L'offensive low-cost et la fin du train ?
IDBUS est mort, vive Ouibus ! La SNCF ne veut pas rester inactive face au développement des liaisons nationales par autocar libéralisées par la loi Macron. Ainsi, Starshipper, Megabus, Flixbus, Isilines sont déjà en train de placer leurs pions (enfin... leurs autocars !) sur le réseau autoroutier français. Loin des beaux discours du gouvernement sur la parfaite et naturelle complémentarité entre le train et l'autocar, il s'agit d'une concurrence frontale et la plus agressive qui soit. Ainsi par exemple, Flixbus propose une liaison Paris - Bourges - Clermont Ferrand en 5h30 pour seulement 1 € ou une ligne Paris - Lille en 3 heures pour 9 €. Pour la "presse du coeur", l'autocar est une alternative au co-voiturage. Dans les faits, c'est le train qui déguste avec une érosion accélérée de sa fréquentation.
Les mesures de la SNCF mises en oeuvre cet été, avec les "Happy Hours" sur Intercités et le concept TGV "Pop" ont certes permis de limiter la casse et même de faire mieux qu'en 2014 côté trafic, mais l'opérateur s'est bien gardé de parler du résultat comptable.
Ouibus marque l'entrée de la SNCF dans le cortège des autocaristes pour le trafic intérieur avec pas moins de 85 allers-retours, desservant 26 villes, qui seront mis en service d'ici la fin de l'année. L'objectif est de transporter par autocar pas moins de 4 millions de voyageurs l'année prochaine et 8 millions en 2018. Elle mise sur le développement de partenariats avec des autocaristes régionaux pour mettre rapidement en ligne ces nouveaux services. Il s'agit de faire vite puisque les concurrents procèdent de même, notamment Starshipper et Flixbus.
Ainsi, seront desservies par Ouibus :
- Paris - Rouen - Le Havre
- Paris - Caen
- Paris - Le Mans - Rennes - Saint Brieuc - Brest
- Paris - Le Mans - Rennes - Lorient - Quimper - Brest
- Paris - Le Mans - Angers - Nantes
- Paris - Bordeaux (avec une variante de cabotage desservant Orléans, Tours et Poitiers et un service direct)
- Paris - Orléans - Bourges - Clermont Ferrand
- Paris - Toulouse (une ligne avec arrêt à Limoges, une ligne avec arrêt à Brive)
- Paris - Amiens - Lille - Dunkerque
- Paris - Strasbourg via Reims et Metz ou via Nancy
- Paris - Lyon - Grenoble
- Paris - Lyon - Marseille
- Lyon - Marseille - Nice
- Bordeaux - Toulouse - Montpellier - Nîmes - Marseille
S'ajoutent évidemment les liaisons actuelles d'IDBUS vers Londres, Amsterdam, Barcelone et Milan.
La SNCF consent quand même encore - mais pour combien de temps ? - à faire du train en développant également Ouigo, l'offre à grande vitesse mais à petits prix avec de nouvelles destinations : Tourcoing (pour la desserte de l'agglomération lilloise), Haute Picardie, Angers, Nantes, Rennes, Roissy et Massy-Palaiseau. Il est aussi question d'une liaison Intercités de fin de semaine Paris - Strasbourg sur le modèle de Paris - Bordeaux.
Aux Echos, le président de la SNCF s'est dit prêt à faire perdre des clients au train pour les conserver sous le giron SNCF, par le développement de modes alternatifs au chemin de fer. Au moins c'est dit. Plus précis encore, il estime que le train perdra 10% de clientèle.
Avec une telle évasion de la clientèle, jamais vue jusqu'à présent, que restera-t-il du chemin de fer en France dans 5 ans ? Quelles seront les conséquences pour l'économie des dessertes ferroviaires, qu'elles soient nationales ou régionales ? Que la SNCF tourne le dos au train n'est pas une surprise quand on se proclame opérateur de "mobilités". L'atonie des Régions est étrange mais les élections approchent et qu'il ne faut pas jeter de l'huile sur le feu.
La concurrence débridée sur la route au détriment du rail est une injure aux intentions écologiques, mais les écologistes préfèrent jouer au règlement de comptes par médias interposés. Pour faire bien, les congressistes de la COP21 seront transportés par train pour entretenir les illusions, probablement avant une cure de fermeture de lignes qui se comptera en milliers de kilomètres et qui est déjà en préparation... Le démantèlement du réseau ferroviaire pourra-t-il être stoppé à temps ?