La grande vitesse se profile entre Lisbonne et Porto
Le projet d'une ligne nouvelle à grande vitesse réduisant à 1h15 la durée du trajet entre les deux principales métropoles du Portugal va être concrétisé avec l'annonce par le gouvernement de la mise en chantier en 2024 d'une première section entre Porto et Soure (au sud de Coimbra), dont le coût est estimé à 2,9 MM€. Elle serait livrée en 2028 et réduirait le temps de trajet à environ 2 heures pour les meilleurs services. La deuxième étape apporterait l'essentiel du gain de temps complémentaire (1h19 pour les trains directs) en se raccordant à l'entrée de la capitale. Il resterait une dernière section, au-delà de 2030, pour une arrivée plus rapide au coeur de Lisbonne et un gain de 4 minutes.
La ligne nouvelle intègre :
- l'extension de la gare de Porto Campanha en préfiguration de la future jonction avec Vigo,
- un nouveau viaduc sur le Duro (incluant une liaison routière),
- la création d'une gare nouvelle au sud de Porto, à Vila Nova de Gaia, connectée à un prolongement du Metro do Porto,
- des raccordements pour la desserte d'Aveiro, Coimbra et Leiria,
- l'aménagement de la gare de Lisbonne Oriente et Porto Campanhã pour accueillir les circulations supplémentaires.
Le coût complet du projet est estimé à 4,5 MM€ et bénéficiera d'une subvention européenne de 1 MM€.
La grande vitesse ferait pratiquement tripler la fréquentation du train entre les deux villes, passant selon les études de potentiel de 6 à 16 millions de passagers annuels. Actuellement, le temps de parcours des 15 allers-retoues oscille entre 2h58 pour les services assurés en trains pendulaires Alfa et 3h22 pour les offres classiques. Le schéma de desserte prévoit jusqu'à 60 circulations sur la ligne nouvelle, dont 9 sans arrêts et 17 desservant les gares intermédiaires, ainsi que 34 alternant la circulation sur la ligne nouvelle et sur le réseau existant, combinaison facilitée par le choix de construire la ligne nouvelle à l'écartement ibérique : il faut espérer que soient prévues des traverses compatibles avec la pose d'un troisième rail à écartement 1435 mm..
Lisbonne Oriente - 26 mai 2014 - La très belle verrière de la gare Oriente contraste avec l'espace sous les voies, d'un agrément nettement moindre. Les liaisons rapides entre Lisbonne et Porto sont assurées en automotrices pendulaires Fiat-Alstom, similaires aux ETR460 italiennes. © transportrail
Porto Campanhã - 28 mai 2014 - La gare des trains longue distance de Porto est à l'écart de la ville, accessible notamment par correspondance avec les services de banlieue depuis la gare de São Bento. Notez les quais à 760 mm qui réduisent le nombre de marches à gravir pour accéder à ces rames dont le plancher se situe à 1,25 m. © transportrail
L'appel d'offres pour 12 rames à grande vitesse (et 14 en tranche optionnelle) se poursuit. Le montant total du marché est aujourd'hui estimé à 650 M€. Alors, Alstom, Siemens, CAF, Talgo, Hitachi ?
Portugal : un investissement massif pour le ferroviaire
A l'échelle du pays, c'est beaucoup : 10,5 MM€ d'investissements supplémentaires sur 10 ans, dans le cadre de la relance de l'économie après la crise sanitaire. Le chemin de fer au Portugal, ce sont 3621 km de lignes, dont 2546 km exploités. Plus de la moitié est à voie unique (1639 km). Un tiers du réseau est électrifié (1351 km). Voici quelques chiffres.
Le plan adopté par le gouvernement comporte une tête d'affiche : la réalisation d'une ligne à grande vitesse entre Lisbonne et Porto, évaluée à 4,5 MM€, en commençant au sud de Porto. Elle serait établie dans un premier temps à écartement ibérique et apte à 250 km/h, en attendant l'achèvement complet de la ligne nouvelle qui passerait ensuite à l'écartement européen avec une vitesse portée à 300 km/h afin d'atteindre l'objectif d'une liaison Lisbonne - Porto en 1h15.
Lisbonne Oriente - 26 mai 2014 - Une rame pendulaire ALFA arrivant de Porto dans la nouvelle grande gare de la capitale du Portugal, les trains continuant vers le terminus de Santa Apolonia. Aptes à 250 km/h, ces rames pourraient profiter des futurs aménagements, en attendant la conversion à la voie normale et l'arrivée d'un matériel à grande vitesse. Il faudra donc aussi probablement adapter l'infrastructure pour le double écartement afin de maintenir la desserte des gares existantes. © transportrail
Porto Saõ Bento - 28 mai 2014 - Accueillant un trafic régional assez consistant, la petite gare au centre de Porto est ici occupée par 2 automotrices série 3400 constituant le matériel le plus moderne. En descendant du train, il faut admirer la décoration du hall de la gare, de toute beauté ! © transportrail
La ligne nouvelle pourrait ensuite être prolongée de Porto à Vigo en passant par Braga, pour une liaison Porto - Vigo en une heure et assurer la jonction avec le réseau à grande vitesse espagnol.
Le plan comprend également un important chapitre relatif à l'électrification du réseau, avec une enveloppe de 740 M€. Vient ensuite l'amélioration des dessertes de banlieue autour de Lisbonne et de Porto, avec un budget de 290 M€, sujet qu'on devrait en partie retrouver dans les 270 M€ fléchés vers ERTMS pour moderniser la signalisation. Enfin, 200 M€ seront alloués à l'amélioration de l'intermodalité fer - mer.
De nouvelles infrastructures sont également prévues avec notamment une ligne de 36 km pour la vallée de Sousa, au nord-est de Porto, estimée entre 200 et 300 M€, et pas moins de 750 M€ seraient consacrés à l'amélioration du maillage du réseau, notamment vers l'Espagne, pour développer le transport de marchandises et prolonger les investissements dans les ports.
Il est aussi prévu d'engager 1,7 MM€ pour le renouvellement du matériel roulant, incluant les 12 rames à grande vitesse prévues en 2029 et une option de 14. Ce budget couvre également le renouvellement des rames de la ligne de Cascais déjà évoqué par transportrail, et une prévision de 55 automotrices en lien avec les électrifications envisagées.
Portugal : vague de modernisation sur Lisbonne – Cascais
Notre premier article sur les chemins de fer au Portugal !
La capitale du Portugal n’est pas au bord de l’océan mais presque : les amateurs de surf dans les rouleaux de l’océan Atlantique connaissent Cascais… et les amateurs de formule 1 ont l’oreille qui se dresse en entendant le nom de la ville d’Estoril. Rassurez-vous, transportrail ne devient pas Stade 2… et on s’empresse de préciser que ligne dessert aussi Belem, son monastère, sa tour en rive droite du Tage et son palais présidentiel… Voilà pour la partie touristique.
Ainsi, la petite ligne de Lisbonne à Cascais, longue de 25,4 km au départ de la gare lisboète de Cais do Sodre, dessert la rive nord de l’estuaire du Tage et rejoint les célèbres plages de l’océan Atlantique. Elle est fonctionnellement isolée du reste du réseau portugais, même si elle est connectée depuis 1975 à Alcântara au reste du réseau ferroviaire.
Première ligne portugaise électrifiée, en 1926, pour son caractère éminemment périurbain, elle avait à l’époque équipée en caténaire à courant continu 1500 V, avec un mélange d'influences anglaise (pour le matériel roulant, les quais hauts) et allemande (pour la partie électrique). Les autres lignes électrifiées sont équipées en 25 kV 50 Hz puisque plus récemment équipées.
Alges - vers 1890 - La ligne de Cascais à l'époque de la traction vapeur : un petit chemin de fer littoral avec un certain soin apporté aux gares avec cette grande marquise, plus longue que le bâtiment d'accueil des voyageurs. (cliché X)
Monte Estoril - vers 1955 - En 1950, de nouvelles automotrices anglaises de General Electric Company sont venues épauler le parc d'origine construit par Dyle & Bacalan, Baume & Marpent et AEG pour la partie électrique. On aperçoit ici un couplage des deux modèles. Avec l'électrification, les quais avaient été réhaussés pour faciliter les conditions d'accès, probablement par l'influence britannique... (cliché X)
Belem - 26 mai 2014 - Depuis la passerelle de la gare, l'implantation de la ligne au milieu d'une avenue à grande circulation dans la traversée de Belem, avec un train en direction de Cascais. Une configuration qui évoque presque plus un tramway qu'un train de banlieue. © transportrail
Belem - 26 mai 2014 - Les automotices en acier inoxydable de 1959 ont été modernsées avec une face avant renforcée. Construites par Sorefame et GEC, elles ont été modernisées à la fin des années 1990 avec également l'installation de la climatisation. © transportrail
Gibalta - 3 avril 2011 - Un train ayant quitté Lisbonne circule en direction du littoral, longeant le détroit du Tage avec en arrière-plan l'immense viaduc rejoignant la rive gauche, dans lequel passe la ligne de chemin de fer du Fertuga. © N. Moraõ
Lisbonne – Cascais est aussi sans réelle surprise la ligne la plus circulée du réseau portugais, avec un service de banlieue intensif. A l’heure de pointe, la mission semi-directe pour Cascais est cadencée aux 12 minutes, desservant Alcântara, Algés et toutes les gares à partir d’Oreias, tout comme la desserte de « première zone » jusqu’à Oreias. En journée, les trains sont omnibus (16 arrêts) de Lisbonne à Cascais avec un départ toutes les 20 minutes. L’amplitude de service est élevée puisque le premier train est à 5h30 et le dernier à 1h30. Il faut 33 minutes à un train semi-direct pour atteindre Cascais et 40 pour un train omnibus. Le week-end, le service applique le régime d’heure creuse.
La grille horaire actuelle prévoit un intervalle de 2 minutes entre les départs des missions express et omnibus.
REFER, le gestionnaire d’infrastructure portugais engage la modernisation de cette ligne qui sera réélectrifiée en 25 kV 50 Hz et équipée en ERTMS niveau 2 pour augmenter le débit sur cette ligne au potentiel évidemment conséquent. Il s’agit d’un des éléments du programme d’amélioration du réseau à horizon 2023, d’un coût de 77 M€, bénéficiant d’un important concours européen à hauteur de 50 M€. En outre, il faudra renouveler le matériel roulant avec l’acquisition de 60 nouvelles rames (à écartement de 1668 mm, faut-il le préciser ?) afin de remplacer les automotrices en acier inoxydable datant de 1959 et modernisées entre 1998 et 2002 : composées de 4 voitures dont une seule est motrice, elles développent 960 kW pour masse de 118 à 142 tonnes selon l’ampleur de la rénovation (renforcement de la face frontale) et une vitesse maximale de 90 km/h.
Lisbonne – Cascais va donc surfer sur une vague rafraichissante…