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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires

Des tramways interurbains en pays cauchois ?

La procédure administrative visant à transférer la propriété de l’emprise ferroviaire entre Le Havre (Harfleur) - Rolleville à la Métropole havraise suit son cours : elle précède la création d’une nouvelle ligne de tramway jusqu'à Montivilliers dans un premier temps, avec une fréquence de 8 min (contre 30 à 60 min pour le train).

 

Peut-on envisager une suite ? Si l‘agglomération au sens physique ne dépasse pas Rolleville, au plan administratif, elle est plus étendue, jusqu’à Etretat.

 

Au-delà de Montivilliers

 

Première étape : restaurer une desserte de Rolleville, avec un service plus intense que les 4 allers-retours par jour. Si Montivilliers aura un tramway toutes les 7 min 30, on peut considérer qu’une fréquence de 15 à 30 minutes pourrait répondre aux besoins de cette première section. Il semble ensuite relativement aisé d’atteindre Criquetot-l’Esneval. 

 

Criquetot-l'Esneval - 12 avril 2024 - Deux stations seraient envisageables dans la traversée de cette localité, dont l'une à proximité du magasin Intermarché qu'on devine en arrière-plan. La desserte voyageurs a été supprimée en 1970. La ligne était à l'origine à double voie. © transportrail

 

Ecrainville - 12 avril 2024 - Entre Criquetot et Les Ifs, la végétation a largement envahi la voie dont on remarque ici un usage agricole au premier plan. © transportrail

 

Cette première section suburbaine pourrait questionner la tension d’alimentation des tramways, entre le maintien du 750 V ou l’adoption du 1500 V. Etant donné que ces dessertes impliqueraient un matériel distinct, plus confortable, l’option bitension serait intéressante pour optimiser le coût du projet (moins de sous-stations) et optimiser le besoin en énergie (moins de pertes en ligne).

 

La branche d’Etretat

 

Les Loges - 12 avril 2024 - La voie de l'antenne d'Etretat est toujours là, sous une végétation qui semble entretenue : pourtant, la desserte ferroviaire a disparu en 1951 pour les voyageurs et en 1972 pour les marchandises. © transportrail

 

Bordeaux-Saint-Clair - 13 avril 2024 - Au droit de l'ancienne gare, très excentrée, la voie présente un état bien meilleur : aurait-on commencé les travaux du futur tramway proposé dans ce dossier ? Quand même pas : c'est pour le vélorail ! © transportrail

 

Etretat - 13 avril 2024 - La gare a été reconvertie en colonie de vacances. Elle est à l’écart de la cité touristique, mais le parking est toujours bien occupé, signe que les 10 minutes de marche ne sont pas un obstacle. De toute façon, il est difficile d’envisager une arrivée plus proche du centre du bourg et de la mer, à moins de revoir en profondeur la circulation automobile, et probablement de nécessiter une déviation du flux de transit. Il vaut peut-être mieux s’en passer… © transportrail

 

La traversée de la gare des Ifs

 

Venant du Havre, la voie rejoint la ligne arrivant de Bréauté et la bifurcation entre les antennes de Fécamp et d’Etretat se situait en aval. Il semble possible de réaliser une voie parallèle, pour avoir un système tramway distinct, au gabarit et sous décret de sécurité (STPG) idoines : il faudra faire du ménage dans la collection de matériel ferroviaire ancien du château, exposée aux quatre vents.

 

Cependant, ce schéma conduit à la question suivante : se limite-t-on à un tramway Le Havre – Etretat ou doit-on passer à l’échelle supérieure ? Dans cette hypothèse, il faudrait donc également « récupérer » la ligne Bréauté – Fécamp… ce qui amène à s’interroger sur la configuration de la gare de Bréauté.

 

Le réseau interurbain se composerait en théorie alors d’un schéma en X avec des liaisons depuis Fécamp et Etretat vers Bréauté et Le Havre.

 

La gare de Bréauté

 

Actuellement, les trains arrivent de Fécamp sur une voie distincte de l’axe Paris – Le Havre, mais préalablement un très court tronc commun, à hauteur du poste d’aiguillages, avec les voies utilisées pour la manœuvre des trains de l’antenne fret de Notre-Dame-de-Gravenchon.

 

Bréauté-Beuzeville - 11 décembre 2016 - Premier jour de restauration du service Bréauté - Fécamp après le renouvellement de la voire. On aperçoit en arrière-plan le poste d'aiguillages qui empêche actuellement la création d'un itinéraire distinct pour l'antenne de Fécamp. © transportrail

 

La réception d’un tramway au gabarit 2,40 m, alimenté en 750 V et répondant aux normes de sécurité urbaine n’est pas possible en l’état actuel des installations : il faudrait une voie distincte strictement étanche des infrastructures exploitées sous décret Sécurité – Interopérabilité.

 

La future modernisation de la signalisation de l’axe Paris – Le Havre sous ERTMS sera assurément le moment propice pour procéder aux modifications d’installations requises pour réaliser une voie dédiée « tramway » distinctes des voies « train » :

  • le poste de Bréauté devrait être supprimé, libérant le foncier nécessaire pour rendre étanche la voie Fécamp à quai ;
  • la communication existant en avant-gare entre la voie Fécamp et la voie Gravenchon devra aussi être supprimée ;
  • une communication devra être insérée – au chausse-pied –  depuis la voie 2 vers la voie Gravenchon à l’extrémité des quais, sans trop réduire la longueur du faisceau de service, qui n’est déjà pas très long. Elle sera utilisée par les liaisons Le Havre – Lillebonne.

 

Un schéma progressif

 

Bréauté – Fécamp constituerait une tranche optionnelle : elle est techniquement plus complexe et implique un volet juridique assez consistant, cependant déjà connu car identique à celui nécessaire pour le transfert de propriété de la section Le Havre – Rolleville, à la base de la présente réflexion.

 

Ce serait l’occasion de relever la vitesse à 100 km/h au lieu de 80 sur cette ligne et d’accélérer l’arrivée à Bréauté, assujettie à une longue section à 40 km/h.

 

La réouverture des sections Rolleville – Les Ifs et Les Ifs – Etretat implique donc d’aménager une voie dédiée sur 900 m à hauteur du château des Ifs pour faire circuler les tramways sur des voies distinctes de l’antenne Bréauté – Fécamp. Le système « Le Havre – Etretat » peut donc être autoportant. Il faudra déjà gérer les nombreuses procédures associées à cette perspective, et envisager les conséquences pour le vélorail d’Etretat. L’antenne Bréauté – Fécamp achèverait cette perspective de tramways interurbains du pays cauchois.

 

 

Quel service ?

 

Le schéma de base proposerait une desserte à la demi-heure du Havre à Criquetot avec prolongement d’un service sur deux à Etretat.

 

L’intégration au réseau de l’antenne Bréauté – Fécamp aboutirait au prolongement des missions Criquetot à Fécamp.

 

La desserte depuis Bréauté proposerait à l’année une desserte de Fécamp, à cadence horaire, pour les liaisons Paris – Rouen – Fécamp. En complément, d’avril à septembre, un service direct Bréauté – Etretat pourrait capter une importante clientèle touristique, avec une correspondance systématique sur les Paris – Le Havre, cadencés à l’heure.

 

Pour réaliser ce service, le matériel devrait répondre aux caractéristiques suivantes :

  • Gabarit 2,40 m ;
  • Alimentation en 750 V, et éventuellement 1500 V pour les sections interurbaines afin de limiter le nombre de sous-stations ;
  • Vitesse maximale de 100 km/h, suffisante pour utiliser presque intégralement les aptitudes du tracé des lignes considérées ;
  • Capacité d’environ 100 places assises en ménageant des espaces avec strapontins pour accueillir des vélos, des voyageurs en fauteuil roulant, des poussettes, et des voyageurs debout sur le parcours urbain ;
  • Longueur maximale de 44 m, compatible avec les installations existantes – et futures – du réseau.

 

L’hypothèse d’un tram-train a été écartée : il faudrait développer un matériel compatible avec le gabarit 2,40 m, et en l’absence de cohabitation avec des circulations ferroviaires classiques, un matériel « mono-système » apte à 100 km/h est suffisant.

 

Cette perspective est inspirée par l’Appenzellerbahn (en Suisse), dont la desserte St Gall – Appenzell a fusionné avec la Trogenerbahn au moyen d'une section en voirie. Elle est assurée à l’aide de tramways Tango de Stadler. La fusion entre le petit tramway de Gmunden et la Traunseebahn (en Autriche) a été accompagnée de l’arrivée de tramways Tramlink du même constructeur.

 

Fécamp - Boulevard de la République - 12 avril 2024 - La liaison vers Le Havre est assurée par la ligne 508 assurant le service le plus rapide, avec 8 allers-retours en 1h15. © transportrail

 

Yport - Place du 18 juin - 13 avril 2024 - La ligne 509 effectue aussi le trajet entre Le Havre et Fécamp, mais en passant par Etretat et Yport. Elle propose également 8 allers-retours en semaine, mais en 1h40. © transportrail

 

Des conséquences sur le réseau urbain havrais ?

 

Quant aux dessertes vers Le Havre, il faudra aussi examiner l’évolution du réseau urbain : cette perspective pourrait justifier la création d’un nouvel itinéraire d’accès au centre, suivant l’actuel bus C2 (rue Joffre et avenue Coty) pour arriver à l’Hôtel de Ville perpendiculairement aux voies actuelles et envisager un terminus au sud de la rue de Paris.  De la sorte, les liaisons interurbaines seraient dédiées aux lignes interurbaines, tandis que le service urbain jusqu’à Montivilliers (ou Rolleville) serait reporté sur cette nouvelle section.

 

Etretat - Rue Guy de Maupassant - 13 avril 2024 - Signe de l'appartenance à la même intercommunalité, la ligne 13 du réseau havrais vient jusqu'à Etretat, toutes les heures et tous les jours en 1h05 de trajet. © transportrail

 

Cette réflexion sortant largement du périmètre de la Communauté Urbaine du Havre, et pourrait faire partie des dossiers du futur bassin de mobilité réunissant aussi la Région Normandie, le Département de Seine-Maritime, Caux Seine Agglo et la Communauté de communes de Fécamp, par exemple au travers d’une Société Publique Locale.

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