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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
10 juin 2015

Autocars : quelle franchise kilométrique ?

De retour à l'Assemblée Nationale après une réécriture par le Sénat, la loi Macron est en cours de rétablissement dans ses dispositions d'origine. Le Sénat avait notamment revu la franchise kilométrique des "Macron Express" à 200 km, suivant l'avis de l'Autorité de la Concurrence, au lieu de 100 km, compte tenu du risque avéré de destabilisation de l'économie des dessertes ferroviaires. Le seuil de 100 km est rétabli. Le GART dénonce cette manoeuvre vues les conséquences pour les TER et les TET. La complémentarité vantée par le gouvernement est battue en brêche lorsqu'on regarde par exemple la carte du réseau d'autocars Isilines que nous avons récemment publié : c'est une concurrence frontale qui se prépare. Thatcher n'aurait pas fait mieux...

L'affaiblissement du chemin de fer est donc indiscutablement une stratégie résolument engagée par l'Etat. Les beaux discours environnementaux à l'approche de la COP21 sont là pour amuser la galerie.

 

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5 juin 2015

Transdev : le car... avant le train ?

Transdev présente Isilines, sa nouvelle filiale destinée aux liaisons intérieures libéralisées... dès que la loi Macron aura été adoptée et que ses décrêts auront été publiés : 17 lignes et 30 villes seront desservies dont voici la carte :

Evidemment, il saute aux yeux que les lignes proposées sont directement en concurrence avec les grands axes ferroviaires, y compris face au TGV, et sans aucune logique de complémentarité entre le car et le train puisque les autocaristes proposeront des services à leurs risques et périls. Effet garanti sur le taux de couverture des charges par les recettes sur les trains...

Isilines attend cependant de savoir si la franchise kilométrique sera de 100 km (comme le propose le gouvernement) ou de 250 km (suite à la tentative de coup de frein du Sénat). Cette carte met cependant en avant l'arrivée du car sur des axes où il aura tôt fait de détourner la clientèle du train qui subit des trains rares quand ils ne sont pas absents, lents et à la qualité de service médiocre. On notera tout particulièrement les lignes :

  • H Bordeaux - Brive - Clermont Ferrand
  • K Lille - Reims - Metz - Nancy - Strasbourg
  • L Grenoble - Lyon - Clermont Ferrand - Bourges - Tours - Angers - Nantes
  • M Nantes - Rennes - Vannes - Lorient - Quimper - Brest
  • N Rennes - Nantes - La Rochelle - Bordeaux - Toulouse
  • R Paris - Orléans - Bourges - Clermont Ferrand - Montpellier

Ces six relations pourraient pousser encore un peu plus dans le précipice les lignes ferroviaires correspondantes...

Eurolines sera chargé de la coordination avec les liaisons internationales dont le cabotage intérieur sera accru, de commercialisation et de l'exploitation de 300 véhicules climatisés (bien sûr), dotés de toilettes (heureusement), de sièges inclinables et du Wifi (qu'on attend toujours dans les trains).

Parallèlement, Starshipper, Flexibus et Megabus préparent leurs offres. IDBus également.

Quelques comparaisons grâce au site Isilines sur trois relations transversales pour comparer les temps de parcours et les émissions de CO² données par les deux opérateurs. Sur Bordeaux - Lyon, nous avons pris en comparaison le meilleur temps du Bordeaux - Lyon via Limoges quand il existait. Sur Nantes - Lyon, nous avons pris en comparaison un Intercités, qui bénéficie de la traction électrique de Nantes à Nevers. Les résultats mettent notamment en avant la disparité des situations, y compris pour le train, et remettent en cause le discours sur les vertus environnementales du car, tout en modérant celles du train (sncf.com estime l'empreinte du voyageur à environ 4,5 kg sur ces trajets).

Ligne Autocar Train
Temps Empreinte carbone CO² Temps Empreinte carbone CO²
Bordeaux - Lyon 8h10 60,29 kg 7h23 (1) 33,7 kg (2)
Bordeaux - Nantes 5h20 18,17 kg 4h

19,5 kg (2)

12,2 kg (3)

Nantes - Lyon 10h40 92,1 kg 7h20 17,3 kg (2)(4)

(1) temps de parcours possible via Limoges - (2) sur la base de 2,6 kg de CO² par litre de gasoil consommé et 3 litres au km pour une occupation moyenne de 200 voyageurs, soit 52 g de CO² au km - (3) hypothèse Régiolis bimode avec 77 km en traction électrique à 10g de CO² par km et 299 km en traction Diesel à 40 g / km  - (4) avec traction électique de Nantes à Nevers.

Si toute l'énergie dispensée à promouvoir l'autocar et à organiser sa mise en exploitation sur le trafic intérieur était mise au service du transport ferroviaire, si au lieu de baisser les bras, certains retroussaient leurs manches, certaines relations aujourd'hui en quasi état de mort clinique se porteraient sans doute un peu mieux...

26 mai 2015

EPSF : vigilance sur la sécurité du réseau

Après la catastrophe de Brétigny à l'été 2013, une campagne de vérification minutieuse du réseau avait été annoncée par la SNCF pour tirer les leçons de cette dramatique défaillance de l'infrastructure ferroviaire et de sa maintenance. Au printemps 2014, une série d'enquêtes approfondies a été menée dans 9 établissements de maintenance de l'infrastructure et les conclusions de l'EPSF ne sont pas rassurantes : du manque de connaissances de terrain à la faiblesse des retours d'expérience, du turn-over important des équipes à une programmation insuffisamment organisée et fiabilisée des travaux, de référentiels de maintenance dépassés, parfois contournés à une traçabilité lacunaire de la gestion quotidienne du réseau, l'EPSF appuie là où ça fait mal.

Alors il ne faut pas en conclure que le réseau ferroviaire met en péril la sécurité des biens et personnes qu'il transporte et de ceux qui le font fonctionner, mais l'excellence en matière de sécurité ferroviaire reste encore un objectif plutôt qu'une réalité quotidienne. Selon l'expression consacrée de nombreux anciens, "il faut remettre du monde sur les voies" pour s'occuper du réseau, et surtout améliorer la transmission des savoirs et des savoir-faire dans une époque de renouvellement de la génération des babyboomers, probablement les derniers à avoir appris leur métier "à l'ancienne". L'enjeu est aussi d'introduire les nouvelles technologies qui permettront d'améliorer l'efficacité de la maintenance. La productivité n'est pas un gros mot quand la mécanisation et l'automatisation des opérations permet de réaliser plus rapidement des opérations de maintenance ou de renouvellement, surtout compte tenu de l'ampleur des travaux à effectuer pour remettre en état un réseau qui a pâti de décennies de sous-investissements.

La tache longue, onéreuse, quasi sacerdotale pour renouer avec un réseau ferroviaire de qualité capable d'accueillir un projet de service en phase avec les besoins des territoires et de leurs habitants. Cependant, certains semblent préférer jeter l'éponge et contourner l'obstacle du réseau ferroviaire en misant sur l'autocar.

26 mai 2015

ARAF - Gares et Connexions : suite

Après avoir donné raison au STIF, l'ARAF confirme sa position sur la rémunération du capital de Gares et Connexions avec la requête déposée par la Région des Pays de la Loire. Elle demande de diminuer le taux à une valeur comprise entre 5,5 et 6,9%, contre 9,2% actuellement : c'est un peu couper la poire en deux puisque les calculs de la Région aboutissait à un taux de 3,5%. Cependant, l'ARAF demande non seulement de modifier le taux, mais de l'appliquer de façon rétroactive : 11 M€ sont en jeu pour la Région. Il est probable que d'autres Régions engageront la même procédure, et que, comme pour le STIF, la SNCF fera appel de la décision de l'ARAF.

Cependant, le taux élevé permet, selon Gares et Connexions, d'obtenir une part d'investissement élevée du groupe SNCF sur les projets, alors qu'une baisse de ce taux transfèrerait mécaniquement le manque à gagner sur la part à chaque des collectivités. Autre question, la mécanique actuelle semble aboutir à une relative péréquation en fonction de la densité des investissements par Région et il n'est pas certain que toutes les Régions bénéficient d'un équilibre entre la rémunération du capital demandée par Gares et Connexions et le niveau de contribution de cette branche de la SNCF aux projets d'aménagement des gares.

26 mai 2015

L'électrification est-elle toujours justifiée ?

Cela fait toujours partie des annonces aux effets généralement très valorisés : l'électrification d'une ligne de chemin de fer est associée à des symboles de vitesse, de performances, de confort, de service et, un peu quand même, d'écologie. Surtout, c'est le précieux sésame pour obtenir une desserte TGV. Or avec la crise financière du système ferroviaire d'une part et la destabilisation du modèle économique du TGV, l'électrification ressemble de plus en plus à un argument électoral et moins à un besoin technique avéré, d'autant plus avec l'arrivée des matériels roulants bimodes, s'affranchissant de la contrainte du relais traction.

Le nouveau dossier de Transport Rail pose la question de la poursuite des projets d'électrification et propose une analyse des besoins sur le réseau français. A vos commentaires !

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14 avril 2015

Appel pour une nouvelle ambition ferroviaire française

transportrail reproduit l'appel en faveur d'une nouvelle politique ferroviaire en France, lancé par les Chambres de Commerce et d'Industrie, la Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles, la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises, l'Association des Usagers de Transport de Fret, l'Association Française des Ports Intérieurs, la Fédération des Industries Ferroviaires et la Fédération Nationale des Associations d'Usagers du Transport.

Dans l'indifférence ou l'ignorance des politiques, des médias, du public, la France, pays du TGV et des trains à l'heure, est en voie de perdre son statut de grande nation ferroviaire et de devenir un maillon faible de l'Europe ferroviaire. Pourtant nos territoires, nos entreprises, nos ports, pour renforcer leur identité, leur compétitivité, leur attractivité ont impérativement besoin de bonnes connexions ferroviaires entre eux et avec l'Europe. Il le faut pour valoriser notre position de carrefour européen occidental. Comme il le faut pour renforcer les liens entre nos ports, maritimes et fluviaux, et leurs hinterlands. A ces enjeux s'ajoutent les grands défis transverses, environnemental, énergétique, climatique.

Nous vivons la fin de l'ère des opérateurs nationaux exclusifs, supposés être en mesure de répondre à tous les besoins de leur territoire, chacun d'eux étant le seul utilisateur de « son » réseau, placé sous son contrôle. Ce qui ne veut en aucun cas dire que ces opérateurs publics historiques n'ont pas encore un rôle majeur à jouer. Mais les modalités en seront différentes. A défaut, ils courent à leur marginalisation. Le moment est venu de jouer la carte de la diversité et d'une nouvelle modernité ferroviaire européennes, d'ouvrir notre réseau ferré national à de nouveaux opérateurs, publics ou privés, de vendre notre savoir-faire ferroviaire dans d'autres pays.

Le niveau actuel d'utilisation de notre réseau ferré national, même avec les nouveaux opérateurs de fret, ne permet plus d'assurer son équilibre économique. Ce déséquilibre structurel, insoutenable, menace sa pérennité. La France a un besoin impérieux de « nourrir » son réseau de nouvelles utilisations, de nouveaux opérateurs. Ce qui créera de nouveaux services au public et aux entreprises. C'est le rôle du gestionnaire du réseau, de statut public, indépendant, de les susciter et les prospecter. Il est appelé à devenir le pilier de la politique ferroviaire française. Il y a urgence d'action.

Même s'il reste parmi les plus sûrs, les experts alertent sur le vieillissement de notre réseau et son manque d'ouverture aux technologies modernes. Est-il acceptable en 2015 que des trains de fret se « perdent » encore ? La modernisation de notre réseau, appuyée sur la révolution numérique, incluant le contrôle et la connexion centralisés des points sensibles, recèle d'importants gisements de sécurité, de fiabilité, de productivité, d'économie d'énergie. Prolongée par un réseau capillaire décentralisé, géré « en proximité », cette modernisation, augmenterait la performance nationale, européenne et territoriale du mode ferroviaire. Dès lors, pourquoi ne pas en faire un projet franco-européen contribuant à la relance économique, mobilisateur pour des start-up françaises ?

Le fret ferroviaire, en quelques années, à contre-courant de l'exigence de report modal portée par le Grenelle de l'environnement, a chuté en France de 16 à 9 % de part de marché. Ce recul spectaculaire, ignoré du grand public, est une exception européenne qui devient un handicap logistique pour notre économie. La comparaison avec l'Allemagne est alarmante qui, avec 17 % de part de marché, connaît une croissance que se partagent l'opérateur national DB Schenker et ses concurrents. Le recul de l'offre pour le wagon isolé en France est lourd de conséquences à court et long terme. A l'heure où des chaînes logistiques virtuelles structurent le transport de fret, à l'échelle planétaire, le retard numérique du transport ferroviaire est incompréhensible. La médiocre traçabilité qui en résulte, la complexité de l'accès aux sillons, affaiblissent son potentiel logistique et écologique.

Dans le domaine des voyageurs, si le TER reste un succès de fréquentation, les régions ne peuvent plus assumer la montée de son coût. Le Transilien est dans la même situation, le vieillissement du réseau et la baisse de qualité pèsent sur la vie quotidienne des Franciliens. Les Intercités se dégradent depuis l'avènement du TGV, il y a plus de trois décennies. Le TGV, polarisé sur la concurrence aérienne, fragilisé par les low cost, peine à trouver un nouveau souffle. La France a repoussé l'échéance de l'ouverture à la concurrence, au risque de voir son opérateur national, et ses filiales, écartés des appels d'offres européens. Ce délai, à tout le moins, doit être utilisé pour traiter nos points faibles.

Le ferroviaire français, et il faut veiller à ce que la réforme ne l'accentue pas, souffre d'un excès de centralisation qui génère des charges de structures élevées. Il a besoin de réactivité, d'adaptabilité, de proximité, d'un développement de sa capacité d'initiative locale. C'est une évidence pour le TER et les Intercités. C'est tout aussi vrai pour le fret qui, contrairement à d'autres pays, dont l'Allemagne, manque cruellement de racines territoriales et portuaires. Des PME ferroviaires réactives et flexibles pourraient aller chercher et organiser les envois dans les territoires et amorcer les chaînes logistiques modernes à dominante ferroviaire dont notre économie a besoin. Beaucoup d'entreprises sont prêtes à s'impliquer dans des initiatives locales pour peu qu'elles soient menées dans un esprit de partenariat et d'innovation. En particulier pour les lignes capillaires, dont le potentiel logistique est sous-estimé, dont il faut résolument exclure la fermeture. Le bilan des premiers OFP, opérateurs ferroviaires de proximité ou portuaires, appelle à investir ce champ d'innovation.

Le ferroviaire illustre le paradoxe français : d'un côté un potentiel technique et humain que, malgré son recul, bien des pays peuvent encore nous envier, de l'autre la peur de l'avenir et l'illusion que cet avenir passe par le retour à un passé révolu et idéalisé.

La France, si elle l'ose et si elle le décide, peut figurer parmi les grands gagnants de l'Europe ferroviaire. La réforme le permet. Encore faut-il que sa mise œuvre ne soit pas détournée de son objectif originel, renforcer l'efficacité de notre système ferroviaire. Pour cela, l'Etat stratège doit impulser une stratégie innovante, appuyée sur un secteur public différencié et renforcé, une stratégie ouverte à la concurrence, à l'initiative privée, à l'Europe.

Nous attendons du transport ferroviaire qu'il devienne un acteur du développement durable et de l'attractivité de la France. Nous mesurons l'ambition, l'énergie, l'esprit transpartisan qu'implique ce grand projet national et européen. Nous sommes prêts à y prendre notre part.

François Asselin, président de la CGPME, Xavier Beulin, président de FNSEA, Denis Choumert, président de l'AUTF, Jacques Kopff, président de l'AFPI, André Marcon, président de CCI France, Louis Nègre, président de la FIF, Jean Sivardière, président de la FNAUT.

23 mars 2015

Libéralisation de l'autocar : le Sénat freine

Examinée par le Sénat, les élus de la chambre haute se sont attaqués à la loi Macron et notamment à la libéralisation du marché de l'autocar. Les amendements adoptés en commission spéciale aboutissent à un détricotage en règle qui vise d'une part à protéger l'économie des dessertes subventionnées, notamment TER et TET avec en contrepartie l'ouverture à la concurrence sous forme de délégation de service public, comme pour les réseaux urbains, à compter de 2019.

Dans le détail, les sénateurs proposent de relever de 100 à 200 km la distance minimale entre deux points d'arrêt des autocars privés et de permettre aux autorités organisatrices régionales d'émettre un véto sur des liaisons qui pourraient menacer l'équilibre économique des TER. Les Régions sortent d'autant plus gagnantes que le Sénat leur donne le pouvoir suprême d'autoriser ou non une liaison routière privée, alors que le texte adopté à l'Assemblée Nationale l'octroyait à l'actuelle ARAF qui deviendrait l'ARAFER.

Consolidation aussi des TER et TET au moyen d'une précision sur le caractère substantielle de l'atteinte aux lignes de service public, qui ne porterait pas sur la seule relation concernée mais sur l'ensemble d'un réseau : un moyen de dire que toucher une liaison peut bousculer toute une convention TER.

La contrepartie, c'est la réaffirmation de la nécessité d'ouvrir le marché régional et de basculer vers le modèle de la DSP avec appel à la concurrence, et ce dès 2019, pour le stimuler face à une concurrence routière de plus en plus forte, que ce soit avec l'autopartage ou l'inéluctable montée en puissance des lignes privées d'autocar.

Bilan, le Sénat, pourtant pas forcément réputé progressiste, a plutôt visé juste dans son analyse sur la dangerosité d'une ouverture quasi-incontrôlée du marché de l'autocar face à un système ferroviaire trop fragile. Il souhaite au travers de ses amendements consolider fortement le rôle de la Région dans l'organisation des transports.

Il est probable que ces amendements soient adoptés le 7 avril prochain par le Sénat... et immédiatement contestés par l'Assemblée Nationale lors de l'inévitable Commission Mixte Paritaire chargée d'accorder les deux textes pour un passage en seconde lecture à l'Assemblée.

23 février 2015

La dette continue d'augmenter

+10% : c'est l'augmentation de la dette de SNCF Réseau (anciennement RFF) en 2014. Elle atteint désormais 36,78 MM€ contre 33,7 MM€ en 2013. Autant dire que le défi que les deux présidents du groupe affirment pouvoir relever en 5 ans, stabiliser puis réduire la dette, relève de plus en plus de la haute acrobatie. La hausse est notamment due aux emprunts destinés à couvrir la part de financement à la charge du système ferroviaire pour les 4 lignes nouvelles en construction. Elle augmente aussi avec les retards de contribution des collectivités locales et de l'Etat à ces projets puisque selon le président de SNCF Réseau, le "trou" pour la seule ligne SEA atteignait 795 M€ qui s'explique par deux phénomènes :

  • Plusieurs collectivités situées sur SEA suspendent ou annulent leur subvention du fait des craintes - en grande partie avérées - de diminution de l'offre TGV sur les territoires concernés, du fait du niveau élevé des péages destinés à amortir la construction et l'exploitation de cette LGV apte à 320 km/h dont le coût de construction est particulièrement onéreux (7 MM€ pour 300 km) : mécaniquement, SNCF Mobilités cherche à optimiser sa capacité de transport, notamment en utilisant des rames Duplex (qui continuent d'être livrées pour maintenir de la production chez Alstom plus que par insuffisance du parc existant) afin de maintenir l'offre en nombre de places avec moins de trains ;
  • Les élus situées au-delà de Bordeaux gèlent leurs contributions tant que les sections Bordeaux - Dax et Bordeaux - Toulouse n'auront pas été gravées dans le marbre.

En outre, la baisse du trafic (fret et voyageurs) se poursuit ce qui réduit les recettes du gestionnaire d'infrastructure, dans une période d'investissement accrus au titre de la rénovation du réseau existant.

Et pendant ce temps, le vieillissement du réseau continue, laissant dans l'incertitude le sort de plusieurs lignes...

23 février 2015

Ecotaxe : c'est l'AFITF qui paiera

Dans la catégorie "passées les bornes, il n'y a plus de limites", le feuilleton de l'écotaxe est en train de virer à ce qu'on pourrait qualifier de psychodrame "escologique". Donc, non seulement, la ministre de l'écologie s'est érigée contre une mesure qui avait pourtant été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée Nationale, mais en plus, elle fait régler les conséquences de sa politique éminemment dangereuse par l'AFITF, l'agence de financement des infrastructures de transport en France, qui devra s'acquitter de 529 M€ cette année afin de payer les pots cassés de la rupture du contrat avec Ecomouv'.

Il est évident que c'est la voie "Royale" pour permettre au réseau ferroviaire de se sortir d'une mauvaise passe qui risque de lui être fatale, entre le sous-investissement de régénération et la soumission au lobby routier...

13 février 2015

Après les TER et les TGV, la Cour des Comptes demande moins d'Intercités

Troisième rapport et une conclusion similaire. Après avoir considéré que l'autocar devait remplacer les trains sur de nombreuses liaisons ferroviaires et que la politique de desserte du TGV était excessive par rapport aux coûts structurels de la grande vitesse, la Cour des Comptes tacle la gestion des Intercités et demande la suppression des trains de nuit et interroge l'avenir des relations diurnes entre un élagage sévère et un transfert partiel aux Régions. Cependant, le propos est un peu moins tranché et semble renvoyer les arbitrages aux orientations de la commission présidée par Philippe Duron.

On prendra le rapport non pour une vérité absolue mais comme un thermomètre qu'il est intéressant d'analyser avec un regard critique. Tout comme il est peu rationnel de vouloir limiter les TGV aux seules lignes à grande vitesse ou de systématiser des reports de trains sur route pour faire des économies peu avérées quand elles ne concernent en réalité que la valorisation des moyens mobilisés pour les heures de pointe, il serait caricatural de vouloir enfermer l'avenir des Intercités dans une même direction.

"Le retard pris pour prendre les décisions permettant d'assurer la pérennité des TET contraint maintenant l'Etat, la SNCF et les Régions à devoir résoudre une équation particulièrmement complexe à un moment où les marges de manoeuvre sont devenues particulièrement faibles". En clair : à force de ne rien faire, nous sommes au pied du mur ! Le propos liminaire du rapport est particulièrement rude : "Les trains Intercités ont été gérés jusqu'à présent sans véritable stratégie.". On ne peut pas faire plus clair.

L'analyse statistique n'est pas contestable mais elle manque de précision : en indiquant un taux de remplissage moyen des trains de 35%, la Cour oublie de préciser que cette réalité recouvre des réalités très différentes selon les lignes et selon les jours puisque les TET sont très soumis aux fluctuations de trafic en fin de semaine. Ces 320 trains par jour transportent 100 000 voyageurs générant 1 MM€ de chiffre d'affaires en 2013. Cependant, entre 2011 et 2013, la Cour relève une chute impressionnante du trafic avec -14,58 % de voyageurs-kilomètres. Le taux de couverture des charges par les recettes se situe autour de 75%, contre 35% sur TER et 38% sur Transilien. Seules les liaisons Paris - Normandie et Paris - Clermont Ferrand parviennent à couvrir plus que leurs coûts d'exploitation. Même POLT et la transversale sud sont désormais "dans le rouge". Le déficit annuel était de 211 M€ en 2011 et de 276 M€ en 2013 en partie dû à la hausse des péages et le vieillissement du matériel roulant renchérissant la maintenance.

La Cour constate en outre que le financement des TET est en vase clos basé sur le principe de solidarité des activités. Si la péréquation entre activités bénéficiaires et déficitaires n'existe plus au sein de la SNCF, elle a été fiscalisée en créant la Contribution de Solidarité des Territoires et la Taxe sur les Résultats des Entreprises Ferroviaires. La route contribue via la Taxe sur l'Aménagement du Territoire mais elle été abaissée en 2011 à 35 M€ par an seulement. Ainsi, l'exploitation des TET est d'abord financée par la SNCF (environ 200 M€) elle-même et ensuite par l'Etat qui acquitte les péages pour environ 400 M€ par an. Un mécanisme déresponsabilisant et pour l'Etat et pour la SNCF d'autant que la convention Etat - SNCF ne demande que 0,5 % par an de gain de productivité, ce qui est passablement faible.

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Vias - 8 juillet 2013 - Le Grand Sud en provenance de Bordeaux file en direction de Marseille et Nice : une liaison dont le caractère national est indiscutable et qui a vocation à accompagner un rééquilibrage territoriale en faveur des métropoles du sud. Reste une qualité de service médiocre... © transportrail

Pointée du doigt aussi le manque de clarté dans la distinction TER / TET : peut-être est-ce justement parce qu'elle n'est pas totalement évidente sauf pour de grands axes comme Paris - Toulouse, Paris - Clermont ou Bordeaux - Nice. On est étonner de ne rien lire à propos de la réforme territoriale et des implications potentielles sur la gouvernance des TER et des TET. Avec une seule Région Normandie, les Intercités n'auraient-ils pas une certaine légitimité à être gérés par cette autorité, ce qui lui permettrait, comme le demande implicitement la Cour, de remettre de l'ordre dans les dessertes pour plus d'efficacité ?

Il n'est point besoin de s'apesantir sur le coeur du rapport qui concerne l'obsolescence du matériel et les coûts engendrés, sur l'incertitude quant au renouvellement du parc et la modicité de la commande de 34 Régiolis, pas plus que sur les solutions préconisées qui relèvent d'une logique des trois tiers à peine cachée : un tiers de suppression, un tiers de préservation et un tiers de transfert aux Régions. On rappellera quand même qu'en 1998, la Région Centre avait proposé de récupérer l'ensemble des trains Paris - Orléans - Tours, et avait essuyé le refus de l'Etat et de la SNCF qui considéraient que les TER ne devaient pas arriver à Paris. Sur la productivité, on soulignera que la SNCF refusa la mise en réversibilité des relations Paris - Tours.

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Orléans - Juin 2005 - Les liaisons Paris - Orléans - Tours constituent un exemple de sous-performance entretenue sur les liaisons Intercités. Voici 10 ans, il fallait encore composer avec des BB9200 (ici la 9292 dernière de la série livrée en 1962) et changer de machine pendant le rebroussement : la réversibilité est pourtant un outil de productivité majeure pour des formations classiques. © transportrail

Le rapport préconise donc l'élimination des trains de nuit qui représentent 3% du trafic mais 30% du déficit et suggère d'examiner l'opportunité des liaisons par autocars sur certains axes. Mais est-ce en recommandant des suppressions massives de desserte qu'on assurera réellement l'attractivité - non pas du transport ferroviaire - mais du transport en commun tout court ? Est-ce par des autocars exploités aux risques et périls des transporteurs, sans contrat avec aucune autorité organisatrice, que l'on pourra assurer a minima la préservation de l'actuel aménagement - fut-il imparfait - du territoire ? N'est-ce pas aussi le moyen de continuer et d'amplifier le lent déclin du train classique et de créer un fossé grandissant entre le TER qui ne pourra pas tout faire faute de moyens et le TGV qui ne peut pas tout faire non plus parce que ce n'est pas sa vocation ?

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