16 juin 2022

Vallée du Rhin : besoin de sillons pour le fret

En 2021, 800 000 camions ont transité par les itinéraires routiers alpins à travers la Suisse : c'est 150 000 de plus que l'objectif fixé par la confédération. Afin de développer encore le transport ferroviaire de marchandises, notamment sur l'axe Lötschberg - Simplon, plusieurs actions sont étudiées : d'abord, est prévue la construction d'un nouveau terminal multimodal à Milan Smistamento, pour augmenter la capacité de transfert en accédant à un bassin industriel italien fortement générateur de flux. Ensuite, il va falloir composer avec la capacité disponible en Allemagne dans la vallée du Rhin. L'achèvement du quadruplement entre Karlsruhe et Bâle n'est désormais plus attendu avant 2035 voire 2037. Au nord de Karlsruhe, la congestion des itinéraires n'est pas une légende. Aussi, toutes les pistes sont examinées... même le passage par la France !

En ligne de mire, le maillon faible en rive gauche du Rhin : une ligne de desserte fine du territoire dans le jargon français, qu'on pourrait traduire comme un potentiel sous-utilisé dans d'autres langues (allemand, suisse allemand, suisse romand, italien... à vous de choisir). Strasbourg - Lauterbourg suit le Rhin en rive gauche, mais contrairement à la section Strasbourg - Bâle, le parcours n'est pas électrifié et dispose d'une signalisation moins performante. Surtout, faute d'investissements de renouvellement, l'état de l'infrastructure se dégrade et le risque d'apparition de ralentissements à 40 km/h est réel à court terme. Néanmoins, cet itinéraire intéresse.

Pour en faire un itinéraire complémentaire, il faudrait cependant améliorer la performance de l'itinéraire :

  • évidemment renouveler l'infrastructure pour circuler à vitesse nominale même avec des trains lourds, et s'interroger sur la vitesse nécessaire puisque le tracé est assez favorable : pour le fret, on sait qu'une vitesse de 100 à 120 km/h est suffisante, mais il faudrait examiner la vitesse utile pour le service voyageurs afin d'optimiser les roulements (quand gagner 5 minutes fait gagner une rame en ligne, ça n'est pas anodin sur la facture globale) ;
  • électrifier Strasbourg - Lauterbourg de sorte à simplifier l'organisation de la traction : c'est d'autant plus justifié que la ligne peut participer, au moins sur une partie du parcours, au développement du RER strasbourgeois... et évidemment à se passer des énergies fossiles (surtout avec des trains de voyageurs majoritairement omnibus et pour partie dans une métropole avec zone à faibles émissions) ;
  • côté allemand, il faudra aussi tirer de la caténaire entre Lauterbourg et Wörth pour assurer la continuité électrique ;
  • en Allemagne encore, la voie unique Lauterbourg - Wörth est-elle compatible avec l'ensemble des besoins de circulations de fret et de voyageurs, avec le projet de relation régionale transfrontalière ? ;
  • toujours en lien avec le RER strasbourgeois, la capacité de la ligne est aujourd'hui correcte, mais le débit offert par le BAPR à cantons longs pourrait être un handicap, au moins sur la partie où le service périurbain serait renforcé ;
  • sujet capacitaire connexe : l'ouverture la nuit de l'itinéraire, impliquant a minima une tenue des postes en 3x8 et non en 2x8 comme aujourd'hui... en attendant mieux et une éventuelle modernisation intégrant une télécommande de l'axe ;
  • à l'arrivée à Strasbourg, il n'existe pas aujourd'hui de raccordement direct entre la ligne de Lauterbourg et le contournement fret de Strasbourg par l'ouest de la ville : sa réalisation semble a priori délicate, ce qui amènerait à maintenir le rebroussement au triage de Hausbergen.

Et pour couronner le tout, il se dit que l'électrification de la section Wörth - Germersheim - Speyer aurait été en partie financée par les collectivités locales moyennant une interdiction du trafic fret pour la quiétude des riverains. Le théorème français voulant que les promesses n'engagent que ceux qui les croient s'appliquerait-il aussi de l'autre côté du Rhin ?

La perspective de trains de fret internationaux sur la ligne de Lauterbourg aurait enfin pour effet collatéral de bousculer l'intention, toujours pas concrétisée par une demande officielle de la Région Grand Est, de transfert de gestion de cette ligne en vue d'un contrat associant exploitation et gestion de l'infrastructure : en effet, c'est un critère d'exclusion du périmètre d'application potentielle de l'article 172 de la Loi d'Orientation des Mobilités.


02 juin 2021

Strasbourg : un accord pour le RER

La Région et l'Eurométropole s'accordent sur la mise en oeuvre du RER strasbourgeois avec pour principe une augmentation minimale de l'offre dans les gares de l'agglomération d'au moins 25%, certaines voyant leur desserte doubler.

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(document Eurométropole)

Les services seront étendus jusqu'à 22h30 pour mieux s'adapter aux rythmes urbains. Les gares de Vendenheim, Roethig, Bischheim, Schiltigheim et La Wantzenau seront érigées en pôles d'échanges multimodaux. La structure de desserte évoluera progressivement avec la constitution d'une diamétrale Saverne - Strasbourg - Sélestat. L'ouverture de la 4ème voie entre Vendenheim et Strasbourg constituera le facteur déclenchant. La desserte de la ligne Strasbourg - Lauterbourg sera traitée en priorité car il s'agit de l'axe le plus faible de l'étoile de Strasbourg.

Il faudra en outre s'attaquer à un sujet délicat : l'amélioration des infrastructures. L'alimentation électrique autour de Strasbourg date de 1957 et n'a pas évolué depuis. L'augmentation du trafic périurbain aura pour effet d'accroître la sollicitation des installations : quoique sur du réseau structurant, on ne voit apparaître à ce stade aucune perspective stable de financement. On le sait, le contrat Etat - SNCF Réseau est structurellement régressif puisqu'il est fondé sur un renouvellement à l'identique et non sur un maintien du niveau de performances, faisant fi de l'évolution du trafic. En conséquence, il est probable que SNCF Réseau tendra la sébille à la Région et l'Eurométropole.

En complément, l'Eurométropole confirme le prolongement de la ligne F des tramways jusqu'à Wolfisheim (4 km et 9 stations) et relance le vieux dossier du BHNS vers Wasselonne.

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09 juillet 2019

Grand Est : 30 Régiolis transfrontaliers

Après les accords entre la Région et les Lander voisins sur l'évolution de la desserte régionale transfrontalière, le deuxième acte de la démarche s'est déroulé le 5 juillet dernier au Conseil Régional du Grand Est avec l'approbation d'une commande de 30 rames Régiolis à Alstom, dans une version bimode et transfrontalière. Le principe avait été validé en début d'année et finalement, la commande est encore plus importante que prévue. Elle représentera un investissement total de 376 M€ qui sera partagé entre les 4 autorités organisatrices à due proportion des besoins de la Sarre, de la Rhénanie-Palatinat et du Bade-Wurtemberg. Ces rames devront entrer en service en 2024, pour l'instauration des nouvelles dessertes... avec un opérateur qui n'est pas encore connu mais qui sera désigné dans un processus lui aussi transfrontalier.

En complément, 9 rames Régiolis périurbaines ont également été commandées, dont 5 en version 4 caisses et 4 en version 6 caisses, pour étoffer le parc et mieux répondre à l'augmentation du trafic.

Enfin, la Région Grand Est annonce son intention d'expérimenter 5 rames Régiolis munies de batteries alimentées par caténaire et par une pile à hydrogène. Au total, la Région a donc délibéré sur un budget matériel roulant de 500 M€, exclusivement chez Alstom, qui assemble le Régiolis à Reichshoffen.

03 juin 2019

Grand Est : accord avec le Bade-Wurtemberg

Et de trois ! En une année, la Région Grand Est a noué des accords avec les trois Lander voisins pour le développement de liaisons ferroviaires régionales franco-allemandes avec la Sarre, la Rhénanie-Palatinat et désormais avec le Bade-Wurtemberg.

Le protocole prévoit à horizon 2024 la mise en oeuvre de dessertes Strasbourg - Lauterbourg - Wörth plus consistantes et surtout toute l'année : actuellement entre 3 et 4 allers-retours par jour circulent du printemps au milieu de l'automne. La liaison existante entre Strasbourg et Offenburg sera densifiée pour passer à la demi-heure. Enfin, la desserte Mulhouse - Müllheim, qui ne compte aujourd'hui que 7 allers-retours (dont un prolongé à Freiburg im Breisgau), sera cadencée à l'heure. Il est même question de l'intégrer au RER de Freiburg.

En revanche, pas un mot sur la liaison Colmar - Freiburg : la Région n'est pour le coup pas totalement alignée avec son voisin allemand, ni même avec l'Etat français : le Préfet de Région suit avec intérêt ce dossier qui pourrait faire partie des compensations politiques à la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim. Néanmoins, avec 12 à 13 000 véhicules par jour sur le pont franchissant le Rhin, il y a probablement un marché à capter pour le train. Ceci dit, la Région Grand Est a déjà fort à faire avec les lignes existantes et on peut comprendre qu'elle ne place pas ce dossier au même niveau d'importance que la consolidation des lignes existantes.

21 mai 2019

Strasbourg - Lauterbourg entre RER et délestage de la Magistrale

La Magistrale, c'est la ligne de rive droite du Rhin entre Karlsruhe et Bâle et ce surnom n'est pas usurpé au regard de l'intensité de son trafic qui dépasse allègrement les 300 circulations journalières, avec un trafic fret de grande ampleur sur l'itinéraire de référence du corridor européen entre les ports néerlandais de la mer du Nord et l'Italie. Nous vous avions proposé un dossier (dans le brouillard, mais ne ne reculons pas devant les caprices de la météo) pour en mesurer l'ampleur.

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La Wantzenau - 30 décembre 2015 - Image moderne de la ligne de Lauterbourg avec un Régiolis périurbain... mais il faudra aussi investir sur la voie, dont la fatigue se ressent au fur et à mesure qu'on s'éloigne de Strasbourg. © B. Arbogast

En face, Strasbourg - Lauterbourg fait partie de celles qu'on appelle maintenant lignes de desserte fine du territoire : par rapport à ce à quoi nous habitue cette catégorie, la ligne de Lauterbourg se situe plutôt dans la frange haute du panier, tant par le niveau de l'offre (on est il est vrai en Alsace, territoire historique de la relance du transport ferroviaire régional), que dans la consistance de l'infrastructure à double voie et avec une signalisation automatisée, le BAPR ayant remplacé le block manuel Alsace-Lorraine il y a seulement 13 ans.

Axe naturellement voué à intégrer - au moins en partie - un futur RER strasbourgeois, appelé à un développement des dessertes transfrontalières à la faveur d'un partenariat franco-allemand, comptant parmi les premiers territoires qui devraient être l'objet de la mise en appel d'offres de l'exploitation des dessertes, la ligne Strasbourg - Lauterbourg avait déjà beaucoup d'arguments à faire valoir. Si vous ajoutez qu'avec une voisine allemande à deux doigts de la saturation, il ne serait peut-être pas totalement inutile d'envisager d'en faire un itinéraire de délestage pour le fret (en cohérence avec l'axe Strasbourg - Bâle évidemment), vous avez le sommaire du nouveau dossier de transportrail !

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30 juin 2018

Grand Est : vers des liaisons transfrontalières

La Région Grand Est et le Land de Rhénanie-Palatinat ont conclu un accord de coopération transfrontalière destinée à améliorer les liaisons ferroviaires régionales entre la France et l'Allemagne, avec une échéance de mise en service en décembre 2024. Il porte dans un premier temps sur deux liaisons :

  • Strasbourg - Lauterbourg, avec prolongement à Wörth
  • Strasbourg - Wissembourg, avec prolongement à Winden voire Neustadt

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Il porte notamment sur l'évolution du schéma de desserte, la tarification et le matériel roulant : sur ce dernier point, la possibilité d'une commande de Régiolis bimodes adaptés à la circulation en Allemagne est évoquée.

Question subsidiaire : quel exploitant pour ces relations ? La Région Grand Est est assez motivée pour attribuer ses dessertes par appel d'offres et le marché est ouvert en Allemagne depuis quasiment un quart de siècle : de quoi susciter les appétits des opérateurs déjà implantés en Allemagne, à commencer par la DB qui pourrait avoir envie de chatouiller la SNCF...

Autre point, la mise à l'étude de la réactivation d'une diagnonale entre Rastatt et Haguenau côté français, croisant la ligne Strasbourg - Lauterbourg à Roeschwoog. Il s'agit de réactiver la section Roeschwoog - Haguenau côté français, qui existe toujours mais neutralisée, et de restaurer le franchissement du Rhin puisque le pont ferroviaire a été transformé en ouvrage routier.

Cette initiative mériterait de faire des petits, y compris dans le Grand Est, avec le Land du Bade-Wurtemberg, pour développer des relations ferroviaires au départ de Strasbourg vers Karlsruhe, pouvant ensuite rejoindre Stuttgart d'une part, Heidelberg et Mannheim d'autre part. Vers le sud, une liaison Strasbourg - Offenburg - Freiburg ne serait pas non plus dénuée d'intérêt...

 

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04 décembre 2017

Grand Est : 65 M€ pour les lignes régionales

Les lignes Reims - Fismes, Colmar - Metzeral, Sarreguemines - Béning, Pont Saint Vincent - Mirecourt, Verdun - Conflans Jarny et Molsheim - Saint Dié font l'objet d'une convention de financement Etat - Région - SNCF Réseau pour financer des travaux de renouvellement. Il s'agit de la suite du plan de préservation du réseau régional dans le Grand Est. La Région apporte 35 M€, l'Etat 20,7 M€ et SNCF Réseau 9,3 M€.

En priorité, les travaux se consacrent à la traversée du massif vosgien pour rétablir en septembre 2018 les performances et la consistance de la desserte Strasbourg - Saint Dié, aujourd'hui limitée à un seul aller-retour.

Rappelons qu'un premier accord était intervenu pour la prise en charge par SNCF Réseau du financement du renouvellement des sections Strasbourg - Lauterbourg, Mommenheim - Sarreguemines et Blainville - Epinal. En contrepartie, la Région Grand Est consentait à une suspension temporaire de l'exploitation de quelques lignes : Epinal - Lure, Epinal - Saint Dié, Kalhausen - Sarre-Union, Pont Saint Vincent - Merrey, pour que SNCF Réseau finance en totalité les besoins sur les trois lignes jugées les plus structurantes par la Région.

Cependant, la Région a également lancé des études de trafic sur les lignes régionales, dont les deux axes au départ d'Epinal. On notera aussi que la liaison Epinal - Lure - Belfort relève de la Région Bourgogne Franche-Comté, impliquant des échanges entre les deux autorités organisatrices pour statuer sur le devenir de cette relation.