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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires

France - Suisse : desserte, tarification, matériel roulant

Desserte : un métro national en Suisse

La Région Rhône-Alpes est d'abord organisée autour d'un axe nord-sud sur lequel se greffe l’axe de Saint-Etienne, et un réseau de villes en Savoie et Dauphiné, assez dynamique et caractérisé par l’influence croissante de Genève. Néanmoins, plusieurs liaisons intervilles demeurent faibles : Lyon – Annecy, Genève – Chambéry – Grenoble – Valence (sillon alpin) et dans la vallée du Rhône.

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Nyon - 19 juillet 2023 - Les rames FV-Dosto, aussi appelées Duplex TGL, série 502 pour les CFF, participaient à la stratégie des CFF pour améliorer encore l'exploitation du réseau et la capacité proposée. Entre une conception difficile, compliquée par les exigences particulièrement élevées des associations de handicapés et les déboires du système de compensation du dévers, elles ont essuyé de nombreuses critiques. Elles signent bien involontairement les limites de l'utilisation du réseau existant. Entre Genève et Lausanne, la réalisation d'une ligne nouvelle semble aussi justifiée que difficile à concrétiser. © transportrail

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Montélimar - 1er novembre 2022 - La ligne de rive gauche du Rhône a bien été allégée par la réalisation de la LGV Méditerranée, mais le service voyageur organisé par les Régions demeure notoirement insuffisant. En ligne de mire notamment, les Lyon - Marseille, cadencés seulement aux 2 heures, qui ont été en outre ralentis par l'ajout d'arrêts entre Vienne et Valence au-delà du service initial, et sur lesquels la Région engage de plus en plus fréquemment un matériel inadapté (les TER2Nng ici illustrées). Bilan : une prestation médiocre et des retards chroniques de 15 à 20 minutes. © transportrail

En revanche, la comparaison à l’échelle nationale est vaine, avec une mégapole parisienne et, hormis Lille, aucune métropole millionnaire en habitants à moins de 450 km. La France est un vaste pays à la structure fortement centralisée sur sa capitale, impliquant de fait une autre logique de maillage : les liaisons intervilles sont structurellement plus longues, d’où la recherche de vitesse, alors qu’en Suisse, la compacité du réseau de villes impose une logique de fréquence qui devrait s’appliquer en Rhône-Alpes, mais également sur différents corridors fortement urbanisés en France (arc méditerranéen, val de Loire, Lorraine, Alsace, bassin nordiste…).

Cependant, combien de gares en France ne sont pas desservis a minima toutes les 2 heures ? L’autre écart en matière d’offre porte sur le service du week-end, souvent très allégé voire invisible le week-end : nombre de lignes ne sont desservies que par 3 à 5 allers-retours par jour et que dire de certaines gares maintenues artificiellement ouvertes dont les trains ne s’arrêtent que dans un seul sens, ou sans possibilité d’aller-retour dans la journée ?

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Nantiat - 29 juillet 2014 - Un TER sur la relation Poitiers - Limoges : une liaison entre deux agglomérations de 200 à 270 000 habitants, mais à l’offre de faible consistance composant avec des infrastructures en état médiocre. © transportrail

En Suisse, tout groupement d'au moins 100 habitants doit bénéficier d'au moins 3 allers-retours de transport en commun par jour, 7 jours sur 7. Il s'agit d'abord des Cars Postaux, puis des services ferroviaires. Dès lors que le potentiel de trafic atteint 500 voyageurs par jour, un cadencement horaire de 5 heures à 23 heures doit être instauré.

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Urtenen - 10 juin 2021 - Le Régional Berne-Soleure est une ligne secondaire peu commune puisqu'elle assure la liaison entre deux axes principaux. A voie métrique, elle a bénéficié d'investissements importants pour moderniser le matériel roulant, l'infrastructure et renforcé le service, qui propose une cadence au quart d'heure toute la journée sur la mission régionale (en recourant de plus en plus aux unités multiples, ici avec les automotrices NExT), complétée par le service du RER bernois jusqu'à Bätterkinden cadencé à la demi-heure... © P. Hurzeler

S’il faut reconnaître les difficultés rencontrées en Suisse, elles procèdent notamment de la sollicitation accrue du réseau du fait des politiques de planification des dessertes depuis 1982 : utilisé plus intensément, les installations fatiguent aussi plus vite et les aléas commencent objectivement à être plus difficiles à traiter quand les voies accueillent plus de 200 trains par jour. Le terme de saturation n’y est pas galvaudé !

La gestion du trafic est supervisée par 7 postes de supervision, gérant l’ensemble du réseau : on est donc très loin des 1700 postes d’aiguillages français et du rythme de modernisation, lié à l’insuffisance des moyens d’investissement. Dans la trajectoire du contrat Etat – SNCF Réseau, le seul réseau principal (60% du linéaire) serait télécommandé en… 2070 !

Prix du train et tarification

Le train est effectivement cher en Suisse, surtout par rapport au niveau de vie français (pour mémoire, le salaire minimum en Suisse est à 4500 CHF), mais son usage est d’une évidente facilité, à la fois par l’organisation en réseau cadencé aux correspondances systématiques et ajustées, non seulement entre trains mais avec tous les autres modes de transport, et évidemment sur le plan tarifaire : plein tarif, tarifs dégriffés sur Internet, abonnement demi-tarif ou abonnement général forment l’essentiel de la palette d’offres. Les communautés tarifaires simplifient grandement la multimodalité dans les principales agglomérations.

Entre le yield management tarifaire français, la segmentation InOui / Ouigo sur les liaisons à grande vitesse et les excès de la liberté accordée aux Régions, les ingrédients d’une complexité élevée de l’usage du train, s’ajoutant aux faibles fréquences et aux multiples interceptions pour entretien ou travaux, sont bien réunies en France.

En matière de ponctualité, la densité d’utilisation du réseau arrive encore à maintenir une prestation de qualité. En 2022, le réseau accueillant 12 000 trains par jour (3000 de moins que dans toute la France !) avec une ponctualité à 3 minutes (et non à 5 min 59) de 92,5 % et un taux de conformité des correspondances de 99 %. Même si l'exploitation de certains axes, comme Genève - Lausanne, est très tendue et sujette à de fréquentes perturbations, la robustesse de l'horlogerie ferroviaire suisse n'est plus à démontrer malgré une tension objectivement croissante.

En France, la régularité tangente les 90 %, avec de fortes disparités selon les activités et les territoires : difficile de trouver un Intercités Bordeaux - Marseille à l'heure alors que les trains régionaux de Bretagne ou d'Alsace affichent des scores helvétiques. En outre, la mesure de la ponctualité sur les grandes lignes dépend de la durée du trajet. Ainsi, on peut être considéré à l'heure avec 14 minutes de retard si le trajet dure au moins 3 heures… mais on peut alors rater sa correspondance !

Matériel roulant : un confort plus frustre en Suisse ?

Premier point de comparaison : les voitures Grandes Lignes. Les voitures unifiées type IV de type UIC-Z peuvent être comparées aux voitures Corail françaises. On note deux différences assez fondamentales. D'abord la disposition en vis-à-vis des places est la règle dans les voitures suisses, l'exception dans leurs homologues françaises ; ensuite le confort du siège, moins confortable en Suisse, les Corail les surclassant, même dans la version d'origine (banquette Talon). Les EC250 semblent ne pas faire l'unanimité non plus.

Deuxième repère, sur le matériel régional. La comparaison donne un résultat un peu plus partagé : les sièges des Flirt et des Kiss peuvent paraître parfois assez raides, mais la profondeur d'assise est supérieure aux matériels français qui est de plus en plus courte au fil des nouvelles séries.

Il faut aussi noter une conséquence de la prédominance de l'implantation des sièges en vis-à-vis : pas ou très peu de tablette ! Il n'existe qu'un repose-gobelet pour les sièges situés près des fenêtres. On retrouve cette configuration à la fois sur le matériel régional mais aussi sur les trains Grandes Lignes. Si vous voulez utiliser votre ordinateur pour travailler ou regarder un film, il sera sur vos genoux. Certes, sur certains matériels français, la tablette est dimensionnée au plus juste, mais, pour les longs parcours, à bord des TGV, des Corail, des Omneo Premium voire des Coradia Liner, cette fonctionnalité est quand même possible.

Autre dimension du confort, la restauration : les wagons-restaurants n'ont pas totalement disparu et il est encore possible de déjeuner - ou de dîner - sur une vraie nappe et de vrais couverts avec un service à la place. La distribution automatique est encore assez peu développée : on la retrouve par exemple dans les Flirt du SÖB assurant le Voralpen Express. En comparaison, on pourra prendre les nouvelles rames normandes proposant également cette prestation.

On mettra de côté le confort haut de gamme de certaines voitures de lignes secondaires, notamment sur le MOB et le chemin de fer rhétique, répondant aux particularités touristiques de ces parcours de renommée mondiale. Le confort des matériels modernes, souvent issus des usines Stadler, surclasse généralement très nettement celui des autocars, même sur des lignes de parcours de longueur limitée. Les assises sont généralement mieux dessinées que dans les trains régionaux français... mais dommage qu'il n'y ait pas plus de tablettes pour choisir le moyen de passer le temps !

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