Lignes régionales : une étude intéressante du CEREMA
Organisme rattaché au ministère de l'écologie, le CEREMA, centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement, a publié une étude intéressante sur les modalités d'organisation des lignes régionales. L'analyse s'est concentrée sur quatre cas : le Blanc-Argent, Guingamp - Paimpol, Guingamp - Carhaix et Busseau - Felletin. Particularité des trois premières, elles sont bien estampillées SNCF, intégrées aux conventions d'exploitation des TER Centre et Bretagne, mais sur place, ce n'est pas la SNCF qui exploite ces lignes. Elles sont affermées à un sous-traitant : la Compagnie du Blanc-Argent, filiale de Keolis pour la première et CFTA, filiale de Transdev, pour les deux lignes bretonnes. Seule Busseau - Felletin est exploitée directement par la SNCF.
Valençay - 18 mars 2005 - Les X74500 n'ont pas eu des débuts faciles et restent relativement agressifs sur la voie. Heureusement, les sections courantes ont été modernisées de Salbris à Valençay. Ne restent plus que les zones de gare. La Compagnie du Blanc-Argent sait faire preuve de polyvalence et de dynamisme pour porter à bout de bras sa ligne... mais que fait-elle dans le réseau dit national ? © transportrail
Il apparaît d'abord que le ratio charges / recettes est significativement meilleur sur les lignes affermées. Sur le Blanc-Argent, il atteint 22%, 21% sur la ligne de Carhaix et 15% sur celle de Paimpol. En comparaison, Busseau - Felletin plafonne à 8%. Le prix du km-train ressort à 9€ sur les lignes affermées et à 21,80 € sur Busseau - Felletin.
Ensuite, pour la partie infrastructure, SNCF Réseau réussit le tour de force d'atteindre des taux de couverture de plus de 160% sur les lignes affermées, en facturant des péages sur la base des coûts de la maintenance SNCF Réseau... alors que celle-ci est confiée aux fermiers, dont les coûts sont nettement inférieurs en raison de techniques certes plus rudimentaires, mais validées par l'EPSF et SNCF Réseau. Dans ces conditions, on ne peut être qu'étonné de la faible participation de SNCF Réseau au renouvellement de ces lignes compte tenu de la trésorerie accumulée sur le dos des Régions.
Paimpol - 29 juillet 2016 - Exploitant historique du dernier vestige du Réseau Breton, CFTA, groupe Transdev, propose des prestations à 9 € du km-train mais la Région ne bénéficie pas de cet avantage dans la convention qui la lie à la SNCF. L'affermage ne devrait pas survivre à l'expérimentation de la gestion en DSP : Transdev jouit d'un avantage significatif dans un futur appel d'offres. © E. Fouvreaux
Cet avantage important sur les coûts d'exploitation et de maintenance s'explique d'abord par une plus grande polyvalence des agents assurant tantôt la conduite de trains, de cars, la maintenance ou la commercialisation et ensuite par une organisation de type PME plus en adhérence avec les besoins de la ligne qu'une direction TER devant gérer selon les mêmes processus des lignes variées.
Il apparaît enfin que les lignes affermées ont davantage recherché une coordination entre le train et l'autocar, notamment pour assurer autant que possible le transport scolaire par le train, et en utilisant l'autocar en complément de l'offre ferroviaire, et non en substitution. Les fermiers utilisent de façon plus rationnelle le matériel ferroviaire et recourent à l'autocar au-delà de la capacité atteignable avec l'infrastructure actuelle. A l'inverse, Busseau - Felletin et son unique aller-retour n'est nullement coordonnée avec les offres routières départementales qui s'accaparent sans difficultés l'essentiel du flux.
Cette réflexion sur l'affermage confirme bien qu'un autre modèle économique d'exploitation des lignes régionales est possible. L'affermage ne permet cependant pas à la Région de bénéficier des moindres coûts d'exploitation puisque SNCF Mobilités se rémunère pour la gestion du contrat et SNCF Réseau applique des péages sans tenir compte des coûts réels d'entretien.
Une étude qui confirmera, s'il le fallait, que la délégation de service public à l'issue d'un appel d'offres ouvert sous contrôle des Régions peut avoir un effet positif sur les coûts d'exploitation et la pérennité du service public ferroviaire...