Sortons un peu des sentiers battus, largement connus des lecteurs de transportrail, quant aux montants investis par la Suisse, l'Allemagne ou l'Autriche en faveur du renforcement du rôle du chemin de fer pour les déplacements de voyageurs et de marchandises. Voyons ce qui se passe dans un pays latin voisin, qui n'est pas particulièrement réputé pour être à la hauteur de ces références : l'Italie.

Le réseau italien géré par RFI comprend 16782 km de lignes (dont 7732 km à double voie), classées en 3 catégories : 6468 km d'axes structurants, 9364 km à vocation régionale et 950 km dans les noeuds ferroviaires. Cette segmentation est intéressante car la dernière catégorie ne fait pas de différence entre les lignes, considérant qu'elles ont toutes une importance dans la stabilité de fonctionnement du noeud, surtout si elles sont à voie unique. Le contrat de programme 2022-2026 prévoit 31,7 MM€ d'investissements, soit un peu plus de 6 MM€ par an : pour un réseau de 16782 km (7732 km à double voie et 9050 à voie unique) :

  • 2,7 MM€ pour des opérations de sécurité et de mise en conformité réglementaire ;
  • 20,1 MM€ pour la création de lignes nouvelles, l'amélioration des grands axes et corridors européens ;
  • 3,6 MM€ pour la modernisation de la signalisation avec ERTMS (voir ci-après) ;
  • 2,3 MM€ pour la modernisation des infrastructures et l'électrification de lignes régionales (nous y revenons aussi par la suite) ;
  • 1,9 MM€ pour l'augmentation de capacité et la fiabilisation des grands noeuds ferroviaires ;
  • 900 M€ pour l'intermodalité ;
  • 200 M€ pour la valorisation touristique du réseau ferroviaire en lien avec les lieux de destination.

Ce contrat est majoritairement financé par le Plan de Relance italien, à hauteur de 23,86 MM€. Pour l'illustrer, transportrail vous propose de faire un petit zoom sur certains domaines. 

Electrification : l'Italie accélère

Actuellement, 12065 km de lignes sont électrifiées, en 3000 V continu majoritairement, sauf les lignes à grande vitesse en 25 kV, soit 72% du réseau. Cette part devrait être portée à 83% avec l'électrification d'environ 1800 km supplémentaires, dont un tiers dans les provinces du sud de la péninsule. A cette échéance, l'Italie serait le deuxième pays d'Europe - derrière la Suisse - par la proportion de lignes équipées.

En outre, RFI a identifié 6400 km de lignes dont l'alimentation électrique doit être renforcée pour les besoins du fret ferroviaire, notamment pour développer la circulations de trains de 2500 tonnes.

Signalisation - Contrôle-commande de l'exploitation

Pour l'instant, 13321 km de lignes sont gérées au moyen d'une commande centralisée, gérant à distance les installations en ligne et en gares. Parmi elles, 782 km disposent de l'ERTMS niveau 2 (les lignes à grande vitesse). L'objectif de RFI est d'achever la télécommande des installations d'ici 15 ans et de généraliser ERTMS à l'ensemble du réseau dans un délai de 25 ans, en déposant la signalisation latérale. Pour cela, le budget total est estimé à 13 MM€ et les 3,6 MM€ évoqués précédemment constituent la première étape, avec 3400 km d'équipements au sol.

Concernant les lignes régionales, un premier essai d'un équivalent de niveau 3 avait été réalisé, dans le sillage d'un projet comparable en Suède : il présentait cependant l'inconvénient de démultiplier le nombre de balises pour assurer une fiabilité maximale de la localisation des rames, avec un mixage de circuits de voie en zone de gare et de compteurs d'essieux en ligne, devant également vérifier la parfaite intégrité des convois. Les études réalisées depuis semblent délaisser cette solution et aller vers une plus grande simplicité, quitte à abandonner l'objectif d'un niveau 3 avec canton mobile déformable. Son utililté n'est pas vraiment avérée sur des lignes à desserte simple, répétitive (encore les vertus du cadencement) sur lesquelles ne circulent qu'un seul train à l'instant t entre les points de croisement. L'approche italienne rejoint donc les considérations françaises et la démarche NExT Regio, assouplissant la longueur des cantons aux besoins de l'exploitation. Finalement, maintenir quelques signaux en entrée et sortie de gare n'est pas forcément une dépense déraisonnable si les comptes intègrent les modifications à apporter sur le matériel roulant dans une solution ERTMS niveau 3. C'est aussi l'approche menée en Suisse, déjà en oeuvre avec le ZSI90 et a fortiori avec la nouvelle version ZSI127.

Organiser l'autonomie énergétique de certaines installations

Troisième domaine de transformation de l'infrastructure : les gares et les installations de maintenance. RFI va engager un programme visant à assurer d'ici 2026 l'auto-suffisance énergétique de 54 gares. Concrètement, il s'agit d'installer des équipements de production électrique - on pense notamment à des panneaux photovoltaïques - sur les emprises et bâtiments : le déploiement à plus grande échelle devrait à terme couvrir 40% des besoins d'alimentation des sites de maintenance du matériel roulant et des infrastructures.