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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
21 mars 2018

Allemagne : une concurrence vertueuse pour le voyageur

Veillée d'armes avant la première journée de grève à la SNCF contre le projet de réforme de l'opérateur ferroviaire. Il est quelque peu dommage que le devenir du statut spécifique des cheminots soit mis au centre des débats alors qu'il serait nettement plus intéressant de parler de l'avenir du chemin de fer en France, de son rôle pour les territoires et leurs habitants, dans une politique de reconquête du marché et de réduction de la dépendance à l'automobile.

L'autre point de blocage, c'est l'ouverture à la concurrence avec quantité d'arguments agités en guise d'épouvantail mais qui ne résistent guère à une analyse objective des faits.

Les résultats en Allemagne

Nous vous invitons à (re-)découvrir deux dossiers de transportrail : oser expérimenter une concurrence régulée et 20 ans de concurrence en Allemagne, dont nous rappelons ci-dessous quelques chiffres-clés, sur la base d'un récent rapport du Parlement allemand.

  • le nombre de voyageur-kilomètres a augmenté de 88,3 % passant de 30 à 56,5 milliards de voyageurs-km ;
  • l’offre en km-trains a augmenté de 35 % passant de 498 à 673 millions millions de trains-km;
  • un coût moyen du km-train de 15 € financé à peu près à parité entre le voyageur et la collectivité ;
  • un chiffre d’affaires de DB Regio en hausse de 166% ;
  • un budget fédéral en baisse de 19 % ;
  • un déficit par voyageur-km réduit de 30 % ;
  • une part modale passée de 6,7 à 8,2 %, soit + 25% en nombre de voyageurs et + 33 % en voyageurs-km ;
  • 783 km de réouvertures depuis 1996.

Les Landers consacreront tout de même quelques 8,2 MM€ en 2017 aux services ferroviaires régionaux. C’est 30% de plus qu’en 1994, année de la restructuration de la DB, avec une enveloppe alors établie à 6 MM€.

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Josefsthal - 2 août 2013 - Non, ce n'est pas la ligne des Alpes, nous ne sommes pas entre Grenoble et Veynes, mais en Bavière, sur la ligne Munich - Bayrischzell exploitér par le BOB avec d'étonnants autorails à l'architecture ressemblant à un tramway. Le service est assuré à cadence horaire, ponctuellement renforcé à la demi-heure. L'exploitation est assurée par une filiale de Transdev. © N. Hoffmann

Les opérateurs privés détiennent en 2016 environ 30% en trains-kilomètres du marché régional, et cette part pourrait atteindre 34% avec les prochains appels d’offres dont la mise en œuvre est prévue à partir de 2019. Par rapport au périmètre commercial de 1994, la DB a conservé 80% des prestations. Entre 2014 et 2015, en dépit de l'augmentation du nombre de contrats attribués à des opérateurs privés, DB Regio a enregistré une hausse d'environ 5% de son trafic en voyageurs-km, de 40,3 MMvk à 42,7 MMvk. La DB assure donc un service plus conséquent qu'en 1994.

Non, la concurrence ne concerne pas que les grands axes... c'est le contraire !

Il faut aussi tordre le cou à l'idée reçue selon laquelle les opérateurs privés n'iraient que sur les grands axes les plus rentables, alors que c'est justement sur les lignes secondaires qui ont été les premières à bénéficier des effets de l'ouverture du marché, en nécessitant peu de moyens pour faire la différence et mettre en place un service attractif à peu de frais. On pourra rappeler notre expérience de voyage sur le Harz Elbe Express, autour de Halberstadt, ville comparable à Montluçon (42 000 habitants, même situation de dépression économique, configuration territoriale voisine) mais qui dispose d'une centaine de trains par jour contre 22 dans la sous-préfecture de l'Allier.

Non, la concurrence ne complique pas la tarification

Même chose quant à la tarification : dans une procédure de type DSP, c'est l'autorité organisatrice qui définit la politique tarifaire. Dans le cas allemand, elle est organisée en communautés multimodales autour des grands bassins urbains et pour les trajets interurbains, le système de vente est transparent : dans notre exemple du HEX, nous avons acheté un billet HEX (Transdev) sur un distributeur DB et une combinaison HEX-DB sur un distributeur HEX.

Ne pas confondre concurrence sur le marché et concurrence pour le marché

Cette confusion savamment entretenue mélange concurrence sur le marché, en open access (exemple les trains à grande vitesse Italo de NTV en Italie) et la concurrence pour le marché, par le biais de délégation de service public (comme sur les réseaux urbains français), mais aussi la franchise, sur le modèle britannique, qu'on pourrait assmiler aux anciennes compagnies ferroviaires françaises avec un découpage géographique.

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Montepulciano - 1er mai 2013 - Sur la Direttissima, la rame Italo 575.08 assure une liaison Rome - Florence - Milan. Italo est actuellement le seul cas d'opérateur à grande vitesse en open access en Europe, bousculant Trenitalia. © M. Stellini

Sur le marché régional, il s'agira d'une concurrence pour le marché à laquelle la DB souhaité participer avec sa filiale Arriva, ainsi que l'a annoncé le président de la DB, qui en fait une cible prioritaire.

Sur le marché national, une concurrence sur le marché est l'orientation la plus plausible, mais on sait que la SNCF conservera probablement une position très nettement majoritaire compte tenu des moyens à mobiliser pour pénétrer un marché d'abord organisé sur la grande vitesse. Tout au plus, les Intercités seraient une cible plus accessible, d'autant qu'il y a matière à développer un marché souvent sous-développé.

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20 mars 2018

POLT : dossiers mis à jour

En lien direct avec le dossier POCL, il nous est apparu également nécessaire de toiletter les dossiers que nous avions consacrés à l'axe POLT (Paris - Orléans - Limoges - Toulouse), et à l'évolution des temps de parcours.

A propos de l'axe POLT, nous vous invitons également à (re-)découvrir l'étude que nous avions consacré aux raisons du désamour français à l'égard de la pendulation.

20 mars 2018

Paris - Clermont-Ferrand : un avenir sans POCL

Mal aimée des grands projets ? L'Auvergne pourrait le croire. Déjà, dans les années 1990, le projet de TGV Auvergne - Limousin, un Y Paris - Orléans - Gien, avait été aussi vite abandonné qu'il était apparu, dans la veine d'un schéma directeur de la grande vitesse ferroviaire ambitieux qui se heurtait à une conjoncture économique pas très propice et déjà des questions sur le modèle économique de relations TGV sur des axes à flux relativement modestes.

La deuxième tentative était nettement plus consistante. Si le projet POCL intégrait bien la connexion de l'Auvergne au réseau à grande vitesse, il s'agissait d'une des fonctionnalités d'une démarche qui visait beaucoup plus grand : désaturation de la LGV Sud-Est et de la gare de Lyon, accélération des temps de parcours par une vitesse de pointe de 360 km/h, intégration de la desserte du Berry voire du Limousin selon les scénarios. Cependant, à 13 MM€, POCL (Paris - Orléans - Clermont - Lyon), projet phare d'un SNIT démesuré ne put résister aux interrogations sur le financement d'un tel projet qui aurait essentiellement incombé aux collectivités locales et, plus globalement, à une politique de modernisation du réseau ferroviaire passant d'abord par de grands projets, en laissant un peu trop de côté un réseau classique plus qu'à la peine.

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Moulins - 11 février 2018 - Croisement de 2 Intercités Paris - Clermont-Ferrand, sur lesquels l'intégralité du parc Corail ex-Téoz a été rénové (et de façon plutôt réussie) tout comme le parc de BB2600, formant un ensemble revêtant de façon homogène la livrée Carmillon. Le renouvellement de ce matériel est l'occasion d'écrire une nouvelle trajectoire de modernisation de l'axe, depuis le report sine die du projet POCL. © transportrail

Bousculé par le rapport Mobilités 21 puis celui du Conseil d'Orientations des Infrastructures, le projet POCL affiche un « retard indéterminé » qui confine à la suppression, d'autant plus que, parallèlement, SNCF Réseau engage un grand programme de modernisation de la LN1 avec ERTMS et à la clé un gain de capacité non négligeable. La saturation sur laquelle misait POCL recule, entre l'érosion progressivre du trafic depuis 2009, la généralisation en cours des compositions Duplex, le projet de nouvelle génération de TGV encore plus capacitaires et l'augmentation du débit prévu sur la LN1.

Autant de facteurs qui ont d'abord conduit transportrail à restructurer le dossier consacré à POCL, élargi au projet de modernisation de la LN1, fondateur dans la démarche de Réseau Haute Performance lancée par SNCF Réseau, et ensuite à examiner les possibilités d'amélioration de l'axe Paris - Clermont-Ferrand. Ces possibilités ont été en partie mises au placard pour ne pas concurrencer le projet de ligne nouvelle. Entre les sections qui pourraient être relevées à 200 km/h, le traitement de certains points durs (Paris-Bercy, Moret, Vichy par exemple) et la valorisation du renouvellement du matériel roulant, se profile une configuration ferroviaire propice, sans oublier un réexamen de la desserte, comme suggéré par le rapport Avenir des TET.

Vous pouvez également retrouver notre reportage A bord de l'Intercités Paris - Clermont-Ferrand.

18 mars 2018

Ligne des Horlogers : vers un accord franco-suisse

Devant le trafic conséquent - jusqu'à 15 000 véhicules par jour - sur la route du col des Roches assurant la liaison entre Morteau et La Chaux de Fonds, la faiblesse de l'offre ferroviaire française a été mise en exergue par le canton de Neuchâtel, ainsi que le non-respect des normes anti-pollution en vigueur en Suisse par les X73500 français (dotés de moteurs Euro2). De surcroît, la migration ERTMS du réseau suisse entraîne la dépose des équipements Signum, dont sont équipés 6 X73500 affectés aux relations Besançon - Morteau - La Chaux de Fonds.

Les Suisses n'ayant pas de matériel thermique disponible et les français de matériel thermique compatible avec les nouvelles normes suisses (dont l'ERTMS), il fallait trouver un compromis : c'est en bonne voie.

Le KVB français serait donc transitoirement installé jusqu'en gare du Locle-ville : les voyageurs pour La Chaux de Fonds devront alors faire une correspondance. Réciproquement, la France devrait s'engager à installer ERTMS sur la section transfrontalière, a minima entre Morteau et Le Locle, avec un matériel adéquat et de surcroît conforme aux normes antipollution suisses.

Parallèlement, côté français, le financement du renouvellement de la ligne des Horlogers devrait se traduire par un effort supplémentaire pour assurer la pérennité de la ligne et examiner les opportunités d'amélioration des performances dans ce cadre.

17 mars 2018

Quand les petites lignes sont des RER qui s'ignorent...

Croisons deux sujets sur le haut de la pile de l’actualité ferroviaire française : d’un côté, le devenir des lignes régionales, les petites lignes, les « UIC 7 à 9 » en jargon technique ; de l’autre, le développement de dessertes type RER adaptées aux grandes métropoles, régulièrement évoqué par le gouvernement, souligné par le rapport du Conseil d'Orientation des Infrastructures et la mission Spinetta.

Autour de ces dernières, il n’y a pas que des grands axes ferroviaires à trafic soutenu. Nombre de grandes agglomérations comportent dans leurs étoiles ferroviaires une ou plusieurs lignes classées UIC 7 à 9 qui concourent, plus ou moins bien à la desserte périurbaine.

Dans le tableau ci-dessous sont regroupées les sections classées UIC 7 à 9 autour des grandes agglomérations, y compris des bassins de taille intermédiaire dans lesquels existent déjà des services identifiés comme périurbains, comme Le Havre – Rolleville, La Rochelle – Rochefort ou Mulhouse – Thann.

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L’appréciation de la desserte est toute relative : nous avons surtout cherché à distinguer les lignes pour lesquelles existe un socle minimal relativement conséquent d’offre de celles qui sont pénalisées par un service très insuffisant au regard des critères d’attractivité d’une desserte de zone urbaine. Ce tableau met en exergue quelques situations extrêmes :

  • La Madeleine – Comines et Le Havre – Rolleville : le principe d’un mode ferré en site propre est avéré mais la solution ferroviaire n’est probablement pas l’optimum coût / efficacité, raison pour laquelle nous préconisons une solution de conversion au tramway urbain rapide ;
  • Ascq – Orchies, à l’est de Lille, est suspendue compte tenu de l’état de l’infrastructure et sa réouverture n’apparaît pas pertinente au regard de ce ratio coût / efficacité, d’autant que les habitants du sud de la ligne vont rejoindre la desserte Lille – Valenciennes plus fréquente et plus rapide, tandis qu’au nord, le rabattement sur le métro constitue la solution la plus appropriée ;
  • Tassin – Lozanne a vocation à devenir la troisième branche du tram-train de l’Ouest Lyonnais, avec un potentiel de rabattement lié à la construction d’un parc-relais à Limonest, avec réouverture de l’ancienne gare ;
  • Clermont-Ferrand – Volvic ne peut rivaliser avec les bus T2C dans la partie urbaine compte tenu d’une offre squelettique et d’une géographie désavantageant le train alors que les bus relient Durtol, Royat et Chamalières au centre-ville de façon plus efficace ;
  • Clermont-Ferrand – Thiers traverse une zone de densité faible ;
  • Grenoble – Vif est handicapée à la fois par la faiblesse de l’offre, par un tracé sinueux allongeant le temps de parcours et par la densité d’offre urbaine (réseau TAG), facteurs auxquels s’ajoutent l’état de l’infrastructure et le coût de sa remise en état ;
  • Tours – Loches, caricature de sous-utilisation du réseau ferroviaire alors que les autocars affichent complet sur une des routes les plus dangereuses de l’ouest de la France en raison de l’importance du trafic, témoignant du manque d’appétence de la Région Centre pour le chemin de fer (les temps changent…) ;
  • Rennes – Châteaubriant, pour laquelle l’horizon est en train de s’éclaircir avec l’étude du renouvellement de la ligne préfigurant une modernisation destinée à intensifier son rôle périurbain.

Pour ces lignes, le champ des possibles est donc très éclectique, allant de la sortie du RFN pour reprise par une métropole en vue d’un tramway à une exploitation ferroviaire classique mais généralement au prix d’un développement de l’offre conditionné non seulement à un renouvellement de l’infrastructure (pour lever les ralentissements, analyser au passage les opportunités de relèvement de vitesse à moindre coût) et à une augmentation de capacité en ligne par des équipements de signalisation appropriés. Reste après à savoir si ces circulations arriveront à passer dans les nœuds ferroviaires car, si sur les grands axes le schéma capacitaire offre généralement la possibilité d’une desserte périurbaine à la demi-heure, il n’en est pas toujours de même quand il s’agit d’une ligne UIC 7 à 9…

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16 mars 2018

Nouvelles liaisons de combiné franco-suisse

Deux nouvelles liaisons de transport combiné sont lancées par Naviland Cargo entre la France et la Suisse. La plateforme de Chavornay, près de Lausanne, reçoit depuis ce mois de mars 2 nouvelles relations avec la France : l'une vers Le Havre et l'autre vers Marseille, avec transit par Gevrey. A raison de 3 rotations par semaine et des trains de 480 m, l'objectif est de transporter entre 300 et 400 000 caisses par an. Pour la Suisse, ces nouvelles liaisons présentent l'intérêt d'éviter les ports de Gênes et de Rotterdam, plus encombrés, avec à la clé des retards d'acheminement qui peuvent se compter en journées !

15 mars 2018

Limousin : 2 suspensions temporaires... pour l'instant

Inquiétude grandissante en Limousin sur le devenir des lignes de maillage ferroviaire : après la suspension des circulations entre Pompadour et Objat en raison d'un affaissement de remblai dans le secteur de Saint Solve, la majeure partie de la ligne Limoges - Angoulême, entre  Saillat et Angoulême, est interrompue depuis le 13 mars dernier en raison d'un défaut de géométrie de la voie. Cependant, les perspectives sont assez différentes dans les deux cas.

Limoges - Brive par Saint Yrieix devrait être coupée en deux sections par le milieu, selon la bonne vieille méthode traditionnelle, avec la suspension du trafic en décembre prochain entre Saint Yrieix la Perche et Objat et de fortes interrogations sur le devenir des deux sections préservées, notamment sur la viabilité de navettes Brive - Objat.

Limoges - Angoulême devrait échapper à ce scénario compte tenu de l'engagement de la Région Nouvelle Aquitaine à maintenir la desserte ferroviaire, mais avec probablement une période de vaches - très - maigres - le temps de réaliser les travaux de première urgence en attendant un programme plus conséquent pour lever les ralentissements. Cela tombe mal, la mise à 2x2 voies de la route nationale parallèle progresse (application du théorème « Pour le rail on réfléchit, pour la route on élargit »). A priori, les trains devraient être de retour mi-avril selon SNCF Réseau...

15 mars 2018

Transdev obtient sa licence d'opérateur en France

Dans cette période intense mettant le réseau ferroviaire dans les gros titres de l'actualité française, il y a parfois quelques raccourcis. Ainsi, l'obtention par l'EPSF d'une licence d'opérateur ferroviaire par Transdev est présentée comme une grande nouveauté dans la perspective de l'ouverture à la concurrence, important sujet de crispation entre les syndicats cheminots et le gouvernement.

En réalité, Transdev est déjà opérateur ferroviaire en France, par le biais de sa filiale CFTA, assurant le service de deux lignes bretonnes : Guingamp - Paimpol et Guignamp - Carhaix... mais sous le certificat de sécurité de SNCF Mobilités puisque CFTA exploite ces lignes dans un contrat d'affermage qui se termine à la fin de cette année. L'objectif pour Transdev est évidemment de conserver ces deux lignes dans le nouveau cadre juridique.

Autre élément, Transdev est candidat à l'exploitation de CDG Express et se positionne déjà clairement dans les prochaines discussions avec les Régions pour les appels d'offres relatifs à l'exploitation des TER en s'appuyant sur l'expérience acquise en Allemagne et en Suède notamment, y compris sur les lignes secondaires.

14 mars 2018

Réforme ferroviaire : l'analyse de la CGT

Alors que le projet de réforme de la SNCF est examiné aujourd’hui en conseil des ministres, la CGT a dévoilé ses propres propositions baptisées Ensemble pour le fer, rapport sur l’avenir du service public ferroviaire et contre le statu quo libéral afin de faire pression pour réorienter les orientations du gouvernement. transportrail vous en propose un résumé.

Eléments de contexte

Dans le constat, plusieurs points présentés par le syndicat ne suscitent pas de remarque particulière, car ils ne peuvent être que partagés :

  • la position centrale du chemin de fer dans la réduction de l’empreinte environnementale des transports (tout en soulignant très justement que le transport collectif est déjà peu émetteur de pollution par rapport au trafic) ;
  • la nécessité d’un équilibre dans l’aménagement du territoire entre les grandes métropoles et les zones de moindre densité ;
  • l’exigence d’une comparaison des coûts complets des modes de transport, compte tenu d’une forte externalisation des coûts des modes routiers ;
  • dans le domaine du fret, le fort gisement de trafic potentiel par une meilleure articulation entre la voie maritime et le réseau ferroviaire ;
  • l’effet d’entrainement sur l’activité industrielle du fait d’une filière ferroviaire bien implantée en France.

La CGT s’interroge sur la dérive progressive par rapport à la LOTI, toujours en vigueur, en passant d’un droit au transport à un droit à la mobilité, considéré plus individuel et pas forcément adossé à un maillage du territoire par des réseaux organisés par l’Etat et les collectivités locales. Il est vrai que les « nouvelles mobilités » sont dans le vent et, comme malheureusement trop souvent, la prime à la nouveauté aboutit à des analyses excessives cherchant à en faire le substitut à des services organisés (certes pas toujours de façon efficace), surfant sur la vague du coût pour la collectivité. Bref, le réseau ferroviaire doit être l'épine dorsale du système de transport collectif autour de laquelle gravitent les autres modes en complémentarité. Pas vraiment de nature à susciter la critique.

A propos du coût du système ferroviaire

On notera également que l’analyse souligne que, globalement, le transport ferroviaire n’est pas plus subventionné que la route : 10,5 MM€ par an pour le système ferroviaire (d’après le rapport Spinetta) contre 16 MM€ à périmètre comparable pour le réseau routier (rapport CGEDD 2016). Le coût de la prise en charge des retraites serait à peu près comparable au coût sanitaire de la pollution supporté par la Sécurité Sociale, autour de 3 MM€ selon l’OMS et l’OCDE. La valorisation socio-économique de la congestion routière (valeur du temps perdu) est estimée à 20 MM€ par an et l’accidentologie routière à 37 MM€. Le déséquilibre rail-route se retrouve aussi dans le déficit des « cars Macron » avec une incertitude sur les moyens de renflouage de Ouibus, mais aussi sur les exonérations de TVA et de TICPE dont bénéficient le transport routier de marchandises (ajoutons aussi l'abandon de l'écotaxe).

Part de marché : la reprise d’un objectif du Grenelle Environnement

Dans ses préconisations, le syndicat propose de fixer un objectif de part modale de 25% pour le transport de voyageurs comme pour le fret, soit, pour cette branche, une augmentation de 330% des tonnages transportés.  Ce seuil de 25%  n’est pris au hasard : la CGT a repris l’objectif fixé par le Grenelle Environnement... à horizon 2020 ! Il y a donc du chemin pour y arriver, d’autant que l’attractivité du rail pour les voyageurs passerait par exemple pour le syndicat par l’abandon de la tarification de marché au profit du retour de la stricte application du barème kilométrique. A vérifier quand même car il n'est pas certain que le voyageur y soit gagnant dans le temps...

Economie et dette ferroviaire

Sur le volet économique, la CGT propose :

  • l’affectation des recettes de la TICPE aux infrastructures de transport, pour financer l’AFITF ;
  • la création d’un Versement Transport hors des agglomérations, dont bénéficieraient les Régions ;
  • la création d’un livret d’épargne populaire défiscalisé permettant de financer les projets du SNIT (il serait toutefois bienvenu de préciser « les projets pertinents ») ;
  • la prise en charge complète des déplacements domicile-travail par les employeurs (elle est en principe aujourd'hui de 50%).

Quant au sujet de la dette, la CGT propose la création d’une structure autonome de défaisance, en partie financée par la renationalisation des sociétés d’autoroute afin de récupérer la rente annuelle des concessions. Rien de bien innovant car cette structure de défaisance a déjà existé : ce fut d'abord le Service Annexe d'Amortissement de la Dette puis... RFF ! On ne manquera pas de rappeler que la requalification officielle de la dette ferroviaire en dette d'Etat ne manquerait pas d'être scrutée de près par la Commission Européenne (mais on connait les critiques de la CGT sur la bureaucratie financière des fonctionnaires de Bruxelles...)

Statut et concurrence

Sans surprise, la CGT s’oppose d’une part à toute remise en cause du statut cheminot et demande le retour à l’organisation de la SNCF d’avant 1997, c’est-à-dire une entreprise unique intégrée, en s’appuyant sur des établissements territoriaux multi-activités. Il est tout de même assez intéressant de voir la CGT saluer l’efficacité du système ferroviaire suisse, en soulignant que les CFF sont une entreprise – intégrée de surcroît – contrôlée à 100% par l’Etat… mais en passant sous silence qu’elle est une Société Anonyme à capitaux publics, ce que propose le gouvernement dans sa réforme. Ajoutons tout de même que la migration de SNCF Mobilités en SA poserait financièrement moins de problèmes que SNCF Réseau, pour une question de garantie d'Etat vis à vis de la dette (avec pour conséquence une hausse des taux d'intérêt).

D'autre part, on ne peut pas complètement donner tort à la CGT sur la relativisation de l'importance du statut dans le coût du système ferroviaire français : ce qui coûte cher à la SNCF, c’est moins le statut (qui représenterait selon certains experts le tiers de l’écart entre les coûts de production ferroviaire de la SNCF et ceux de ses voisins européens) que le poids de la dette et la faible productivité des moyens mobilisés essentiellement pour les seules heures de pointe : même dans le carcan relativement étroit du statut actuel, il y aurait moyen de diminuer le coût par voyageur-km ou par tonne-km, ce qui relève d’abord d’une politique d’offre fondée sur l’usage rationnel des moyens (personnel, matériel, infrastructure). Le ratio entre le chiffre d'affaires et la marge opérationnelle reste trop élevé : il est de 1 pour 24 actuellement alors que la règle d'or le plafonne à 1 pour 18...

Même chose sur l’ouverture à la concurrence : le chapitre souligne, à raison, le niveau d’investissement élevé de la part des Etats dans leur système ferroviaire, mais se fait plus discret sur les effets de l’ouverture du marché, l’émulation entre opérateurs, la réorganisation des entreprises historiques (qui même en perdant des parts de marché, ont une activité plus soutenue, comme en Allemagne), en prenant pour habituel repoussoir le Royaume-Uni, qui n’a pas que des vertus, certes, mais aboutit à une situation paradoxale de forte hausse de la fréquentation en dépit d'une forte hausse des tarifs.

La CGT s’appuie d’ailleurs sur le Règlement européen relatif aux Obligations de Service Public, et les paragraphes 6 de l’article 4 et 4bis de l’article 5, qui encadrent les modalités d’une attribution directe de contrats de service public ferroviaire. Cela dit, dans le texte, c'est bien l'appel d'offre qui est la règle, et l'attribution directe une exception.

Conclusion

Reconnaissons à la CGT le souci de ne pas cantonner sa contribution à la seule question du statut cheminot. Débroussaillé de certaines postures et tournures qui font le charme de la culture syndicale française, il donne effectivement « du grain à moudre » dans une discussion avec le gouvernement sur des sujets centraux quant à l’avenir du système ferroviaire et l’angle sociétal au travers du maillage du territoire et de la réduction de l’empreinte environnementale. Mais nul doute que le sujet du statut sera l’objet de toutes les crispations… sans compter le principe des ordonnances, qui, il faut bien le dire, ne va pas forcément dans le sens d'un dialogue équitable...

14 mars 2018

L'heure c'est l'heure... mais laquelle ?

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C'est une des suites du rapport de l'été 2017 sur la robustesse de l'exploitation ferroviaire. Constatant qu'un tiers des trains arrivant en retard à leur terminus étaient partis en retard de leur gare d'origine, la SNCF motive ses troupes avec un programme baptisé H00 et son slogan : "pour être à l'heure, chaque seconde compte"... oui d'accord, mais encore faudrait-il que les pendules soient à l'heure car on peut constater dans nombre de gares que la synchronisation est loin d'être acquise quand il y a, comme dans l'exemple ci-dessus jusqu'à 4 minutes d'écart entre deux écrans sur le même quai (chacun affichant sa voie, ici à Nanterre Université entre la voie centrale (écran de gauche) et la voie 2 (à droite).

Certes, la situation géopolitique dans les Balkans conduit à une réduction de la fréquence sur les lignes à haute tension en Europe : le 50 Hz se mue en 49,9996 Hz ce qui aboutit, pour les horloges branchées sur la fréquence du courant électrique, à se retrouver au fil du temps, à un décalage horaire. Ceci dit, le constat sur l'absence d'homogénéité de l'heure dans les gares existe depuis des années...

Nous reviendrons prochainement sur ce sujet de régularité et de conception horaire : il peut être assez passionnant !

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