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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires

La ligne du Blanc-Argent

C’est une des dernières lignes françaises à voie métrique. Elle est moins connue que les lignes de montagne de la vallée de Chamonix, de Provence, de Corse ou de Cerdagne, mais elle ne manque pas d’attrait touristique en offrant une traversée de la forêt de Sologne à l’écart des axes routiers. Cependant, la ligne du Blanc-Argent est aussi un véritable outil d’aménagement du territoire et de service public, notamment pour les élèves des établissements scolaires de Romorantin.

Elle est intégrée à la convention Région Centre – SNCF, mais cette dernière en délègue l’exploitation à la Compagnie du Blanc-Argent. Autrefois entreprise locale, elle a été rachetée par Keolis, filiale de la SNCF, en 2000.

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Villeherviers - 11 avril 2006 - Résumé de l'évolution du BA en image : matériel moderne et renouvellement progressif de l'infrastructure. L'X74504 quitte une section de voie d'origine en double champignon et entre sur une portion équipée en rails U60 recyclés. L'assise de la voie était encore inégale à l'époque de la prise de vue.© transportrail

Constitution de la ligne

A son apogée la ligne du Blanc-Argent s’étirait sur 191 km d’Argent sur Sauldre au Blanc. Intégrée au plan Frecyinet de 1879, la ligne était concédée au Paris-Orléans en 1883. La construction était engagée en 1899 et l’ouverture se déroulait en 4 étapes entre le 26 décembre 1901 (Salbris – Romorantin) et le 17 novembre 1902 (Ecueillé – Le Blanc). Ainsi, la nouvelle ligne reliait plusieurs lignes du Paris-Orléans :

  • au Blanc, la transversale Port de Piles – Argenton sur Creuse ;
  • à Buzançais, la ligne de Tours à Châteauroux ;
  • à Gièvres, la ligne de Tours à Nevers ;
  •  à Romorantin, la ligne de Blois à Villefranche sur Cher ;
  •  à Salbris, la grande ligne de Paris à Toulouse ;
  • et à Argent sur Sauldre la ligne d’Orléans à Bourges par Sully sur Loire.

Etablie à voie unique et métrique, la ligne était donc isolée du reste du réseau du PO. Ses 191 km étaient établis de façon économique avec un profil souvent favorable. Les rampes maximales atteignent cependant 15 pour mille, notamment au droit des franchissements des lignes Paris – Toulouse et Tours – Nevers.

CP-valençay

Valençay au temps de la vapeur avec une gare comprenant alors pas moins de 4 voies à l'activité pour le moins dense. Le bâtiment voyageur tranche radicalement avec l'image d'une ligne secondaire ordinaire.

La Compagnie du Blanc-Argent se substituait au PO après création de la compagnie le 24 juin 1906.

La vocation de la ligne était à la fois d’irriguer finement la Sologne et le Berry vers les grands axes ferroviaires et de concourir à l’acheminement des marchandises notamment les productions agricoles. Elle bénéficiait de l’apport de lignes de chemin de fer ou de tramway d’intérêt local cumulant pas moins de 1000 km de lignes.

L’exploitation était initialement assurée par 16 locomotives à vapeur type 030T fournies par ANF, Buffaud et Robatel, tractant 56 voitures et fourgons et 200 wagons de marchandises produits par ANF. Le BA rechercha dès les années 1920 le moyen de limiter l’usage de ses locomotives à vapeur mais les premiers essais de locomotives Diesel s’avéraient infructueux. Les premiers autorails apparaissaient en service voyageurs dès 1936 avec différents types, notamment Billard, Verney et De Dion. Après-guerre, la dieselisation était engagée pour le trafic marchandises avec 5 locotracteurs amorçant le retrait de la traction vapeur effectif en 1954.

CP-romorantin

Romorantin, probablement juste après la deuxième guerre mondiale - L'autorail a pris le relais de la vapeur sur les services voyageurs. Les engins utilisés sont d'apparence bien frêle, souvent dérivés de la construction d'autocars : ici le MZ24 construit par les usines De Dion. (cliché X)

CP-loreux

Loreux, probalement dans les années 1970 - Les OC2 De Dion provenaient du Réseau Breton. Avec les X210 Verney reçus en 1950, ils se partageaient la desserte voyageurs principale.

La contraction de la ligne débuta en mai 1939 avec la fermeture de la section Salbris – Argent aux voyageurs d’abord puis aux marchandises entre 1951 et 1973. Parallèlement, la section Buzançais – Le Blanc disparaissait en 1953. Dans les années 1980, la section de Luçay le Mâle à Buzançais subissait un destin différent puisque l’exploitation de la voie métrique fut définitivement arrêtée en 1988… mais pour transformer la section Argy – Buzançais à voie normale afin de faciliter la desserte des silos céréaliers et d’éviter les transbordements à Buzançais. Le service voyageurs se stabilisait donc sur la section Salbris – Luçay le Mâle. Cependant, la section de Valençay à Luçay Le Mâle, en mauvais état, a vu son exploitation suspendue en octobre 2009.

CP-valençay2

Valençay, vers 1985 - Les années 1980 assuraient l'avenir de la ligne avec l'acquisition de 2 autorails X240 auprès de Socofer et la rénovation des X210. Ceux-ci adoptaient une nouvelle face avant, pas très grâcieuse, pour améliorer la sécurité en cas de choc (pas si rare dans une région réputée pour son gibier), et une nouvelle livrée en rupture avec le traditionnel rouge et crème. Les touristes prennent la pose avec leur bicyclette...

Ainsi, des 69 km préservés, ne subsistent que 56 km ouverts à l’exploitation.

Une ligne portée par la Région

La ligne du Blanc-Argent a en outre affronté plusieurs velléités de fermeture, face à un trafic purement local, principalement constitué de scolaires. La Région Centre a, depuis plus de 15 ans, manifesté son soutien à la ligne, avec des investissements portant sur les gares, le matériel roulant et l’infrastructure. La Région a en effet investi près de 20 M€ sur la voie, avec un programme de remplacement des rails à double champignon par des rails recyclés provenant des LGV Sud-Est et Atlantique. L’armement de la voie est ainsi passé de 28 à 60 kg au mètre. L’opération a d’abord concerné les zones les plus critiques, dans les courbes. En 2011, un programme de 13,6 M€ a été négocié entre RFF et la Région Centre portant sur le renouvellement intégral de 38 km, évitant à la voie de reposer sur du sable. De la sorte, la vitesse de 70 km/h pouvait être à nouveau pratiquée sur la ligne. Il a fallu pour ces travaux fermer totalement la ligne et assurer la desserte par autocar, ce qui n’était jamais arrivé depuis 1902.

En outre, la Région a investi 1 M€ sur l’aménagement des gares et 12,1 M€ en 2003 pour acquérir 5 autorails X74500 et rénover les 2 X240. L’arrivée des X74500 en 2003, livrés par CFD, a permis le retrait du service des X210 Verney datant du début des années 1950, dont deux avaient été modernisés dans les années 1980, parallèlement à l’arrivée des X240. Quoique rénovés en 2009, les X240 ont été mis à l’arrêt en 2015 du fait de l’absence du Dispositif d’Arrêt Automatique des Trains à bord de ces autorails.

 

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La Ferté Imbault - 21 juillet 2006 - Les X240 ont troqué dans les années 1990 leur livrée crème et marron au profit de la découpe TER Centre à base de bleu Isabelle. Ils ont été rénovés une seconde fois en 2009... et sont désormais remisés sans utilisation. © transportrail

Service public et tourisme

La ligne du Blanc-Argent est aujourd’hui principalement dédiée à la desserte de la Sologne et en particulier de Romorantin et Valençay. La clientèle de la ligne est très largement dominée par les élèves des établissements scolaires le long de la ligne, à Salbris ou à Romorantin.

Cependant, la ligne dispose d’un potentiel touristique : les amateurs de tourisme vert peuvent facilement accéder à la forêt solognote depuis Paris et Orléans notamment ; le château et le musée automobile de Valençay sont à 10 minutes de la gare ; et le train touristique du Bas Berry fait revivre une partie de la ligne.

Créée en 1989, la Société d’Animation du Blanc-Argent se donnait pour objectif de faire revivre une partie de la ligne désaffectée. Quatorze ans plus tard, le Train du Bas Berry obtenait son autorisation préfectorale d’exploitation entre Ecueillé et La Foulquetière, prolongée à Heugnes en 2004 et atteignant Argy en 2005. A terme, il n’est pas à exclure que la section de Luçay le Mâle à Valençay soit convertie à l’exploitation touristique, ce qui amplifierait le potentiel touristique du TBB mais aussi du service régulier.

Aussi, la systématisation de l’arrêt à Salbris sur les Intercités Paris – Bourges faciliterait l’accès au BA, tout en offrant une combinaison d’accès rapide à Romorantin en 2h15, comme c’est par exemple le cas le soir avec la combinaison 3913+61295 (Paris Austerlitz 17h07 – Salbris 18h33 / 18h42 – Romorantin 19h19), alors que les autres combinaisons horaires, avec changement à Orléans et Salbris, mettent plus de 3 heures. De quoi potentiellement laisser une journée suffisamment large pour profiter de la Sologne, y compris la visite du château de Valençay, demeure de Talleyrand.

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