SNCF Voyageurs : des avis de marché étonnants
En un mois environ, entre mi-décembre et mi-janvier, SNCF Voyageurs a fait paraître au Journal Officiel de l’Union Européenne 2 avis de marché pour l’acquisitions de nouvelles rames destinées au transport régional.
Le premier porte sur 150 rames destinées aux « dessertes métropolitaines », aptes au moins à 160 km/h (une option à 200 km/h est demandée), au moins bicourant (une option 15 kV pour la Suisse est demandée) avec 3 versions de longueur (83, 110, 140 m) et une capacité de 400 places minimum sur la version 110 m en configuration régionale. Une version périurbaine est également en option.
Le second porte sur 180 rames destinées aux « dessertes des territoires » dont 30 en version électrique + hydrogène et 150 en version électrique + batteries. Ces rames devraient proposer au moins 120 places sur une longueur maximale de 59 m, avec une aptitude à 160 km/h en traction électrique classique et 140 km/h en autonomie, en visant 600 km pour la version H² et 100 km pour la version avec batteries.
Ces consultations peuvent surprendre pour au moins 3 raisons.
Le matériel roulant est une prérogative régionale et les autorités organisatrices renforcent leur organisation, en récupérant la propriété pleine et entière du parc qu'elles ont financé, voire en créant des : dans le cas présent, l’opérateur agit sans mandat des autorités organisatrices, manifestement dans la perspective d’appel d’offres pour l’exploitation de lignes incluant la fourniture du matériel roulant. Pourtant, dans la plupart des cas, le parc – existant puisque neuf ou récent – sera mis à disposition de l’opérateur retenu. Quelle serait donc la portée réelle de ces marchés ?
La consultation pour les rames « dessertes métropolitaines » s'inscrit dans le sillage de l'actuel Régio2N en cherchant manifestement un matériel capable à la fois d'assurer des dessertes intervilles (avec l'option à 200 km/h pertinente dans certains cas) ou des RER (pour l'option d'aménagement périurbain). Certes, ce matériel n'est pas sans défauts (notamment une motorisation faible et une alimentation sous 1500 V pénalisée par la présence d'un seul pantographe sur les rames longues), mais un nouveau matériel supposerait des frais d'ingénierie élevés pour un marché correspondant à moins d'un tiers du parc Régio2N actuellement en circulation ou commandé ?
La consultation pour les rames « desserte des territoires » mise sur une capacité intermédiaire entre l’X73500 (80 places) et l’AGC (160 places), voisine de celle des EAD disparus (X4300-4500-4630-4750), et sur un matériel de longueur voisine de celle d'un AGC 3 caisses. Elle semble faire abstraction du marché existant du Régiolis, certes passé entre les mains de CAF et plus capacitaire que la cible énoncée. Elle peut être également observée à l'aune de la vaste communication des travaux de la branche Innovation du groupe SNCF, sur son concept « Train Léger Innovant » largement présent dans les congrès, salons, médias et réseaux sociaux. Faut-il comprendre que l'exploitant affiche - discrètement - une prise de distance par rapport à ce concept ?