Nouveautés en vue sur la Côte d'Opale
Reprenant la compétence sur les liaisons Intercités, la Région Hauts de France a annoncé plusieurs évolutions à venir dans les deux prochaines années sur la desserte du littoral.
D’abord, l’arrivée des Coradia Liner sur la relation Paris – Boulogne sur mer, dont certains trains seront prolongés à Calais, puisque ces rames y seront entretenues. Ces liaisons seront accélérées d’un quart d’heure du fait de la suppression du surstationnement à Amiens lié au changement de locomotive. La fin des rames Corail et des BB67400 à bout de souffle approche enfin… même si le nouveau matériel n’est pas exempt de réserves.
Etaples - 28 août 2017 - Le Paris - Boulogne version vieux Diesel et Corail, c'est bientôt fini. Les Coradia Liner prendront la relève en utilisant la traction électrique de Paris à Amiens et de Rang du Fliers à Boulogne. Dommage que l'électrification du hiatus Amiens - Rang du Fliers ait été abandonnée : elle aurait permis de constituer une flotte homogène de Régio2N et donc de neutraliser les contraintes de capacité entre Paris et Amiens... © transportrail
Amiens - 11 septembre 2015 - Outre les meilleures performances intrinsèques des Coradia Liner, le renouvellement du matériel sur les Paris - Boulogne effacera le gain d'arrêt lié au changement de machine. © transportrail
Néanmoins, ces rames de 267 places, même en UM2, seront d’une capacité assez limitée entre Paris et Amiens ce qui impliquera de travailler au positionnement de ces relations en dehors des créneaux les plus demandés où le renouvellement des voitures Corail passera par l’introduction des 19 Omneo Premium récemment commandés à Bombardier.
Ensuite, la Région prépare une amélioration de la desserte Calais – Dunkerque, avec une révision générale comprenant 25 à 40% d’offre supplémentaire dans les différentes gares du parcours, et la création d’une relation directe Amiens – Abbeville – Boulogne – Calais – Dunkerque.
Coup d’accélérateur pour le TERGV
Les liaisons entre Lille et le littoral seront améliorées avec le renforcement du service TERGV financé par la Région, qui ne se limitera plus aux seules heures de pointe. Calais, Boulogne et Dunkerque bénéficieront donc de nouvelles relations rapides accessibles, la Région annonçant un volume d’offre en hausse de 40%, moyennant un supplément de 2 € par trajet.
La Région en profite pour annoncer le lancement d’une nouvelle relation TERGV entre Lille et Amiens, avec seulement un aller-retour par jour alors qu’elle en souhaitait 3.
Une sévère contraction de l’offre TGV vers Paris en 2020
En revanche, les débats ferroviaires en Hauts de France trouvent un nouveau sujet de polémique entre la Région et la SNCF avec les intentions de l’opérateur de réduire assez drastiquement – certains plans estiment à 40% le volume d’offre concerné – la desserte TGV entre Paris et les différentes destinations du Nord et du Pas de Calais, principalement Calais, Dunkerque, Boulogne sur mer, Arras, Douai et Valenciennes. Il est à peine exagéré de résumer la proposition en une concentration de la desserte sur la seule relation Paris – Lille, les autres villes étant surtout reliées par correspondance à Lille Flandres, la SNCF ne consentant au maintien que d’une offre directe symbolique. L’opérateur justifie cette orientation par le caractère déficitaire des relations.
Etaples - 28 août 2017 - La réforme des rames PSE et le transfert de rames Duplex sur le réseau Nord est un argument utilisé par la SNCF pour justifier un mouvement de contraction de l'offre TGV entre Paris et les Hauts de France. Les conséquences des excès dans l'homogénéisation du parc ? © transportrail
Valenciennes - 27 septembre 2013 - Restera-t-il encore des TGV directs pour Paris depuis Valenciennes, un des fiefs d'Alstom (empressons-nous de préciser qu'il est quand même partagé avec Bombardier) ? L'inquiétude des élus locaux est forte face à une SNCF qui semble ne pas vouloir modérer ses ardeurs dans l'élagage de l'offre. © transportrail
Il est vrai que les TGV Nord sont assez largement utilisés par des abonnés, utilisant tous les jours ou presque le TGV comme un « super-RER », par une population résidant dans la Région mais travaillant en Ile de France, dégageant par conséquent peu de recettes par place occupée.
Ces décisions de la SNCF sont également la conséquence d’un sureffectif de TGV et la réforme des rames à un niveau (ici les Sud-Est) pour se concentrer sur les seules rames Duplex, plus capacitaires : l’opérateur explique qu’elle compense la réduction d’offre par une plus grande capacité unitaire des trains… mais on sait que le voyageur est aussi attaché à la répartition des trains dans la journée.
La SNCF est donc adepte de deux des trois principes du PLM, « le train rare, lourd et lent » au risque de perdre une part significative de la clientèle. Le taux de remplissage des trains amène à une vision tronquée du marché : un TGV unique dans la journée rempli à 95% sera toujours moins fréquenté que 3 TGV occupés à 70%...
La négociation risque d’être serrée d’autant que la campagne des élections régionales risque de s’emparer du sujet des transports en général et de faire du devenir de l’offre TGV un des repères forts de la période à venir…
Paris - Montluçon : fin de la liaison directe
Le service annuel 2019, entré en vigueur dimanche dernier, a mis fin à la relation Paris - Montluçon.
La relation, comme les autres Intercités en Région Centre, est en cours de transfert de l'Etat à la Région. L'accord, conclu en fin d'année 2016, prévoit que l'Etat assume le déficit de ces trains jusqu'en 2019. A partir de 2020, selon un schéma dégressif, la charge sera supportée par la Région, qui a déjà apposé sa marque sur le matériel roulant.
Les deux allers-retours Paris - Montluçon sont désormais limités au parcours Paris - Bourges. Une correspondance est assurée avec les 3 nouvelles rames Coradia Liner dont l'acquisition a été financée par l'Etat, au titre du transfert de compétence.
Vallon en Sully - 12 mars 2010 - Image désormais révolue d'un Intercités Paris - Montluçon approchant de la gare de Vallon en Sully. Néanmoins, l'autre sujet sensible qui devient de plus en plus pressant, c'est évidemment l'état de l'infrastructure. © transportrail
Cependant, la correspondance à Bourges reste un compromis. Pour les gares situées au-delà en direction de Montluçon, ce n'est pas la solution la plus rapide. Il faudrait privilégier une liaison Vierzon - Montluçon rabattue sur les trains de l'axe POLT. Mais dans ce cas, la desserte de Bourges est dégradée. Elle n'est déjà pas très consistante... On comprend la sensibilité du choix.
On rappellera enfin que les Régiolis, avec leur capacité de 218 places, sont évidemment largement sous-capacitaire sur la section Paris - Vierzon (et qu'il n'est pas question d'alléger la politique d'arrêt au risque de déshabiller encore un peu plus Orléans), et de surcroît limités à 160 km/h sur une infrastructure qui - en principe - doit autoriser la circulation à 200 km/h.
Notons aussi symboliquement que les rames Corail et les BB67400 perdent une relation de plus, ce qui est logique eu égard à leur âge avancé. Paris - Boulogne est leur dernier bastion...
Les BB 67400 ont 40 ans
C'est une petite phrase qu'on retrouve souvent dans la presse ferrovaire et nous n'allons pas vous en priver : la livraison de la BB 67632 clôturait en 1975 le programme d'acquisition de locomotives Diesel pour service mixte voyageurs / marchandises. C'était il y a 40 ans et depuis, les engins thermiques livrés à la SNCF ont été uniquement destinés au transport des marchandises.
Passant donc le cap de la quarantaine, les BB67400 voient leur fin de carrière s'approcher à très brève échéance et se retrouve, bien malgré elles, au coeur du sujet du renouvellement du matériel roulant des trains d'équilibre du territoire. Dans le domaine régional, le remplacement par les AGC puis par les Régiolis aura réduit à néant leurs prestations en tête de RRR ou de voitures Corail. En revanche, l'incertitude demeure sur les TET puisque la récente commande de 34 rames Coradia Liner en utilisant le marché Régiolis ne pourra assurer le remplacement de l'intégralité du parc des lignes retenues à savoir Paris - Boulogne, Paris - Belfort, Paris - Montluçon, Nantes - Lyon et Nantes - Bordeaux.
Le nouveau dossier de Transport Rail est consacré aux 40 ans de service de ces locomotives.
Picardie : les Régiolis sur Paris - Boulogne
Face au vieillissement des BB67400 assurant la traction entre Amiens et Boulogne de ces trains Intercités, la SNCF et la Région Picardie ont convenu d'un accord pour engager rapidement le renouvellement du matériel de ces trains qui complètent l'offre Paris - Amiens qui est assurée évidemment en traction électrique avec des BB15000 et des BB22200.
Port le Grand - 28 avril 2013 - La BB67600, un peu défraichie, emmène un Intercités sur l'axe Paris - Boulogne entre Abbeville et Noyelles. Les Régiolis vont venir diminuer les prestations de ces machines essoufflées.© transportrail
En attendant les affectations de Régiolis commandés par l'Etat au titre des Trains d'Equilibre du Territoire, ce sont les rames commandées par la Région Picardie pour les relations TER qui sont engagées ainsi que quelques rames Basse-Normandie louées temporairement par Intercités. Etrange mécanique qui semble répondre à une logique d'urgence...
D'une capacité de 316 places en unité simple soit 632 en rame double, elles offrent moins de places assises que les rames de 9 voitures Corail (732 places). Aussi sont-elles engagées sur des trains de journée moins fréquentés. Pour l'instant, 2 allers-retours sont prévus du lundi au samedi.
- 2013 Paris Nord 10h35 - Boulogne sur mer 13h01
- 2035 Paris Nord 19h31 - Boulogne sur mer 22h01
- 2008 Boulogne sur mer 6h53 - Paris Nord 9h29
- 2026 Boulogne sur mer 14h57 - Paris Nord 17h29
Le dimanche, une seule rotation est assurée : 2014 Boulogne sur mer 9h59 - Paris Nord 12h29 et retour au 2017 Paris Nord 13h17 - Boulogne sur mer 16h31.
L'emploi des Régiolis mieux motorisés et surtout l'abolition du relais traction d'Amiens procure au total un gain de temps de l'ordre de 16 minutes par rapport aux horaires du service 2014.
Nantes - Lyon : retour à la rame tractée
Alors que les X72500 avaient investi la relation en 2009 en succédant aux CC72000 à bout de souffle, la rame tractée est revenue au service annuel 2014 sur la liaison Nantes - Lyon.
Civrieux d'Azergues - 6 janvier 2014 - Retour à la rame tractée avec 6 voitures Corail emmenées par une BB67400 sur l'étape Lyon - Nevers. Ici, c'est la 67433 affectée à l'infrastructure qui place sa livrée jaune canari face au soleil. © N. Godin - lyonrail
Un retour en arrière temporaire...
Au moins deux objectifs étaient poursuivis au travers de ce qui apparaît comme un retour en arrière :
- restituer à la Région Rhône-Alpes les X72500 qui lui étaient loués par Intercités
- utiliser au maximum la traction électrique sur la ligne Tours – Nevers
Ainsi, 2 compositions de 6 voitures Corail ont été engagées sur les 2 allers-retours subsistant au portefeuille Intercités. De Tours à Nevers, la traction est assurée en principe par une BB26000, relayée à Nevers par une BB67400.
Par conséquent, la performance de la relation est une nouvelle fois dégradée, en perdant encore 18 minutes, résultat d’abord de l’allongement de l’arrêt à Nevers pour changement de machine, plus long que le rebroussement de l’automoteur, et de la diminution des performances entre Nevers et Lyon. Les 67400 plafonnent à 140 km/h alors que les X72500 sont aptes à 160 km/h, qu’ils pouvaient atteindre entre Nevers et Saint Germain des Fossés. En outre, sur la section Roanne – Lyon, l’ascension de la rampe des Sauvages et ses passages à 28 pour mille se fait au mieux à 55 km/h, alors que les X72500 pouvaient atteindre sans difficultés les 90 km/h.
En revanche, seule consolation, les voyageurs perdent le bourdonnement des moteurs des automoteurs.
... en attendant mieux
D’ici 2 ans, la relation sera assurée par les Régiolis TET. Cependant, la liaison ne cesse de se dégrader : le passage par Nevers a certes favorisé la clientèle nivernaise par la suppression de la correspondance à Saincaize, procurant au passage l’économie d’un autorail et de son équipage, mais – situation ubuesque – sans suppression de l’arrêt dans la fantomatique gare de Saincaize, et au prix d’une perte de 30 minutes pour les voyageurs « passe Nevers ».
Le retour à la formule tractée amplifie cette dégradation, qui ne fait qu’augmenter l’attractivité des solutions alternatives, notamment du covoiturage, qui taille littéralement des croupières à la SNCF sur un segment de marché où son service médiocre fait fuir le candidat au voyage : moins chère et plus souple grâce à la mise en ligne des offres de déplacement, la formule du covoiturage est assurément devenue une redoutable concurrence au train, en particulier sur ces liaisons mal assurées.
L’arrivée des Régiolis TET sera-t-elle suffisante pour améliorer l’image du service ? Une refonte de l’offre s’avère impérative pour retrouver des performances dignes de ce nom et ainsi redresser une pente qui pourrait – en dépit de l’arrivée de matériel neuf – fatale.
L'affaire du rebroussement de Nevers
Outre la perte de temps de près de 30 minutes pour tous les voyageurs "passe-Nevers", le rebroussement dans la préfecture de la Nièvre suscite un blocage interne à la SNCF puisque certains trains doivent rebrousser en 13 minutes alors que le temps minimum "réglementaire" serait - d'après les syndicats - de 19 minute, alors même que les rebroussements en des temps inférieurs sont moindres. On se souvient qu'à conditions identiques (rame tractée non réversible et changement de locomotive), les Aqualys Paris - Orléans - Tours rebroussaient en gare d'Orléans en 10 minutes sans protestation de ce genre.
On rappellera qu'à l'époque de la grandeur - perdue - du chemin de fer et de la fierté cheminote, le rebroussement du TEE Mistral Paris - Nice comprenait non seulement le changement de machine mais aussi le dételage de la tranche Marseille, opérations réalisées en 3 minutes ! Les temps changent...
Dossier transversales : le matériel roulant
En conclusion du dossier de transportrail consacré aux lignes transversales, un dernier chapitre consacré au matériel roulant. Si les turbotrains RTG avaient, pour plusieurs d'entre elles, constitué voici près de 40 ans, une notable amélioration du service, la fin de vie des voitures Corail, principalement livrées entre 1975 et 1982, et des BB67400 arrivées entre 1969 et 1975, constitue une préoccupation de plus pour l'avenir de ces relations. L'Etat a pris des engagements pour renouveler la flotte des Intercités d'ici 2015. L'annonce sera-t-elle suivie d'effet ? Le Régiolis, prévu pour ces lignes, sera-t-il adapté ?
Ce dernier volet de l'étude "lignes transversales" est à présent en ligne.
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