemniser que les agglomérations où les transports sont gérés par un syndicat mixte dédié. Résultat, exit de nombreuses villes... mais aussi exit les Régions ! Débrouillez-vous. Mais que les syndicats mixtes se rassurent : il est loin d'être avéré que l'Etat compense à l'euro près les pertes, le fameux « quoi qu'il en coûte » du Président de la République. A moins que cette phrase ne veuille dire « peu importe qu'on supprime des services à la population » ? L'ambiguïté permet d'éviter l'accusation de mensonge...

Il reste maintenant moins de 600 jours au Président de la République pour se « réinventer ». La tâche est d'autant plus complexe que depuis mars, les inflexions sont faibles... si tant est qu'elles aillent dans le bon sens !

Il est évident que la situation actuelle est inédite, largement imprévisible et remet en question bien des schémas préétablis. Il ne s'agit pas de dépenser aveuglément, mais de mettre de la rationalité dans les décisions et surtout de la cohérence : c'est, il est vrai, beaucoup demander.

Pour conclure sur le seul domaine ferroviaire, les besoins sont de natures diverses :

Du fonctionnement d'abord

La compensation à l'euro près des pertes de recettes de l'ensemble des autorités organisatrices de transport et des activités commerciales de la SNCF (entreprise publique en SA) liées au confinement et à la moindre fréquentation : définir la date de référence est facile... mais la date de fin l'est moins ? 11 mai ?

De la fiscalité ensuite

Comme le réclame la FNAUT depuis 7 ans, et comme l'Allemagne l'a décidé, la TVA à 5,5% sur tous les transports en commun de voyageurs, y compris les billets longue distance de la SNCF, serait un signal incitatif favorable. Dans une logique d'équité environnementale, le manque à gagner pourrait être compensé par un point de TVA supplémentaire sur d'autres domaines à plus fort impact écologique.

Il faudra aussi, dans le cadre d'un vrai plan de décentralisation, repenser la gestion des ressources des collectivités locales : elles sont bien plus en capacité de gérer au plus près des territoires et des besoins les services à la population et aux entreprises qu'un Etat un peu trop orienté par un tableau Excel de synthèse.

De l'investissement enfin

Dans le domaine ferroviaire, un véritable Contrat de Modernisation et de Performance économique et sociale du réseau, réévalué à l'aune de l'audit de l'EPFL et des évolutions de périmètre à prendre en charge : une quinzaine de lignes pourraient être à nouveau éligibles à une prise en charge à 100% par l'Etat (un des résultats de la mission Philizot), s'ajoutant aux précédentes décisions (des ponts-routes au glyphosate), qui devrait porter la dotation annuelle de renouvellement de 2,77 MM€ (en 2020, contre 3 MM€ initialement prévus en 2017) à au moins 4 MM€ pour le réseau principal. Pour les lignes de desserte fine du territoire, le besoin est évalué à 750 M€ par an. L'Etat, redevenu propriétaire du réseau, devrait en assumer une part au moins majoritaire, soit un budget annuel d'environ 350 à 400 M€.

Et à cette enveloppe de renouvellement, il faudrait ajouter la part relative à la modernisation et au développement : l'augmentation de la capacité du réseau, que ce soit pour les besoins du fret ou des RER métropolitains, la réalisation de certaines infrastructures nouvelles, en lien notamment avec des enjeux de report modal à vocation environnementale. Un nouveau Conseil d'Orientation des Infrastructures devrait être prochainement instauré, en lien avec l'hypothèse d'un retour du Commissariat Général au Plan (créé en 1946 et disparu en 2006) : assurément, la réalisation de la LGV Bordeaux - Toulouse, des sections francilienne et rouennaise de LNPN, une première partie de LNMP et de LNPCA devraient légitimement être confortés.

Au total, il faudrait probablement que l'Etat consente à consacrer annuellement au moins 5 MM€ au système ferroviaire s'il voulait véritablement marquer une rupture. Sans compter un engagement financier consistant aux côtés des collectivités locales pour développer, en ville, BHNS, tramways et métros... dont on peut considérer qu'il devrait osciller entre 700 M€ et 1 MM€ pour commencer à avoir un effet réel.

Et qui d'autre que le Premier Ministre a déclaré que « dépenser pour transformer, c'est préparer l'avenir » ?

15 juin 2020

Le train à la reconquête des clients

Pas facile de faire revenir les voyageurs dans les trains. Le confinement les a logiquement vidés, mais c'est aussi face à une inquiétude, une peur, une panique qu'il faut lutter. L'analyse a posteriori des origines de la crise sanitaire semble pour l'instant démontrer que les transports en commun n'ont pas été un lieu de contamination (même avant le confinement). Les mesures prises par les exploitants pour renforcer le nettoyage des véhicules et des espaces de ces réseaux réduisent encore un peu plus ce risque qui était faible.

Pourtant, la reprise du trafic est lente. Certes, une partie des salariés continue le télétravail. Les établissements scolaires sont encore ouverts avec parcimonie et les vacances d'été approchent de toute façon. Les étudiants, qui eux n'ont pas repris le chemin des amphithéâtres, comptent parmi les absents. Sur les liaisons longue distance, le retour des voyageurs est beaucoup plus lent qu'il ne le fut après la grève de l'hiver passé. D'où la persistance des inquiétudes. Pas facile d'aller à rebours d'une situation anxiogène et d'un climat de suspicion généralisée. Bilan, c'est le transport individuel qui sort gagnant. A commencer évidemment par la voiture.

La SNCF a déjà pris une première mesure commerciale avec 3 millions de billets sur les TGV et les TET à un prix maximum de 49 € pour essayer de faire décoller les réservations et obtenir un taux de remplissage des trains correct. Néanmoins, elle a dû procéder à quelques suppressions de trains et il faut espérer que les clients reviennent au train pour limiter ces corrections commerciales.

Les Régions et la SNCF lancent également 4 mesures inédites pour inciter les français à utiliser les trains régionaux cet été :

  • 2 millions de billets à moins de 10 € ;
  • un pass pour les jeunes valable sur tous les trains régionaux ;
  • l'extension de la validité des abonnements TER à l'ensemble du territoire (sauf Ile de France évidemment) ;
  • une communication renforcée sur l'articulation train régional - tourisme - patrimoine avec notamment cette carte interactive

Alors, on serait tenté de lancer un slogan :

« Pour vos vacances d’été, les petites lignes vous choisirez ! »

Il faut donc espérer que les trains se remplissent cet été pour limiter autant que possibles les dégâts économiques et financiers. Les mesures annoncées sur le transport régional et le tourisme vont plutôt dans le bon sens et il est presque dommage qu'il ait fallu attendre un tel événement pour valoriser le train dans ce pays qui reste la première destination touristique mondiale et qui peut être le vecteur commun à bien des formes de découverte des territoires. Ne manquerait plus guère qu'une rubrique à TF1 13 heures « Nos petites lignes ont du talent ». Nos dossiers sur le lien entre train et tourisme et sur les lignes régionales sont déjà là pour vous donner des idées si vous en manquez !

Ah si quand même : il faudrait qu'il y ait des trains en nombre suffisant (donc généralement plus nombreux, pour atteindre a minima sur toutes les lignes une cadence aux 2 heures tous les jours de la semaine) sur des infrastructures dans un état correct... ce qui nous ramène à la question pour l'instant sans réponse d'une prise en charge par l'Etat des conséquences économiques et financières du confinement sanitaire sur la situation financière non seulement des opérateurs du groupe SNCF, mais aussi des autres opérateurs (voyageurs et fret), et du gestionnaire d'infrastructures. La perte pour le groupe SNCF est estimée à 4 MM€ dont 800 M€ pour SNCF Réseau entre la réduction du nombre de circulations et les impacts sur les chantiers.

Un sujet de plus pour l'Etat, qui doit aussi réviser le Contrat de (non-)performance Etat - SNCF Réseau avec la question ô combien central de l'engagement de l'Etat sur le niveau d'ambition pour le transport ferroviaire, non seulement pour moderniser les grands axes, mais aussi sur un sujet qui sera central dans l'année à venir avec la perspective des élections régionales : les lignes de desserte fine du territoire. Et pour l'instant, toujours pas de fumée blanche !

5 juin 2020

Le modèle économique du rail français en question

Allô Papa Tango Charly...

Les conséquences de la crise sanitaire sur l'économie des transports ont de quoi inquiéter mais il semblerait que la tutelle regarde ailleurs. La rapidité avec laquelle l'Etat est venu au chevet d'Air France et maintenant de Renault dont il est actionnaire minoritaire, tranche avec ce qui ressemble de plus en plus à une stratégie de l'esquive à l'encontre des entreprises de transport dont il est l'actionnaire unique - la SNCF et la RATP - ou des services hospitaliers pour lesquels il semble comme d'habitude urgent d'attendre.

Chez nos voisins européens, l'Allemagne va aider la DB, qui a fait remonter une perte de 11 à 13,5 MM€ sur l'année et que l'Etat prendrait en charge à 6,7 MM€ : le reste sera couvert par un relèvement du plafond d'endettement qui passera de 25 à 30 MM€ et le groupe ferroviaire s'engage sur une trajectoire de productivité accrue pour résorber l'endettement de l'ordre de 5 MM€. Les opérateurs privés de fret se font entendre pour éviter une distorsion de concurrence.

En Italie, le gouvernement va compenser à hauteur de 115 M€ le manque de recettes de péages de RFI, et lui accorde 155 M€ d'aide qui se traduiront par des remises pour le fret et les activités voyageurs non subventionnées. En outre, il versera 70 M€ en 2020 et 80 M€ de 2021 à 2034 à ces opérateurs aux risques et périls pour compenser les effets économiques directement imputables à la crise sanitaire. Le transport régional disposera d'une enveloppe de 500 M€ cette année pour amortir les conséquences de la chute du trafic. Au Royaume-Uni, les franchises ont été mises en suspens et l'Etat assume le risque commercial à leur place, du fait des mesures de restrictions du trafic imposées par lui-même.

En France, pour l'instant, rien de tout cela et pourtant, pour paraphraser Raymond Barre, il serait particulièrement urgent de mettre un frein à l'immobilisme ! La FNAUT a adressé un courrier au Président de la République, comme le GART, signe que le dialogue avec le Ministère des Transports et avec Matignon semble difficile sinon bloqué.. et que la présidentialisation du régime se poursuit (pour ceux qui ne l'aurait pas remarqué).

La FNAUT demande :

  • le retour de la TVA à 5,5% et de l'appliquer désormais aussi aux liaisons ferroviaires longue distance, dans le cadre d'un rééquilibrage de la fiscalité des modes de transport selon leur empreinte environnementale, avec la réduction des aides au transport aérien (500 M€ par an selon une étude de la FNAUT)
  • de veiller à l'indépendance de SNCF Réseau vis à vis des opérateurs SNCF afin d'assurer une équité de traitement avec les autres entreprises ;
  • d'adapter le niveau des péages aux capacités des opérateurs ;
  • d'accélérer l'ouverture à la concurrence sur le marché intérieur (sur les liaisons longue distance relevant de sa compétence) ;
  • de revoir la politique d'investissements sur les modes routiers (329 km d'autoroute en construction) et aériens (extension de certains aéroports).

De son côté le GART, met en avant les conséquences budgétaires du confinement imposé par l'Etat sur l'économie des transports publics (voir notre article à transporturbain).

La maison SNCF tient... mais jusqu'à quand ?

Auditionné à l'Assemblée Nationale le 20 mai dernier, le président du groupe SNCF, Jean-Pierre Farandou, a exposé les risques à court terme pour l'entreprise ferroviaire... mais il faudrait parler des entreprises car la situation est assez différente entre la partie Opérateur et la partie Infrastructure. Le président de SNCF Réseau a été auditionné le 3 juin dernier.

La fin des mesures de distanciation, plafonnant le nombre de places vendues dans les trains, a été levée le 2 juin, ce qui a permis à SNCF Voyageurs de rétablir la pleine capacité, accompagnée d'une offre promotionnelle avec 3 millions de billets à 49 € maximum. Mais il faudra analyser le comportement de la population et le rythme de retour au niveau de trafic antérieur... avec de notables interrogations sur les enseignements de la période de confinement et notamment le volume de déplacements d'affaires.

Cette inconnue est de taille car elle concerne au premier chef les TGV. Quel sera aussi l'impact d'un accroissement du télétravail sur les déplacements domicile-travail ? Quel sera le rôle du train dans l'économie des loisirs alors que le gouvernement multiplie les incitations au tourisme estival en France ? Face à ces questions, il apparaît assez nettement que les débats sur le rééquilibrage de l'usage de la voiture et de l'avion sont très liés à l'évolution économique de la demande ferroviaire. En ce sens, l'intégration du levier de transition écologique, notamment par la modération du rôle de l'avion sur certaines liaisons intérieures, serait plutôt de nature à conforter l'économie du ferroviaire.

A propos de l'ouverture à la concurrence, une interrogation a été soulevée sur la pérennité de la logique de financement des Trains d'Equilibre du Territoire par le biais de la Taxe de Solidarité sur les Territoires prélevée sur les activités commerciales de la SNCF c'est à dire essentiellement les liaisons TGV. De façon à peine voilée, c'est un appel de l'opérateur à l'Etat avec à la clé la possibilité de réduire l'offre faute de mesure adaptée. Posture un peu plus complexe pour SNCF Réseau, qui peut voir dans l'ouverture du marché une source de circulations supplémentaires (donc de recettes)... mais qui ne peut pas être trop mise en avant au risque de froisser l'approche du groupe...

Ces questions sur l'évolution du trafic rebondissent tout naturellement sur SNCF Réseau via les péages, et les dividendes versés par le groupe. Les pertes pourraient atteindre 800 M€ selon M. Lallemand. Elles sont d'autant plus préoccupantes que de nombreuses voix convergent pour réaffirmer le rôle du transport ferroviaire et ses atouts dans l'objectif de décarbonation des transports. Or les moyens dévolus à SNCF Réseau ne lui permettent que de stabiliser l'âge des infrastructures, pas de le réduire (toujours les conclusions de l'audit de l'EPFL). Il manque toujours au moins 500 M€ par an pour les besoins du seul réseau structurant. Les évolutions législatives récentes ont néanmoins chargé la barque. La sortie du glyphosate est un noble objectif, mais les solutions alternatives, générant environ 400 M€ par an de dépenses supplémentaires, ne sont pas financées, pas plus que la maintenance des ponts-routes de certaines communes, qui pourrait représenter plus de 100 M€ par an également. Or en 2019, la dotation pour 2020 a décroché par rapport à la trajectoire définie par le législateur qui prévoyait d'atteindre 3 MM€ sur le renouvellement du réseau. Il manque environ 200 M€ par construction budgétaire, qui s'ajoutent évidemment aux centaines de millions ci-dessus. Le besoin minimal serait de 3,5 MM€ (encore l'audit EPFL) et on serait tenté de considérer qu'avec les mesures connexes, ce sont bien 4 MM€ par an qu'il faudrait accorder à SNCF Réseau pour assurer la mission de renouvellement... sans parler des effet de la crise sanitaire sur le coût des travaux (mesures spécifiques, impact des déprogrammations et chute de l'activité).

Néanmoins, M. Lallemand lui aussi a appelé de ses voeux une position forte du transport ferroviaire dans un plan de relance (dont on dit qu'il pourrait émerger en septembre) au regard de ses atouts économiques, écologiques et territoriaux. Le fret devrait y jouer un rôle important... si l'Etat met en oeuvre les moyens d'amélioration du réseau ferroviaire et un soutien de cette activité, y compris par des mesures de rééquilibrage intermodal. Les sénateurs ont d'ailleurs largement souligné le déficit d'interconnexion entre le réseau ferroviaire, la voie maritime et le réseau fluvial en France.

Il n'en reste pas moins que la position de M. Lallemand sur certains points a été jugé évasive par les sénateurs sur des points concernant directement SNCF Réseau. Ce fut le cas sur l'indépendance du gestionnaire au sein du groupe : il s'est retranché derrière l'Autorité de Régulation des Transports, mais les sénateurs attendent une posture pro-active et pugnace de SNCF Réseau. Il leur faudra attendre. Même chose sur la position de SNCF Réseau sur les travaux du secteur Paris Nord : M. Lallemand exécute le contrat sur CDG Express. La Région Ile de France appréciera certainement... modérément.

M. Lallemand met en avant l'accélération de la centralisation de la commande du réseau (les CCR), dont le rythme actuel est tributaire d'une logique financière fondée sur les échéances de renouvellement naturel des installations existantes... qui semble évoluer en fonction des moyens octroyés plus que de la réalité technique. Il promeut également une réduction importante - il serait question d'une première tranche de 3000 - du nombre d'appareils de voie mais qui suppose une analyse de l'utilité réelle des aiguillages, et de la prise en compte des effets sur les installations de signalisation et des postes d'aiguillages, ce qui n'est pas vraiment dans la logique actuelle du Contrat Etat - SNCF Réseau (ne l'appelons plus contrat de performance...). Son appel à une logique économique est en revanche assez logique, soutenant une dimension pluri-annuelle qui faciliterait la réalisation d'investissements dont les effets se font sentir dans un second temps pour réduire dans la durée du coût de possession du réseau. Mais dans le même temps, il n'a pas caché une forme de perplexité sur les projets d'équipement ERTMS sur certaines lignes.

L'audition de MM. Farandou et Lallemand semble avoir plongé certains parlementaires dans un abyme de perplexité : il y a encore besoin de clarifier les ambitions, la stratégie et les moyens, et cela n'était manifestement pas adressé qu'aux dirigeants de la SNCF !

12 mai 2020

Allemagne : l'Etat recapitaliserait la DB

Pour rebondir et une nouvelle fois constaté la différence de considération de l'Etat envers le système ferroviaire : alors que, ce matin sur France Inter, le Secrétaire d'Etat aux Transports développait toute une série de circonvolutions pour esquiver la discussion sur les compensations liées aux mesures de confinement et à l'organisation du déconfinement progressif, le gouvernement fédéral allemand serait prêt à prendre en charge 80% des pertes causées par la crise sanitaire, évaluées entre 11 et 13 MM€ par la DB. Une aide estimée entre 7 et 8,5 MM€ pourrait lui être octroyée dont la moitié probablement avant l'été, le temps d'actualiser les chiffres selon les résultats des premières semaines de déconfinement, organisé au niveau régional. Une recapitalisation partielle du groupe serait aussi à l'étude ainsi qu'un relèvement de son plafond d'endettement. Ces mesures restent à affiner avant d'être présentées au Parlement allemand puis à la Commission Européenne.

Quant à Lufthansa, un plan de soutien est également en cours de négociation et pourrait porter jusqu'à 9 MM€ : l'hypothèse d'une montée de l'Etat au capital de la compagnie aérienne n'est pas écartée.

11 mai 2020

De l'(in)équité de mesures gouvernementales insensées

Décidément, le transport aérien a vraiment les faveurs du gouvernement : à croire que le confinement suscite une appétence particulièrement prononcée pour le kérosène. Ainsi, après avoir accordé plus de 7 MM€ d'aide à Air France pour compenser le manque de recettes ; après avoir évoqué une restriction des dessertes pour des parcours pouvant être effectués en train en 2h30 maximum (ce qui ne concerne de fait que très marginalement les liaisons aériennes en France) ; voici donc la petite dernière du Secrétaire d'Etat aux Transports.

Si les transports urbains et ferroviaires se voient imposer le port du masque et une distance d'un mètre entre les voyageurs, divisant par 2 à 4 la capacité d'accueil des véhicules, le transport aérien en sera exonéré ! Ainsi, les voyageurs dans les autobus, tramways, métro et trains doivent être répartis à raison d'un voyageur par mètre carré... mais dans un avion, ils peuvent continuer à s'entasser à tout juste 50 centimètres les uns des autres ! Pour les opérateurs, hormis des incitations multiples et variées, le contrôle strict de la distanciation sociale est un voeu pieu !

Les compagnies aériennes ont expliqué qu'elles ne pouvaient pas s'en sortir avec des avions remplis aux 2/3 de leur capacité. C'est probablement exact vu leur modèle économique. Mais on objectera que :

  • plafonner le remplissage des trains à 50 % ne permet certainement pas aux liaisons non subventionnées d'atteindre l'équilibre commercial ;
  • cette même règle appliquée aux trains régionaux augmente le déficit d'exploitation par voyageur-kilomètre, alors que les Régions vont devoir faire face non seulement à la baisse des recettes commerciales mais aussi de leurs ressources du fait de la récession économique (les Régions perçoivent une fraction de la TVA et des taxes sur les produits pétroliers), avec des dépenses en hausse (par exemple pour l'achat de masques et l'installation de mesures de protection du personnel relevant de leur compétence ou l'effet du maintien d'une offre très supérieure au trafic réel) ;
  • dans le domaine des transports urbains, outre l'augmentation du déficit par voyageur-kilomètre, la baisse des recettes des voyageurs et des recettes fiscales dynamiques, il faudra aussi compter sur l'effet de l'effondrement du Versement Transport.

Bref, les transports terrestres, urbains et interurbains, sont face à une situation similaire. Elle est beaucoup plus grave que la crise du transport aérien, car avec l'effet cumulé du décrochage du printemps 2020 et les conséquences économiques sur les ressources des collectivités, c'est tout le modèle de financement du transport public qui pourrait être remis en cause. Il faudra donc que l'Etat prenne rapidement toutes ses responsabilités pour aider massivement et durablement les collectivités autorités organisatrices, mais aussi les opérateurs à surmonter les effets des mesures de confinement qu'il a décretées. Faute de quoi, le transport public, urbain et interurbain, pourrait connaître une période passablement troublée.

Un soutien massif aux investissements sera en outre justifié tant pour des questions territoriales, qu'économiques et sociétales :

  • territoriales : les transports en commun ne concernent pas seulement les besoins entre et au sein des grandes métropoles mais revêtent aussi un enjeu d'équilibre entre les bassins urbains et les secteurs ruraux ;
  • économiques : moderniser le réseau ferroviaire, le développer sur les besoins pertinents, poursuivre l'essor des transports urbains, c'est aussi faire appel à des entreprises souvent françaises ou européennes, avec des activités souvent locales, donc soutenir l'activité industrielle des territoires ;
  • sociétales : développer le transport ferroviaire et les réseaux urbains constitue un axe majeur d'une véritable politique de transition énergétique.

Le transport public a donc urgemment besoin de bons lobbyistes... ou de personnalités politiques plus responsables... voire les deux !

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