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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires

Voitures Corail et incertitudes sur les Intercités

Du Corail au Téoz

En proie à un déficit d’image, les trains de jour étaient évidemment dans l’ombre du TGV. Néanmoins, celui-ci n’ayant pas vocation à assurer toutes les grandes lignes, surtout celles où la grande vitesse n’est pas envisagée ou pas envisageable pour des raisons de coût et d’utilité, la SNCF planchait sur une évolution du concept du train Corail.

En 2000, elle proposa un prototype de rame offrant un aménagement intérieur totalement transformé. Baptisé Train Rapide de Demain, le prototype allait donner naissance au nouveau train Téoz, « le train qui ose », avec au passage l’entrée en scène des communicants. Le bilan était à première vue positif : le coup de jeune était flagrant et l’œil flatté par la nouvelle ambiance à base de bleu et blanc en seconde classe et de cuir coquille d’œuf en première.

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Paris Austerlitz - Juin 2005 - La nouvelle décoration des voitures Téoz, ici en première classe, est composée de pelliculages multiples sur une base orangé. La tenue des films adhésifs dans le temps a posé problème et leur disparition est en cours avec application de la livrée Carmillon. © transportrail

La rupture est incarnée dans l’aménagement intérieur classique des voitures à couloir central avec l’alternance du 2+2 et du 3+1. En première classe, aménagements plus classiques en semi-compartiments ou en 2+1 plus classique, mais l’étonnant salon fumoir en places debout se trouvera rapidement inutile quand les trains deviendront non-fumeurs. Le plancher des salles a été rehaussé de 10 cm pour améliorer la vue du paysage au prix d'un rehaussement du centre de gravité, se répercutant assez sensiblement sur le confort dynamique sur les parcours sinueux.

La clé du Téoz résidait dans la voiture services avec espaces pour les personnes à mobilité réduite, pour les enfants, pour les familles et la détente. Les rames deviennent des blocs indéformables de 7 voitures dont 2 de première et 5 de seconde (dont la voiture Services). 430 voitures Téoz sont constituées pour Paris - Strasbourg et le Massif Central (Paris – Clermont-Ferrand et Paris – Toulouse). La mise en service de la LGV Est en juin 2007 entraina le basculement des voitures libérées sur l’axe Bordeaux – Nice et la généralisation du Téoz sur les deux autres liaisons, et amplifiait le mouvement de transfert aux Régions des Corail, notamment dans l’Est mais aussi dans le Sud-Est avec la mise en place du cadencement en décembre 2007.

Incertitudes sur les Intercités

Par la suite, la rénovation des Corail Plus résulta de l’épisode de 2004-2005 sur les liaisons classiques jugées trop déficitaires par la SNCF.  Baptisés d’abord Trains Interrégionaux puis Corail Intercités puis Intercités tout court, les Trains d’Equilibre du Territoire, appellation ministérielle, ont été conventionnés en 2008 par l’Etat avec un financement complexe mettant essentiellement à contribution les TGV. Avec les maigres moyens de l’activité Intercités, une rénovation put être engagée sur le parc des lignes Nantes – Bordeaux et Paris – Nevers. Au-delà, les Régions furent sollicitées.

Les deux Régions normandes financèrent chacune à 50% la rénovation de 300 voitures selon deux versions différentes. Pour la Basse Normandie, l’aménagement retenu conservait la banquette Corail, rénovée, rehoussée et avec l’installation de prises de courant 220 V, proposant un confort honorable notamment sur Paris - Cherbourg. Pour la Haute Normandie, l’objectif était de rapprocher l’intérieur des Corail de celui des TER2Nng alors mises en service sur Paris - Le Havre, avec l’adoption du siège TER adapté par Compin pour améliorer son confort… quoique très en retrait par rapport aux banquettes Corail, le modèle d’origine n’étant conservé qu’en première.

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Rénovation Basse Normandie pour cette voiture de seconde classe à compartiements B11u : sièges conservés mais rehoussés, nouvelle tablette TER et suppression des portes donnant sur le couloir pour une ouverture accrue. © transportrail

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Rénovation Haute Normandie pour cette B11tu avec adoption du siège TER Compin redessiné à l'aide de nouvelles mousses un peu plus larges. Un coup de jeune nettement visible mais un confort en régression: le siège est plus ferme, mais plus mince, il donne un peu plus d'espaces aux jambes, il est vrai très réduit sur les diagrammes à 88 places. © transportrail

Le « train qui ose » rentre dans le rang

Sous la pression des élus locaux, la SNCF engagea la rénovation des voitures Téoz dont les aménagements avaient rapidement fané. Les prises de courant en 2nde classe ont enfin fait leur apparition. La livrée Téoz a été abandonnée en raison de problèmes de droit d’image et d’une mauvaise tenue du pelliculage, au profit de la nouvelle – et austère – identité de la SNCF : gris métallisé et gris sombre en base, rehaussés d’un filet et de portes « carmillon ». Même livrée pour les nouvelles révisions générales des voitures désormais au parc Intercités, avec une variante : les voitures du Nord et de l’Est conservent les aménagements type 1995, alors que les ex-Aqualys bénéficient de l’expérience Basse Normandie pour les secondes classes.

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Intérieur des voitures ex-Téoz après rénovation, avec notamment l'abandon du cuir en première classe, et changement global de l'ambiance à bord. Le rehaussement du plancher de 10 cm a certes amélioré la visibilité extérieure mais en dégradant le confort dynamique notamment sur les parcours sinueux. © transportrail

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Tours - 31 août 2013 - La dernière décoration appliquée aux voitures Corail, y compris aux ex-Téoz, décline l'actuelle identité de l'entreprise : trois tons de gris, et le carmillon du logo décliné sur les portes et un filet supérieur.  Difficile de distinguer la première et la seconde classe, jusqu'alors nettement identifiables, soit par la couleur de la voiture (Téoz) soit par la porte (rouge en première, vert en seconde). Très - trop ? - sobre...© transportrail

Train de nuit : pour celles qui ont échappé à la purge

Les voitures de nuit ont pour leur part bénéficier d’une rénovation à la fin des années 1990 dans le cadre de la nouvelle offre Lunéa, avec une évolution du service : coffret d’accueil, nouvelle couette, création d’un espace services et distribution de boissons et friandises, suppression des arrêts de pleine nuit, politique d’accueil différencié pour les femmes seules… Elle s’accompagnait d’un pelliculage, déclinaison plus discrète de la décoration Téoz.

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Près de Briançon - 22 février 2014 - Longue composition de voitures Corail couchettes arborant pour la plupart la livrée Lunéa. L'opération partait de bonnes intentions mais l'avenir de ces services a été quasiment scellé par des déclarations péremptoires de l'Etat et du président de la SNCF de l'époque non seulement sur le coût pour la collectivité et leur inutilité face au TGV et à l'avion. Quelle vision ! © F. Didelot

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Les Cabannes - 25 février 2022 - Une rénovation de plus pour les voitures Corail : rescapées du découpage, certaines voitures ont repris vie, grâce à une rénovation, assez soignée, pour prolonger encore un peu leur carrière en attendant la relève, puisque le train de nuit a repris des couleurs (comme quoi, il faut toujours se méfier de certains avis définitifs !). Cette courte composition monte vers Latour-de-Carol. Hormis leurs accès peu commodes, ces voitures restent finalement assez contemporaines et leur structure a bien vieilli. © transportrail

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Intérieur des voitures rénovées en 2021-2022 dans le cadre du sauvetage in extremis des trains de nuit ayant échappé au démantèlement. L'opération a essayé de tirer profit des structures et d'apporter de nouvelles fonctionnalités, tout en maîtrisant le coût de l'opération sur des voitures déjà largement amorties et dont la durée de vie reste malgré tout limitée. © E. Fouvreaux

Vu du voyageur

Il est indéniable que la voiture Corail fut une réussite et qu’elle a changé l’image du train en attendant le TGV, en prenant la succession de la cohorte de ces voitures austères à la livrée vert sombre, assemblage hétéroclite de voitures dont la conception datait pour partie des années 1920 et pour le reste de l’immédiat après-guerre. Corail et turbotrains ont démocratisé le train rapide et confortable.

Ces voitures conservent de solides atouts : un bogie procurant un très bon roulement, un siège dessiné par Roger Tallon qui soutient la concurrence contemporaine, et des caisses saines. En revanche, le niveau sonore est devenu élevé comparativement aux matériels régionaux et aux progrès de l’automobile ; le niveau de service à bord reste limité (la prise 220 V sera-t-elle un jour généralisée ?) ; les conditions d’accès sont malcommodes ; enfin, les secondes classes à 88 places sont un peu exiguës avec une population qui grandit.

Autre souci : les locomotives. Les nez cassés sont sur le départ. Les BB26000 ont une seconde partie de carrière difficile et le débat entre automotrice et rame tractée est à peu près fermé en France, du moins à la SNCF.

Le dernier volet de notre dossier s'intéresse à la succession des voitures Corail.

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