Digne - Saint-Auban : faut-il vraiment innover ?
Abandonnée depuis septembre 1989, l'antenne Digne - Saint-Auban a régulièrement fait l'objet de débats dans l'éventualité de sa remise en service, jusqu'à présent sans succès. La préfecture des Alpes-de-Haute-Provence présente une particularité proche de celle de l'Ardèche, celle d'être à l'écart du réseau ferroviaire national. Il y a bien la ligne des Chemins de fer de Provence, du moins en théorie, car cette dernière est interrompue depuis plusieurs années suite à un accident de chantier dans un tunnel. Si les trains en provenance de Nice devraient être retour dans quelques mois, Digne n'est plus reliée autrement que par autocars à l'axe Marseille - Briançon.
Jusqu'à présent, l'espoir d'une remise en service a été douché d'une part par le coût d'investissement pour procéder à une quasi-reconstruction (puisque, hormis l'emprise, tout est à refaire), et les conditions de sécurité au voisinage de l'usine Arkéma de Saint-Auban, classée Seveso... également bordée Marseille - Briançon, la gare étant en lisière du site industriel.
Digne - Saint-Auban est alors devenue un terrain de prédilection pour envisager quantité de scénarios alternatifs fondés sur des modes de transport à l'état de recherche, avec le label « mode innovant ». L'un des concepts en cours d'élaboration par SNCF Innovation & Recherche, Draisy, a été retenu pour prolonger les études. Il s'agirait d'un véhicule d'une trentaine de places assises, fonctionant sur batteries ou avec une pile à combustible alimentée en hydrogène. Conçu dans un objectif de grande légèreté, un tel module nécessiterait une infrastructure de haute qualité pour assurer sa stabilité, un niveau de confort correct pour les voyageurs et en évitant d'exporter sur sa structure les irrégularités de la voie : un sujet déjà connu avec un véhicule pourtant plus lourd et très peu tolérant aux infrastructures moyennes, le tram-train.
Cependant, il y a de quoi être interrogatif sur cette perspective, dont le coût est pour l'instant inconnu, mais il semble assez peu probable qu'une exploitation légère puisse minorer significativement le montant d'investissement pour remettre en état l'infrastructure.
La solution esquissée à ce stade constituerait un troisième système, incompatible avec les Chemins de fer de Provence à voie métrique mais aussi avec le réseau ferré national puisque, trop léger, le module Draisy ne pourrait cohabiter avec les circulations ferroviaires classiques. Conséquence, à ce stade, il ne serait envisagé que de travailler sur la section de Digne à Malijai, sans viser la correspondance à Saint-Auban... donc pour une utilité voisine du néant.
Sur le plan technique, comme celui de l'utilité pour la collectivité, seules deux solutions de service ferroviaire peuvent être envisagés :
- remettre en service l'antenne à voie normale, soit pour assurer de simples navettes Saint-Auban - Digne, soit pour développer une offre directe depuis Marseille ou Aix-en-Provence : on en profitera pour souligner s'il en était besoin l'intérêt de restaurer une desserte voyageurs sur Cavaillon - Pertuis pour proposer une desserte Avignon - Vallée de la Durance qui serait probablement intéressante, évitant le détour par Marseille ;
- transformer la ligne pour la voie métrique avec intégration aux CP, pour une navette Saint Auban - Digne (puisqu'il faut rebrousser pour continuer vers Nice)... à condition que la Région accepte de récupérer l'infrastructure et l'intègre dans sa structure comme le reste des CP.
Enfin, tant que n'aura pas été négocié avec les autorités de sécurité et l'usine un protocole définissant les conditions permettant le passage des trains à travers le périmètre Seveso (ce qui était le cas jusqu'à la fermeture), toute hypothèse sera vaine, car le coût de protection de l'emprise ferroviaire sera rédhibitoire... En attendant, voiture pour le plus grand nombre, autocar en guise de transport collectif...
Digne - 1er juillet 1983 - Correspondance quai à quai entre l'autorail SY des CP Nice - Digne et la RGP1 à destination de Genève par la ligne des Alpes. Sans aller jusqu'à une telle hypothèse, la restauration d'une connexion entre Digne et l'axe Marseille - Briançon améliorerait singulièrement l'accessibilité à un territoire à l'écart des autres villes régionales, desservie uniquement par des autocars. (archives SNCF)