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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
14 juillet 2018

Les limites de l'autorail à hydrogène

Allemagne : feu vert pour l'exploitation, mais des commandes en moins

Le verkehrsbund Rhein-Rhur (VRR) a annulé le 11 mai dernier la commande d'autorails Alstom Coradia iLint fonctionnant à l'hydrogène avec pile à combustible. C'est un revers pour cette nouvelle technologie, qui fait beaucoup parler, y compris en France. Cependant, l'EBA, l'autorité de sécurité ferroviaire en Allemagne, a autorisé le 11 juin dernier ces rames à assurer un service commercial avec voyageurs. C'est en Basse-Saxe que débuteront les activités des autorails à hydrogène.

Néanmoins, les performances de ces autorails peuvent faire question : dotés de 2 piles à combustible de 180 kW, ils embarquent également des batteries d'une puissance moyenne de 221 kW pouvant atteindre 450 kW pendant 40 secondes. Les deux moteurs électriques développent 660 kW chacun, bien plus que ce que peuvent fournir les batteries et la pile. En résumé, le Coradia iLint n'est pas un foudre de guerre...

Le fonctionnement du train s'appuie d'abord sur les batteries, notamment au démarrage, et la pile à combustible viendrait en complément une fois le train lancé, pour le maintien en vitesse et la réalimentation des batteries, qui profiteraient également de la récupération au freinage. Cependant, un autre élément vient quelque peu timorer l'enthousiasme en faveur de ces trains : qu'en est-il sur des lignes à profil difficile avec des rampes de 20 à 30 / 1000 sur plusieurs dizaines de kilomètres ?

Hydrogène : pas si propre que cela ? 

La comparaison du rendement énergétique entre la production et la consommation constitue un point de fragilité important pour les motorisations à hydrogène, surtout en incluant l'acheminement et le stockage de cette énergie : plus il est fait usage d'énergies fossiles, plus l'hydrogène a besoin d'être transporté, par tubes ou plus souvent par voie routière, moins l'hydrogène s'avère pertinente par rapport au gasoil. Et compte tenu des méthodes de production d'électricité en Allemagne, le sujet devient des plus sensibles.

En France, d'après l'ADEME, le rendement énergétique de l'hydrogène, du producteur au consommateur, est de 20%, si elle est produite de façon vertueuse à partir d'une énergie renouvelable : un résultat équivalent aux motorisations thermiques et inférieur aux véhicules à batteries. Outre les méthodes de production de l'hydrogène, entrent en jeu les conditions d'acheminement et de stockage, avec des cycles de compression / décompression lors du transfert et le recours aux poids-lourds pour convoyer cette énergie. L'hydrogène semble donc plus adaptée à une logique de circuits de production courts, en misant sur des sources existantes de production électrique : on pensera à l'hydro-électricité dans les régions de montagne, mais aussi pour le cas français à la gestion des plages d'utilisation des centrales nucléaires en période creuse (la nuit notamment), pour profiter de la capacité à stocker cette énergie primaire qu'est l'hydrogène.

Le dossier n'est pas clos, loin de là, mais on peut déjà retenir cette évidence : il n'y a pas de solution universelle. Pour s'affranchir autant que possible des énergies fossiles, la traction électrique ferroviaire doit donc concevoir de nouvelles méthodes. L'hydrogène peut en être une, mais il y a encore besoin d'en préciser le domaine de pertinence non seulement technique mais aussi économique et écologique. Pour l'ADEME, dans le domaine de la motorisation de véhicules lourds, la pile à combustible à hydrogène viendrait en complément des batteries pour prolonger substantiellement l'autonomie de ces dernières et optimiser les cycles de récupération de l'énergie au freinage. C'est finalement le schéma vers lequel se dirige le Coradia iLint, et on est donc loin d'un train entièrement autonome grâce à sa seule pile à hydrogène.

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Commentaires
K
Avec le projet du Zillertalbahn, il y'a déjà une idée pour les coûts d'infrastructure.<br /> <br /> <br /> <br /> Selon Eurailpress, le contrat entre lme Zillertalbahn et Verbund Hydropower toutes les infrastructures (liaison au réseau électrique, installations pour électrolyse, installations pour charger les celules...) coûtent 15Mio Eur.<br /> <br /> <br /> <br /> Donc, ils produisent l'hydrogène pour 1700km/jour (=33km x 2 directions x 26 trains par direction)<br /> <br /> <br /> <br /> N'oubliez pas, le ZB est une ligne à écartement 760mm et en conséquence les véhicules sont petites et bien légères.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> https://www.eurailpress.de/news/technik/single-view/news/tirol-gruener-wasserstoff-fuer-die-zillertalbahn.html
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M
D'accord avec les conclusions de l'article : il n'y a pas d'alternative miracle et universelle au pétrole. <br /> <br /> <br /> <br /> Pour que l'hydrogène soit intéressant :<br /> <br /> * Production locale<br /> <br /> * Valorisation d'une énergie perdue ou débouché permettant de faire aboutir un projet de stockage d'électricité "verte"<br /> <br /> * à la place de gazole<br /> <br /> * et considération économique = là où le recours aux batteries seules sans charge intermédiaire n'est pas possible<br /> <br /> <br /> <br /> Pour que le GNV soit intéressant :<br /> <br /> * Production locale<br /> <br /> * Valorisation de déchets locaux "renouvelables" (ex. agriculture raisonnée)<br /> <br /> * à la place de gazole<br /> <br /> * et considération économique = sous réserve d'équipement d'une flotte conséquente dans un même dépôt<br /> <br /> <br /> <br /> Pour en revenir au train, la question à se poser, me semble-t-il, c'est celle du "moins pire". Sur le cycle de vie complet de l'hydrogène "moyen" actuel (produit à partir d'hydrocarbures), est-on pire ou pas que le gazole ? La réponse à cette question peut permettre de choisir entre plusieurs scénarios dont au moins :<br /> <br /> * Scénario 1 = Vu le surcoût, faire de l'hydrogène seulement là où on en a du "vert" et où il n'y a pas de caténaires<br /> <br /> * Scénario 2 = On fait le maximum d'hydrogène afin de maîtriser la technologie, même si ce sont des surcoûts importants à court terme<br /> <br /> C'est une stratégie nationale...
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F
Merci.<br /> <br /> Ok ça change la donne....
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F
Est ce que le VRR a t-il purement et simplement annuler sa commande ou a t-il transformé cette dernière pour des véhicules diesel?
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R
A tous les arguments pertinents déjà développés dans l'article et les commentaires pour expliquer les limitations de ce genre de technologie aujourd'hui, on peut ajouter celui de la sécurité. Peut on garantir une sécurité raisonnable aux passagers de ce genre de véhicule transportant de l'hydrogène en cas d'accident ? Quid de l'utilisation en tunnel ?<br /> <br /> <br /> <br /> Il y a du travail pour tempérer l'entousiasme souvent un peu trop débordant de certains politiques dès qu'il est question de nouvelles technologies "miracles" pour assurer la transition énergétique. Ou sinon on risque de voir cet entousiasme fortement tempéré lors du premier accident sérieux ayant des conséquences dramatiques (on peut d'ailleurs dire la même chose de l'hyperloop).
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A
C'est un peu comme l'eau chaude...plus elle est produite localement meilleur est le rendement final. Prévoir des réseaux "hydrogène" est en partie anti-économique (sauf pour continuer à caser des X-Mines, Enarques ou autres) et pas écologique du tout actuellement du fait que la production, centralisée et de masse, se fait par craquage. Ce qui ne fait que déplacer les problèmes de pollution!<br /> <br /> Dans le développement il faut prévoir des étapes et pas des coups de balanciers chers à notre beau pays. Nombre de petites lignes avec TER, donc à cadencements faibles, pourraient déjà y trouver leur compte. En sachant en plus que l'hydrogène ne fonctionne pas si mal en utilisation thermique directe.<br /> <br /> C'est une très bonne chose que des essais grandeur nature se fassent et certainement la "rentabilité" ne sera pas au rendez-vous avant quelques années...mais parfois il faut faire des choix et sur le climat nous n'avons que trop tardé. Comme dit par un autre intervenant si les industriels s'y retrouvent les solutions techniques suivront (cela a bien été le cas pour les moteurs thermiques pourtant très complexes et à rendement malgré tout limité).
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A
Un lien se dessine avec votre dossier récent sur la ligne du Médoc Bordeaux-Le Verdon, et la volonté du député local Benoît Simian d'en faire une ligne pilote en France pour cette technologie:<br /> <br /> -profil platissime<br /> <br /> -proximité de la Centrale nucléaire du Blayais qui ne dispose pas de retenue d'énergie potentielle à proximité (encore, du fait de l'environnement platissime...)<br /> <br /> -ancienne raffinerie de Pauillac, à proximité immédiate de la gare que l'on pourrait aisément raccorder à la centrale nucléaire par un câble sous l'estuaire si ce n'est déjà fait, pour en faire un site de production et de stockage d'hydrogène<br /> <br /> <br /> <br /> Pourquoi pas... même si les bimodes actuels feraient très bien l'affaire.<br /> <br /> Pour moi il faudrait renouveller la caténaire au minimum jusqu'à Macau (RER bordelais); idéalement jusqu'à Pauillac qui doit absolument voir un service cadencé à l'heure. Au-delà, vers Lesparre, Soulac et Le verdon on a un terrain de jeu qui semble effectivement aussi propice que possible à tester cette technologie.
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K
Pour une ligne, qui roule en cadencement de 30 minutes c'est certainement plus efficace de la électrifier avec un centenaire.<br /> <br /> <br /> <br /> La seule avantage du Hydrogène dans ce cas : on peut produire l'hydrogène avec l'électricité de la nuit et stocker. Mais pour ça il y'a aussi une solution locale beaucoup mieux: Ils pompent de l'eau vers les barrages dans les montagnes avec l'électricité pas utilisé par les consommateurs pendant la nuit. avec cette méthode on perde beaucoup moins.<br /> <br /> <br /> <br /> une discussion en Autriche:<br /> <br /> https://schienenweg.at/index.php?thread/33728-neues-von-der-zillertalbahn/&pageNo=1
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A
Un projet intéressant est actuellement discuté dans le Zillertal en Autriche. Comme mentionné dans l'article, le problème est la proximité de la production de l'hydrogène. L'hydrogène sera "fabriqué" localement et ensuite stocké avant d'être utilisé par les nouveaux trains. Ceux-ci devrait être commander cet automn et on devrait connaître un peu plus sur leur performance. Il reste encore le point de la perte d'énergie lors de la transformation de l'éléctricité en hydrogène et retour. Est-ce vraiment plus économique ou ne sera-il pas moins cher d'éléctrifier la ligne de chemin de fer.<br /> <br /> http://www.tt.com/wirtschaft/standorttirol/14589997-91/leuchtturm-auf-schiene-zillertal-gibt-wasserstoff.csp
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