On ne peut nier que le développement des infrastructures à grande vitesse et leur usage relèvent d'abord d'une logique radiale dans la grande tradition française centralisatrice, une sorte de nouvelle étoile de Legrand. Néanmoins, depuis près de 30 ans, l'offre TGV s'est enrichie de liaisons tantôt qualifiées de province-province ou d'Intersecteurs, destinées à relier les grandes agglomérations entre elles en évitant le transit entre les gares parisiennes. Relier Lille et Lyon en 3 heures est un mérite du système TGV au moins aussi important que de mettre Marseille à même distance-temps de la capitale. Elles concourent ainsi à la mise en réseau des grandes agglomérations, avec une propension non dissimulée à graviter autour de Lyon.
Couzon au Mont d'Or - 9 avril 2012 - Les TGV Intersecteurs doivent apprécier la bonne cuisine lyonnaise compte tenu de leur organisation largement organisée autour du noeud de Lyon Part-Dieu. La rame PSE62 franchir la gare de Couzon et franchira la Saône après avoir longé une des plus célèbres tables françaises... © transportrail
Lyon - Tranchée des Hirondelles - Août 2005 - Les TGV Duplex ont progressivement mis la main sur les liaisons Intersecteurs... et bien évidemment, la SNCF a misé sur leur plus grande capacité pour réduire la voilure sur les dessertes. Depuis, Ouigo a rendu encore moins lisible ces offres ! © transportrail
Ces relations transitent par l'Ile de France, en utilisant soit la Grande Ceinture au sud de Paris pour relier les LGV Sud-Est et Atlantique (ce qui leur vaut d'être plus structurante pour la trame horaire nationale que les liaisons radiales) et la ligne nouvelle dite d'interconnexion pour accéder aux LGV Nord et Est.
En ce cens, ces relations ont un autre mérite : celui de ne pas cantonner la desserte nationale de l'Ile de France aux seules gares situées au coeur de Paris. Massy-Palaiseau, Marne la Vallée, et l'aéroport de Roissy, gares auxquelles il faut ajouter plus marginalement Versailles Chantiers et Mantes la Jolie, proposent une solution alternative, le plus souvent bien maillée avec les lignes structurantes d'Ile de France. Mixer des flux radiaux et transversaux est ainsi une grande force de ces relations.
Cependant, la stratégie de la SNCF engagée ces dernières années, et notamment le tournant du transport à grande vitesse à bas coût incarné par Ouigo, a fortement remis en question ces dessertes. Misant d'abord sur les gares périphériques, surtout en Ile de France, afin de réduire le coût du sillon, Ouigo a commencé par cannibaliser l'offre TGV Intersecteurs préexistante. Cette reconversion ponctuelle de sillons n'a pas été sans conséquence sur l'équilibre des dessertes avec une dégradation de la lisibilité de la consistance du service et de son tarif. Ouigo s'attaque désormais aux liaisons radiales depuis les gares centrales, avec les mêmes conséquences.
Les sillons transversaux n'ont-ils donc d'avenir qu'à convertir au low-cost ? Les relations Intersecteurs ne sont-elles destinées qu'à proposer aux familles un trajet à coût réduit vers le parc Disneyland (interrogation volontairement caricaturale) ?
Dans ce nouveau dossier de transportrail, qui s'inscrit dans le prolongement de nos réserves sur la stratégie de segmentation par l'horaire entre InOui et Ouigo, nous nous penchons sur ce que pourrait être une remise à plat de la desserte à grande vitesse sur ces liaisons transversales, avec en ligne de mire la constitution de lots techniquement indépendants, bien que pouvant être physiquement superposés, dans la perspective d'un marché ouvert, que ce soit dans une logique d'open-access ou d'une système contractualisé avec l'Etat.