Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
7 juin 2020

A propos de maillage ferroviaire...

Deux graphiques réalisés sur la base des données fournies par IRG-Rail, l'association des régulateurs ferroviaires en Europe (Independant Regulator'sGroupe - Rail), permettent de comparer la présence du rail en Europe sur le territoire et par rapport à la population.

L'Europe comptait 234 037 km de lignes avec une densité moyenne de 4,79 km pour 100 km² ou 4,38 km pour 10 000 habitants. On enregistrait en 2018 environ 54 trains par jour et par kilomètre, dont 81% pour le transport de voyageurs et 19% pour le fret. Dernier chiffre, 55% des infrastructures ferroviaires européennes sont électrifiées.

reseau-territoire-population

La barre verticale en pointillés représente la moyenne des deux tableaux. La France apparaît en rouge et se situe au niveau de la moyenne, légèrement au-dessus sur le premier critère. Par rapport au territoire, le pays européen le plus proche est la Roumanie puis la Serbie, la Hongrie. Sur le second tableau, la France se classe en 19ème position, à un niveau voisin de pays très variés comme la Pologne, le Danemark, le Luxembourg... et l'Allemagne.

Les deux critères sont assez complémentaires même si le second peut donner un certain avantage à des Etats compacts, soit parce que le pays est très urbain soit parce qua population est très concentrée. On prendra les pays baltes et la Finlande pour illustrer ce propos. Aussi, l'approche sur la surface du pays semble plus révélatrice des disparités : la prime aux petites surfaces existe avec la Suisse, la République Tchèque, le Luxembourg, les Pays-Bas, ou la Belgique. L'écart entre la France (5,11 km / 100 km²) et l'Allemagne (10,99 km / 100 km²) est impressionnant mais on notera quand même l'écart entre la France et l'Italie (6,12 km / 100 km²).

Une façon de tordre le cou à ceux qui considèrent que le maillage ferroviaire français est soit exceptionnel... soit trop important. Non, il est juste dans la moyenne et cette vision statistique est même légèrement avantageuse pour les Etats disposant de lignes à grande vitesse par nature distinctes des lignes historiques, même quand elles sont parallèles et à faible distance d'axes préexisants : on prendra pour illustration la vallée du Rhône avec 3 lignes sur une vingtaine de kilomètres entre Montélimar et Avignon, ou la LGV Atlantique parallèle à la ligne Paris - Châteaudun - Tours. A l'inverse, une ligne à 4 voies (comme par exemple la rive droite du Rhin) ne compte pas pour 2 lignes distinctes. Mais abstraction faite de cette limite, ces chiffres restent quand même assez intéressants...

Rappelons quand même qu'existaient 42 000 km de lignes à la création de la SNCF... et qu'il en reste aujourd'hui 28 000 soit l'équivalent du réseau de 1890. Il y avait certes quelques lignes plus utiles à l'élection d'un conseiller général ou d'un député qu'à la population, mais il faut quand même reconnaître que les coupes ont été radicales en France. Les seules années 1938 et 1939 avaient vu la fermeture de 9700 km de lignes à tout trafic et de 4700 km supplémentaires au trafic voyageurs. Une jolie saignée...

Pour terminer, quelques chiffres d'investissement sur la période récente 1990-2015 : la France a investi 78 MM€ sur le réseau ferroviaire, dont 38% pour les lignes à grande vitesse et 13% en Ile de France. Durant la même période, l'investissement sur le réseau routier a atteint 276 MM€. Il y a encore du chemin avant de rendre ces trajectoires un brin plus équitable...

Enfin, sur la seule période 1998-2018, le réseau ferroviaire exploité s'est contracté de 13%, alors que le réseau routier a été étendu de 12%.

Publicité
Publicité
14 avril 2020

ERTMS : une trajectoire européenne à redresser

5733 km équipés en septembre 2019 pour un objectif de 15 665 km fin 2023 : l'Union Européenne constate qu'entre les engagements et les actes, l'écart est significatif et ne pourra probablement pas être rattrapé. Parmi les explications, le délai de mise au point d'une version stable, la désormais célèbre Baseline3 pour les initiés, peut être avancé mais ne saurait être suffisant. 

La Suisse vient d'achever l'équipement de son réseau avec le niveau 1 en supervision limitée. Même chose au Luxembourg. Mais il s'agit de réseaux de taille limitée par rapport aux principaux pays européens, et la démarche a été engagée et financée de longue date... sur les équipements au sol et à bord. En France, l'axe Luxembourg - Bâle est également prévu en niveau 1 en supervision limitée, mais ce stade est jugé finalement - et logiquement - peu pertinent.

020317_1301mommenheim2

Mommenheim - 2 mars 2017 - La BB1301 belge traverse la gare française de Mommenheim avec un long convoi vers la Suisse se jouant des frontières. Ces machines sont très présentes sur cette dorsale entre la Lorraine et la Suisse, l'itinéraire français étant bien plus court que par l'Allemagne. © transportrail

080717_37052kogenheim_hoffmann

Kogenheim - 8 juillet 2017 - Circulation à droite en plaine d'Alsace pour la BB37052 en tête d'un convoi Sibelit aisément reconnaissable avec ses caisses mobiles Ambrogio, à destination de l'Italie. Les BB37000 tricourant aptes au 15 kV peuvent pénétrer en Suisse et en Allemagne et circulent également sous le 25 kV luxembourgeois. © N. Hoffmann

ERTMS pose effectivement plusieurs questions d'ordre économique, financier et technique. Sa valeur ajoutée n'apparaît réellement qu'avec le niveau 2 et avec la suppression de la signalisation latérale, pour bénéficier d'un gain de capacité d'une part et d'une réduction des coûts de maintenance d'autre part (bref, des recettes en hausse et des dépenses en baisse). L'installation nécessite une mise de fond assez élevée pour équiper l'infrastructure mais aussi le matériel roulant. Si le GSM-R, outil de communication essentiel dans ERTMS, est déployé sur 140 000 km d'infrastructures en Europe, les autres équipements amènent les gestionnaires d'infrastructures et les États à une certaine inertie. 

Dans certains cas, ERTMS même en niveau 2, même avec suppression de la signalisation latérale, ne présente pas dans l'absolu un bilan économique tranché lorsque des équipements performants existent : c'est le cas du LZB allemand et de la TVM française sur les LGV.

Il est effectivement plus important lorsque ERTMS doit venir remplacer des systèmes classiques à capacité limitée et lorsque le gain qu'il peut procurer élude - ou diffère - un besoin d'investissement élevé en voies supplémentaires ou en infrastructures nouvelles. 

Cependant, lorsqu'il faut envisager le renouvellement d'équipements, ERTMS s'impose comme un nouveau standard : plutôt qu'un remplacement à l'identique (par exemple refaire de la TVM), basculer en ERTMS prend tout son sens, comme cela a été démonté avec la LGV Sud-Est. Le gain de capacité procuré est ici réel, car il s'agit de la première version de la TVM (TVM300) et le renouvellement est l'occasion d'envisager un redécoupage, intégrant les performances des matériels de dernière génération. C'est en outre un axe majeur français et européen, où certains opérateurs préparent leur arrivée face à une SNCF qui leur a facilité la tâche en réduisant l'offre depuis plus de 10 ans. C'est tout le paradoxe français : la demande existe, mais valoriser un gain de capacité de l'infrastructure dans une conjoncture à la baisse en nombre de sillons effectifs s'avère objectivement un exercice difficile face à des comptables à courte vue. 

L'autre point sensible, c'est evidemment le matériel roulant : entre 27 500 et 30 000 engins (auto-)moteurs doivent être équipés d'ici 2030. Or les conditions de financement sont particulièrement variables entre les États. En outre, la progressivité dans l'équipement du réseau implique en phase transitoire la spécialisation des parcs. C'est par exemple un des éléments centraux du projet Marseille - Vintimille, facilité par la configuration de l'axe, finalement assez isolé. Ce n'est pas trop difficile pour les trains à grande vitesse, puisque le renouvellement naturel du parc devrait aboutir à un équipement général des relations empruntant l'ensemble LN1-LN4-LN5.

Cette situation résulte aussi d'un choix de pilotage par les États. Un portage européen aurait été intéressant, notamment dans la démarche industrielle avec la constitution d'une centrale d'achat mutualisant certains frais fixes et donnant une toute autre envergure au projet. Le consensus mou préservant le pré carré de chaque État a finalement engendré une partie des dérives techniques et financières de l'Esperanto de la signalisation ferroviaire.

En outre, ERTMS doit aussi prendre en compte ses propres limites et une nouvelle évolution à venir : le GSM-R a vocation à être remplacé par un nouveau système dérivé de la 5G : Future Rail Mobile Communication System pourrait émerger d'ici 4 ans. Pointe aussi à l'horizon une évolution d'ERTMS avec pilotage automatique pour les sections à fort trafic.

Le nouveau contexte de la décennie 2020 suite à la crise sanitaire recherche des projets pouvant être rapidement mis en oeuvre : le développement d'ERTMS mériterait d'en faire partie avec un concours européen significatif, surtout si le modèle économique et industriel venait à privilégier des circuits plus courts, à l'échelle du continent, avec un mode de transport plus vertueux.

12 mars 2020

Il y a de la place sur nos LGV !

Voici un dossier de transportrail qui va probablement intéresser de futurs opérateurs ferroviaires qui envisageraient de se lancer dans une aventure à grande vitesse, si périlleuse soit-elle compte tenu de la mise de départ assez élevée.

En comparant le trafic sur les principales LGV françaises (LN1, LN2, LN3) sur leurs sections les plus chargées, il est de prime abord étonnant de constater une régression assez sensible, qui peut atteindre 20%, du nombre de circulations par rapport à l'année 2008 qui peut être considérée comme l'apogée du trafic. Pourtant, la SNCF met en avant l'essor de Ouigo et de bons chiffres de fréquentation. C'est vrai, mais il faut d'abord noter qu'une majorité des circulations low-cost n'ont pas été créées mais résultent de la transformation de circulations préexistantes.

En outre, la quasi-généralisation des rames à 2 niveaux a objectivement augmenté la capacité proposée à desserte équivalente et la SNCF en a profité pour ajuster à la baisse son offre, focalisée par le coefficient d'occupation de ses trains et surtout la marge par place-kilomètre offerte : conséquence, nombre de relations ont été passées au peigne fin. Ce fut notamment le cas sur l'axe Nord en décembre dernier, mais on sait que plusieurs relations ont été dégraissées : Paris - Annecy et Paris - Grenoble par exemple au sud-est. Sans compter les liaisons Intersecteurs, premières concernées par la conjonction du phénomène Ouigo et du malthusianisme de SNCF Voyageurs. C'est oublier un peu vite que ce qui intéresse d'abord le voyageur, après la vitesse et le prix, c'est la fréquence ! Mais faut-il rappeler les tensions à l'époque entre la SNCF d'un côté, feu-RFF et les Régions de l'autre à propos du cadencement ?

080320_607lgv-rr_meillasson

Vellechevreux-et-Corbenans - 8 mars 2020 - Evidemment, illustrer ce dossier avec une vue de la LGV Rhin-Rhône revêt un aspect caricatural. C'est la moins fréquentée des lignes à grande vitesse et elle n'a pas échappé au mouvement de contraction de l'offre, essentiellement sur les liaisons Intersecteurs : il ne reste que 5 allers-retours Strasbourg - Lyon (et encore, une rotation a été ajoutée à l'horaire 2020 le matin su pression des élus locaux) soit un de moins qu'à l'époque des Corail... A noter sur ce cliché que la rame Réseau-Duplex 607 arbore la livrée Carmillon. Il y a encore 18 mois, il était prévu de réassocier les tronçons Duplex avec les motrices 4400 auxquels ils étaient associés à la sortie d'usine, et de réformer les motrices Réseau et les segments voyageurs formant les rames POS avec les motrices 4400. La SNCF a changé d'avis in extremis... © S. Meillasson

Certes, 7 allers-retours Paris - Annecy en TGV Sud-Est sont équivalents en capacité à 5 allers-retours en TGV Duplex... mais pour le voyageur, ce n'est pas vraiment la même chose. La comparaison sur cette période est donc d'autant plus intéressante que la séquence précédente, entre 1995 et 2008, avait plutôt été celle du développement de l'offre.

Résultat, il sera difficile de plaider la congestion - sinon la saturation - pour contrer les tentations de certains opérateurs européens de venir concurrencer l'opérateur historique français... qui ne se prive pas d'afficher ses intentions chez nos voisins, notamment en Espagne. On le sait, Trenitalia et la RENFE se préparent, le premier avec des ETR400, le second avec des S100, mais attention à ne pas avoir l'appétit plus gros que le ventre. (nos dossiers sur la grande vitesse en Espagne et en Italie). Ce sera aussi par les temps qui courent une bonne mise à l'épreuve du nouveau groupe SNCF sur la question de plus en plus sensible de l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure.

Bonne lecture du nouveau dossier de transportrail.

11 mars 2020

Paris - Toulouse ou les méfaits du morcellement tarifaire

Le gruyère n’est pas une spécialité gastronomique toulousaine. En revanche, la relation Paris – Toulouse illustre de façon criante la politique commerciale de la SNCF et sa segmentation par l’horaire entre InOui et Ouigo.

Ainsi, à l’horaire 2020, on compte 6 allers-retours à grande vitesse entre Paris Montparnasse et Toulouse Matabiau, au demeurant assez mal cadencés :

  • Départs de Paris à 6h47, 8h52, 12h27, 14h04, 16h52 et 18h52
  • Départs de Toulouse à 6h47, 8h44, 11h54, 14h12, 17h50 et 18h47

Le temps de parcours oscille entre 4h06 et 4h48. Pas très lisible non plus.

Mais ce qui est encore plus révélateur, c’est la décomposition de l’offre puisque sur ces 6 allers-retours, 2 sont des Ouigo :

  • Au départ de Paris à 8h52 et 12h27
  • Au départ de Toulouse à 14h12 et 17h50

Résultat, il n’y a qu’un seul départ InOui de Paris en matinée, à 6h47. Pas de report possible avant 14h04. Au départ de Toulouse, un seul InOui en fin de journée à 18h47. Le précédent est à 11h54.

La fragmentation tarifaire par l’horaire amène donc à des creux d’offre de 7h17 dans le sens impair et de 5h56 dans le sens pair, qui sont évidemment inacceptables et concourent au passage à renchérir le prix du billet sur InOui, puisqu’il n’y a qu’une seule fréquence utilisable en pointe.

Dans une vision plus large, on peut supposer que l’élargissement de l’offre Paris – Toulouse, comptant 2 allers-retours Intercités de jour, 1 aller-retour de nuit et un Intercités Eco, pourrait être bousculée par l’arrivée de Flixtrain sur 2 allers-retours, également via Limoges, avec une concurrence directe non seulement sur les Intercités de la SNCF mais aussi sur les Ouigo.

Conclusion : si Toulouse a gagné un aller-retour et une heure de trajet avec SEA, en réalité, avec la logique de la SNCF, elle dispose de 5 types de service commercialement étanches comprenant respectivement 4 (InOui), 2 (Ouigo et Intercités de jour) et 1 aller-retour (Intercités Eco et Intercités de nuit). Dans ces conditions, le trafic aérien peut être relativement tranquille, même dans la perspective d'une LGV entre Bordeaux et Toulouse. Pour mémoire, Air France propose 22 allers-retours par jour entre Blagnac, Orly ou Roissy.

6 mars 2020

Les ouvrages en terre en question

Les ouvrages en terre, ce sont les remblais et les déblais... et les dernières semaines ont mis en évidence les fragilités. Trois illustrations.

Hier, un TGV Strasbourg - Paris a déraillé sur la LGV Est à 225 km/h suite à la déformation de la voie provoquée par un glissement de terrain : plusieurs rames étaient passées avant sans encombres, ce qui laisse penser que le mouvement s'est produit juste avant le passage de la rame qui a déraillé. Le TGV a bien résisté grâce à sa structure articulée avec un bilan limité à 22 blessés.

Depuis le 4 février, le trafic est interrompu en Ile de France entre Saint Cloud et Versailles également suite à un glissement de terrain à la sortie sud du tunnel. La stabilisation du site s'avère difficile d'autant que plusieurs habitations pourraient être menacées.

Enfin, à l'ouest de Mantes la Jolie, le remblai d'Apremont, en amont de Bueil, est identifié depuis 2001, mais la situation est devenue critique en imposant un ralentissement à 10 km/h. Une nouvelle phase de travaux de stabilisation est en cours, pour essayer de purger le talus et de le renforcer afin d'éviter les dégradations parfois importantes sur la géométrie de la voie. En attendant, l'exploitation reste particulièrement affectée.

On pourra aussi rappeler les conséquences des intempéries dans l'Hérault, qui avaient emporté la plateforme au sud de Béziers, ou encore dans les Yvelines avec le déraillement d'une rame du RER B dans la vallée de l'Yvette.

Ces événements illustrent une plus forte sensibilité du réseau ferroviaire aux contrastes météorologiques, entre longues périodes sèches et épisodes pluvio-orageux de forte intensité, à laquelle objectivement il n'est pas préparé. Cependant, ils mettent aussi en lumière des faiblesses dans la gestion de l'infrastructure, notamment dans la maintenance courante : le traitement des équipements de drainage constitue un élément central dans la bonne tenue de la plateforme, mais la course à la réduction des dépenses de fonctionnement a entrainé une réduction de ces tournées. La digitalisation de la gestion du réseau permettra peut-être, à condition d'avoir les capacités d'investissement suffisantes, de mieux détecter l'évolution des installations et anticiper les interventions... à condition d'avoir les moyens de le faire, ce qui suppose d'abord une capacité d'analyse des données récoltées par des bardées de capteurs et une réactivité des moyens d'intervention. Or dans un système ferroviaire sous-financé en investissement et en maintenance, le risque de tels événements tend à être amplifié. Peut-être faudra-t-il aussi évaluer l'impact de ces ouvrages de grand format, et réexaminer les règles de leur conception, y compris le rôle de la végétation dans leur tenue, or la tendance est plutôt à couper les arbres aux abords des voies pour éviter les chutes sur la caténaire ou les glissades automnales liées aux feuilles mortes...

L'enquête du BEA-TT déterminera les causes de l'accident d'hier sur la LGV Est.

Publicité
Publicité
5 mars 2020

Partagez vos idées sur les petites lignes

Fer de France, association d'acteurs de la filère ferroviaire, organise chaque année le cycle Moisson-Desroches destiné aux jeunes dirigeants. Dans ce cadre, 3 d'entre eux, de profils différents, ont initié un projet collaboratif sur les « petites lignes ». Plutôt que d'entrer dans le débat récurrent sur la pertinence du mode ferroviaire, ce projet s'oriente plutôt sur les moyens de développer l'attractivité et la fréquentation de ces lignes. Ils proposent une «boîte à idées » qui regroupe des initiatives menées en France mais pas seulement. Leur objectif est d'inspirer aussi bien les acteurs du ferroviaire que les acteurs locaux (les collectivités, gestionnaires de sites touristiques, associations) qui souhaitent dynamiser les lignes sur leur territoire.

Une première version test comprenant a été constituée que vous pouvez télécharger sur ce lien : elle n'épuise évidemment pas toutes les possibilités mais essaie - heureusement - de faire bouger ces lignes. Vous pouvez les aider en répondant à leur questionnaire après avoir consulté leurs premières propositions.

17 décembre 2019

Marseille - Aix en Provence vers une électrification nouvelle génération ?

La Région PACA a fait un pas en avant vers l'électrification de la ligne Marseille - Aix en Provence. L'année dernière, elle avait participé au financement d'une étude sur cette ligne. L'électrification classique y est rendue difficile par la succession d'ouvrages d'art, notamment 10 tunnels et une vingtaine de ponts sur 36 km, qui représentent un poste de dépenses élevé pour dégager le gabarit d'implantation de la caténaire. L'émergence de nouvelles solutions recourant à des batteries a ouvert une nouvelle voie, inspirée de la démarche proposée par Keolis au Pays de Galles, pour l'électrification de lignes autour de Cardiff à moindres frais.

040809_81604aixenprovence5

Aix en Provence - 4 août 2009 - Départ d'un AGC bimode pour Marseille. Les travaux de modernisation de l'axe ont considérablement remanié cette entrée de la gare (avec des choix discutables qui n'ont pas été pensé dans le sens de l'économie). L'électrification nouvelle génération devrait donc être la troisième phase d'augmentation des performances de cette ligne. L'AGC bimode série 81500, avec sa chaîne de traction continue 1500 V serait selon Bombardier assez facile à transformer en matériel purement électrique par un mix pantographe-batteries qui pourrait être prometteur. © transportrail

Parallèlement, Bombardier étudie depuis plusieurs mois l'évolution des AGC bimodes pour les rendre complètement électriques en remplaçant la partie thermique par des batteries. Ainsi, la caténaire serait implantée sur les sections les plus faciles et donc les moins onéreuses tandis que les batteries, assureraient la traction soit de façon ponctuelle, sous les ouvrages, soit de façon linéaire, par exemple sur une section terminale de distance limitée. Ainsi, on peut désormais dissocier traction électrique et caténaire implantée de façon continue sur l'ensemble d'une ligne.

Un premier prototype devrait donc être réalisé d'ici 2 ans, avec un cofinancement par SNCF Mobilités, Bombardier et plusieurs Régions. L'objectif est de limiter le coût de transformation à environ 2 M€ par rame, hors frais d'études. La Région PACA pourrait dans un premier temps transformer une dizaine de rames pour la ligne Marseille - Aix en Provence, tandis qu'il faudra aussi compter entre 20 et 30 M€ pour électrifier certaines sections de la ligne. On peut notamment penser que la caténaire sera étendue au moins jusqu'à Saint Antoine, et qu'elle fera son apparition en gare d'Aix en Provence pour la recharge au terminus, mais que les 4 km jusqu'à Septèmes en seront dépourvus puisque cette section accueille à elle seule la moitié des tunnels entre Marseille et Aix. Au-delà, le parcours entre Septèmes et Gardanne ne présente pas de difficulté particulière.

Sur les sections électrifiées, le passage d'ouvrages ne dégageant pas le gabarit pourra être résolu grâce aux batteries, avec une zone neutre non alimentée servant simplement à guider le pantographe. Restera donc uniquement à manoeuvrer le pantographe à la fin des parcours électrifiés et à le relever en début de zone. Un système automatisé par balises faciliterait cette opération en évitant tout risque d'oubli (qui, dans un sens, pourrait se révéler préjudiciable...).

Point à noter : comme l'objectif est de limiter au maximum les reprises de gabarit, cette solution ne permettra pas l'emploi de rames à 2 niveaux sur cette ligne, qui nécessiteraient justement cette reprise des ouvrages, et qui ne peuvent recevoir de batteries faute d'espace suffisant en toiture.

En revanche, une question reste à traiter : quelles conséquences pour les trains Marseille - Briançon ? Ceux-ci auraient toujours besoin de moteurs thermiques au-delà d'Aix en Provence. Quelle modalités de traction sur les sections non électrifiées entre Marseille et Aix en Provence ? Cet aspect devra être traité dans le choix des zones équipées de caténaires et dans les règles d'exploitation. Il serait dommage d'avoir des trains en traction Diesel sous des sections nouvellement électrifiées...

Cette opération est d'autant plus intéressante qu'elle coïncidera avec des opérations mi-vie sur le parc des AGC. Elle l'est aussi à plus d'un titre sur le plan environnemental puisqu'elle permettra non seulement de s'affranchir du gasoil, mais qu'elle évite la construction de trains neufs en transformant un parc existant. Pour une SNCF qui s'est engagée dans la neutralité carbone à horizon 2035, c'est assurément un axe important de verdissement de ses activités. D'autres axes pourraient prochainement émerger, notamment Bordeaux - Le Verdon, avec une problématique légèrement différente : la caténaire existe et il s'agirait plutôt ici de réduire le coût de renouvellement des installations en privilégiant l'installation de batteries sur le matériel (des AGC aussi).

26 novembre 2019

Le Sénat s'intéresse aux trains de nuit

Discussion au Sénat sur les trains de nuit : manifestement, la chambre haute prend à bras le corps certains sujets ferroviaires pour lesquels jusqu'à présent, les belles déclarations se succèdent mais sans réelle concrétisation. Le débat a rassemblé 11 sénateurs de tous bords politiques qui ont assez unanimement défendu l'intérêt et le potentiel de ces trains, rappelant même un taux d'occupation supérieur aux trains Intercités de jour. Ce fut aussi l'occasion pour deux sénateurs des Alpes de rappeler l'urgence concernant la liaison Paris - Briançon, pour lesquelles n'a pas été trouvé de solution satisfaisante pour les voyageurs et l'économie locale pendant les travaux sur Livron - Veynes en 2021.

En réponse, le Secrétaire d'Etat aux Transports a évoqué les nouvelles perspectives pour le train de nuit dans le contexte écologique et un nouveau modèle économique à construire. Des généralités sans plus de précisions et surtout sans éléments concrets. En attendant, relisez donc notre dossier sur les trains de nuit...

19 novembre 2019

A propos de camions et autres convois exceptionnels

L'effondrement hier du pont routier suspendu à Mirepoix sur Tarn semble provenir, d'après les premiers éléments de l'enquête (et ce qui a été retrouvé dans le lit du Tarn...) de la circulation d'un convoi dépassant largement les 40 tonnes (était-il déclaré comme exceptionnel ?), sur un ouvrage n'admettant que des véhicules d'une poids total en charge de 19 tonnes maximum.

Il est difficile de ne pas faire le rapprochement avec l'accident survenu entre Reims et Charleville-Mézières par un point commun assez flagrant : dans les deux cas, les itinéraires où ont eu lieu ces événements étaient interdits aux convois exceptionnels.

A Mirepoix, si le pont a 85 ans, il était régulièrement inspecté et il n'y avait manifestement pas de défaut de maintenance de l'ouvrage. Il y a un mois, la collision entre un TER et un convoi exceptionnel avait, comme d'habitude, dérivé sur des suspicions du côté ferroviaire alors que la cause réelle de l'accident était bien la circulation sur cette route d'un véhicule routier interdit !

Il semblerait donc qu'un certain relâchement se fasse jour dans le respect de la réglementation routière sur les convois exceptionnels. Ces circulations sont en principe soumises à arrêté préfectoral et doivent emprunter les itinéraires prévus à cet effet. Mais certains sont manifestement tentés de prendre des raccourcis pour gagner du temps, en se fiant à des applications d'itinéraires ou à leur connaissance du réseau routier local. La belle affaire !

5 novembre 2019

Arc languedocien : un cas de vulnérabilité du réseau

L'exploitation ferroviaire a été interrompue sur l'arc languedocien, entre Béziers et Sète pour les TER, entre Montpellier et Narbonne pour les TGV et TET, après l'épisode cévenol de la semaine du 21 octobre. L'infrastructure a été en plusieurs points emportée par des précipitations importantes après une longue période sèche et plusieurs fois caniculaire : le rétablissement complet est prévu au début du mois de décembre. Une coupure d'une telle durée sur un axe principal est assez inédite sur le réseau ferroviaire français et pose plusieurs questions.

D'abord, celle de la vulnérabilité du réseau face à de tels événements. La plaine littorale a été considérablement urbanisée, souvent en zone inondable, amplifiant les effets de ces précipitations très courantes en début d'automne et dont les effets sont parfois dévastateurs. La voie ferrée se joue du cordon littoral, entre Montpellier et Sète, le long de l'étang de Thau, puis au sud de Narbonne. La plaine biterroise est une zone sensible, avec la vallée de l'Orb, et c'est précisément dans ce secteur que les dégâts ferroviaires sont les plus conséquents.

280219_27500beziers_behrbohm

Béziers - 28 février 2019 - L'Orb fait partie de ces cours d'eau dont les crues peuvent aussi soudaines que violentes. Ce cours d'eau vient une nouvelle fois prouver les fragilités du réseau ferroviaire face à des événements météorologiques qui sont certes ponctuels, mais dont la fréquence est malgré tout relativement importante. © R. Behrborm

280219_27500leucate_behrbohm

Leucate - 28 février 2019 - Plus au sud, la voie ferrée longe le trait de côte. L'impact d'un élévation du niveau de la mer doit être étudiée car c'est une hypothèse qui ne peut plus être considérée comme irréaliste. © R. Behrborm

Elle interroge ensuite la capacité à proposer des alternatives : les voyageurs pris au dépourvu, comme les équipes de la SNCF, ont critiqué l'opérateur pour le faible nombre d'autocars, mais il est évident qu'on ne trouve pas 500 véhicules de 50 places d'un claquement de doigt. Evidemment, Flixbus, Blablabus et les offres de covoiturage ont été prises d'assaut, avec des tarifs à la hausse, rejoignant ceux du train. Du côté de la SNCF, la mise en place d'un plan de transport alternatif n'est pas évidente, surtout avec le conflit local à l'atelier TGV de Châtillon, bloquant fortement les possibilités de liaisons via Bordeaux. Il aura fallu près de 2 semaines pour que le train de nuit Paris - Cerbère, qui transite via Limoges, Toulouse et Narbonne, soit rendu quotidien pour permettre une continuité ferroviaire nord-sud. Un retour en grâce temporaire, mais qui illustre la complémentarité des offres.

La transversale Bordeaux - Marseille est évidemment impossible à assurer de bout en bout et l'alternative consiste soit à passer par Paris, soit à effectuer une partie du trajet par autocar entre Narbonne et Montpellier... avec tous les aléas que cela comporte. Dans le cas présent, une liaison Bordeaux - Lyon n'aurait été que d'un faible intérêt, compte tenu du temps de parcours de l'ordre de 7 heures sur cette seule section. Quant à l'axe POLT, avec la multiplication des travaux de renouvellement, la réserve capacitaire est assez inégale selon les jours, en particulier entre la semaine et le week-end.

Sur le plan politique, cette interruption donne un argument de plus aux partisans de la réalisation de la ligne nouvelle Montpellier - Perpignan. Mais, comme ce fut le cas cet été après l'interception de la ligne de la Maurienne pour des raisons comparables, la ficelle semble un peu grosse : est-on certain que la ligne nouvelle n'aurait pas été elle aussi touchée par les intermpéries ?

Et puisqu'on parle de cette ligne nouvelle, il faut peut-être aussi voir plus loin. Ce phénomène conjoncturel pourrait être de nature à reposer certaines questions :

  • sur le maillage entre cette infrastructure à créer et le réseau exisant, avec en tête des préoccupations, la gare nouvelle de Béziers, connectée à l'autoroute... mais pas à la voie ferrée classique, et dans la foulée, sur celle de Narbonne, placée en aval de la bifurcation rejoignant la ligne classique vers Toulouse ;
  • sur le devenir de certaines sections du réseau actuel, dont la vulnérabilité aux effets des évolutions climatiques est assez nette, notamment les sections les plus proches de la mer et surtout de quasi plain-pied : LNMP ne résout en rien la question de la desserte de Sète et de Agde, qui demeure liée à la ligne existante et à la section comprise entre l'étang de Thau et la mer Méditerranée. Indépendamment du devenir de LNMP, il faudra bien se résoudre à plancher sur la protection de la ligne existante entre Montpellier et Béziers ;
  • sur les stratégies modales et d'usage de ces infrastructures, qui ne doivent pas être conçues à travers le seul prisme parisien mais dans une optique plus large : même avec une continuité de lignes rapides ou à grande vitesse de Paris jusqu'en Espagne, le trajet diurne Paris - Barcelone en 5h45 sera moyennement attractif, et donc de nature à privilégier une offre par trains de nuit. En revanche, pour Lyon, Genève, Marseille, Toulouse et l'arc languedocien, les connexions vers l'Espagne seraient sensiblement améliorées à condition de prévoir un haut niveau de connexion aux lignes existantes pour la desserte des villes du littoral. Bref, sortir d'un parisiano-centrisme serait plutôt favorable à LNMP... dont il ne faut pas non plus négliger l'intérêt pour le transport de marchandises, si une convergence européenne pour un report modal de grande ampleur passait du discours aux actes. La pénurie actuelle de chauffeurs de poids-lourds est un signal intéressant mais qui pour l'instant semble bien peu perçu...
Publicité
Publicité
<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 > >>
Publicité