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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
24 mai 2023

Le devenir de Fret SNCF en jeu

Coup de communication d’un syndicat

Hier, un groupe de syndicalistes Sud-Rail a fait irruption au colloque Osons le train organisé, dans les locaux de la Fédération Nationale des Travaux Publics près des Champs-Elysées, par la FNAUT et animé par Mobilettre, loupant l’intervention du ministre des Transports et interrompant une présentation sur la complexité tarifaire et la perspective d’une « convention collective de l’usager » (dont nous reparlerons).  Il s’agissait de faire pression sur le gouvernement alors que le dossier des aides au renflouage de Fret SNCF depuis 2007 laissait planer le risque d’un démantèlement de l’activité. Seule conséquence : ledit colloque a été définitivement interrompu.

Vous avez dit libre concurrence ?

La Commission Européenne reproche au gouvernement français d’avoir effacé la dette de Fret SNCF (5,4 Md€ à l’époque) en la relogeant au niveau du Groupe lors de la dernière réforme ferroviaire, et à l’apport de 170 M€.

L’Etat est indiscutablement responsable d’avoir eu recours à des mesures en sachant pertinemment qu’elles pourraient être contestées par d’autres opérateurs.

La Commission Européenne n’est pas exempte de critiques concernant une approche parfois un peu trop orthodoxe voire schizophrénique. Le développement du fret ferroviaire implique de nombreuses conditions dont notamment d’avoir des opérateurs en bonne santé. Des contestations similaires ont également lieu à l’encontre de DB Cargo.

En outre, le soutien aux opérateurs de fret ferroviaire est à replacer dans un contexte plus large : quand l’Union Européenne a adopté sa directive sur les travailleurs détachés, elle a de fait accordé un avantage concurrentiel considérable au transport routier, déstabilisant non seulement le marché du transport routier, mais aussi celui du ferroviaire, déjà dans une situation délicate. L’équité ne peut être à sens unique.

Une nouvelle structure de moindre taille pour éviter la sanction ?

La solution proposée par le gouvernement consiste en la création de 2 nouvelles entités publique (majoritairement ou totalement) distinctes du Groupe SNCF selon un obscur principe de « discontinuité économique ». Pas de sanction à la clé (le remboursement des aides considérées indues) mais une sévère cure d’amaigrissement puisque la proposition prévoirait la cession des contrats de trains complets (20% de l’activité de Fret SNCF actuellement), la suppression de 470 postes (10 % des actuels effectifs) et de 53 locomotives. Et ce alors que l’activité a repris des couleurs et est parvenue en 2022 à dégager un petit excédent. Les nouvelles entités ne pourront pas se repositionner sur les marchés cédés avant 2034.

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Nogent L'Artaud - 18 septembre 2021 - Fret SNCF se porte mieux mais son avenir à court terme est en jeu. Les règles européennes sont certes connues... mais sont-elles toujours si équitables ? Le transport routier a bénéficié de grandes latitudes déformant la concurrence rail-route. © transportrail

Développer le report modal

Solder le passé ne sera pas facile. Il va maintenant falloir construire l’avenir avec des solutions plus consensuelles. Dans la première partie du colloque d'hier, il a été beaucoup question de :

  • l’équilibre des recettes du gestionnaire d’infrastructures entre les péages et les subventions de l’Etat ;
  • la qualité et de la disponibilité du réseau (voir notre dossier à ce sujet) : travaux nombreux et modalités de réalisation à fort impact capacitaire faute d’itinéraires alternatifs en nombre et en qualité suffisants, faute de moyens de réalisation des chantiers qui limitent l’interception du trafic (pour les spécialistes, peut-on faire autrement qu’en interrompant par principe les 2 voies simultanément ?) ;
  • la prise en compte du fret dans la planification capacitaire, compte tenu des enjeux du transport de voyageurs, notamment des RER autour des grandes agglomérations.

On pourrait aussi ajouter parmi ce champ des possibles une « prime locomotives » pour soutenir l’acquisition d’engins plus performants et plus polyvalents : outre les fonctionnalités ERTMS, l’industrie propose de plus en plus de machines bimodes aux nombreux avantages (possibilité de circuler sur des lignes non électrifiées, rationalisation du parc des opérateurs, intégration du moyen de traction sur les installations embranchées…) et/ou d’unités aux performances accrues pour augmenter la productivité des sillons. Le réel succès commercial des Euro 6000, Euro 9000 et EuroDual de type CC de Stadler montre que de nombreux opérateurs ont compris les avantages qu’ils pouvaient tirer de machines augmentant d’au moins 30 % les tonnages remorqués par rapport à des locomotives de type BB telles que les Prima ou les Traxx.

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Commentaires
T
et plus il y a de camions, plus il faut faire des contournements de villages ou villes et plus il faut mettre à 3 ou 4 voies le réseau routier pour que les automobilistes puissent doubler ...et on renforce ainsi encore l'attractivité du mode routier .....<br /> <br /> CQFD
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M
Des centaines, peut-être des milliers de chefs d’ entreprise sont prêts à recevoir par train les matières premières indispensables à la bonne marche de leurs usines . <br /> <br /> D’ autre part, <br /> <br /> ils veulent et sont prêts également à remettre leurs produits finis au rail. <br /> <br /> Alors qu’ est ce qu’ attend la France pour réagir? <br /> <br /> Votons les budgets nécessaires au FRET FERROVIAIRE. <br /> <br /> Réhabilitons immédiatement la totalité des ITE , exigeons la réouverture de toutes les lignes capillaires de FRET, réorganisons les triages , créons des corridors FRET.<br /> <br /> Les gens n’ en peuvent plus des camions qui traversent nos villes et nos campagnes!
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T
Et que dire du démantèlement de tout le réseau capillaire qu’il sera impossible de réouvrir et qui fait que des pans entiers du territoire deviennent dépendants des camions même si par miracle ils voulaient faire autrement
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M
>pour les spécialistes, peut-on faire autrement qu’en interrompant par principe les 2 voies simultanément ?<br /> <br /> <br /> <br /> C'est techniquement possible, de façon plus ou moins heureuse selon l'équipement de la ligne en installations de contre-sens.<br /> <br /> ça coûte également allègrement 20% plus cher, ce qui, dans un contexte où le budget disponible ne permet pas de traiter toute la masse de régénération nécessaire, plaide clairement en faveur du travail sous interruption totale pour préserver le volume de voies régénérées chaque année.
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T
Pendant que vous débattez à propos de règles arbitraires fixées uniquement par des humains, la Terre crame...
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T
Ce que reproche la commission européenne est que l’Etat a donné une aide financière sélective pour la seule société Fret SNCF. Ce qui constitue une aide d’état au détriment des concurrents de Fret SNCF.<br /> <br /> <br /> <br /> L’Etat pourrait donner de l’argent au prorata du chiffre d’affaire ou du tonnage de marchandise transporté aux concurrents de Fret SNCF. Ainsi les sommes déjà versées à Fret SNCF ne seraient plus considérées comme une aide d’état mais comme une subvention généralisée pour le secteur du fret ferroviaire, équitable pour tous les entreprises et compatible avec le marché intérieur européen.<br /> <br /> <br /> <br /> Mais est-ce que l’Etat a envie de donner de l’argent à des entreprises concurrentes de Fret SNCF qui sont a priori financièrement équilibrés ? Cela constituait un effet d’aubaine pour ces entreprises. Mais c’est peut-être le prix pour sauver Fret SNCF…
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G
Je dis peut-être une bêtise et c'est une vraie question que je pose aux habitués de ce blog : n'est-ce pas étonnant de voir la commission européenne réagir à ces aides alors que d'autres entreprises à capitaux publics, comme Air France, l'ont été dans un contexte certes différent mais pour des montants bien plus important ? Il y a sûrement d'autres exemples, y compris en dehors de la France.
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J
"L’Europe n’y est pour rien d’ailleurs dans d’autres pays le fret ferroviaire se porte beaucoup mieux".<br /> <br /> Vous avez parfaitement raison et je rajouterai qu'en général, le ferroviaire se porte beaucoup mieux dans les pays "développés" d'Europe.<br /> <br /> Chez nous, la "bagnole" à Pompidou a encore de beaux jours devant elle, comme dans les pays en voie de développement...
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T
La France est bien la seule responsable de ce fiasco…<br /> <br /> <br /> <br /> D’un côté les grands slogans à la sovietique pour sauver le fret<br /> <br /> De l’autre l’absence d’investissement dans l’infrastructure ,une stratégie permanente de démantèlement des trafics de la part de la sncf dont l’Etat est le patron et pour couronner le tout le surinvestissement routier rendant le transport routier toujours plus attractif…<br /> <br /> <br /> <br /> L’Europe n’y est pour rien d’ailleurs dans d’autres pays le fret ferroviaire se porte beaucoup mieux
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F
Vraie question : à part la crainte de la contestation sociale, qu'est ce qui empêche SNCF Fret de recourir à des travailleurs détachés ? Rien en droit. Air France loue des avions et équipages d'Europe de l'Est quand elle a besoin d'augmenter ses capacités (cf la compagnie Amelia), les routiers font tourner des conducteurs hongrois, etc. Il me semble que l'argument de l'équité sur ce point est un peu bancal.
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J
C'est la France qui est responsable de cette situation, pas l'Union Européenne. Partout en Europe, le chemin de fer est en pleine expansion grâce à la libéralisation en marche depuis 30 ans. Seule la France, intoxiquée par le groupe SNCF, a mené une politique dilatoire... Résultat, impossible de faire des offres de trains complets, par exemple, entre la France et l'Italie sans passer par la SNCF et Captrain, alors que les prix au km sont 2 fois plus élevés que partout en Europe et le service insatsisfaisant selon les clients... Résultat, le France est le seul pays où nous xsommes comtraints de refuser du trafic faute d'offre !
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D
On peut parfois s'interroger sur le bien fondé de la politique européenne de vouloir tout mettre en concurrence, même quand ça n'a aucune signification (la fourniture d'électricité est un exemple criant). Mais attention, l'UE n'est en rien responsable du manque d'ambition ferroviaire des gouvernements successifs depuis plusieurs quinquennats. Ce n'est pas l'UE qui a interdit de mettre des moyens pour rénover le réseau capillaire qui a presque intégralement disparu en l'espace de 5-6 ans. Ce n'est pas l'UE qui empêche aujourd'hui de prendre des mesures pour limiter l'explosion du coût de l'électricité (qui touche tous les opérateurs ferroviaires). Quant à la bureaucratie qui écrase le système ferroviaire français, elle découle en partie des mesures demandées par l'UE mais c'est avant tout une transcription nationale; elle permet surtout de freiner l'arrivée des concurrents; ce faisant elle a une conséquence directe sur les coûts de structure et sur le manque d'agilité du système ferroviaire. Et c'est la concurrence routière qui en profite. Quand on voit aujourd'hui des wagons d'entreprises de travaux, des trams ou des métros voyager par la route, on se dit que le système marche vraiment sur la tête.
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T
Où pourquoi ne pas quitter l'UE pour faire ce que l'on souhaite ?
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E
Oui enfin pourquoi ne pas faire reprendre fret SNCF par un autre groupe?
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