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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
sncf
13 janvier 2013

Le 4ème paquet ferroviaire accéléré ?

La commission européenne propose dans le cadre du "quatrième paquet ferroviaire" d'ouvrir complètement les transports ferroviaires intérieurs en décembre 2019 avec une transition jusqu'en 2023 pour les contrats signés avant 2019. Cela concernerait les liaisons nationales ainsi que les dessertes régionales, pour lesquelles l'Europe envisage de rendre obligatoire la procédure d'appels d'offres. Initialement, il était prévu de réserver la possibilité - motivée - de contrats exclusifs en gré à gré. Cependant, les prises de position des deux principales entreprises ferroviaires, la DB et la SNCF, en matière de gouvernance ferroviaire, ont probablement quelque peu crispé la commission.

Prenant ouvertement partie pour une intégration de la gestion de l'infrastructure dans un groupe piloté par l'exploitant historique, ces deux entreprises vont à rebours des positions affirmées par l'Europe dont on connaît le penchant pour un libéralisme certain. Question de fond : ne sont-elles pas les mieux placées pour savoir ce qui est bon pour le fonctionnement du rail ? Esquisse de réponse : leur vision n'est-elle pas intrinsèquement biaisée ? Et puis est-elle si uniforme qu'elle n'en a l'air ?

En Allemagne, l'ouverture du marché régional a eu pour conséquence l'arrivée de nouveaux opérateurs à hauteur de 20% des km-trains. La DB reconnait d'elle même que cette ouverture a précipité une évolution interne qui lui a permis de se rapprocher des attentes des Landers et des voyageurs, dans un contexte malgré tout difficile quelques années seulement après la réunification. Les coûts de production du km-trains ont diminué, ce qui a favorisé l'essor des dessertes ferroviaires en maîtrisant - autant que possible - les finances des autorités organisatrices. Il existe quelques cas particuliers, comme la gestion de la S-Bahn de Berlin : la mise en appel d'offres pour 2017 de la ceinture semble constituer une réponse du Sénat de Berlin aux manquements de la DB qui jouait un peu trop sur du velours. Enfin, le trafic fret demeure très dynamique par la diversité des transporteurs.

En France, la situation est plus complexe en France. Le marché intérieur est fermé et les autorités organisatrices sont à court de moyens pour financer l'essor attendu des dessertes, tout en dénonçant un manque de transparence sur l'usage de l'argent public et la décomposition des coûts de la SNCF. Sur les liaisons nationales, la complexité tarifaire du yield management masque de moins en moins une augmentation réelle des tarifs : certes, le train reste en France encore un peu moins cher que chez nos voisins, mais cet écart se gomme rapidement et surtout avec une capacité à jouer sur l'insuffisance de l'offre pour accentuer la hausse sur les trains les plus demandés.

Quant au fret, on peut affirmer que si le marché n'avait pas été ouvert en 2006, aujourd'hui, le transport de marchandises serait en état de mort clinique. Les trafics ont chuté, mais c'est aussi le résultat d'un manque de vitalité de l'activité économique française, au moins autant que l'inadéquation des prestations de l'entreprise historique face aux besoins de ses potentiels clients. Pire, la SNCF a été récemment sanctionnée pour avoir biaisée la concurrence (ce qui mériterait qu'on disserte sur l'intérêt d'utiliser des feuilles de pompe pour finir en dessous de 5 sur 20 !)

Pour aboutir à cette mise en concurrence, l'Europe s'oriente vers l'obligation d'une séparation physique, juridique et comptable entre les gestionnaires d'infrastructure et les exploitants. A Paris comme à Berlin, on dit déjà essayer d'infléchir cette position : affaire à suivre !

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30 octobre 2012

Vers une "holding" SNCF ?

Le gouvernement Ayrault semble se rapprocher de la position défendue par la SNCF. La gestion de l'infrastructure serait réunifiée intégrant dans une même structure RFF, SNCF Infra et la Direction de la Circulation Ferroviaire. Cette nouvelle entreprise publique serait rattachée à la holding SNCF tout en étant comptablement indépendante, comme l'exige la directive européenne 91-440. La France pencherait donc le modèle allemand, celui qui aujourd'hui est dans le collimateur de l'Union Européenne qui lui reproche un manque de transparence dans le cadre de l'ouverture du marché à des entreprises concurrentes de l'opérateur historique. Autant d'éléments qui nécessitent une certaine prudence quant à la solidité de cette position.

RFF : une naissance dans la douleur

En 1997, après les grèves de 1995 qui avaient révélé la crise du système ferroviaire français, le gouvernement Juppé avait procédé à la séparation de la gestion et de l'exploitation du réseau ferroviaire en créant un établissement public qui devait d'abord principalement gérer la dette d'Etat sur le réseau ferroviaire, et qui a été chargé de construire une politique de maintenance et de développement, alors qu'il était question d'amputer le réseau du tiers de son linéaire.

Pour financer RFF, le principe de péages avait été mis en place sur le réseau : chaque train devant payer une redevance d'accès et d'utilisation du réseau, avec différents critères. Ces péages étaient censé couvrir les coûts d'entretien du réseau. Or en réalité, seuls les péages en Ile de France atteignent cet objectif. Malgré le relèvement de ces redevances, suscitant de vives réactions à la SNCF, notamment lorsqu'ils concernent le TGV, l'équilibre n'a pas été atteint, amplifiant le manque de ressources du réseau ferroviaire.

Propriétaire en plein titre des infrastructures et d'une partie du patrimoine foncier (les gares demeurant à la SNCF), RFF a néanmoins pu engager une politique de rationalisation des surfaces. L'entreprise publique a aussi, et surtout, mené à bien la réalisation des LGV Méditerranée, Est et Rhin-Rhône, ainsi que la modernisation de plusieurs milliers de kilomètres de lignes classiques, en particulier dans le cadre des Plans Rail initiés par les Régions.

La réalisation de ces travaux ne fait pas que des heureux : compte tenu de l'ampleur de la tâche, les contraintes sur la conception des horaires est maximale compte tenu des marges de financement mobilisables. On peut même s'interroger sur un effet de balancier : RFF demandant SNCF Infra d'améliorer sa productivité, la différence entre la productivité recherchée et celle réalisée se fait par le biais de fermetures partielles ou complètes, et ce sont les activités de transporteur de la SNCF (comprendre, le voyageur !) qui subissent les conséquences. Enfin, RFF a également engagé un vaste programme de centralisation de la commande du réseau en 17 postes de régulation, contre 17000 aujourd'hui.

Malgré ces sujets qui peuvent animer les échanges, entre le mouvement des Régions en faveur du développement de l'offre TER et l'intérêt de RFF à voir son réseau proposer un maximum de sillons, les enjeux étaient au moins partiellement convergeant et au fil du temps, RFF a saisi l'enjeu d'une coopération avec les autorités organisatrices dans la recherche d'un meilleur usage du réseau. En revanche, RFF a toujours pointé la faiblesse du fret comme une des causes des faibles ressources d'exploitation du réseau.

Reste que la partition était restée au milieu du gué. L'ingénierie était pour grande partie restée dans le giron de la SNCF, les équipes opérationnelles de maintenance aussi, de même que les horairistes et régulateurs. Le partage des gares avait pris un tournant kafkaïen : à RFF les quais, les passerelles,  souterrains, verrières et abris de quais en marquise ainsi que l'éclairage ; à la SNCF les gares et le mobilier léger à quai (bancs, poubelles, petits abris, systèmes d'information).

Trois possibilités, une orientation... mais encore beaucoup de questions

La France avait trois possibilités :

  • le statu quo, confortable à court terme mais calamiteux à moyen terme ;
  • le modèle allemand, avec le retour dans le giron SNCF de RFF;
  • le modèle espagnol ou suédois, avec un gestionnaire d'infrastructures gérant toutes les installations fixes, y compris les gares, laissant à l'opérateur la relation avec les clients, celle du transporteur.

C'est la deuxième qui aurait donc été retenue.

Elle est toutefois lourde de responsabilités pour la SNCF qui devrait assumer désormais seule toutes les responsabilités et devrait démontrer qu'elle est capable de faire mieux avec cette nouvelle organisation : mieux que l'ancienne, celle de 1997 ; mieux que les temps historiques d'une entreprise intégrée mais qui avait tendance à se focaliser sur quelques secteurs du transport et négliger le réseau capillaire régional. Entre temps, la régionalisation est passé par là et a permis de sauver - au moins jusqu'à présent - les lignes secondaires, et la SNCF a très progressivement pris le tournant du transport du quotidien. Il lui reste encore beaucoup - énormément - à faire pour atteindre le niveau d'attente de la population, notamment autour des grandes villes.

La nouvelle organisation dessinée par le gouvernement réunifierait la gestion des infrastructures... mais maintiendrait la structure RFF en tant que gestionnaire du réseau. RFF sera rattaché à la holding SNCF... ce qui pose encore quelques questions :

  • Quelles seront les prérogatives de chacune des composantes de la holding ? comment l'indépendance des fonctions sera assurée ?
  • Comment se réorganisera la maîtrise d'ouvrage, la conception des opérations de maintenance et de développement du réseau, entre RFF et SNCF Infra ?
  • La réintégration sera-elle source d'efficacité (dans la conception des opérations, dans leur planification, dans l'impact sur les circulations) et de productivité des ressources humaines et budgétaires (en clair, fera-t-on mieux pour moins cher avec moins de monde ?). Bref, pourra-t-on faire mieux sur le réseau sans dépenser plus ?
  • Comment se comportera face aux opérateurs privés un gestionnaire d'infrastructure intégré dans la même structure que l'exploitant principal ? Y aura-t-il équité de traitement, notamment sur le fret, où le - très léger - rebond de 2011 est principalement dû à l'effet amortisseur des opérateurs privés, masquant l'effondrement des tonnages de la SNCF ?
  • Les vieux démons ne risquent-ils pas d'être de retour quant à l'utilisation du réseau ? Quelle sera la politique d'aménagement du territoire de la nouvelle organisation ferroviaire, dans un contexte de conjoncture économique difficile, alors que la SNCF fait ses marges les secteurs d'activité subventionnés directement (le TER) et indirectement (le TGV, puisque le péage ne reflète pas l'amortissement des charges de capital, in fine supportées par le contribuable via la fiscalité nationale et locale, ni la réalité des coûts de maintenance du réseau, n'évoluant qu'à la marge via les péages) : qu'en sera-t-il sur la gestion de l'infrastructure et la politique de développement du réseau ? La nouvelle holding ne sera-t-elle pas tentée de fermer certaines lignes ?

Le scénario retenu ressemble à celui qui a conduit à la création de France Télévisions par le regroupement en 1990 d'Antenne 2 et FR3, devenues en 1992 France 2 et France 3 : malgré la présidence commune, les deux entreprises ont conservé leur hiérarchie, leur structure opérationnelle (information, sports, programmes...), sans réelle rationalisation.

L'incertitude européenne

Assurément, le modèle allemand était assuré d'être adopté par la France, pas tant parce qu'il est de bon ton de faire comme le voisin, mais aussi parce qu'il permettait d'esquiver un sujet socialement difficile. La SNCF saura-t-elle être la DB française de demain ? Le feuilleton ne fait que commencer puisque  le gouvernement précise que rien n'est réellement tranché sur la position du gestionnaire unifié de l'infrastructure, compte tenu de l'incertitude sur la compatibilité du scénario présenté avec les prochains textes européens qui devraient accentuer la demande de séparation entre l'infrastructure et les transporteurs.

L'Europe milite en effet pour la séparation forte entre le propriétaire des installations, qui à ses yeux doit être chargé de la maintenance, du développement, de l'accès et de la régulation du réseau : un modèle notamment adopté par l'Espagne qui a ajouté les gares dans le giron de l'infrastructure afin de procurer des recettes supplémentaires par les loyers des commerces en gare... mais ardemment combattu par la DB et la SNCF qui donnent ensemble de la voix à Bruxelles.

Suite au prochain épisode ?

25 septembre 2012

Concurrence : la SNCF pointée de tous bords

L'autorité de régulation des activités ferroviaires (l'ARAF), l'autorité de la concurrence et l'Union Européenne viennent quelque peu secouer la SNCF.

ARAF  demande transparence de Gares et Connexions

La première vient de mettre en demeure le groupe de séparer clairement les comptes de Gares et Connexions, l'entité gérant les gares, comme annoncé en 2010. L'opération devait être effective au début de l'année 2011 : selon l'ARAF, l'objectif n'est pas atteint. La SNCF encourt des pénalités qui pourraient atteindre 3 à 5 % de son chiffre d'affaires, ou des mesures de restrictions de l'accès au réseau ferré national. En outre, l'ARAF souhaiterait comprendre pourquoi la SNCF emprunte sur le marché à un taux de 3,5 % des crédits qu'elle prête à un taux de 5 % à Gares et Connexions.

Concurrence déloyale sur le Fret... et pourtant le déclin !

L'autorité de la concurrence, saisie par ECR, filiale de la DB, vient quant à elle d'émettre un rapport sur les distorsions de la concurrence quant à l'accès au réseau ferré national des opérateurs de fret, en pointant le comportement de la filiale SNCF Geodis. Elle pointe :

  • des prix anormalement bas de la SNCF sur les trains massifiés depuis 2006, inférieur à la couverture des coûts complets,
  • un abus de position dominante pour la formation et la délivrance du diplôme de conducteurs,
  • la transmission d'informations confidentielles entre la maintenance de l'infrastructure et l'activité Fret entre avril 2006 et septembre 2008,
  • la sur-réservation de sillons et non restitution à RFF entre janvier 2006 et février 2009,
  • une tarification dissuasive des cours de marchandises,
  • un favoritisme à l'égard de VFLI sur l'utilisation de trois sites,
  • la sur-réservation de wagons spécialisés pour le transport de granulats,
  • la location à des tarifs inférieurs au marche de locomotives pour Naviland Cargo depuis octobre 2007,
  • des accords-cadres liant la réalisation d'une prestation de wagon isolé contre des contrats de trains massifiés,
  • des conventions d'occupations des terrains embranchés,
  • des tarifs discriminatoires sur la location de wagons.

Malgré ces errements pointés, la situation du fret à la SNCF ne cesse de décliner : certes, la conjoncture économique est particulièrement déprimée, mais l'entreprise a réduit la voilure de 5 à 30 % entre l'été 2011 et l'été 2012. Parallèlement, malgré l'atonie du moment, la part des opérateurs privés atteint désormais 30 %. Fret SNCF espère que le gouvernement ne tardera pas à engager la mise en oeuvre d'un cadre social harmonisé dans le domaine du transport ferroviaire, ce à quoi les opérateurs privés font preuve d'une certaine méfiance, et à renforcer la sévérité à l'égard des conditions de circulation du transport routier. Depuis le temps qu'on en parle, on sait que tous les gouvernements se sont cassés les dents sur le puissant lobby des camioneurs... Alors certes "le changement c'est maintenant", mais ira-t-on jusqu'à des mesures coercitives à l'égard des circulations de camions ? On peut quand même douter...

Les usagers font entendre leur voix

Toujours au chapitre de la concurrence, les associations d'usagers, et en particulier la FNAUT, commence à affirmer clairement leur position favorable à la possibilité de mettre en appel d'offres, comme pour les réseaux urbains, des blocs homogènes de dessertes régionales et interrégionales. La fédération souligne les limites bdugétaires des Régions, qui, face à l'augmentation des besoins, se confrontent aux coûts actuels qui limitent les possibilités de développement. L'appel d'offres serait, selon la FNAUT, d'abord un moyen de connaître les marges de manoeuvre possibles, et, si le pas était franchi, de l'utiliser soit par une politique de volume, soit par une réduction des coûts à offre constante. De quoi peut-être mettre le doute parmi les élus régionaux, parfois engoncés dans des postures politiques, sinon politiciennes...

L'Europe s'interroge sur les EPIC

En outre, l'Union Européenne pointe le statut d'EPIC (Etablissement Public Industriel à caractère Commercial) en le considérant comme une garantie publique illimitée, bénéficiant de conditions de financement plus avantageuses qu'une autre entreprise. Considérant cette forme d'aide déguisée de l'Etat, l'Union Européenne demande au gouvernement français de réexaminer le statut des EPIC, qui, pour sa part, aurait tout à craindre socialement d'une réforme de cette ampleur dans le domaine ferroviaire, en particulier à la RATP et à la SNCF, après les mouvements connus à La Poste.

La SNCF répond sur la question de la dette

Dans ce contexte, on peut mieux comprendre les prises de positions de la SNCF quant à la réforme du système ferroviaire français dont on parle tant mais dont on ne voit toujours pas le moindre début de commencement, à savoir la réforme de la réforme de 1997 aboutissant à la création de RFF.

Principal sujet, la dette. La SNCF s'était débarrassée d'une partie de sa dette, liée au financement des infrastructures et particulièrement des lignes nouvelles, lors de la création du gestionnaire d'infrastructuré, conformément à la directive européenne 91-440. Plombant RFF, la dette ne peut être reprise par l'Etat sans être qualifiée de dette d'Etat, ce qui viendrait accentuer le déséquilibre des comptes de la nation, et mettre la France dans une situation encore plus périlleuse qu'elle ne l'est actuellement.

La SNCF propose donc de reprendre une partie de la dette, à condition que le solde, soit environ les deux tiers, soit porté par le contribuable, par une fiscalité supplémentaire, et par l'usager, en augmentant la tarification des trains régionaux et franciliens pour augmenter le taux de couverture des charges par les recettes, aujourd'hui d'environ 25 à 30 % selon les régions.

Evidemment, la réponse ne s'est pas fait attendre : l'association des régions de France, qui regroupe les autorités organisatrices du TER, condamne le propos de la SNCF en rappelant que les usagers supportent les méfaits de trois décennies de tout-TGV, largement insufflés par la SNCF, sur l'état du réseau régional. Quant à l'ARAF, elle reste très perplexe sur la faisabilité des propositions et sur l'impact sur la position de l'entreprise dans le système ferroviaire.

La SNCF ne manque évidemment pas une occasion de mettre en avant sa convergence de vue avec la DB sur les vertus d'une réunification ferroviaire en holding sous le contrôle de la SNCF, passant sous silence quelques sujets de concurrence sur certaines relations pour lesquelles la DB voudrait jouer sa propre carte (notamment Thalys et Francfort - Londres).

Il n'en demeure pas moins que l'entreprise profite du silence - assourdissant - d'un ministre manifestement long à se mettre en activité, donnant l'impression que le gouvernement n'était guère prêt à prendre les commandes de l'Etat. Près de six mois après son installation, on attend toujours les premières orientations sur un sujet d'une importance capitale tant le réseau ferroviaire français se retrouve pris dans une impasse économique à une échéance qui ne cesse de se rapprocher, et alors même que les besoins sont grandissants. On parle de comités, de groupes de réflexion : il fallait peut-être les organiser avant, de sorte à être prêt à passer à l'action à l'issue d'élections dont le résultat était prévisible.

Les annonces sont attendues pour le mois d'octobre : espérons que l'effet d'annonce ne fera pas pschitt...

19 août 2012

SNCF et DB d'une même voix ?

Interrogés au cœur de l’été par le quotidien Le Figaro, les présidents de la DB et de la SNCF ont fait preuve, du moins en apparence, d’une certaine convergence de vue. Il était d’abord question de l’Europe ferroviaire : handicapée par l’hétérogénéité des techniques, parfois savamment entretenue par certains ingénieurs après guerre, l’harmonisation destinée à faciliter les relations ferroviaires transfrontalières reste encore aujourd’hui passablement embryonnaire. L’ERTMS est depuis dix ans dans toutes les têtes mais pas encore sur toutes les voies, et la Suisse a un train d’avance, une fois de plus. Cependant, d’européenne, cette signalisation n’en a que le nom puisque les variantes sont presque aussi nombreuses que les Etats. Les deux présidents en appellent à l’Union Européenne et aux Etats pour les financements : il semblerait qu’il y aurait d’autres priorités…

Il était aussi question de concurrence : les deux entreprises semblent plutôt en phase et considérer qu’elle est justifiée sur les axes où le train peut avoir un part de marché dominante, alors que sur les axes où le train est moins performant, la coopération serait privilégiée. C’est probablement la raison pour laquelle la DB lorgne sur les liaisons avec le Royaume Uni, alors qu’elle souhaite coopérer avec la SNCF sur les liaisons France – Allemagne, au marché encore naissant.

Troisième sujet, l’abolition des barrières sur le matériel par l’harmonisation des admissions du matériel roulant. En filigrane, l’affaire Eurostar / Alstom / Siemens. On pourrait aussi citer, mais avec la Suisse, l’affaire du Flirt, tant pour CEVA que les liaisons avec l’Alsace. Si les questions de compatibilité avec l’infrastructure ne sont pas simples (les installations pouvant parfois fortement diverger de la situation théorique censée faire foi lors de la conception d’un nouveau train), celles relatives à la sécurité pourraient faire l’objet d’un accord de réciprocité : on se demande toujours pourquoi on serait moins en sécurité dans un même matériel du simple fait du franchissement d’une frontière qui ne change pas les lois de la physique et notamment de l’énergie cinétique !

Quatrième sujet, et non des moindres, le fret. Côté français, la lente et certaine agonie de la branche fret de la SNCF contraste avec la bonne tenue de sa rivale germanique. La conjoncture économique n’aide pas : on retrouve à la fois les maux d’un pays désindustrialisé et d’une offre inadaptée aux besoins, rendue un peu plus complexe par la multiplication des travaux de rénovation d’un réseau français trop longtemps négligé. Cependant, il faudrait s’interroger sur les atermoiements de l’entreprise depuis un quart de siècle et la perception de ses clients qui lui ont, de façon sans cesse croissante, tourné le dos sans qu’aucun dirigeant ne s’interroge ouvertement sur la qualité de la démarche commerciale de l’entreprise.

Les deux présidents ont cependant convergé sur un point : il faut réduire la distorsion de concurrence générée par la prise en charge par l’Etat (donc par nous tous) des coûts du transport routier, largement subventionné de façon indirecte par l’absence de redevance d’usage des infrastructures correspondant aux coûts réellement générés par la circulation des camions. Pour la DB et la SNCF, il faut renchérir le coût du transport routier pour créer une concurrence loyale entre le rail et la route.

On entend déjà les réactions…

6 juillet 2012

La SNCF lance IDBUS

La SNCF a présenté cette semaine IDBUS, un nouveau produit destiné à proposer des services de transport à faible prix, qui sera lancé à la fin du mois entre Paris, Lille, Bruxelles, Amsterdam et Londres. 20 relations seront proposées au départ de Paris, 12 au départ de Lille.

L'objectif est de ne pas laisser les actuelles compagnies d'autocar seules sur le marché de ces liaisons économiques, et de proposer sur ces relations porteuses, une offre de transport à bas coût afin de dissuader toute concurrence.

La SNCF a souhaité également proposé un haut niveau de service sur ces autocars, avec assises inclinables, liseuses individuelles, écrans 19 pouces, connexion Wifi gratuite et toilettes à bord. Autant de service qu'on aimerait bien trouver à bord des trains aux couleurs de l'entreprise.

Du côté des tarifs, le prix des billets est fixe, qu'il soit commandé à l'avance ou en dernière minute : une logique à l'opposé de ce l'entreprise érige en modèle économique pour le train.

Le lancement d'IDBUS pourrait être un signe avant coureur d'une réflexion de la SNCF concernant certaines relations ferroviaires, notamment les lignes transversales, sur laquelle elle doit faire des investissements conséquents de renouvellement de matériel roulant, mais où elle déplore parallèlement le manque de trafic pour justifier des investissements.

Le ronronnement d'un moteur d'autocar se fait régulièrement entendre quand il s'agit d'évoquer les perspectives de ces relations (par exemple Lyon - Bordeaux). Le lancement d'une telle offre d'autocars, en misant sur une desserte dissociée (par exemple Lyon - Clermont - Montluçon / Lyon - Limoges / Lyon - Périgueux - Bordeaux) pour éviter trop de cabotage, pourrait dédouaner l'entreprise ferroviaire d'efforts sur le niveau des prestations offertes aux voyageurs.

On pourrait aussi remarquer que la SNCF ne manque pas de matériel ferroviaire voyageur inutilisé (locomotives, voitures voyageurs), qui pourraient constituer la mise de fond de liaisons ferroviaires n'empruntant pas les lignes TGV mais qui pourraient fort bien proposer une offre à bas coût, moins rapide que le TGV mais moins lente et plus sûre que l'autocar.

En heures creuses, l'accès à Paris semble possible. En revanche, en heures de pointe, il faudait peut-être recourir à des gares extérieures, comme pour les compagnies aériennes low coast qui utilisent des aéroports secondaires aux tarifs d'accès moins élevés que Roissy et Orly. Alors pourquoi ne pas  envisager un Creil - Bruxelles par Compiègne, Saint Quentin, Aulnoye ; un Creil - Lille par Longueau ; un Paris - Strasbourg par Chalons sur Marne et Nancy ; un Paris - Bordeaux par Orléans ; un Paris - Nantes par le même itinéraire ; un Paris - Rennes par Chartres, voire un Melun - Lyon par la ligne classique, au-delà des TER caboteurs ?

id-bus

Néanmoins, l'affichage de ces publicités dans les gares cette semaine, notamment en Ile de France, a de quoi - une fois de plus - susciter réactions : l'application des horaires d'été sur de nombreuses lignes Transilien entraîne d'importantes carences de capacité et les voyageurs sont un peu plus entassés dans des rames à la netteté douteuse et à la ponctualité aléatoire. Les "clients" de la SNCF aimeraient un peu plus de considération que ce genre de publicité aux relents obscènes, et que l'entreprise se consacre à sa mission première de service public qu'elle a si souvent tendance à oublier.

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5 juillet 2012

Thello : premier bilan après 6 mois

Entreprise fondée Trenitalia, la compagnie italienne de chemins de fer, et Véolia-Transdev, Thello a repris la relation nocturne Paris - Venise au mois de décembre dernier, mettant ainsi fin à Artesia, le service assuré par la SNCF et Trenitalia. En revanche, les TGV diurnes Paris - Milan ont été intégralement repris par la SNCF qui a obtenu sa propre licence par le biais d'une filiale pour assurer l'exploitation jusqu'à Milan.

Thello a repris le parc de voitures lits et couchettes des anciennes relations nocturnes Artesia. Pour la traction, en France, la compagnie loue à Akiem, filiale spécialisée de la SNCF, trois BB36000 surnuméraires, et qui font ainsi leurs premières prestations en service voyageurs. Toutefois, les trains étant tracés par Vallorbe, il faut trois locomotives pour emmener ce train de Paris à Milan.

270412_36007paris-lyon2Paris gare de Lyon - 27 avril 2012 - La BB36007 louée par Akiem à Thello, a conservé la base de sa livrée initiale. Elle a reçu un drapé blanc, comme pour les locomotives estampillées Fret, sur lequel Thello a appliqué son logo. © transportrail.

270412_36007paris-lyon4Paris gare de Lyon - 27 avril 2012 - Le Thello pour Venise mis à quai sous les verrières de la gare de Lyon. Côté matériel roulant, pas de nouveauté majeure, Thello cherche d'abord à se distinguer par le service à bord, mais pour l'instant, la différence par rapport à Artesia reste minime... © transportrail.

Thello souhaite également reprendre la liaison nocturne Paris - Rome et développer une desserte diurne entre Lyon et Milan, arrêtée lors du retrait des ETR460 pendulaires, pour laquelle il est question de trois allers-retours en semaine et deux le week-end.

Cependant, la liaison resterait handicapée par des temps de parcours peu compétitifs du fait des performances limitées de l'infrastructure : par Culoz, la vitesse s'abaisse à 130 km/h dans la cluse de l'Albarine ; par Saint André le Gaz, elle chute même à 90 km/h ; au delà, l'ascension de la Maurienne reste un frein à la rapidité de la liaison, pour laquelle la barrière alpine favorise la part de marché du transport aérien. Bref, ce serait un défi que de lancer cette relation ferroviaire, ce qui suppose que Thello ait acquis une certaine solidité pour pouvoir se lancer sur ce marché.

En attendant, l'été approche et Thello espère attirer du monde en Italie par ses services...

3 avril 2012

40 Euroduplex supplémentaires

La SNCF a donc avalisé une commande de 40 rames EuroDuplex destinée à Alstom, par une levée d'option au marché existant, portant à 95 l'effectif prévisionnel de ce matériel. C'est en quelque sorte la fin d'un feuilleton à multiples intrigues : il y avait la question des péages de RFF sur les lignes à grande vitesse qui menaçait la stratégie de la SNCF et l'équilibre des comptes de l'activité Voyages, l'épisode "Eurostar achète Siemens", un soudain attachement aux rames Sud-Est, les effets de la conjoncture économique sur la fréquentation, et au final cet aboutissement non dénué d'une certaine volonté de soutien de l'Etat à l'activité de l'entreprise Alstom.

Alstom a ainsi annoncé que la procédure contre le contrat Siemens dans l'affaire Eurostar pourrait être abandonnée.

En revanche, cette commande importante pourrait précipiter la réforme d'une partie du parc Sud-Est, plus particulièrement les rames non concernées par le programme de rénovation 3 actuellement en cours.

22 mars 2012

Francfort - Marseille : la SNCF alliée à la DB

C'était devenu un sujet de tension : c'est devenu un sujet de consensus. Demain 23 mars sera lancé le premier aller-retour Francfort - Strasbourg - Lyon - Marseille, exploité par Alléo, la filiale 50% SNCF - 50% DB assurant déjà les liaisons Paris - Francfort / Stuttgart / Munich. Pour débuter le service sera assuré par des TGV de la SNCF, Siemens ne pouvant livrer à temps des ICE3.

ICE4 (2)L'ICE3 lors de sa présentation à Innotrans en 2010. La livraison de ce matériel destiné aux liaisons européennes de la DB sera plus tardive que prévue. © transportrail

Les "retrouvailles" de la SNCF et de la DB vont au-delà de cette relation : les deux entreprises, poids lourds du ferroviaire européen, entendent converger sur d'autres sujets liés à l'exploitation, la commercialisation et les services à bord du train et en gare. D'autre part, les deux entreprises sont aussi en accord sur le modèle de gouvernance du système ferroviaire, la SNCF souhaitant tendre vers le modèle de la holding incarné par la DB (le gestionnaire d'infrastructure filiale du groupe). Par ce biais, l'alliance SNCF - DB voudrait montrer à la Commission Européenne que ses réticences devront convaincre deux acteurs majeurs du ferroviaire.

Toutefois, la DB souhaite aussi se placer sur les relations avec la Belgique : elle est au capital de Thalys à hauteur de 10%. Deux pistes sont envisagées : soit une montée en puissance de la DB au sein de Thalys, soit le lancement d'un produit indépendant par la seule DB sur Paris - Bruxelles - Cologne et Londres - Bruxelles - Cologne - Francfort.

7 mars 2012

TER : une grogne certaine

Plusieurs Régions constatent depuis l'hiver une dégradation des conditions de réalisation de l'offre TER, et ont manifesté leur mécontentement auprès de la SNCF. Le mouvement touche essentiellement des Régions de la moitié ouest : Midi-Pyrénées, Aquitaine, Pays de la Loire, Basse-Normandie, ainsi que la Picardie et la Franche-Comté, qui menace de suspendre le versement des subventions d'exploitation au titre de la non-conformité du service. Trains supprimés, retards récurrents, compositions insuffisantes...

En Midi-Pyrénées, outre la dégradation de la qualité du service, le bilan des nouvelles dessertes suite à la mise en place de l'horaire cadencé continue de susciter des commentaires peu flatteurs, surtout sur l'impact des nouveaux horaires sur les conditions de travail des utilisateurs du train. RFF et la SNCF se retranchent derrière les concertations menées avant l'application de l'horaire, mais ces opérations ont plus été de l'information qu'un réel dialogue sur la construction de l'offre. D'ailleurs, comment pourrait-il en être autrement vus les délais impartis et le niveau de technicité requis ? Reste l'impression que la construction technique a parfois omis de prendre en compte d'autres contraintes que celles du réseau ferroviaire : celles de ses utilisateurs...

Enfin, alors que le prix du carburant à la pompe repart à la hausse, et même si son coût ramené à la minute de travail n'a cessé de baisser depuis quarante ans, la fréquentation des transports ferroviaires régionaux pourrait connaître une nouvelle poussée, ce qui en principe devrait susciter de la part de l'exploitant le souci de "faire bien" pour convaincre les nouveaux utilisateurs de la justesse de leur choix.

Or, vous l'aurez remarqué, le sujet des transports en général, et de l'avenir du transport ferroviaire en particulier, est complètement absent de l'agitation électorale, de laquelle on peine à entendre ce qu'on pourrait qualifier de proposition construite, réfléchie et pragmatique.

22 février 2012

La SNCF commandera 40 Euroduplex

La stratégie industrielle peut parfois recevoir un petit coup de pouce de la part de l'Etat. C'est par exemple le cas pour Alstom, dont les commandes de TGV sont en train de se tarir : le Président - candidat a ainsi annoncé qu'il sollicitait la SNCF pour définir une prochaine commande.

Problème, du fait de la conjoncture, il y a de l'excédant dans le parc TGV et de façon prudente, la SNCF a engagé une troisième rénovation de 60 de ses rames TGV Sud-Est. Cependant, en annonçant ses résultats 2011, la SNCF a également indiqué qu'elle étudiait les conditions de levée d'une option de 40 rames EuroDuplex, ce qui amorcerait la réforme des rames Sud-Est à partir de 2016 pour les éléments non rénovés. Il se dit aussi que la posture de RFF sur une prévision à moyen terme de l'évolution de ses péages serait en train de provoquer un réexamen du sujet par l'exploitant national...

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