Suite à la décision - salutaire et courageuse - d'abandonner la réalisation de l'autoroute A45, serpent de mer entre Rhône et Loire depuis plus de 30 ans, le gouvernement avait décidé d'organiser un débat public sur les alternatives ferroviaires . Parallèlement au torpillage du projet routier, le gouvernement avait décidé d'organiser un débat public en 2019 sur les alternatives ferroviaires entre Lyon et Saint Etienne.
Le débat public qui commence le 11 avril pour une durée de 3 mois, avec 16 réunions, dont 15 dans l'agglomération lyonnaise et une excentrée à Clermont-Ferrand sur le thème des liaisons entre métropoles régionales (et par souci d'équilibre politique ?), porte lui sur le seul noeud ferroviaire lyonnais. Il fait clairement suite aux études menées au début de la décennie et au rapport du CGEDD, très axée sur la question de l'augmentation de capacité des itinéaires d'accès à Lyon Part-Dieu. Curieux décalage...
Disons-le d'emblée, ce débat public nous apparaît tronqué, car il abord le noeud ferroviaire lyonnais de façon très réductrice le résumant à la section Saint Clair - Guillotière.
Deux voies supplémentaires sur l'axe nord-sud : est-ce bien nécessaire ?
Dans sa contribution, SNCF Réseau estime que le besoin de capacité à horizon 2040 devrait augmenter de 40% par rapport à la situation actuelle, avec l'intention de la Région de cadencer la desserte du RER lyonnais au quart d'heure et d'intégrer le besoin de capacité supplémentaire lié soit à la modernisation de la LGV Sud-Est soit à la réalisation de la LGV POCL.
SNCF Réseau préconise l'ajout de 2 voies supplémentaires entre la bifurcation de Saint Clair au nord et le secteur de la Guillotière au sud alors que le besoin en sillons supplémentaires se limiterait à 2 omnibus Ambérieu et 2 TGV. Comme un arrière-goût de déconnexion entre les besoins et les solutions ?
Deux solutions pour augmenter la capacité de l'axe nord-sud via Part-Dieu : la solution en surface prévoit deux voies côté Est au nord de la gare et côté Ouest au sud, avec un gain de capacité obtenu par ripage des circulations entre Part-Dieu et le triangle de Croix-Barret. Dans la solution souterraine, le raccordement s'effectue à hauteur de la rue Challemel-Lacour pour les missions vers le Sud, par la ligne classique ou par la LGV, moyennant l'emprunt de la section Saint Fons - Grenay.
Saint Fons - Grenay : un quadruplement nécessaire
Sur l'axe Lyon - Grenoble, le quadruplement des voies entre Saint Fons et Grenay répond lui à des enjeux connus de longue date pour développer la cadence au quart d'heure sur la desserte périurbaine vers Saint André le Gaz, en dissociant les flux omnibus et rapides, constitués des TGV rejoignant la LGV vers la Méditerranée à Saint Quentin Fallavier et les liaisons Intervilles vers Grenoble et Chambéry. En bonus, moyennant le doublement du raccordement sud de Saint Fons, l'opération bénéficierait également au fret dans la perspective du Contournement Fret de l'Agglomération Lyonnaise, du moins sa section nord (Beynost - Grenay) et en différent potentiellement sa section sud (au demeurant quelque peu contestée).
Le coût des deux scénarios, incluant tous les deux le pogramme précvu entre Saint Fons et Grenay, varie entre 2,8 et 4,2 MM€ à ce stade préliminaire d'études.
Saint Exupéry n'est pas une alternative à Lyon Part-Dieu
On sent également pointer le souhait de mieux utiliser la gare de Lyon Saint Exupéry, en alternative au transit des TGV par Lyon Part-Dieu, ce qui serait assurément une erreur majeure, vidant les TGV, qui sont largement tributaires de bonnes conditions d'accès au centre de Lyon mais aussi des correspondances procurées. Gagner du temps en perdant des voyageurs, il y a assurément mieux à faire... à condition que l'objectif soit évidemment d'augmenter l'usage du train.
La gare Saint Exupéry conserve donc une fonction complémentaire au noeud lyonnais, bénéficiant à la banlieue Est de Lyon et au nord de l'Isère... mais avec des accès uniquement en voiture puisque la desserte par les transports en commun est limitée afin de ne pas porter ombrage au tramway Rhônexpress.
D'étonnantes lacunes
D'abord, on peut être surpris du périmètre très réduit du débat : pas un mot sur l'itinéraire Vaise - Perrache par exemple, qui semble pourtant bien plus en phase avec une logique de développement d'un RER lyonnais. Le sujet Lyon - Saint Etienne, tout de même quelque peu dimensionnant, n'est même pas clairement évoqué.
Ensuite, le débat ne dit mot sur la démarche de SNCF Réseau visant à déployer ERTMS niveau 2 sur les grands axes et les grands noeuds ferroviaires. Au regard des perspectives 2040 exprimées dans le dossier, il semble que les bénéfices procurés par la modernisation de la signalisation puisse répondre aux besoins à un coût nettement inférieur à celui de l'ajout de deux voies supplémentaires entre Saint Clair et Guillotière... alors même que la LGV Sud-Est doit en être équipé. Malgré la contrainte d'une bifurcation à niveau à Saint Clair, il y a peut-être moyen de différer le besoin d'un tel investissement, tout en procurant le gain de capacité attendu.
Très étonnant débat donc...