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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
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27 août 2014

L'ARF demande un nouvel audit du réseau

Après les accidents de Brétigny sur Orge en 2013 et de Denguin cette année, l'Association des Régions de France a demandé au Ministre des transports (qui vient de changer) un nouvel audit sur l'état des infrastructures ferroviaires françaises.

En 2005, l'Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne avait été missionnée pour réaliser cet audit et le professeur Robert Rivier avait dressé un état particulièrement préoccupant du réseau, évoquant la dégénérescence de plusieurs milliers de kilomètres. En 2012, une mise à jour (2ème document dans la liste présentée) avait été effectuée par l'EPFL pour évaluer l'impact des premières mesures, en les considérant positives car dans la bonne direction mais d'ampleur insuffisante pour freiner le vieillissement du réseau.

RFF a engagé son Grand Plan de Modernisation du Réseau, censé être la réponse aux besoins des infrastructures ferroviaires, mais les efforts qui sont portés restent encore notoirement insuffisants, car les budgets sont limités. En 2014, pas moins de 1000 chantiers sont engagés.

La posture de l'ARF n'est pas innocente : les Régions souhaitent s'affirmer comme chefs de file sur les rails, constatant les faiblesses de l'Etat et se montrant assez prudentes quant aux effets de la réforme qui entrera en application le 1er janvier prochain. Posture d'autant plus compréhensible que la réforme territoriale devrait renforcer les Régions dans l'organisation des transports. La combinaison des deux devrait - en principe - créer les conditions d'une nouvelle gouvernance du transport ferroviaire et notamment régional, d'autant plus que les Régions ont obtenu la possibilité de lever un Versement Transport en dehors des périmètres urbains qui, plafonné à 0,55%, devrait dégager environ 450 M€ par an de recettes bénéficiant aux investissements ferroviaires attendus tant par l'état du réseau que la croissance de la demande.

On attend aussi la nomination d'ici là du futur Président du conseil de surveillance du système ferroviaire et de l'EPIC de tête SNCF. Certaines figures régionales pourraient "postuler" pour affirmer la volonté d'asseoir les territoires en bonne place dans la gouvernance ferroviaire et contrer les probables tentations à la contraction du réseau...

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11 mars 2014

Régions : un manifeste pour le ferroviaire

L'Association des Régions de France a publié son manifeste pour le renouveau du système ferroviaire. Les autorités organisatrices se montrent prudentes sur la question de l'ouverture à la concurrence considérant qu'il ne faut rien modifier avant l'échéance de 2019. Néanmoins, dans Les Echos, son Président se montre extrêmement critique à l'égard du comportement de la SNCF.

Il souligne que les coûts d'exploitation de l'opérateur ont augmenté de 90% en 12 ans soit 4 fois plus vite que l'évolution de l'offre. Alain Rousset demande où sont passées les promesses d'amélioration de la productivité, c'est à dire de la saine utilisation de l'argent du contribuable (qui peut être cheminot !). Le Président de la Région Aquitaine en rajoute en disant que les Régions "financent tout mais ne contrôlent rien".  Elles ne veulent plus être un guichet à subventions mais souhaitent pouvoir vérifier l'usage des subventions versées à la SNCF, d'où l'exigence, maintes fois renouvelée, de la présentation de comptes transparents par ligne.

L'ARF ne ferme pas la porte à l'ouverture du marché mais considère que la SNCF doit préalablement ouvrir en totalité ses livres de compte pour que les Régions puissent connaître la réalité de l'usage de leurs subventions, avant de pouvoir engager une comparaison avec d'autres opérateurs. En conclusion, Alain Rousset est très clair : si la SNCF refuse d'être transparente, elle poussera les Régions dans les bras de la concurrence. Une manière très claire de renvoyer l'accusation sur l'opérateur.

Du point de vue de la gouvernance, l'ARF demande à l'Etat de jouer pleinement son rôle d'autorité organisatrice sur les liaisons nationales (TGV et TET), d'arbitrer en faveur de l'intégration des gares dans le nouveau gestionnaire d'infrastructures et de donner au réseau les moyens de sa rénovation en priorisant les lignes existantes sur le développement de lignes nouvelles.

24 février 2014

La SNCF juge les critiques des Régions injustifiées

Voila qui ne manque pas de piquant. La SNCF monte au créneau face à la fronde de certaines Régions qui ont décidé de suspendre leurs paiements face à la dégradation de la qualité du service (ponctualité, suppressions de trains, conformité des compositions de train, propreté...), et, pour certaines, de se lancer dans une nouvelle stratégie d'acquisition du matériel roulant en se dispensant du passage obligé par la case SNCF.

Pour répondre, la SNCF a fait appel à... un ancien Président du Conseil Régional, donc autorité organisatrice du TER, passé de l'autre côté de la barrière. Alain Le Vern était Président du Conseil Régional de Haute Normandie. Il est désormais Directeur Général TER et Intercités à la SNCF et diffuse désormais la parole officielle qu'il écoutait il y a peu non sans être dubitatif ou critique...

Selon lui, le discours des Régions est exagéré et annonce un chiffre de 92% de régularité des TER en moyenne nationale sur l'année 2013. On rappellera quand même que ce chiffre écarte les trains supprimés de la statistique, puisqu'un train supprimé ne peut pas être en retard vu qu'il n'a pas circulé. En tenant compte de ce que remontent les associations d'usagers, la régularité perçue par les voyageurs, qui eux tiennent compte des trains supprimés, se situe selon les Régions entre 70 et 80%. Des chiffres nettement moins flatteurs, mais qui ne bénéficient pas de la même visibilité médiatique que ceux annoncés par la SNCF et transmis à l'Autorité de la Qualité de Service dans les Transports.

Et de déclarer à l'Agence France Presse que le coût de production des TER en France à la SNCF est inférieur à celui des pays voisins, et que l'attractivité du service français est meilleur qu'en Allemagne ou au Royaume-Uni : ou quand la communication d'entreprise clairement sur la sellette et sur la défensive se transforme en désinformation du citoyen...

19 février 2014

Création de l'association d'études pour le matériel roulant

A l'initiative de la Région Rhône-Alpes, les Régions Aquitaine, Auvergne, Bretagne, Bourgogne, PACA, Pays de la Loire, Picardie, Poitou Charentes et le STIF dont décidé de créer cette nouvelle structure afin de changer les relations avec la SNCF quant à l'acquisition des matériels régionaux. Aujourd'hui, ceux-ci sont financés à 100% par les Régions mais la SNCF reste pilote des marchés et propriétaire de plein exercice des rames, qui ne peuvent être transférées aux Régions qu'en fin de carrière (donc sans intérêt) ou moyennant une mécanique fiscale complexe.

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Les Roches de Condrieu - 8 avril 2012 - Assurant un TER Lyon - Valence, cette Z24500 (TER2Nng) porte les couleurs de la Région Rhône-Alpes mais est bien propriété de la SNCF, ce qui ne manquerait pas de poser question dans la perspective d'une ouverture du marché ferroviaire régional. © transportrail

L'objectif de cette association est de préfigurer les nouvelles modalités d'acquisition des matériels roulants régionaux en réalisant des études sur les stratégies de gestion, maintenance, exploitation et renouvellement des flottes, mais aussi et surtout de travailler sur les solutions de financement des ces rames. Dans un second temps, l'association travaillera sur les modalités de passation des commandes et les engagements réciproques des Régions et des industriels.

Aujourd'hui, les Régions expriment des besoins que la SNCF restranscrit dans un cahier des charges, pilotant ensuite la procédure de passations de marché avec une indépendance certaine vis à vis des clients finaux que sont les Régions. Les marges de manoeuvre des Régions sont réduites et même si l'industrie ferroviaire entretient des relations nourries avec la sphère politique et technique avec les autorités organisatrices, le fonctionnement actuel ne permet pas aux Régions d'avoir la maîtrise de cet aspect majeur de leur rôle sur le transport régional en restant extrêmement dépendant d'un opérateur unique.

Cette volonté d'émancipation de Régions, dont quelques poids lourds du transport ferroviaire de proximité (à commencer par le STIF) s'inscrit dans un contexte de craquements dans les relations Régions - SNCF, amplifiés par la médiocrité du service délivré par l'exploitant et le lobbying réalisé par Arriva (cheval de Troie de la DB) et Transdev auprès de plusieurs d'entre elles. S'il est probable que le statu quo sera la politique d'ici les élections régionales de 2015, il n'est pas impossible que l'issue de ce scrutin ait des conséquences sur le lancement d'une expérimentation de la mise en délégation de service public par appel d'offres, comme l'avait proposé le rapport du sénateur Grignon.

4 décembre 2013

Régions - SNCF : nouvelle poussée de fièvre

L'Association des Régions de France a pris sa plume pour pointer l'augmentation continue des coûts facturés aux Régions par la SNCF pour l'exploitation des TER avec des taux compris entre 5 et 7 % par an, en proposant de geler le niveau des contributions pour contraindre l'exploitant à améliorer sa productivité à service constant. Elle dénonce aussi l'obligation faite par l'entreprise de rénuméner à un taux de 9,3% les capitaux que la SNCF investit dans les gares, notamment lors des rénovations et mises en accessibilité.

Ce taux, bien éloigné du niveau des marchés, fait bondir les Régions, qui proposent en contrepartie d'appliquer le même taux aux investissements faits notamment sur le matériel roulant.

Parallèlement, les comptes du TER Lorraine ont été audités et font apparaître une subvention non due de l'ordre de 25 M€ par an sur un montant annuel de 170 M€.

En conséquence, l'ARF propose de dénoncer en bloc les conventions TER et de remettre Régions et SNCF autour de la table pour discuter des coûts. Iront-elles jusqu'à ce point ? Dans un contexte politiquement proche de l'impasse, pareille décision entrainerait un blocage que les syndicats pourraient utiliser pour mobiliser leurs troupes sur la défense du service public en plein débat sur la réforme ferroviaire.

Par ailleurs, les Régions ont ouvert un second front à propos du taux de rémunération des participations de Gares et Connexions dans les projets de modernisation et de développement des gares : 9,2%. Jugé excessif, les Régions envisagent de saisir l'Autorité de Régulation des Activités Ferroviaires pour réexaminer ce taux de rémunération : l'ARAF l'avait déjà considéré trop élevé et suggéré de l'abaisser autour de 6,5 %. La SNCF se défend en affirmant que les intérêts sont réinvestis dans la branche, mais une fois de plus, la question de la transparence des comptes de la SNCF est pointée du doigt.

Au congrès du GART à Bordeaux, la semaine dernière, le Président de l'ARF, par ailleurs Président de la Région Aquitaine, considérait qu'il fallait aller vers la mise en appels d'offres de l'exploitation des TER. Une première.

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20 septembre 2013

Pour l'achat des trains, les Régions veulent s'émanciper de la SNCF

Au congrès de l'Association des Régions de France, 8 collectivités et non des moindres ont décidé de constituer une association d'étude pour envisager de commander leurs prochains matériels roulants sans passer par la SNCF, et afin de pouvoir négocier en direct avec les industriels. Le groupe des 8 est constitué de Rhône Alpes, PACA, Bourgogne, Picardie, Aquitaine, Pays de la Loire, Auvergne et du STIF. Autant dire que la majorité des "poids lourds" du ferroviaire en France en font partie, à commencer par le STIF dont les matériels roulants sont pourtant le plus souvent spécifiques.

300613_27681vernon2Vernon - 30 juin 2013 - Si les logos régionaux sont plus visibles que celui de l'exploitant, il n'en reste pas moins que le matériel appartient aujourd'hui en pleine propriété à la SNCF. Mais se passer de son ingénierie - quoique jugée coûteuse - implique une évolution considérable du rôle des autorités organisatrices : sont-elles prêtes à assumer et franchir le pas ? © transportrail

Aujourd'hui financeurs des nouveaux TER, sans en être propriétaires, les Régions reprochent à leur exploitant unique de gonfler la facture par des frais de structure élevés et de constituer un filtre entre les besoins exprimés par les autorités organisatrices qu'elles sont et les industriels. Pour les Régions, passer hors du circuit SNCF permettrait d'abaisser la facture. Néanmoins, de multiples questions restent posées : la SNCF prend aujourd'hui en charge toute la maintenance et toute la partie "normative" des matériels roulants. Passer de l'expression de besoin fonctionnel du client à la conception intégrale suppose un saut en matière d'ingénierie pour lequel les Régions ne sont pas aujourd'hui armées.

L'hypothèse de la constitution d'un groupement économique associant les Régions et une ingénierie ferroviaire extérieure est souvent évoquée. Reste que la SNCF a aujourd'hui quelques arguments à faire valoir ne serait-ce que pour préserver son pré carré sur les liaisons régionales, dont l'ouverture à la concurrence se rapproche inéluctablement. Et la question de la propriété du matériel ne manquera pas de se poser...

26 février 2011

Coûts SNCF : de la valeur des surcoûts

Cette semaine, dans le quotidien économique Les Echos, est paru un article qui n'a pas manqué d'attirer l'attention des décideurs, notamment dans les Régions. Le quotidien rapporte une étude interne de la SNCF qui confirmerait un écart de 30% entre les coûts facturés aux Régions et la moyenne de 15 contrats sélectionnés au Royaume-Uni, en Suisse, en Suède, aux Pays-Bas et en Allemagne. 30%, c'est beaucoup, ce qui invite à aller plus loin que ce simple ratio.

Dans ces 30%, on retrouve aussi la différence de valeur des péages d'infrastructures, refacturés à l'euro l'euro aux Régions et les différences liées aux durées légales de travail dans les pays étudiés : deux sujets qui échappent pour large partie à la responsabilité de l'exploitant national. Il en est partiellement de même sur l'impact de la présence systématique d'un agent commercial dans les trains régionaux, même sur des lignes rurales à faible trafic : socialement délicate, le sujet est désormais considéré comme ouvert par la SNCF, mais il est souvent une demande politique forte de la part des Régions, alors même que les matériels modernes peuvent être exploités par le seul agent de conduite.

En revanche, la nette fragmentation des métiers ou la question des frais de structures constituent des sujets franco-français, quoique peu évidents car ils seront immanquablement secoués par des questions sociales internes.

La note tombe au moment où le GART et l'ARF viennent de lancer un groupe de travail commun sur les capacités de financement du transport ferroviaire régional. Elle peut aussi poser question alors que la régularité ferroviaire s'est effondrée dans plusieurs Régions. C'est donc, comme on dit dans les prétoirs, une pièce versée au dossier, mais il serait un peu court de la transposer "à froid" dans les futures négociations entre la SNCF et les Régions...

26 janvier 2011

Régularité : du bâton et de la carotte...

Des Régions qui grognent

Depuis près de six mois, les élus en charge des transports ferroviaires avaient commencé à accentuer la pression sur la SNCF au regard de la diminution progressive et néanmoins inquiétante de la régularité et une élévation du nombre de suppressions de trains. La situation est devenue particulièrement médiocre dans les grandes régions, évidemment en Ile-de-France mais aussi en Rhône-Alpes et en PACA, où les relations Région - SNCF avaient atteint un niveau de tension jamais connu. Alors, les élus ont convoqué le Président de la SNCF, qui a dû passer quelques oraux devant les assemblées régionales pour faire preuve d'une part de pédagogie pour expliquer la situation, et exposer ses solutions pour y remédier.

En PACA, le plan PrioriT vient d'être signé : 200 mesures, 40 M€ avec pour objectif premier la réduction du taux de suppression de trains de 8 à 3,5 % d'ici décembre prochain. En contrepartie, la Région accepte de réduire le montant de ses pénalités conventionnelles de 19 à 7,7 M€ dont 2,2 réinvestis dans ce plan qui concernera la maintenance du matériel, des installations, l'information des voyageurs, l'amélioration de la programmation des circulations, la lutte contre la fraude et l'insécurité dans certains secteurs du réseau. In fine, la Région se retrouve contrainte de mettre la main à la poche et ainsi augmenter sa contribution pour l'exécution du service que la SNCF s'est engagée à réaliser.

En Pays de la Loire, la Région vient également de saisir la SNCF face à la dégradation du service, et en appelle à l'Etat, qui, en tant qu'actionnaire unique de l'entreprise, a également son mot à dire... ou tout du moins devrait. La ligne Caen - Le Mans - Tours est l'une de celle qui focalise régulièrement l'attention.

En Ile-de-France, les Présidents de la RATP, de la SNCF et de RFF passent à l'oral devant le conseil du STIF environ une fois par an, tant la situation est passablement éloignée des objectifs contractualisés, et rendue d'autant plus mal vécue qu'elle concerne plusieurs millions de voyageurs par jour.

La régularité, il y a les chiffres officiels, qui font part de 10 à 12% d'irrégularité sur les TER et Transilien, et  même 20% pour les TGV et Corail... et puis il y a les chiffres officieux, ceux mesurés par les usagers et les associations : 50 à 70% des trains ne sont pas à l'heure, tant sur des RER que des TER, y compris sur des lignes à fort trafic (comme Lyon - Grenoble, particulièrement touchée), et les suppressions de dernière minute ne cessent de se multiplier.

Si on neutralise les effets de la neige et des grèves, les taux ne diminuent que de 1 à 1,5%. Autant dire que ces événements ne se sont qu'ajoutés à une tendance générale.

Pour le TGV, la SNCF reconnaît que la chute est préoccupante, considérant même que le niveau de qualité n'est pas en phase avec les standards de la grande vitesse européenne... avant de pointer l'augmentation du trafic, la saturation et le vieillissement des infrastructures. Les mêmes arguments sont d'ailleurs repris pour les autres activités voyageurs, et on serait tenté de répondre que ces sujets étant connus, la priorité doit être à la réduction drastique des causes internes à la SNCF pour éviter que la dérive des résultats ne s'amplifie.

A côté de cela, 95% des TER Bretagne et Alsace ont circulé à l'heure...

Un climat tendu entre Régions, usagers et SNCF : apparences ou réalité ?

Résultat, la judiciarisation des relations entre les usagers et la SNCF va croissante. Souvent considérés comme délaissés, les usagers s'organisent progressivement, et se rebiffent : refus de présenter leur titre de transport lors des contrôles, refus de payer leur transport... ou dépôt de plainte lorsque les retards provoquent des complications - plus ou moins sévères selon les cas - avec leurs employeurs : certains diront que l'américanisation des moeurs est en marche. D'autres y verront l'expression d'un mécontentement (pour ne pas dire plus) face aux conséquences sur la vie personnelle et professionnelle de ces retards au quotidien : une heure supplémentaire pour la nounou, une réunion loupée, un entretien d'embauche raté, un employeur inflexible qui licencie pour cause de retards récurrents ou qui évite d'embaucher un candidat venant d'un secteur desservi par des lignes réputées très médiocres.

Quid de l'ouverture à la concurrence ? Un bâton plausible ?

A l'opposé de la chaîne, le législateur s'interroge sur la pérennité du monopole d'exploitation des dessertes intérieures dont dispose la SNCF. Le rapport du député Grignon, qu'on n'attend plus aujourd'hui avant le mois d'avril prochain, devrait proposer des modalités d'expérimentation qui pourraient être applicables en 2013 - 2014, période à laquelle plusieurs conventions TER seraient à renouveler. Une expérimentation que la plupart des responsables régionaux n'emballe pas, probablement au moins autant pour des raisons politiques que par une certaine crainte face à une nouvelle situation, une sorte de plongée vers l'inconnue, avec quelques "petites" questions relatives à la propriété du matériel, la gestion des personnels en cas de changement d'exploitant (application de l'article L122-12 du code du travail). Bref, si le rapport ne propose pas un chemin clair, il est évident que les propositions auront du mal à être entendues par des élus qui, déjà aujourd'hui ne sont guère enclins à s'y engager.

Pourtant, il y a de grandes chances que l'expérimentation proposée - et non imposée - s'appuie sur le modèle de la délégation de service public gérant la quasi-totalité des réseaux urbains français. En la matière, certains sont prêts à continuer un lobbying que certains qualifieront d'agressifs - d'autres diront très intéressé - pour faire entendre leur propos, principalement axé sur la diminution des coûts d'exploitation et donc la capacité à dégager, sans investissement supplémentaire des collectivités, de nouvelles marges budgétaires au profit du ferroviaire, par exemple pour assurer la pérennité de petites lignes à la santé aujourd'hui précaire qui - selon les potentiels nouveaux exploitants - seraient condamnées si le mode de fonctionnement actuel était maintenu...

Or le seul moyen de confirmer les dires des partisans de l'ouverture à la concurrence est probablement de mettre un pied dans la porte et d'expérimenter la mise en concurrence pour juger sur pièces. Qui saura - osera - franchir le pas ?

Bref, si la SNCF veut conserver sa position dominante, il lui faudra faire preuve d'imagination et de résultats pour redresser une situation aujourd'hui peu glorieuse : si elle n'est pas la seule responsable - les sous-investissements chroniques de l'Etat ne sont pas étrangers à la situation - de cette dégradation de la qualité de service, elle devra se montrer exemplaire dans sa capacité à résoudre les causes de dysfonctionnements sur lesquelles elle peut avoir la main.

26 septembre 2010

De nouvelles relations entre les Régions et la SNCF ?

Une lente prise de conscience des carencesde l'exploitation quotidienne

Après l'audition de Guillaume Pépy par l'Association des Régions de France, la SNCF s'engage à améliorer l'utilisation des moyens fournis par les Régions dans le cadre des conventions TER. Dans une conjoncture où les budgets se font rares, les Régions souhaitent poursuivre leur politique en faveur du transport ferroviaire, mais appellent la SNCF à une plus grande rigueur dans l'utilisation des ressources.

En guise de réponse, la SNCF propose de développer les nouveaux outils de multimodalité et d'information des voyageurs. Intention louable s'il en est, mais ce qu'attendent d'abord les voyageurs, c'est la réalisation normale du service avec des trains à l'heure et d'une composition adaptée à la fréquentation. En la matière, la SNCF semble reconnaître que la situation n'est pas conforme dans certaines Régions, comme en Rhône-Alpes, en PACA ou en Ile-de-France. L'approche de l'automne donnera un signal quant à l'efficacité des moyens mis en oeuvre pour lutter contre le "défi saisonnier" récurrent mais qui semble toujours aussi difficile à maîtriser. Reconnaître une faiblesse est une chose, lutter pour y remédier en est une autre...

Mieux maîtriser les coûts : la tentation de la contraction de l'offre et les vertus apparentes de l'autocar

Il n'en demeure pas moins que plusieurs questions, et pas des moindres, restent en suspens : dans cette période économique difficile, la performance de chaque euro dépensé est une préoccupation d'autant plus légitime qu'on sait que le transport ferroviaire est inéluctablement appelé à se développer face aux défis de société présents et à venir. Qu'il s'agisse des frais de structure ou de la décomposition des coûts d'exploitation du TER, les Régions attendent non seulement plus de transparence de la part de la SNCF et surtout un réel engagement sur une meilleure productivité des fonds publics consentis en faveur du rail.

Si certains pensent qu'on peut réduire la facture en taillant dans l'offre sur des lignes rurales ou en heures creuses, ce raisonnement n'a pas de sens à long terme, et peut même s'avérer contre-productif à long terme : sur les lignes rurales, la réduction de l'offre pourrait mettre en péril certaines lignes si elles descendent sous le seuil des 20 circulations par jour que RFF applique en matière de maintenance, tandis que l'exploitation par autocars de lignes ferroviaires est souvent le meilleur moyen d'inciter les voyageurs à retourner à la voiture. On serait plutôt inspiré d'essayer de motiver les esprits pour remplir les trains : coordonner le rabattement des réseaux d'autocars locaux vers le rail, éviter la compétition stérile menée par certains départements avec des tarifications forfaitaires à très bas prix, développer la vente de titres de transports dématérialisés par Internet ou applications sur téléphones portables, nouer des relations étroites avec les entreprises pour promouvoir le transport ferroviaire dans les déplacements du quotidien...

Réduire la voilure n'est donc pas une solution durable : le seul moyen de redonner du souffle à l'économie du transport ferroviaire régional réside donc bien en une amélioration de l'efficacité de l'utilisation des budgets. Si l'exercice n'est pas simple, chacun en conviendra, il est déterminant dans l'avenir des relations entre les Régions et la SNCF, d'une part dans la crédibilité de l'action régionale en faveur du rail, mais aussi face au spectre de la mise en concurrence qui est inéluctable à une échéance encore lointaine mais qui, petit à petit, se rapproche. C'est une véritable introspection sur la structure de ses coûts que la SNCF devrait mener pour améliorer sa performance et passer d'une logique du "toujours plus" à un nouveau cap du "toujours mieux".

L'exemplarité, meilleur argument contre l'ouverture à la concurrence ?

Cette approche est d'autant plus légitime que les Régions sont aussi fortement sollicitées pour assurer la pérennité et le développement du réseau ferroviaire, qu'il s'agisse de moderniser lourdement des infrastructures ayant souffert de décennies de déshérence ou de financer la création de lignes TGV... alors même qu'il ne s'agit pas réellement des prérogatives des Régions en matière de transport ferroviaire, sollicitées pour palier les insuffisances de l'Etat.

Le modèle de la régionalisation de 1997 a permis le sauvetage du transport ferroviaire régional. Pour répondre aux nouveaux horizons liés à l'efficacité énergétique, au report modal et à la maîtrise des déplacements dans les grandes agglomérations, un nouveau code des relations Régions - SNCF semble ainsi le préalable au démarrage d'une nouvelle étape dans la revalorisation du réseau ferroviaire français. Les Régions ont à y gagner de nouvelles marges d'actions pour valoriser leur rôle dans l'organisation des transports, et la SNCF une meilleure assise dans un contexte d'ouverture du marché. L'état de l'exploitation actuel fait de l'ouverture à la concurrence l'un des seuls leviers restant à la puissance publique pour aiguillonner une SNCF campant encore trop sur ses positions.

11 septembre 2009

Intercités : quelles perspectives ?

En 2005, le projet de suppression de nombreux trains Corail Intercités avait suscité une fronde des élus régionaux qui avait contraint la SNCF à renoncer à une partie de ses plans. Le déficit de ces liaisons, évalué par un audit financé par l'Association des Régions de France, s'élevait alors à 124 M€, pour des trains dont le ratio recettes / dépenses s'élevait alors entre 50 et 75%.

Un plan de modernisation de certaines dessertes a été engagé, concernant principalement les deux axes normands, qui eux, dégagent un bénéfice. Le programme de modernisation de 150 voitures Corail pour l'axe Paris - Caen - Cherbourg a été mené et donne plutôt satisfaction aux voyageurs puisque l'ambiance des voitures a été rajeunie et de nouveaux équipements ajoutés (notamment les prises de courant en 2nde classe). Quelques voitures circulent également sur l'axe Paris - Nevers mais aussi sur Lyon - Tours.

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Paris Saint Lazare - 15 avril 2009 - Les 150 voitures Corail affectées à la liaison Paris - Cherbourg / Deauville ont bénéficié d'une modernisation financée à partié entre la SNCF et la Région Basse Normandie. © transportrail

Dans la presse économique de ce 11 septembre, le ministre en charge de l'aménagement du territoire remarque que la SNCF va bénéficier de la suppression de la taxe professionnelle, ce qui pourrait lui offrir les moyens d'une nouvelle relance de ces relations interrégionales, qui demeurent encore dans une double incertitude quant au financement de l'exploitation et du renouvellement d'un matériel roulant vieillissant. Selon ce ministre, la manne pourrait être améliorée par un petit coup de pouce de l'Etat, qui porterait la marge d'actions à 250 M€.

Ouvrons donc le dossier Corail Intercités. La marque commerciale de la SNCF recouvre deux réalités assez tranchées.

D'une part, les liaisons entre Paris et le bassin parisien, régulièrement utilisées par des migrants pendulaires longue distance, venant de Normandie, du val de Loire, de Picardie et de Champagne. Des axes où l'offre est en général assez importante et où la fréquentation reste élevée, avec des trains pouvant aligner 11 à 14 voitures.

D'autre part, les liaisons transversales : Nantes - Bordeaux, Caen - Tours, Lyon - Nantes et Bordeaux - Lyon. Des dessertes bien moins riches (au mieux trois allers retours sur Nantes - Bordeaux, un seul sur Caen - Tours, deux sur Lyon - Tours et un sur Bordeaux - Lyon), marquées par un trafic de cabotage assez important (5% seulement des voyageurs vont de Bordeaux à Lyon par exemple) et des performances plus que modestes.

Sur les premières, le matériel Corail répond encore à peu près convenablement aux attentes des voyageurs, même si la conception des années 1970, un aménagement spartiate et uniforme, ainsi qu'un confort sonore daté. Moderato évidemment sur les voitures modernisées, mais qui trahissent malgré tout leur âge.

Sur les secondes, le matériel Corail assure Bordeaux - Nantes, Caen - Tours et Lyon - Tours mais les automoteurs ont mis un pied dans le bastion : Bordeaux - Lyon doit sa survie à l'engagement d'X72500 fournis par Rhône-Alpes, Limousin et Aquitaine. Ces rames ont permis de retrouver à peu près les performances obtenues par les RTG, même si le niveau de confort reste limite pour une relation longue distance : cependant, le trafic est assez segmenté et, comme déjà indiqué, le bout en bout reste très minoritaire.

L'emploi de matériels automoteurs est probablement de nature à relancer ces transversales, en jouant sur la modulation des compositions pour assurer les pointes du vendredi et du dimanche. Combiné à quelques opérations d'infrastructures, les gains de temps peuvent être assez significatifs. On peut ainsi suggérer que le futur porteur polyvalent, dans une version bimode et aménagé "confort" puisse assurer Nantes - Bordeaux, profitant de l'électrification réalisée par les Pays de la Loire entre Nantes et Les Sables d'Olonne (du moins pour la section Nantes - La Roche sur Yon).

De même, sur Lyon - Nantes, le lancement de l'électrification de la section Bourges - Saincaize offrira bientôt une continuité électrique sur les deux tiers du parcours. Enfin sur Caen - Tours, parcours de distance plus réduite, un système à quatre allers-retours de bout en bout complété par des dessertes autour du Mans vers Tours et Caen peut être imaginé avec des X72500, bien taillés pour ce genre de trajet. Les esprits les plus imaginatifs pourraient même oser une formation bitranche avec une rame venant de Rouen, marié à Mézidon ou à Alençon, de sorte à capter le trafic haut-normand, lui évitant ainsi de passer par Paris pour rejoindre le sud-ouest.

Sur le grand bassin parisien, les besoins de confort et de capacité pourraient porter la réflexion sur une version adaptée du porteur hyperdense en cours de définition. La formule automotrice pourrait être adaptée à une modulation des compositions, par exemple sur le val de Loire où un couplage de deux rames se scinderait à Orléans, l'une rejoignant Tours, l'autre alternativement Bourges ou Châteauroux, en mixant des sillons existants de TER.

Reste deux cas, plus complexes car à mi-chemin entre les deux cas : Paris - Troyes - Mulhouse. et Paris - Amiens - Boulogne. Les élus champardenais se mobilisent pour obtenir l'électrification jusqu'à Troyes, ce qui traiterait le cas des relations avec la capitale. Reste que l'effet de rupture pourrait être accru et marginaliserait la section Troyes - Mulhouse qui dessert une région relativement peu peuplée. Quant à l'axe picard, la tentation de la coupure pourra-t-elle être évitée ?

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Abbeville - 25 avril 2009 - Entrée en gare d'Abbeville du Corail Boulogne - Paris : la question des moyens de traction devient essentielle pour assurer l'avenir de ces relations. Or les BB67400 ont plus de 35 ans et les voitures Corail également... © transportrail

Enfin, il ne faut pas oublier que se profile à très court terme une réforme du barème des péages et qu'une partie de la taxe professionnelle est acquittée par les Régions via les conventions d'exploitation des TER. Corail Intercités pourrait donc malgré tout s'inviter à la table de la campagne des élections régionales.

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Paris Est - 20 septembre 2008 - Pour la liaison Paris - Troyes, la Région Champagne Ardenne s'est dotée la première de rames AGC bimodes bicourant. Une solution d'attente dans l'espoir d'une électrification ? © transportrail

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