Alstom : Belfort sur la sellette ?
Juste après avoir présenté le "plateau commun" SNCF - Alstom pour l'élaboration du cahier des charges du "TGV du futur", le constructeur ferroviaire a annoncé la fermeture en 2018 d'une usine historique, emblématique de la construction ferroviaire en France, son site de Belfort. Evidemment, dans le contexte politique actuel, le sujet s'est immédiatement enflammé dans la classe politique, à droite comme à gauche.
Essayons d'y voir un peu plus clair. Belfort, Reichshoffen, Petite-Forêt, Aytré : 4 usines d'assemblage du matériel ferroviaire, avec une forte spécialisation. A Belfort les locomotives, y compris celles destinées au TGV. A Reichsoffen les automoteurs régionaux, plus précisément le Régiolis. A Petite-Forêt, les MI09 et le tram-train Dualis. A Aytré, les tramways et les remorques TGV.
Or le marché de la locomotive a fortement évolué et se concentre désormais principalement sur le fret et les trains de chantiers. Depuis plus de 15 ans, le marché européen de la locomotive est dominé par Bombardier et de sa Traxx, best-seller décliné dans de multiples versions à la demande des clients. Néanmoins, depuis deux ans, Siemens collectionne les succès avec sa nouvelle Vectron. Pendant ce temps, Alstom et sa Prima ont été très en retrait. Certes, le marché français a une fois de plus servi de vitrine (avec le plan des fameuses 400 locomotives pour le fret, incarné par les BB27000, 37000 et 75000, mais aussi avec les 67 locomotives Transilien BB27300). Mais au-delà, la commercialisation des Prima est restée très en retrait de ses rivales européennes. La Prima 2, censée relancer le produit, n'a pas permis de reprendre des parts de marché à Bombardier et Siemens. La raison est simple : Alstom n'a jamais achevé la procédure d'homologation de cette nouvelle locomotive ! Ou comment se lamenter qu'on perd des marchés quand on déclare forfait...
Quant au TGV, le coup de frein était logique, entre réduction des ressources budgétaires et stratégie de prolongement de lignes existantes censées augmenter la productivité du parc existant.
Reste les marchés à venir, et notamment le RERng qui doit être attribué en novembre, et le matériel du Grand Paris Express. Pour le premier, on sait que la compétition est rude avec le challenger CAF dont l'offre met le groupement Alstom-Bombardier en difficulté sur la note technico-financière. Les annonces de la direction d'Alstom peuvent avoir aussi un arrière-goût de "petit coup de pression" pour orienter l'attribution du marché. Pour le second, si tout le monde sait produire le matériel demandé, le rythme de production (200 rames sur 20 ans minimum, soit moins d'une rame par mois), n'est guère enthousiasmant pour structurer un plan d'affaires.
Suite au prochain épisode...