Pays-Bas : CAF conquérant, Alstom se fait attendre
CAF engrange de nouvelles commandes
Après le marché de 2014 confié à CAF, portant sur 206 automotrices de la famille Civity, l’industriel espagnol remporte l’appel d’offres portant sur 60 rames « de grande capacité ». Il comprend 30 rames de 4 voitures et 30 rames de 6 voitures. Comme c’est maintenant systématiquement le cas, il s’agit de rames « partiellement à deux niveaux » puisque seules les voitures centrales seront de ce type, les motrices d’extrémité étant à un seul niveau. C’est d’ailleurs le premier train de ce type remporté par CAF.
Aptes à 160 km/h, elles ne circuleront que sous 1500 V et ne quitteront donc pas le réseau néerlandais. Elles remplaceront les automotrices type DDZ du début des années 1990.
Bruxelles - Amsterdam : départ encore différé
Les rames ICNG (Alstom Coradia Stream aptes à 200 km/h) devaient entrer en service le 11 décembre dernier sur la relation Bruxelles – Amsterdam par la ligne nouvelle. Les NS ont une nouvelle fois annoncé un report, dû à une qualité de fabrication et une fiabilité insuffisantes. L’opérateur a indiqué au gouvernement néerlandais un nouveau rendez-vous au plus tôt au 2ème trimestre de l’année prochaine.
CAF fournira 60 rames électriques à batteries en Allemagne
Destinées aux lignes non électrifiées autour de Duisburg, Krefeld, Essen, Düsseldorf et Dortmund, ces 60 rames ont fait l'objet d'un appel d'offres dans lequel le constructeur espagnol est désormais dans la dernière ligne droite avant la signature du contrat. Elles seront aptes à circuler en traction électrique sous caténaire 15 kV et sur batteries sur les lignes non équipées, afin d'éliminer la traction thermique recourant au gasoil. Deux versions sont prévues, avec une capacité de 120 ou de 160 places et des accès depuis des quais hauts de 760 mm. Le contrat prévoit aussi les prestations de maintenance durant 30 ans.
L'exploitation de ces rames nécessitera l'installation d'équipements pour la recharge des batteries dans les gares terminus de Kleve et Coesfeld.
CAF remporte le marché des TET
Une première pour l'Etat et une compétition limitée à deux acteurs
La toujours bien informée Mobilettre a révélé que le premier appel d'offres d'acquisition de matériel roulant Grandes Lignes piloté par l'Etat - et non pas par la SNCF - devrait être attribué à CAF. On apprend aussi que Bombardier, Siemens et Stadler ont fait un pas de côté, considérant que concourir à ce marché risquait de faire perdre du temps et de l'argent à ces entreprises dans une compétition qu'elle ne jugeait pas loyale.
L'Etat était donc à la recherche d'un matériel de 200 m de long, d'une capacité de 400 places assises, apte à 200 km/h, pour équiper en tranche ferme les axes Paris - Toulouse et Paris - Clermont-Ferrand en remplacement des voitures Corail. L'équipement de la liaison Bordeaux - Marseille figurait lui en tranche optionnelle.
On se souvient que la SNCF avait par le passé essayé de placer des TGV Sud-Est en fin de vie sur les deux premières lignes. De son côté, Alstom avait, dès la publication de l'appel d'offres, essayé de placer une version longue distance du Régiolis, qui suscitait des réactions plus que contrastées chez les élus locaux, entre ceux considérant qu'il s'agissait d'un matériel au rabais et ceux qui semblaient un peu top dans la position du lapin dans les phares de la voiture...
Cet appel d'offres qui n'en finit pas a même réservé une petite surprise puisqu'Alstom avait proposé deux solutions : la première est effectivement dérivée de la gamme Coradia, alors que la seconde est plus inédite, ressemblant à un ICE2 : une locomotive, issue de la nouvelle génération de TGV, et des voitures classiques dont la dernière munie d'une cabine de conduite. Sauf qu'on cherche les voitures voyageurs dans le catalogue d'Alstom...
De son côté, CAF dispose de plusieurs références dans son catalogue, sur les plateformes Civity, apte à 200 km/h, et Oaris, apte à au moins 250 km/h. Laquelle a servi de base pour le produit français ? Cela reste à confirmer : Oaris est le produit le plus récent, mais il est d'abord taillé pour les hautes vitesses, au moins 250 km/h, un segment auquel la France ne s'intéresse pas : entre le train classique et le TGV, point de salut ? transportrail avait mené l'enquête en Europe et en France.
Sur le plan stratégique, il n'est pas à exclure qu'Alstom essaie de réagir pour emporter finalement le marché (doit-on faire la liste des précédents ?), mais il sera difficile de contester à CAF la capacité industrielle à produire une petite série (moins de 30 rames pour la tranche ferme), tandis que la récente commande surprise de 12 TGV Océane, s'ajoutant aux 100 TGV2020 l'année dernière, devrait nourrir les différents sites de production pour quelques années, sans compter le RERng et les rames de métro pour l'Ile de France... Ceci dit, ce ne serait pas la première fois : doit-on rappeler justement le RERng ou certains marchés de tramways pour lesquels CAF peut avoir l’impression d’avoir joué le lievre ?
En revanche, les autres industriels pourraient avoir quelques regrets de ne pas avoir consacré plus de temps à ce marché...
Moulins - 11 février 2018 - Si les BB26000 ont tout passé la mi-vie, les voitures Corail sont de leur côté proches de la retraite et il a fallu jouer les prolongations d'un appel d'offres lancé tardivement et qui a trainé en longueur. L'arrivée de ce matériel est très attendue, notamment par les élus locaux, mais l'amélioration de la qualité de service passera aussi par la fiabilisation de l'infrastructure et des progrès dans la gestion du trafic, même sur des lignes peu chargées, comme Paris - Clermont-Ferrand et Paris - Toulouse... © transportrail
Un appel d'offres bien calibré ?
Il est d'abord un peu dommage d'avoir mis autant de temps à engager le renouvellement des Trains d'Equilibre du Territoire et à concrétiser cette procédure, surtout pour une tranche ferme de seulement 29 unités. On peut aussi déplorer que le nouveau matériel roulant, qui devrait circuler probablement jusqu'en 2065, ne soit pas l'occasion de tirer le meilleur profit des aptitudes du réseau :
- la vitesse maximale a été fixée à 200 km/h, alors que sur Paris - Toulouse et Paris - Clermont-Ferrand, il aurait fallu un train apte à au moins 220 km/h de sorte à pouvoir gagner 20 km/h dans les zones actuellement autorisées à 200 km/h (gain de l'ordre de 3 minutes), grâce aux meilleures performances au freinage d'une rame automotrice, selon un principe déjà appliqué sur le TGV Atlantique (Tours - Bordeaux par la ligne classique, Le Mans - Nantes et les quelques sections sur les radiales bretonnes) ;
- sur Bordeaux - Marseille, l'aptitude à 200 km/h est inappropriée puisque la ligne existante plafonne à 160 km/h : il aurait fallu un matériel apte à 250 km/h de sorte à dévier ces trains via la LGV Méditerranée entre Manduel et Marseille, avec au passage l'intéressante desserte d'Avignon TGV et de Aix en Provence TGV, sans gêner les TGV à 300 / 320 km/h. Un train apte à 250 km/h aurait également pu être admis sur la probable future LGV Bordeaux - Toulouse, avec un écart de performance d'une dizaine de minutes en intégrant les arrêts dans les futures gares nouvelles d'Agen et de Bressols.
Il aurait donc été plus logique de concevoir un marché pour des trains aptes à 250 km/h, équipés en option pour la circulation sur les LGV (sachant que le prééquipement ERTMS est de toute façon obligatoire), ouvrant au demeurant des perspectives intéressantes pour d'autres usages en France.
Autre limite du marché actuel, la capacité des rames : avec une jauge minimale de 400 places, les besoins des deux radiales sont logiquement correctement couverts, d'autant que les schémas directeurs ouvrent la voie à des évolutions d'offre qui favoriseront un meilleur lissage du flux. Une onzième relation devrait être créée vers Limoges à l'issue des travaux de renouvellement et avec l'arrivée du nouveau matériel, tandis qu'une neuvième est étudiée vers Clermont-Ferrand (mais en maintenant un train direct).
En revanche, sur Bordeaux - Marseille, la dynamique de trafic sur cette liaison entre des métropoles millionnaires en habitants nécessite aujourd'hui des compositions de 10 voitures dont le remplissage est élevé, sauf pour les trains rapides (ce qui montre au passage le rôle du trafic de cabotage). Une capacité d'au moins 550 places aurait été plus appropriée, de sorte à limiter le recours à des UM2 aux trains vraiment les plus chargés et à ajustement le dimensionnement du parc donc le coût global d'investissement.
C'est une fois de plus la démonstration d'un déficit de pilotage stratégique de l'Etat dont on attend toujours qu'il présente le Schéma National des Services de Voyageurs, qui aurait dû être remis 6 mois après l'adoption de la réforme ferroviaire... de 2014 !
C'est l'occasion aussi de se replonger dans notre dossier sur le schéma directeur des Trains d'Equilibre du Territoire.
Pays-Bas : importante levée d'options pour CAF
En octobre 2014, les NS avaient attribué à CAF un marché portant sur la fourniture de 118 automotrices NewSprinter, des rames articulées composées de 3 ou 4 caisses sur base Civity. Les premiers éléments ont été mis en service le 9 décembre 2018 sur la relation Haarlem – La Haye. A cette occasion, les NS ont officialisé une levée d’options de 88 rames supplémentaires, comprenant 50 éléments 3 caisses et 38 éléments 4 caisses.
Voorthuizen - 19 octobre 2018 - Essais en UM2 des nouvelles automotrices Civity des chemins de fer hollandais, dont le service a débuté à l'horaire 2019. La forte capacité d'échanges exprime clairement l'orientation du réseau vers des dessertes à cadence très soutenue sur des distances relativement courtes. © J. Boes
Pays Bas : les Flirt livrés, arrivée des Civity
A peine terminée la livraison des 58 automotrices Flirt commandées par les NS auprès de Stadler dans une certaine urgence que débute la livraison des premières rames Civity produites par CAF. Il s'agit d'une commande conséquente puisque 168 rames ont été commandées, dont 118 en version tricaisse et 50 en version quadricaisse. Ces rames viennent progressivement remplacer les "nez de chiens" MAT64 acquis en commun par la SNCB et les NS.
On rappellera les conditions assez étonnantes de gestion de ces deux marchés. Dans un premier temps, en octobre 2014, les NS avaient contracté le marché avec CAF. L'exploitant hollandais a cependant dû faire faire à une pénurie de matériel roulant en raison d'une hausse rapide du trafic. Conséquence, un nouveau marché, dans l'urgence, lancé 2 mois plus tard, en recherchant un constructeur capable de livrer les rames plus tôt que CAF. Dans l'absolu, il aurait probablement été possible de puiser dans le marché CAF et on peut se demander si les NS n'ont pas cherché à challenger (pour ne pas dire faire un petit dans le dos...) à CAF avec Stadler qui s'est engagé à livrer 60 rames en moins de 3 ans, à condition de retenir une version de base disponible au catalogue. Les livraisons des rames Stadler ont effectivement débuté en mars 2016.
Près de Maastricht - 1er avril 2016 - Version tricaisse pour ce Flirt3 série 2200. Une architecture assez comparable aux Sprinter fournis au début des années 2000 par Siemens et Bombardier. © E. Schreurs
Près de Ede-Wageningen - 4 avril 2016 - Version quadricaisse, mais toujours avec 2 portes par face pour ce Flirt3 série 2500. © H. Zwoferink
Sur l'anneau de Velim - 31 mars 2017 - Place maintenant aux automotrices Civity, série 2700, conservant le diagramme désormais standardisé à 2 portes par face sur l'ensemble des automotrices livrées par Stadler et CAF. © V. Fisar
On attend maintenant qu'Alstom livre le premier Coradia destiné aux relations Intercity : 79 rames dont 49 de 5 voitures et 30 de 8 voitures ont été commandées à l'été 2016. Ces rames, aptes à 200 km/h sous 1500 V et 25000 V, seront mises en service à partir de 2021 entre Amsterdam et Breda et La Haye - Eindhoven.
CAF perce aux Pays Bas
Le constructeur espagnol CAF remporte le marché des chemins de fer hollandais destiné à construire 120 rames NewSprinter, faisant suite aux productions du groupement Siemens-Bombardier. Ces rames seront prédisposées pour l'équipement ERTMS. Le montant de ce marché atteint 510 M€ soit 4,25 M€ par rame. CAF place pour la première fois aux Pays Bas un matériel issu de sa gamme Civity, automotrice articulée modulable de 2 à 6 voitures, et remporte le marché face à Alstom.
Moerwijk - 26 mai 2012 - Les automotrices Sprinter actuellement en service aux NS, ici entre La Haye et Rotterdam, ont été fournies par un consortium Siemens - Bombardier. CAF assurera la production de la nouvelle génération sur sa base Civity. © transportrail
La négociation entre CAF et les NS pour la signature du marché devrait aboutir en décembre prochain. Cette victoire du constructeur espagnol sur un marché conséquent montre que l'industrie ferroviaire évolue. Le constructeur peut ainsi disposer d'une nouvelle référence hors de son territoire. Après le métro de Bruxelles, les rames Intercity en Turquie et les tramways de Besançon, le marché régional hollandais permet à CAF de placer un nouveau pion. Le haut débit ferroviaire et la très grande vitesse semblent être la prochaine étape.