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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
13 janvier 2019

Une nouvelle mission sur le maillage ferroviaire

Dans le domaine du transport ferroviaire, deux personnalités sont devenues au cours des 10 dernières années incontournables au point qu'on peut se demander à quoi servent le ministère des transports et ses services : le député normand Philippe Duron a été chargé de plusieurs rapports (Mobilités 21, Avenir des TET, Conseil d'Orientation des Infrastructures) tandis que le préfet François Philizot a piloté plusieurs missions sur l'axe Paris - Le Havre, sur POLT et maintenant, sur le maillage du territoire par le réseau ferroviaire, et plus spécifiquement sur les lignes de desserte fine du territoire (les UIC 7 à 9).

Le dossier est sensible, personne ne peut l'ignorer. La politique en la matière depuis 70 ans a conduit à une impasse, considérant que le déficit d'exploitation des omnibus puis la dette du système ferroviaire pouvait trouver une réponse efficace par la contraction sans fin du réseau (la politique du « TER brûlé »).

Il l'est d'autant plus que, si on essaie - non sans mal - de mettre de côté les facettes les plus dangereuses (pour l'économie, la société, la liberté de penser, la République et la démocratie) de certains porteurs de gilets jaunes (de ceux qui en profitent, pour se livrer à des émeutes ou pour tenter de récupérer le mouvement à des fins politiciennes), il existe une crise de fond liée d'une part à la question fiscale (l'impôt étant payé par une assiette de contribuables qui a tendance à se réduire), qui s'est cristallisée sur une hausse des carburants de 3 centimes, conséquence indirecte de l'abandon de l'écotaxe pendant le précédent quinquénnat. Depuis, les carburants ont baissé de 15 centimes suivant le cours du pétrole... Mettons-ces questions de côté.

Cette situation est aussi la conséquence d'une politique de « déménagement du territoire » menée elle aussi depuis plusieurs décennies. Il est fragrant de constater à quel point l'aménagement du territoire est le grand oublié des gouvernements successifs depuis au moins 25 ans. Outre les services publics ou de première nécessité (hôpital, maternité, établissement scolaires, Poste, médecin, pharmacie...), l'évolution des politiques d'urbanisme, avec l'accélération de la périurbanisation autour des grandes métropoles, l'augmentation des distances quotidiennes, l'essor de l'habitat individuel extensif et de son complément presque indispensable que sont les grandes zones commerciales, combiné à la faiblesse voire l'absence de services de transports en commun, a eu pour effet d'amplifier la dépendance à l'automobile et de vider nombre de centres de petites et moyennes villes.

Dans cette situation, on pourrait espérer que la réforme territoriale et les Schémas Régionaux de Développement Economique et Environnemental des Territoires puissent être l'occasion de réorganiser la desserte avec notamment une meilleure complémentarité train - autocar. Mais le nouvel appel à la contraction du réseau avec le rapport de Jean-Cyril Spinetta en février 2018, préconisant la fermeture d'un tiers du réseau avec les lignes UIC 7 à 9, est venu rappeler que les mauvaises idées étaient tenaces.

Le gouvernement avait prudemment esquivé, pour ne pas amplifier la crise dans ses relations des plus médiocres avec les collectivités locales et singulièrement les Régions, de plus en plus sollicitées pour palier l'incapacité de l'Etat à assumer ses missions en matière ferroviaire, notamment sur le renouvellement du réseau.

Aussi, en confiant au préfet François Philizot une nouvelle mission sur le devenir des lignes de desserte fine du territoire, le gouvernement espère mettre un peu de concret dans le discours et - soyons fous - esquisser une politique plus équilibrée des territoires. Il lui faudra se confronter à une réalité : si l'Etat veut un « plan de bataille », il lui faudra avant tout un plan de financement conséquent, puisque SNCF Réseau a évalué à 7 MM€ le besoin pour assurer la pérennité des lignes existantes à un horizon de 10 ans. Sachant que le Contrat de (non-) Performance Etat - SNCF Réseau, qui ne couvre que le réseau dit structurant a oublié certains sujets (comme la signalisation) avec un déficit de 520 M€ par an, l'Etat va devoir trouver de nouvelles recettes pour concrétiser cette intention.

Il vient déjà de claquer 10 MM€ sur un seul exercice budgétaire pour lutter contre le réchauffement du climat social (dont on ne sait comment il les financera sinon par de nouvelles hausses d'impôts) : on connaît déjà la réponse de Bercy sur la question ferroviaire... et il est illusoire de croire que les lignes de desserte fine du territoire seront un contre-feu suffisant dans la situation politique actuelle. Sera-t-il même audible ?

Le risque dans cette situation serait de justifier in fine la poursuite de la contraction du réseau. Il faut donc impérativement raisonner sur ce sujet autrement qu'en réaction à un mouvement social afin de pouvoir construire une politique des transports pour les territoires faisant, comme l'a rappelé le président de SNCF Réseau, le pivot du système de déplacements en France.

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Commentaires
K
"La politique en la matière depuis 70 ans a conduit à une impasse, considérant que le déficit d'exploitation des omnibus puis la dette du système ferroviaire pouvait trouver une réponse efficace par la contraction sans fin du réseau (la politique du « TER brûlé »)."<br /> <br /> <br /> <br /> Si je prends tout j'ai appris en "Eisenbahnwesen", il y'a le Kernnetz (réseau central (1)) et le "Ergänzungsnetz" (Réseau cmplémentaire, reseau périphérique (1))<br /> <br /> <br /> <br /> Dans l'age d'or des chemins de fer le Réseau central était profitable, le réseau périphérique déficitaire. Mais si on coupe une partie du réseau périphérique, le réseau central perde aussi des transports et sa rentabilité se réduit. Et une partie du réseau central pouvait même devenir déficitaire.<br /> <br /> <br /> <br /> Donc, pour tenir le réseau comme ensemble profitable, on avait deux buts : organiser le réseau périphérique le plus économique possible (qu'il perde moins) et faire le réseau central le plus profitable possible.<br /> <br /> <br /> <br /> Au jour d'hui l'age d'or des chemins de fer est histoire, mais le modèle décrit dessus nous fait comprendre le mécanisme économique qui nous permette de optimiser le réseau pour minimiser les subventions.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> (1)je n'a pas trouvé une traduction officiel
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R
Les choix de la classe politique qui nous ont amenés dans cette situation ubuesque sont dogmatiques ! Sans même s'inquiéter de l'évasion fiscale, qui coûte 80 G€ par an, on peut observer l'inutilité absolue du CICE qui coûte lui aussi un pognon de dingue, 20 G€/an, et 40 cette année. Que n'aurait-on pu faire en ferroviaire depuis tant d'années avec ne serait-ce que la moitié de ça ? Non, seulement en rénovations indispensables, en résorption du déficit, mais aussi en reconstruction de lignes... Avec un bénéfice sur le fameux emploi et sur la fameuse croissance de très loin bien meilleur ! Et sur la transition énergétique, la revitalisation des territoires, etc.<br /> <br /> Mais non, les énarques croient toujours à la route, les sots.
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A
En réaction sur les derniers commentaires, je ne m’hasarderai pas sur les chiffres mais le meilleur moyen d’allier la question écologique (car le temps devient pressent) et la mobilité et de faire habiter les gens dans les villes! Aujourd’hui combien quitte les grands centres pour faire construire au fond fond des campagnes ?? Beaucoup! Et ne pourra ramener des trains ou autres moyens de transports collectif partout la est la réponse
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9
En tout cas, les élus ne sont pas déterminés à diminuer la part de la route dans le transport de marchandises. Les élus des villes situés entre Pontoise et Serqueux se sont opposés aux aménagements pour faire passer le Fret Normand par Gisors (au lieu de Sartrouville actuellement).<br /> <br /> <br /> <br /> https://actu.fr/ile-de-france/cergy_95127/val-doise-cergy-pontoise-lagglo-dit-non-projet-fret-ferroviaire_20757636.html/amp?__twitter_impression=true<br /> <br /> <br /> <br /> Quand on achète une maison à côte d'une ligne ferroviaire ACTIVE, on ne va pas pleurer après parce que plus de trains passent. Concernant l'impact sur les transports du quotidien, mieux vaut une interdépendance avec la ligne J qu'un cisaillement à Sartrouville sur la ligne la plus fréquentée d'Europe !<br /> <br /> <br /> <br /> C'est à eux que les Gilets Jaunes issus du petit patronat devraient fournir leurs doléances ! 😡
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J
Je pense que l'un des problèmes de la France est un problème d'éducation.<br /> <br /> Depuis le début des années 70, le tout "bagnoles" s'est imposé à nous.<br /> <br /> Même le choc pétrolier et les accidents de la route n'y ont rien fait.<br /> <br /> Que des avantages (surtout la liberté...) et presque aucun inconvénient. <br /> <br /> L'amélioration du réseau routier a couté très cher, mais c'était soit disant dans l'intérêt général. <br /> <br /> Le plan Massif-Central de VGE a créé l'A75, mais abandonné la RCEA.<br /> <br /> Les morts ? Un mal nécessaire au développement de l'automobile.<br /> <br /> Ne dit-on pas catastrophe pour certains et accident pour la route... <br /> <br /> <br /> <br /> De plus les gouvernements successifs ont opté pour la "privatisation" de nos moyens subsistance: nourriture, transport, énergie, communication... <br /> <br /> <br /> <br /> Depuis la libéralisation des prix, nous sommes devenus des individualistes invétérés qui recherchons constamment le meilleur prix sans s'occuper des conséquences. <br /> <br /> Comparer l'évolution des prix de la baguette et du lait, c'est édifiant. http://france-inflation.com/prix_depuis_1900_en_france.php<br /> <br /> Combien font plusieurs kilomètres pour acheter ce qu'il pourrait trouver à coté d'eux. Font-ils des économies ? Font-ils cela pour trouver des produits de qualité ?<br /> <br /> <br /> <br /> Pour les transports, comment faire accepter aujourd'hui la contrainte d'un horaire ?<br /> <br /> L'une des solutions, le cadencement, le vrai, pas à la sauce "SNCF". <br /> <br /> Une autre solution, ré-apprendre à vivre ensemble avec nos différences, de là nait la richesse d'un pays.<br /> <br /> <br /> <br /> Un peu de lecture philosophique:<br /> <br /> https://www.letudiant.fr/bac/conseils-methodo/bac-es-corrige-d-un-sujet-probable-de-philosophie.html
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A
On appréciera la belle application du diviser pour mieux régner, joli coup de maître de la part du gouvernement, prédis par certains humoristes dès le début du mouvement.<br /> <br /> On médiatise que les gilets jaunes luttent exclusivement contre la hausse du carburant, comme ça on leur oppose les ecolos, et on les regarde s'entretuer. Ce qui est le plus craignos c'est que vous foncez tous tête baissée.<br /> <br /> <br /> <br /> C'est un blog de TC oui ou non ? Merci de vous en tenir et de ne pas essayer de lancer des débats politiques de pilier de comptoir !<br /> <br /> <br /> <br /> Un lecteur mécontent de voir ce blog s'entâcher de la sorte, autant la faute des auteurs que des commentateurs !
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O
@ Pharyde<br /> <br /> <br /> <br /> Sur votre premier point, il y a quand même une forte corrélation. Dès lors que le choix de 1983 a conduit à développer de nouvelles LGV (Atlantique et Nord) à budget constant pour le transport ferroviaire, l'essor du TGV s'est donc fait au détriment du réseau classique. Choix de court terme car globalement l'état du réseau à cette date était plutôt satisfaisant, mais qui, au fil du temps, en prolongeant cette situation pendant plus de 20 ans, a conduit à tomber à 500 km de renouvellement par an, alors que pour une durée de vie de 30 ans de l'infra sur un réseau de 30 000 km, le calcul est simple : il faut renouveler 1000 km par an.<br /> <br /> <br /> <br /> Sur l'avant-dernier, il est difficile de considérer que les manifestations du moment sont l'expression d'une attente en faveur du développement du ferroviaire. On peut même en douter !<br /> <br /> <br /> <br /> @ Yoyo<br /> <br /> <br /> <br /> La taxation sur le carburant, ne l'oublions pas, est la conséquence de l'abandon de l'écotaxe qui ne devait pas porter sur le transport individuel. Tiens, et si certains gilets jaunes étaient d'ex-bonnets rouges ?
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P
Soyons clair, la dégradation du réseau ferroviaire classique n'est pas la cause du "tout-TGV", l'Espagne a développé de façon plus massive son réseau de LGV que la France (il est vrai avec beaucoup plus d'aides européennes que la France) et son réseau de Cercanias est excellent et son réseau ferroviaire secondaire en meilleur état qu'en France (bien qu'il ne soit pas non plus un exemple). La dégradation du réseau ferroviaire classique est uniquement causé par le sous-investissement de l'État de façon générale dans tous les services publics, que se soit dans la SNCF, les hôpitaux qui saturent, les postes de polices délabrés, les écoles où le niveau baisse...à cause d'une classe politique véreuse depuis 30 ans. Le mal qui touche le réseau ferroviaire est le même qui touche la France depuis 30 ans et qui a atteint son paroxysme avec la crise des Gilets Jaunes.<br /> <br /> <br /> <br /> L'État ne peut pas privatiser ses autoroutes, ses aéroports, la Française des Jeux (en partie) qui sont des machines à cash énormes et après dire devant les français qu'il n'a pas les moyens de financer les infrastructures et que les français doivent payer plus de taxes pour les obtenir.<br /> <br /> <br /> <br /> L'État ne peut pas dire qu'il défend les transports du quotidien lorsqu'il sacrifie les travaux de rénovation du RER B au profit d'un CDG Express dépourvu de pertinence dans la desserte aéroportuaire de Roissy ou lorsque la région Île-de-France est obligée de financer toute seule l'électrification entre Gretz et Provins parce que l'État refuse d'allouer des crédits pour financer les projets.<br /> <br /> <br /> <br /> L'État ne peut pas prétendre défendre la transition énergétique lorsqu'il ferme, refuse d'entretenir correctement son réseau ferré rural ou y met une offre squellettique. Les gens ne peuvent donc plus prendre le train, doivent donc se rabattre sur leur voiture or le carburant est surtaxé pour inciter les gens à prendre le train. Faut pas s'étonner après qu'une partie de la population se rebelle. Je n'évoquerais pas l'aménagement du territoire calamiteux des 30 dernières années mais qui n'est pas la responsabilité de la majorité actuelle (mais il peut légiferer en forçant à la fermeture des zones commerciales de Grande Distribution pour revitaliser le commerce des centres-villes des villes moyennes mais le lobbying de Mulliez, Carrefour et cie est trop puissant).<br /> <br /> <br /> <br /> Ceux qui osent croire que la concurrence va sauver le rail français doivent savoir une chose : "on ne fait pas rouler une ferrari sur une route défoncée".
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M
Tant que la République conservera une telle verticalité du pouvoir, et paradoxalement les français sont demandeurs pour que rien ne change, aucun avenir décent pour les petites lignes et les territoires ruraux. D'autres pays ont montré qu'on peut décentraliser sans être "fédéral". De quoi a peur la France ? C'est toute la question...
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T
Cette nouvelle mission est aussi inutile qu’insupportable..<br /> <br /> Il y a aujourd’hui bien plus de lignes a reouvrir que de lignes a remettre en cause....<br /> <br /> Si il y a une etude utile a faire ,c’est celle portant sur le financement et le niveau d’offre cible a mettre en oeuvre sur les lignes Uic 7-9<br /> <br /> <br /> <br /> Le reste est de la gesticulation regressive.faut il rappeler que plus de 20000 km de lignes ont ete fermees dont de tres nombreuses situees dans les territoires aujourd’hui touristiques ou periurbains et desormais livres a une dependance a 100% de l’automobile......c’est ce modele qu’on veut accentuer ?<br /> <br /> Tout cela pour generer de tres maigres economies au regard de ce que rapporterait de maniere directe et indirecte un reseau ferroviaire modernise et attractif pour la population, les 90 millions de touristes qui visitent notre pays chaque annee ou encore tous les emplois de la filiere.....
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G
Totalement d’accord sur le fond. Par contre permettez-moi de penser que nous ne sommes pas en démocratie, ni même en république mais en idiocracie, vu les piètres résultats de tout ce que touche l’etat en matière de transports, en faisant qui plus est, de plus en plus soigneusement les poches des contribuables.
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S
De toute façon comment voulez-vous que le gouvernement et dans une autre mesure les régions soient convaincues d'investir dans le développement des lignes de desserte fine du territoire ? Même dans les endroits où il y des trains assez nombreux - Dijon Montchanin Nevers que je connais bien - et des tarifs très incitatifs - carte Bourgogne Franche comté - on ne voit pas les "gilets jaunes" dans les trains! Pire, pour eux c'est presque un déshonneur de prendre le train, ils préfèrent pester contre le carburant trop cher et la limitation à 80 km/h sur les routes et continuer à se contortionner dans leurs voitures lors de la traversée sinueuse du Morvan. Méchant mes propos? Sûrement, mais lorsque je vois que passé Luzy le samedi 24 novembre, il ne restait que 7 voyageurs dans le train Dijon 10h12 Nevers 12h33, je m'inquiète.
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A
Faut-il croire qu'un Xième rapport changera quoi que ce soit! La connaissance du dossier si elle n'est pas encore acquise à tous les niveaux de l'Etat montre bien que plus il y a de papier moins il y a d'action. Que l'action des gilets jaunes concoure à un renforcement du tout routier n'est hélas que trop vrai...et je ne crois pas, même après 9 semaines de débats anarchiques, qu'ils en soient conscients!<br /> <br /> En plus nos gouvernants s'ils sont enclins à gérer, plus ou moins bien, les problèmes de mobilité sont surtout centrés sur les grandes agglomérations (le bon % de populations concernées est plus facile à atteindre); que les Régions se débrouillent "avec leurs chers territoires". C'est plus qu'une réorientation c'est un abandon pur et simple des lotissements périurbains et autres villages ayant le tord d'avoir été créés ou d'exister. Agglutinez-vous et nous ferons le nécessaire?
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J
Excellent diagnostic du malade...
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