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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
3 juillet 2019

PACA : la Chambre régionale des Comptes déraille

Dans les colonnes de transportrail, nous avons déjà régulièrement pointé les nombreuses faiblesses, voire les réels dangers, des rapports de la Cour des Comptes en matière ferroviaire, sur les TER, les TET, la grande vitesse... et parfois les quelques - rares - analyses pertinentes (les dernières sur le transport régional montraient des signes de progrès). La Chambre régionale des Comptes, sa version décentralisée, vient de publier un rapport sur les trains régionaux en PACA dont le contenu est tout simplement nocif pour le bon usage de l'argent public. C'est quand même un comble.

Mais il y a plus grave : le rapport est accueilli favorablement par la Région. A ne rien y comprendre, car ce rapport fait tout sauf défendre un bon usage de son budget.

Alors que dit ce rapport ? Un propos éculé, vieux comme le chemin de fer, dans la plus pure tradition des analyses financières qui ne vont pas plus loin qu'un tableau Excel, prétendant vouloir assainir les finances publiques sans prendre en compte les spécificités d'une industrie à rendement croissant comme le transport ferroviaire.

En clair : le train coûte trop cher, ils sont vides, les recettes ne couvrent pas les charges d'exploitation, donc il faut supprimer des trains et mettre des autocars à la place. En matière de prospective, c'est plutôt le Moyen-Age...

Focus sur deux lignes.

Nice - Tende d'abord, où est reproché le faible remplissage moyen des trains, autour de 15% et un coût moyen du km-train de près de 39 €. Que propose le rapport ? Garder les trains en heure de pointe et mettre des autocars en journée. Donc maintenir les frais fixes, mais sans les amortir, et pire, en augmentant les charges de capital avec des autocars supplémentaires (dont on doute de la performance compte tenu de la sinuosité du parcours). C'est l'inverse qu'il faut faire ! Utiliser toute la journée les frais fixes importants du train dans un optimum d'usage d'un nombre de rames limitées et assurer au besoin le complément ponctuel par des autocars plutôt que d'avoir une rame de plus qui passera la majorité de sa journée au dépôt. Dans son récent rapport sur les TER, la Cour des Comptes déplorait - à juste titre pour une fois - la faiblesse de l'usage du matériel roulant ! Deux analyses des mêmes instances... mais qui disent tout et son contraire. Niveau crédibilité, on a connu mieux !

On rappellera que la faiblesse de la fréquentation des trains procède d'abord et surtout de leur faible nombre alors que le trafic routier est considérable dans ce secteur... faute de solution ferroviaire compatible avec les besoins du territoire. Sur cette ligne, c'est aussi la conséquence du maintien de faibles performances sur l'infrastucture en raison de blocages sur le financement de la remise en état de la ligne, afin de lever les ralentissements à 40 km/h.

Cette ligne fait partie des itinéraires sur lesquels la Région envisage à court terme le lancement d'un appel d'offres pour l'exploitation de la ligne. Espérons que les candidats auront l'audace de proposer des schémas de desserte amortissant sur la journée le matériel roulant et de renforcement de l'offre à coût marginal tant qu'elle ne nécessite pas de matériel supplémentaire.

Deuxième cas, la Côte Bleue, entre Marseille et Miramas, avec un taux de couverture des charges par les recettes de 7% et une incitation claire à supprimer complètement la desserte ferroviaire et à la remplacer par des autocars. Pour une ligne du périurbain marseillais, qui a vocation à intégrer le périmètre d'un RER à l'échelle d'une métropole suffoquant sous les gaz d'échappement des voitures (mais aussi, disons-le, des bateaux), la Chambre régionale propose la bonne vieille saignée de l'époque pompidollienne. Mais la saignée ferroviaire, comme en médecine, fait plus de victimes que de miracles...

Petit rappel : si on élaguait les lignes les moins rentables, on commencerait probablement par les lignes de RER en Ile de France. Chiche ?

Soyons objectifs et reconnaissons que la Chambre régionale des Comptes pointe à juste titre que les tarifications régionales réduisent de plus en plus les recettes, ce qui n'est peut-être pas le meilleur moyen dans la durée d'améliorer le bilan économique du transport régional. Il vaudrait mieux compléter les dessertes afin de saturer l'usage des moyens de production (matériel et personnel) pour générer de la recette en journée, qui sera un peu moins le fait d'abonnés et un peu plus d'occasionnels au tarif plus élevé, plutôt que de rester dans un système à offre et productivité des moyens faibles avec des tarifs artificiellement bas.

Comme le rappelle le CEREMA dans ses études récentes sur les lignes de desserte fine du territoire : c'est le premier train qui coûte cher, les autres circulations dans la journée de service sont à coût marginal décroissant.

Malheureusement, les exemples sont encore légion : on citera évidemment le cas de Tours - Loches, qui demeure dans un marasme qui ne pourra conduire qu'à légitimer des analyses financières à courte vue et la fermeture de la ligne pour éviter d'investir plusieurs dizaines de millions d'euros pour conserver un service gaspillant des ressources humaines et matériel.

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Commentaires
S
Rapport complètement anachronique quand dans le même temps SNCF Réseau concerte sur les phases 1 et 2 de la Ligne Nouvelle Provence Côte d'Azur, incluant en phase 1 des travaux sur les voies du port et en phase 2 la gare souterraine de Marseille, augmentant la capacité, ce dont il est prévu dans les schéma de desserte de faire profiter la ligne de la cote bleue (de 2 à 4 TER par heure)
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L
En Paca, c’est deja la qualité des trains qu’il faut revoir. <br /> <br /> Sale, sale, sale semble etre la devise des cheminots locaux.<br /> <br /> Quand on voit l’interieur on se dit que jamais personne n’y met un chiffon ou un balai.<br /> <br /> Et vu l’etat des voies et des caisses on se croirait dans un autre pays, .......comment la Sncf arrive à faire aussi pire alors que d’autres regions le meme materiel est en etat correct.??<br /> <br /> Quand au personnel de quai leur inefficacité egale leur rareté !<br /> <br /> Vite que l’attribution au privé se fasse, pour qu’enfin on est une qualité ferroviaire et un personnel enfin competent !!!
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K
A l'équipe transportrail et les lecteurs :<br /> <br /> <br /> <br /> Quand on ne peut pas poster sous "Régime d'été", je vous souhaite des bonnes vacances ici.
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B
Je ne peux que conseiller à ces "commissaires aux comptes" (ou vérificateurs (ou autres noms "polis")) de sortir de leur tour d' ivoire, et de s' imerger dans la vraie vie ! Et, si besoin, acheter des lunettes s' ils ont des problèmes de vue, car j' ai déjà été sur Nice - Tende, et il y a du monde !!!!!!!!!
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J
De manière générale, une bonne mesure du potentiel est le trafic routier sur l'itinéraire parallèle. Si ce trafic est fort alors que le trafic ferroviaire est faible, c'est que l'offre ferroviaire n'est pas adaptée en horaires. La mise sur route, induisant un temps de trajet plus long que le train (quand la voie est entretenue) n'est certainement pas la solution pour augmenter le trafic. Quelqu'un a-t-il connaissance d'une hausse du trafic d'une ligne, suite à mise sur route?<br /> <br /> <br /> <br /> En poussant la logique jusqu'au bout, l'entretien d'une route ayant un coût, la Cour des Comptes pourrait proposer sa fermeture pour trafic insuffisant ….et inviter les gens à marcher ou à prendre un cheval<br /> <br /> <br /> <br /> La Cour des Comptes est-elle suffisamment compétente en matière de transports pour proposer des solutions? Ne devrait-elle pas se limiter à des constats?
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R
Et la chambre régionale des comptes a t-elle pris en compte le potentiel touristique de ces deux lignes ? Il est à mon sens sous exploité malgré quelques actions contertées de la Région et de TER, comme le Pass Bermuda ou le Forfait Albatros sur la ligne de la Côte Bleue par exemple.
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P
Combien sont payés tous ces technocrates pour "inventer" de si extraordinaires et ingénieux propos ? Le chien de ma belle soeur sait très bien que si on dépense moins pour nourrir son compère matou on pourra en mettre plus dans sa propre gamelle ..; je suggère que ces "grands commis de l'État" reçoivent comme lui un salaire en croquettes pour chien.<br /> <br /> Sinon ça me fait penser à la blague du consultant et de l'orchestre symphonique ... ou "que se passe-t-il quand on consulte des incompétents" <br /> <br /> http://manag.r.free.fr/humour_orchestre_symphonique.html
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K
C'est quand même étonnant, au niveau international ce principe est connue et pratiqué depuis (beaucoup plus?) que 30 ans.
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D
La pédagogie ça consiste parfois à répéter certains messages essentiels dans des contextes différents en espérant qu'ils finissent par être assimilés. Courage, persévérez!!!
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G
C'est l'obsession budgétaire qui conduit à donner une telle importance aux avis de chambres comme les différentes Cours des Comptes, qui idéalement devraient se contenter d'examiner le bon usage *technique* des fonds publics, non questionner leur motivation socio-économique.
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6
Rien à rajouter à l'article, sinon qu'il confirme une méconnaissance complète des enjeux du transport ferroviaire, à tous les niveaux. Les déclarations de M. Tabarot montrent que le transfert de compétences aux AOT n'est pas complet...
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M
Merci pour l'article. À croire que les médias se sont donnés le mot pour écrire des bêtises partout : https://www.capital.fr/economie-politique/15-la-cour-des-comptes-epingle-le-taux-de-remplissage-du-ter-nice-tende-1343710<br /> <br /> De quoi faire péter un plomb aux locaux
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T
La chambre régionale, la sncf et l'état ont a leur tete les memes elites dont leur spécialité est de combiner le conformisme,l’ignorance,l’absence d’esprit d’entreprise et de souffler dans le sens du vent dominant....
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T
Merci beaucoup pour l'article ! :-)
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