Innotrans 2022 (3) : infrastructures et exploitation
Pour des infrastructures encore plus performantes
Du côté de l’infrastructure et de l’exploitation, ERTMS était largement présent, le plus souvent complété par une fonction de pilotage automatique pour les exploitations en zone dense. Les systèmes CBTC n’étaient pas totalement absents, pas seulement dans le domaine urbain (métro), mais aussi pour des applications ferroviaires comme à Londres, Copenhague et évidemment en Ile de France, en dépit des agitations franciliennes.
L’objectif est clair : les réseaux ferroviaires doivent gagner en performance et les ambitions sur la vitesse doivent composer avec les attentes sur le débit, la fiabilité et la résilience en cas de perturbations. Message à peine subliminal : il faudra des crédits massifs pour que le chemin de fer soit à la hauteur du défi sociétal. Ce sera probablement plus difficile pour certains qui continuent de se distinguer par leur passivité sur le sujet…
La décarbonation concerne aussi l’infrastructure avec des angles multiples. Bemorail exposait des traverses en béton de soufre (le ciment est remplacé par du soufre), recyclables à de multiples reprises : 40% de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour leur production qui n’a pas besoin d’eau, mais des conditions d’usage relativement sélectives, en dépit de performances techniques identiques car elles commenceraient à fondre à 140 °C (il y a donc de la marge).
Les promoteurs des fabricants de voie sur dalle en béton – classique – avec des dispositifs préfabriqués misent sur l’importance des besoins avec des débats classiques entre coût d’investissement (à l’avantage de la voie ballastée), les coûts de maintenance (plutôt favorables aux voies sur dalle) et le domaine d’application potentielle : lignes nouvelles, renouvellement complet sur de très grandes longueurs… La dimension écologique d’équipements nécessitant une grande quantité de béton semble tout de même de nature à les requestionner, et l'usage de ces solutions doit toujours être précisé : sur des infrastructures nouvelles, ce n'est pas la même chose que sur des lignes existantes, où les renouvellements se font généralement de façon fractionnée. Et on sait que la transition entre types de pose de voie reste toujours sensible à gérer au quotidien.
De nouvelles conceptions de la voie sur dalle en béton. D'abord le système Slab Track, avec des panneaux préfabriqués assemblées autour de pivots arrimés au sol, et le concept Fast System. Pour la voie classique, les modélistes ferroviaires seront amusés de voir qu'on s'inspire peut-être de leurs techniques avec les produits de collage de la banquette de ballast pour limiter les mouvements transversaux. © 697000
Exploitation du fret : la révolution de l’attelage automatique ?
Dans le domaine du fret, outre les locomotives bimodes et/ou de grande puissance, outre la présentation de nouveaux bogies réduisant le poids mort des wagons (et donc le tonnage réellement transporté par circulation), l’attelage automatique s’affichait avec fierté. Ce n’est pas un sujet nouveau : il date d’au moins 50 ans si on regarde les premiers travaux de l’UIC, mais cette fois, il sort du champ de la théorie pour passer à celui de la quasi-pratique, avec un soutien financier assez net des budgets communautaires. L’enjeu est colossal : 700 000 wagons circulent en Europe. Un consortium DB – ÖBB – CFF avec 3 propriétaires de wagons (Ermewa, GATX et VTG) va réaliser des démonstrations de ces nouveaux équipements en vue de choisir le modèle d’attelage en principe unique. Les gains pourraient être colossaux sur la préparation des trains, leur composition (réduction de la contrainte de la résistance des attelages à vis), amélioration de la performance (freinage, traction), allègement des wagons (donc tonnage accru des marchandises à iso-longueur).
La révolution de l'attelage automatique pour le fret : des décennies de cogitations... et une concrétisation - enfin ! - demain ? Les bénéfices pour le transport de marchandises et plus largement pour l'efficience du transport ferroviaire sont considérables. © transportrail
Plus largement, la numérisation dans le domaine du transport de marchandises est aussi le moyen d’améliorer la localisation des wagons (et de leurs marchandises) pour un meilleur suivi des acheminements pour les clients. La combinaison entre les bénéfices procurés par l’attelage automatique sur la conception des wagons, leur exploitation, et la traçabilité des circulations concourent à renforcer la crédibilité du rail et la confiance des chargeurs envers le chemin de fer. A vrai dire, la demande est telle que l’attrait du transport ferroviaire s’élargit naturellement par les tensions encore plus fortes pesant aujourd’hui sur le mode routier, entre renchérissement du gasoil et pénurie de conducteurs, notamment par le fait que le recours à des salariés d’Europe centrale se réduit, compte tenu de l’activité au sein de ces pays.
Autant de sujets qui laissent un arrière-goût particulier dans la bouche des français…