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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
autocars
13 octobre 2017

Autocars : oui mais les gares routières ?

Quelle surprise ! Le développement des Services Librement Organisés - appellation officielle des "cars Macron" - se heurte à l'insuffisance des conditions d'accueil des voyageurs. Ensemble, Ouibus, Isines et Flixbus déplorent l'indigence des gares routières... quand elles existent. Plusieurs reportages dans les journaux télévisés ont pointé cette situation, avec des voyageurs patientant sous de simples abribus de faible capacité, sur le trottoir, ou allant même occuper le hall de bâtiments administratifs (une clinique à Nantes par exemple). D'une seule voix, ces transporteurs demandent aux collectivités locales de financer l'aménagement de gares routières confortables avec salle d'attentes, services (toilettes, restauration) et des installations commodes pour la gestion des véhicules et le repos des conducteurs.

Il est vrai que les collectivités, Régions, Départements, Agglomérations et Métropoles, ont financé et financent encore des pôles d'échanges pour faciliter les correspondances entre train, autocars départementaux et transports urbains. Mais l'accès à ces équipements est souvent interdit aux SLO puisqu'ils sont réservés et dimensionnés pour les besoins des services publics réguliers et conventionnés de transports de voyageurs.

Les compagnies "SLO" trouvent donc normal de les solliciter pour aménager des gares répondant à leurs besoins. Or c'est un peu vite oublier ce que signifie "Service Librement Organisé", en d'autres termes un service aux risques et périls des transporteurs : on se croirait revenu dans l'entre-deux guerres quand des autocaristes locaux ou de grandes entreprises nationales organisaient une concurrence sauvage avec le train, faisant partir leurs services à la même heure ou juste avant pour capter le trafic des compagnies ferroviaires...

En conséquence, il ne serait pas illégitime de considérer que la construction et l'aménagement de ces gares routières pour SLO soient financés par ces compagnies et non par la collectivité. Compte tenu de leur situation économique, de la concurrence entre les trois opérateurs (sans compter les services internationaux comme Eurolines) et de la versatilité du marché, ce n'est probablement pas pour demain...

 

 

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8 septembre 2017

Ouibus : un essor à quel prix ?

Avec tout de même 130 M€ de pertes accumulées en 5 ans, dont 45 pour la seule année 2016, les résultats de Ouibus continuent de poser question, même si l'Autorité de la Concurrence n'a pas donné suite à la requête formulée par Transdev.

Ouibus détient environ 30% du marché des cars Macron (officiellement appelés Services Librement Organisés), devant Transdev (20%) mais assez nettement distancé par Flixbus qui truste la moitié des voyageurs. Mais le leader du marché indique n'avoir perdu que 3 à 4 M€ en 2016, soit 12 à 15 fois moins que la filiale de la SNCF. Ouibus annonce que son objectif est d'atteindre l'équilibre en 2019, mais tous les ans, celui-ci recule d'un an.

Ouibus semble confronté à un effet de ciseau assez problématique : des coûts de production plus élevés que ses concurrents (qui recourent massivement à la sous-traitance auprès d'autocaristes indépendants) et des tarifs au global inférieurs à ceux de la concurrence. Déjà, Ouibus a décidé d'externaliser au maximum son activité. En outre, l'offre ne se démarque pas assez entre les trois opérateurs qui misent tous sur le wifi à bord (même si, de l'aveu même des usagers, celui-ci fonctionnement assez moyennement), sur les sièges inclinables (ce qui existe aussi dans le train) et sur une politique de bas prix.

Mais Ouibus se distingue aussi par un taux d'occupation de ses autocars moindre que ceux de la concurrence, car l'entreprise a fait le choix de véhicules de grande capacité, souvent des autocars de 15 m à 3 essieux, alors que Transdev se contente d'autocars de capacité classique sur Isilines. De son côté, Flixbus, avec sa position de leader du marché, peut se permettre d'utiliser des véhicules de grande capacité, y compris des 15 m / 2 étages offrant près de 70 places, en les concentrant sur des axes à forte chalandise. L'usage de ces autocars n'est pas neutre car les péages sont plus élevés sur les autoroutes que les véhicules classiques de 12,80 m à 2 essieux.

En moyenne, le taux de remplissage des autocars n'est que de 36% selon l'ARAFER. C'est peu, traduisant surtout un remplissage faible en semaine et plus élevé le week-end. Personne ne semble s'en offusquer. C'est étonnant ? Dans le langage des communicants, c'est normal, car c'est un marché en croissance. En revanche, dans le train, ce n'est pas normal et il faut supprimer ces lignes : deux poids, deux mesures. Mais on ne s'interroge jamais - ou si peu - sur l'adéquation du service à la demande.

L'autre difficulté de Ouibus, c'est le positionnement par rapport aux offres ferroviaires. L'essor de l'autocar vise d'abord le marché du covoiturage, mais impacte aussi le marché du train : ces offres concurrencent directement les politiques de petits prix développées pour éviter la baisse du taux de remplissage des TGV. La concurrence est également vive face aux Intercités et à une partie de l'offre TER (sur des relations Intervilles comme Lyon - Grenoble par exemple), où le train est plus à la peine, surtout sur des axes fragiles (Nantes - Bordeaux) ou carrément abandonné (Lyon - Bordeaux). Au total, on compte 318 liaisons Ouibus contre 457 Isilines et 721 Flixbus.

Point le plus obscur pour Ouibus : d'où provient l'argent qui permet de recapitaliser l'entreprise et de gérer la dette accumulée en 5 ans ? C'est un mystère. Le rejet de la requête de Transdev en juin dernier par l'Autorité de la Concurrence est loin d'avoir soldé le différend et ne fait que conforter le sentiment que Ouibus survit grâce à un trop perçu de subventions publiques pour les activités conventionnées (TET, TER).

80,5 M€ de capital et 130 M€ de pertes en 2016 : une chose est certaine, il eut été nettement plus légitime de voir le groupe SNCF investir ces sommes dans l'activité ferroviaire au profit de son coeur de métier plutôt que de se lancer dans une course sans fin sur le marché de l'autocar qui fragilise un marché ferroviaire déjà dans une situation difficile. Dire que c'est se tirer une balle dans le pied serait un peu exagéré mais ce n'est pas à coup sûr le moyen de gagner en crédibilité vis à vis des financeurs de l'activité ferroviaire !

21 août 2017

Train / Autocar : quelle perception des usagers ?

Le CEREMA a réalisé en 2015 une étude de perception des modes de transport et a fait de la relation Voiron – Grenoble un de ses premiers cas d’application sur un panel d'une douzaine de lignes. A l’époque, 59 allers-retours d’autocars TransIsère et 53 TER reliaient les 2 villes. Environ 550 voyageurs ont été sondés dans chaque mode, soit 30% des clients du car et 11% des clients du train. Liaison périurbaine disposant de deux offres à forte fréquence, cet axe était donc d'un grand intérêt.

Premier résultat : une grande fidélité au mode de transport choisi : 56% des clients du train font leur trajet exclusivement par ce mode, et même 64% pour l’autocar. Le taux augmente à l’heure de pointe. Pour les autres, lorsqu’ils changent de mode de transport, c’est d’abord pour prendre la voiture. Le choix se fait donc entre transport individuel et transport collectif, et non pas entre transports collectifs, d’autant que la moitié des sondés dispose d’une voiture particulière.

Sur la connaissance des offres, si les usagers du car connaissent à 98% l’offre TER, en revanche, 84% des usagers du train connaissent l’offre TransIsère.

Sur le motif du choix modal, le train prend l’ascendant sur les critères de confort, d’écologie, de vitesse et sur la possibilité d’avoir une activité pendant le trajet. En revanche, l’autocar prend l’avantage sur la fréquence, la fiabilité, la ponctualité et la continuité du service (« pas de grèves »). Voilà de quoi assurément faire réfléchir…

Autocar et TER font jeu égal sur le critère du coût, mais avec des nuances : seuls les abonnés du TER mettent en avant cet argument, alors que les abonnés du car ont un point de vue différent car leur titre de transport intègre aussi les transports urbains de Grenoble et Voiron :

  • Billet à l’unité : 4,70 € en autocar contre 5,70 € en train
  • Abonnement mensuel : 78,90 € en autocar contre 58,40 € en train
  • Abonnement mensuel + réseau grenoblois : 78,90 € en autocar contre 87,40 € en train

Au fait, pourquoi TER + TAG  est plus cher que TransIsère + TAG… alors que TER seul est moins cher que TransIsère ?

Il est aussi intéressant de constater que tant les utilisateurs du car que ceux du train considèrent la voiture plus chère, plus lente et plus pénible.

Conclusion : lorsqu’existent des offres routières de haut niveau (et c’est le cas ici), l’autocar est jugé crédible même sur des déplacements périurbains pour lesquels le train bénéficie en principe d’un net avantage du fait d’une infrastructure dédiée et de meilleurs temps de parcours. Mais la qualité de service péjore fortement l’image du train, plus que le coût du trajet, et le choix modal semble donc assez dépendant de ce critère. L'aménagement de couloirs réservés aux autocars de transports en commun, dont bénéficie déjà la ligne Voiron - Grenoble étudiée, pourrait renforcer la concurrence avec le train...

14 février 2017

PACA : études de substitution

Le collectif d'associations Nos TER PACA a lancé une pétition suite à l'annonce par la Région d'engager des études visant à examiner les modalités et conséquences d'un abandon de certaines dessertes ferroviaires et de les remplacer par des services d'autocars. Sont concernés :

  • Orange - Avignon : il s'agirait manifestement d'étudier la suppression de la desserte omnibus pour les gares de Courthézon et Bédarrides, celle de Sorgues ayant été renovée dans le cadre de la desserte Avignon - Carpentras ;
  • Breil sur Roya - Tende, où le temps de parcours train est plus long que par mode routier compte tenu d'une limitation de vitesse à 40 km/h en l'attente d'un renouvellement de l'infrastructure ; néanmoins, un accord international franco-italien confirme le financement du renouvellement de la ligne à hauteur de 29 M€ par l'Etat italien !
  • Gap - Briançon, ce qui semble passablemement surprenant compte tenu de la décision de l'Etat de maintenir le train de nuit Paris - Briançon ;
  • Aix en Provence - Pertuis, choix étonnant puisque la Région avait financé la réouverture de l'antenne Meyrargues - Pertuis dont le trafic reste modeste à défaut d'une politique de service consistante.

La Région se défend dans la presse : son Président rappelle qu'il a demandé un moratoire contre toute fermeture et s'appuie sur un sondage réalisé dans le cadre des Assises régionales des transports, selon lequel 61% des sondés seraient favorables au remplacement des trains par des cars à haut niveau de service.

Mais n'est-ce pas la même Région qui a lancé une étude pour étudier les possibilités de substitution à grande ampleur du train par des autocars au regard du faible nombre de voyageurs transportés par le rail ?

14 décembre 2016

Autocars : Transdev attaque Ouibus

Certes, les statistiques sont flatteuses et la presse peut s'en faire les choux gras pour montrer que la libéralisation des autocars "ça marche". A la rigueur, et encore en regardant de loin. Les taux de remplissage sont très inégaux selon les liaisons et les horaires et pour l'instant, les opérateurs sont dans une logique de conquête de parts de marché... jusqu'à un certain point. En une année, on a vu apparaître 5 opérateurs : Flixbus, Ouibus, Isilines, Megabus et Starshipper. Les deux derniers ont déjà baissé pavillon, se contentant d'une sous-traitance pour Flixbus ou Ouibus. Ne restent donc déjà plus que 3 opérateurs, qui, après un an d'activités, réexaminent déjà pour certains leurs services. Contrairement à ce qui était annoncé par le gouvernement, ces liaisons ne viennent absolument pas compléter l'offre ferroviaire, mais la concurrencent. De même, il n'y a aucune logique d'aménagement du territoire puisque seuls les grands axes sont couverts : les villes moyennes n'attirent pas et certaines ont déjà perdu leur desserte, comme Montluçon sur Bordeaux - Lyon.

C'est maintenant sur le plan juridique que se place la bataille : Transdev, propriétaire d'Isilines, attaque Ouibus, donc la SNCF, devant l'autorité de la concurrence pour abus de position dominante, en pointant les régulières recapitalisations de Ouibus par le groupe SNCF alors que les pertes continuent d'augmenter de l'ordre de 15 à 22 M€ par an depuis la création de cette activité. L'équilibre annoncé en 2016 a été reporté en 2017, puis en 2018 et désormais en 2019.

Transdev se pose une question légitime : d'où viennent les moyens permettant au groupe SNCF de recapitaliser régulièrement Ouibus ? Certains ont déjà une piste de réponse : dans les surcoûts des activités conventionnées de la SNCF (TER, TET).

La saisine de l'autorité de la concurrence montre que la concurrence interne au groupe SNCF a quelque chose de structurellement malsain. Transdev en profite évidemment pour tenter de mettre un caillou dans la chaussure d'un opérateur ferroviaire qu'il voudrait challenger sur le réseau intérieur. Quant à Isilines, Transdev annonce un plan de restructuration et de concentration de ses activités.

L'ancien ministre de l'économie se vantait des créations d'emplois liées à son oeuvre, mais on voit déjà apparaître le spectre des licenciements...

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12 septembre 2016

Flixbus-Mégabus : un flirt estival

C'est presque une histoire adolescente : une plage, un regard croisé, un flirt estival, de beaux rêves... et puis la fin des vacances, les valises dans le coffre et deux gamins qui, chacun de leur côté, se disent à peine "au revoir" après s'être dit "nous deux c'est pour la vie". Le tout sur fond de Roch Voisine : Seul sur la plage, les yeux dans l'eau, mon rêve était trop beau...

Non non, transportrail ne vire pas dans le roman à l'eau de rose, mais illustre de façon un peu décalée ce nouveau rebondissement dans la concurrence entre les autocaristes et les suites de la loi Macron. Ainsi, en juin dernier, Flixbus et Megabus avaient annoncé leur rapprochement, le second opérant en sous-traitance du premier. Patatras ! Les histoires d'amour finissent mal... en général (ou comment passer de Roch Voisine aux Rita Mitsouko), puisque le divorce vient d'être annoncé par les deux protagonistes. Explication de Flixbus : l'entreprise préfère profiter des contrats de sous-traitance avec des opérateurs français avec lesquels elle est déjà en contrat. Bilan, Megabus devrait engager une procédure d'information du personnel sur la situation de l'entreprise et le devenir de son activité en France (170 salariés)... avant d'aller peut-être tenter l'aventure avec un autre opérateur... naturellement sur l'air des Divorcés de Michel Delpech...

7 septembre 2016

Transition énergétique : l'Etat nous enfume ?

Le document préparatoire à la stratégie de développement de la mobilité propre, élaboré par le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, recèle quelques informations étonnantes qui permettent d'éclairer notre petite lumière sur les raisons d'une argumentation aussi défavorable au mode ferroviaire depuis plusieus années.

Destiné à concrétiser les engagements de la loi de transition énergétique (qui avait copieusement oublié le transport public de voyageurs et le fret ferroviaire), ce document doit donc concrétiser l'engagement de la France à diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050. Il s'appuie sur 5 axes dont le contenu et la hiérarchisation ne souffrent guère de discussions :

  • développer des véhicules à faibles émissions et l'infrastructure de distribution des carburants ;
  • améliorer l'efficacité énergétique du parc de véhicules ;
  • favoriser le report modal de la voiture individuelle vers les transports en commun et les modes doux, et pour les marchandises de la route vers le rail et la voie d'eau ;
  • développer les transports collaboratifs (covoiturage et autopartage) ;
  • améliorer le taux de remplissage des véhicules de transports de marchandises.

On y évoque l'articulation entre transport, urbanisme, gestion du foncier en milieu urbain et périurbain, rythmes de travail, dématérialisation de l'économie, télétravail, comme le besoin de planifier l'évolution des réseaux de transport et leur cohérence avec l'aménagement du territoire. Il y est aussi question de la pollution en zone rurale, liée à l'agriculture et l'introduction d'intrants chimiques dans les sols, jouant sur la qualité de l'air et des eaux.

Le document rappelle que les transports représentent 59% des émissions de NOx, 16% des particules fines et 19% des particules très fines. Il indique aussi la relative stabilité de la part modale du transport de voyageurs depuis 20 ans : 83% des voyageurs-kilomètres en voiture, 5% en transport collectif routier, 10% en transport collectif ferroviaire et 2% en avion.

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La répartition de la consommation d'énergie par type de transport, dans le schéma ci-dessus, identifie clairement les 3 sources principales de pollution : la voiture, le camion et l'avion, qui totalisent 89% de la consommation d'énergie, et l'essentiel d'origine fossile. Le transport public de voyageurs pèse moins de 5% puisque dans la part imputée au ferroviaire est intégré le fret.

Plus intéressant, les déplacements de courte distance représentent 98,7% des déplacements en 2014 mais seulement 59,6% voyageurs-kilomètres, ce qui tend à conforter une politique privilégiant les transports urbains et régionaux de proximité par rapport aux liaisons longue distance.

Du point de vue du transport de marchandises, le document confirme l'effondrement du fret ferroviaire et le triomphe du camion qui assure l'acheminement 88% des tonnes-kilomètres en 2014, soit une croissance 11% depuis 1990. La part modale du train n'est que de 10% et la voie d'eau de 2%. Il est fait mention, et on ne pourra que partager cette analyse, que le renforcement des normes environnementales sur la motorisation des poids-lourds a entraîné une réduction des émissions des gaz à effet de serre puisque la norme Euro5 constitue à elle seule plus de la moitié du parc recensé en France.

Au chapitre des enjeux, il est évidemment question de maîtrise de l'étalement urbain, d'un urbanisme privilégiant les courts trajets, d'une économie plus économe en kilomètres parcourus, d'une meilleure gestion de la logistique urbaine fortement émettrice de pollution, d'une optimisation de l'usage des infrastructures existantes dans un contexte de rareté budgétaire. La priorité au transport public est affirmée... mais quelque peu démunie de moyens. Le rôle du fret ferroviaire - y compris sur le réseau capillaire - est une nouvelle fois considéré prioritaire... mais sans véritables actions planifiées et budgétées. Le sujet est renvoyé aux CPER. Bref, en rentrant dans le document, ça se gâte.

La page 60 résume les actions en matière de report modal. Il est ainsi proposé de porter de 12 à 20% la part du fret non routier d'ici 2030 et d'augmenter la part de marché du transport public de courte distance, sans objectif chiffré, en encourangeant notamment le report modal prioritairement vers le rail (ce qui est un peu contradictoire avec une réalité faisant réapparaître les fermetures de lignes à court terme). L'appel à projets type "Grenelle Environnement" est rappelé, mais on sait qu'il est chiche en moyens par rapport aux besoins. Au reste, l'approche est très parisienne en se bornant à citer la mise en oeuvre du Grand Paris Express. Deux pages plus loin est évoqué le schéma national des services de transport, prévu par la loi de réforme ferroviaire... et qu'on attend toujours.

Mais c'est après le corps du document que se nichent ses pépites, plus précisément entre les pages 90 et 92, dans les graphiques que transportrail vous reproduit ci-dessous.

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Dans cette série de graphique présentant les émissions d'équivalents CO² par voyageur-kilomètre, outre un fort parisianisme de l'analyse (eh oh, il y a une vie au-delà du périph'), le premier ne suscite pas de remarque. Le deuxième considère étrangement que le train régional est plus polluant d'un tiers que l'autocar. Le troisième surprend par le faible écart entre le train classique et l'autocar.

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La même chose (malheureusement dans un ordre différent...) quant à l'efficacité énergétique des modes exprimées en grammes équivalent pétrole par voyageur-kilomètre : comment expliquer que l'autocar de 50 places peut-être deux fois moins émetteur par voyageur et par kilomètre qu'un RER de 2500, trois fois moins émetteur qu'un Transilien et quatre fois moins qu'un TER ? Pire, comment peut-on présenter un graphique indiquant que le Transilien a la même (in)efficacité énergétique que la voiture sur des parcours urbains et périurbains ?

Pas grand chose à dire sur le second graphique si ce n'est son parisianisme. En revanche, le troisième est intéressant car il montre une certaine équivalence entre le TGV et le train classique (ce qui va à rebours du discours pro-TGV)... mais on peut douter de sa crédibilité quand on regarde le bilan pour l'autocar, trois fois plus efficace selon ces graphiques que le TGV sur la longue distance.

On sera enfin déboussolé avec cette dernière série de graphiques émanant de l'ADEME : en zone régionale, l'autocar serait une merveille de vertu.

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Il faudrait peut-être arrêter la propagande : elle va finir par se voir ! Que l'autocar soit plus efficace que la voiture, c'est une évidence. Qu'il soit présenté ainsi de façon quasi-systématique plus avantageux que le train est un non-sens délibéré, sauf à considérer des autocars pleins et des trains vides, ce qui n'est pas la vérité ni dans un cas ni dans l'autre. Mais on se souvient que sur France Info, le Président de la République avait affirmé que l'autocar était plus vertueux que le train entre Paris et Lyon...

Deux conclusions :

  • "Le langage des chiffres a ceci de commun avec le langage des fleurs qu'on peut lui faire dire ce qu'on veut : permettez-moi de préférer le langage des hommes, je le comprends mieux !" (Jean Gabin, Le Président)
  • La pollution des cerveaux par les énergies fossiles est bien démontrée...
6 septembre 2016

Autocars : les premiers renoncements

C'était l'un des arguments avancés pour vanter les mérites des autocars libéralisés : plus souples et plus économiques, ils allaient pouvoir "désenclaver" les territoires à l'écart du réseau ferroviaire et améliorer la desserte de villes mal servies par le train en raison de la faible chalandise. Bah voyons ! Les promesses n'engageant que ceux qui les écoutent, non seulement les autocars se concentrent sur des grands axes en confrontation directe avec des offres ferroviaires performantes, mais en plus, sur les lignes où l'autocar vient combler les carences abyssales du service ferroviaire, le désenclavement vole en éclat dès lors que la compétition se fait plus rude.

Ainsi, Flixbus annonce renoncer à la desserte de Montluçon et de Guéret sur ses relations entre Bordeaux et Lyon : pas assez de voyageurs et un impact important sur le temps de parcours d'une liaison caractérisée par une forte concurrence avec Ouibus et Isilines.

26 août 2016

SNCF : recapitaliser Ouibus, produire le TER moins cher

Les Echos annoncent dans leur édition de ce jour que le groupe SNCF a procédé à la recapitalisation à hauteur de 16 M€ de Ouibus "afin de poursuivre son développement et couvrir ses pertes". Le capital de la société atteint désormais 80,5 M€. En revanche, les pertes ne sont plus communiquées. On sait simplement que le cumul des exercices 2012 et 2013 atteint 41 M€. Officiellement, l'accord récemment conclu avec Starshipper, dont l'offre est désormais intégrée à Ouibus, permet par une croissance externe, se traduira par une coordination des offres. L'équilibre est annoncé par Ouibus en 2018 ou 2019, mais d'autres recapitalisations sont prévues.

Les concurrents s'interrogent sur l'origine des fonds de cette recapitalisation, estimant que le groupe SNCF profite de sa rente monopolistique sur le secteur ferroviaire - notamment avec les activités TER et TET subventionnées - pour financer les pertes de Ouibus, faussant la concurrence.

En début de semaine, dans le même quotidien, le Président de la SNCF affirmait : "nous devons vendre le TER moins cher aux Régions". Il serait temps, surtout après une décennie de dérive incontrôlée avec des coûts annuels augmentant en moyenne de 6% par an. Le décalage entre l'évolution de l'offre et l'évolution des montants facturés par la SNCF agace de longue date les Régions qui, désormais, vont pouvoir expérimenter l'ouverture à la concurrence. L'appel d'offres permettra au moins de pouvoir comparer les prix sur des bases réelles et non pas sur des déclarations.

Quelques instants de science fiction : imaginons ne serait-ce que 10% de réduction des subventions annuelles versées par les Régions à la SNCF à offre constante. Pour un poids lourd comme Auvergne Rhône-Alpes, ce sont tout de même plus de 60 M€ par an qui seraient économisées. Indirectement, une maîtrise des coûts de fonctionnement redonnerait un peu d'air à la Région en matière d'investissement. Imaginons (encore !) qu'elle réaffecte complètement cette économie dans l'investissement. Sur un CPER, 300 M€ de plus pourraient être mobilisés. De quoi sortir de l'abyme nombre de lignes secondaires...

24 août 2016

Paris - Lyon en TER : une alternative à l'autocar

La Région Bourgogne Franche Comté propose 5 allers-retours TER entre Paris Bercy et Lyon Perrache, résultant de la diamétralisation de liaisons Paris - Dijon et Dijon - Lyon, permettant notamment une liaison directe entre le nord et le sud de la Région. Avec un temps de parcours de 5h06 et 20 gares desservies, le TER ne fait pas d'ombre au TGV, du moins pas sur le terrain du temps de parcours. En revanche, sur le prix, à 65,60 € en seconde classe (de toute façon, il n'y a plus de voiture de première classe sur ces trains) se situe dans la moyenne des tarifs proposés sur le TGV (pour un achat de billet à J-7).

Mais la comparaison doit prendre aussi en compte l'autocar : avec un tarif variant de 18 à 35 € selon les jours, les heures et les opérateurs, la quête du plus bas prix conduira le voyageur sur l'autoroute plutôt que sur une voie ferrée et le trajet durera au moins une heure de plus que par le TER.

Prestations à bord

Avec le TER, des voitures Corail rénovées, offrant un niveau de confort acceptable pour le train. Lors de la rénovation, la Région a ajouté des prises 220 V mais elles ne sont pas systématiques. Bref, la tablette ou l'ordinateur a intérêt à disposer d'une bonne autonomie... à moins de se plonger dans un bon bouquin qui, lui, ne vous demandera pas de le recharger... Pensez aussi à votre panier repas car nulle voiture bar ni chariot à bord : la France a beau être le pays de la gastronomie, le train vous mettra au régime !

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Fleurville - 18 août 2012 - Le TER Paris - Lyon c'est aussi une autre façon de traverser la Bourgogne et ses paysages. Ici le célèbre site maintes fois photographié du château de Fleurville ! © transportrail

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Intérieur d'une voiture Corail rénovée Bourgogne : évidemment, les sièges sont "lie de vin" et les rideaux "moutarde". Le bleu sous les baies jure un peu. La tablette sur les sièges en vis à vis facilite l'accès aux places situées côté fenêtre mais s'avère d'usage peu commode... © transportrail

De leur côté, les autocaristes annoncent les prises 220 V et USB et même le Wifi... en se gardant de préciser que le débit est limité et qu'il sera bien difficile de regarder un film pendant le voyage...

Pour les bagages, le train est à son avantage car la capacité de stockage est importante (si tant est qu'on soit raisonnable) alors que les compagnies d'autocar limitent fortement le nombre de bagages admis.

Pour les toilettes, le train est aussi en position favorable avec en moyenne 1 espace pour 40 voyageurs contre 1 espace par autocar d'une cinquantaine de places. Reste que la réputation de mauvais entretien des toilettes SNCF hors TGV n'est pas totalement usurpée... mais le voyageur en est parfois - souvent ? - la cause réelle !

TER : une fréquentation importante

Question capacité, les TER sont composés de 9 voitures de 80 à 88 places. Au départ de Lyon, la charge est importante et elle a plutôt tendance à augmenter sur le parcours Lyon - Dijon. La capitale de la moutarde et du pain d'épices est évidemment un important lieu de brassage de voyageurs. Mais ce qui est intéressant de constater, c'est le nombre élevé de voyageurs qui restent dans le train à Dijon : jusqu'à 40% d'une voiture en fin de semaine.

Au-delà, le flux est plus linéaire : assez peu de voyageurs descendant dans les gares situées entre Dijon et Sens, et à l'inverse de nombreux montants, surtout en fin de semaine. Bilan, le train arrive en limite de capacité entre Montbard et Saint Florentin : pour les autres, ce sera debout, sauf à profiter d'une place qui se libère à la faveur d'un voyageur descendant (rassurez-vous, il y en a !).

Un marché entre le TGV et le TER

La fréquentation de ces TER et celle des autocars démontrent - s'il le fallait - qu'il existe un marché pour une offre plus lente que le TGV mais aussi moins chère. La desserte actuelle a le mérite d'exister mais le temps de parcours est tout de même important et ne creuse pas suffisamment l'écart par rapport à l'autocar qui - du moins pour l'instant - offre des prix très bas.

Alors n'y aurait-il pas "de la place" pour une offre classique Paris - Lyon, desservant Laroche-Migennes (pour récupérer la clientèle d'Auxerre), Montbard, Dijon, Chalon et Mâcon ? Un train en moins de 4h30 creuserait l'écart de façon importante avec l'autocar. Il semblerait que la SNCF y pense, mais la présence de l'offre TER impose une certaine prudence, au risque de "piquer" de la clientèle au TER alors que l'objectif premier est de capter des voyageurs qui se détournent du train pour aller dans les autocars et sur les sites de covoturage. A moins que la Région ne prenne les devants et développe elle-même cette nouvelle desserte ?

Quant au matériel roulant, face à des Corail en fin de carrière, l'hypothèse Régio2N dans une version Intervilles apparaît séduisante : arrêts relativement espaces même sur les TER actuels, accès de plain-pied, capacité importante et possibilité d'offrir un minimum de services (prises 220 V, distributeurs automatiques...)

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