Comment financer les TET ?
L'Assemblée Nationale a adopté une mesure fiscale dans le domaine ferroviaire, conduisant à supprimer en 2022 la Cotisation de Solidarité entre les Territoires et en 2023 la Taxe sur le Résultat des Entreprises Ferroviaires. Acquittées notamment par les activités librement organisées de la SNCF (en clair, les TGV), elles contribuaient à financer la convention sur les Trains d'Equilibre du Territoire. Bref, une forme de péréquation indirecte allant de la SNCF à la SNCF via le ministère des Finances. Avec l'ouverture du marché intérieur et l'arrivée potentielle de nouveaux opérateurs, il devenait naturellement inéquitable de ne faire supporter cette taxe qu'à la seule entreprise historique, et manifestement, sa généralisation à l'ensemble des entreprises n'était pas évidente, ne serait-ce que parce qu'elle aurait été immédiatement perçue comme une barrière à l'ouverture du marché.
Cette mesure représente pour les TGV une économie de 200 M€ qui devrait redonner un peu d'air à cette activité : la SNCF annonce qu'elle devrait passer le rythme d'acquisition de la nouvelle génération de rames de 9 à 12 unités par an. En revanche, il va falloir assurer une continuité de financement pour les TET, puisque manifestement l'Etat campe sur cette distinction et sur un périmètre restreint, ce qui revient à poser la question déjà exprimée par transportrail en particulier s'agissant de liaisons province-province : l'offre longue distance sur le territoire français ne doit-elle dépendre que d'activités librement organisées par un ou plusieurs opérateurs ou doit-il y avoir une organisation définie par la puissance publique, avec une contribution financière de base ? Celle-ci pourrait être considérée comme un soutien à la réduction de l'empreinte environnementale des déplacements : ce serait un signal plutôt favorable, qui pourrait avoir pour conséquence d'inciter les opérateurs à pratiquer une offre plus consistante.
Avignonet - 24 septembre 2021 - La rame Duplex 761 assure un TGV Lyon - Toulouse, exploité aux risques et périls par SNCF Voyageurs. Pourtant, l'Etat envisage de créer des TET conventionnés sur le même parcours (avec pour seule différence la desserte d'Avignon). La BB26006 avec une rame de récupération est en tête d'un Marseille - Bordeaux (alors dévié par CNM suite aux inondations du côté de Lunel), qui est aujourd'hui une desserte TET conventionnée... mais qu'en serait-il si elle était exploitée à grande vitesse, ce qui est possible en théorie dès à présent, en transitant par la LN5 (donc en desservant Aix en Provence et Avignon) ? Plus que jamais, il va falloir que l'Etat construise une politique cohérente de desserte nationale, mais l'agenda politique ne semble guère favorable. © transportrail
Si la réponse n'est probablement pas dans un conventionnement intégral (comprenez « tous des TET »), du moins y aurait-il matière à envisager les différentes situations ne serait-ce qu'en Europe. Si les franchises à l'anglaise ne semblent pas les plus appropriées, ne serait-ce qu'au regard des récentes décisions du gouvernement britannique, on pensera en revanche au modèle espagnol, pris sous un angle capacitaire et fondé sur un équilibre entre des destinations à fort trafic et des liaisons au bilan économique plus modeste, voire déficitaire. Cependant, ce schéma suppose un renforcement de l'organisation, soit au sein du ministère des Transports, soit en confiant cette responsabilité au gestionnaire d'infrastructures, ce qui est le cas en Espagne, les appels d'offres ayant été pilotés par ADIF. Mais pour cela, il faudrait construire une stratégie de desserte du territoire.