La Région Bourgogne Franche-Comté a instauré à l’horaire 2018 une nouvelle desserte entre Dijon, Dole et Besançon : les trois principales agglomérations génèrent actuellement environ 7000 voyageurs par jour à bord des TER. La nouvelle offre comprend 26 allers-retours contre 23 précédemment, avec un train par heure de 5h à 22h, renforcé à la demi-heure en pointe, avec un gain de temps pouvant atteindre 8 minutes pour les 10 relations omnibus. Jusque là, tout va bien.
Des trains en plus mais un choix sur la politique de desserte
En revanche, 2 gares ne sont plus desservies : Neuilly-lès-Dijon et Villers-les-Pots. En outre, les TER Dijon - Besançon ne desservent plus Franois, arrêt maintenu uniquement sur les TER Besançon - Mouchard - Lons le Saunier. Pour les deux premières, la Région justifie ces suppressions par leur très faible fréquentation et par une évolution de la stratégie : certes, les quelques voyageurs de ces gares sont - à n’en pas doutés - perdus pour le TER, mais pour l’ensemble de l’axe, le renforcement de l’offre et l’amélioration - certes modeste - des temps de parcours devrait attirer plus de monde vers le train.
Qui plus est, le service est assuré par des Régiolis, mettant fin au panachage de l’offre entre Z2, Régiolis, courtes rames Corail réversibles ou encore RRR peu avenantes, avec un niveau de service correct.
Dijon Ville - 28 septembre 2012 - Les RRR franc-comtoises ont été parmi les chevilles ouvrières de la liaison Dijon - Besançon. La rénovation des aménagements intérieurs avait relevé le niveau de confort de ces rames, mais entre le vieillissement des BB25500 et un comportement dynamique moyen, ce matériel n'était pas dans le coup... © J.J. Socrate
Dole - 20 août 2015 - Les Z2 ont aussi été de la partie : la série de ces automotrices, aux qualités reconnues, s'éteint progressivement après plus de 30 ans de carrière. Néanmoins, leur capacité était devenue insuffisante et leurs conditions d'accès n'étaient plus vraiement au goût du jour. © transportrail
La suppression des arrêts à Franois, dans l’agglomération bisontine, est un peu un cas particulier. Les partisans du maintien de l’arrêt mettaient en avant le temps de parcours vers le centre de Besançon, en à peine 6 minutes. Imbattable. Mais l'argument n'était pas forcément le bon. Evidemment, pour la liaison Franois - Besançon, l'usage du train était forcément limité par l'offre ferroviaire de faible volume, ne soutenant pas la comparaison avec le réseau urbain bénéficiant de l'effet fréquence, surtout avec le rabattement sur le tramway, au terminus Hauts du Chazal. Temps de parcours contre effet fréquence ? Un classique débat à la lisière entre la zone centrale de l'agglomération et ses franges périurbaines...
D’autres Régions semblent envisager l’évolution de leurs dessertes selon une approche similaire : lorsqu’une gare n’est desservie que par un ou deux allers-retours par jour, est-il vraiment pertinent de maintenir une desserte aussi squelettique, si parallèlement, la chalandise du point d’arrêt est de toute façon faible, de surcroît si le rabattement n’est guère envisageable compte tenu de la position du point d’arrêt ? Une telle démarche est menée en Normandie, suite à la reprise des Intercités par la Région et à la fusion des deux Régions. Même chose en Nouvelle Aquitaine sur un territoire assez considérable.
Besançon Viotte - 20 octobre 2017 - Pas d'effort surhumain pour la 22248 ayant pris en charge une courte rame de 4 voitures Corail sur le parcours Dijon - Besançon. La diversité du matériel (et des fonctionnalités associées) est aussi un critère de confort. © transportrail
Bref, il s’agit de sortir d’une forme d’hypocrisie : maintenir artificiellement l’existence d’un point d’arrêt avec une desserte d’affichage ou assumer une suppression de l’arrêt, organiser une logique multimodale et procurer à l’offre ferroviaire plus de lisibilité, plus d’efficacité tout en préservant un bon niveau de maillage du territoire ?
Les Régions, qui ont récupéré la compétence sur les lignes routières interurbaines, peuvent tirer profit de cet élargissement de compétence pour mettre en œuvre une stratégie multimodale autour du train.
Besançon Viotte - 20 octobre 2017 - Quelques minutes plus tard, entre en gare un Régiolis assurant une relation Belfort - Besançon - Lons le Saunier. En ce vendredi soir, les étudiants sont nombreux à regagner leurs familles : les bagageries sont fortement sollicitées. © transportrail
L’intérêt n’est pas forcément anodin puisqu’une sélection plus rigoureuse de la politique d’arrêts sur les TER peut être de nature à procurer de substantielles économies pour les Régions en assurant a minima le même niveau de desserte avec moins de moyens (des trains plus rapides donc meilleure rotation du parc, surtout si le gain permet d’atteindre un bon temps-système en horaire cadencé), et donc de redonner des marges de manœuvre pour développer l’offre sur ces mêmes axes.
Bref, si le bénéfice global pour la collectivité semble assez net, il doit cependant composer avec des pressions locales, le privilège intuitivement octroyé au statu quo faute de quoi, ces points d’arrêt non seulement peu fréquentés mais à faible potentiel, risquent de continuer à végéter pour préserver les apparences…
Et la gare TGV ?
Remarque d'un de nos lecteurs (qu'on remercie au passage) : cette refonte horaire aurait pu être l'occasion de prolonger les TER Dijon - Besançon à la gare TGV Besançon Franche-Comté, d'autant que les navettes sont assurées en matériel thermique sur une ligne entièrement électrifiée (puisque utilisée par les TGV Paris - Besançon Viotte). Cependant, les navettes sont calées en principe au plus juste par rapport aux horaires des TGV sur la ligne à grande vitesse, ce qui n'est peut-être pas si évident à obtenir avec les attaches horaires des TER venant de Dijon : les TER semi-directs arrivent à Besançon Viotte à la minute 05 et les TER omnibus autour de la minute 45 (du moins en principe car les variantes ne sont pas absentes...). Les navettes vers la gare TGV ont un positionnement erratique qui ne colle rarement avec ces minutes. Donc une idée à mettre de côté pour l'instant, mais à ne pas oublier...
Focus sur la desserte de Franois
C'est peut-être une occasion manquée, du moins temporairement. La gare de Franois est située à 1100 m au nord du terminus Hauts du Chazal du tramway. L'absence de connexion entre le train et le tramway est un peu dommage. Non pas pour les habitants de l'agglomération. Certes, le train va plus vite, mais entre l'effet fréquence (très favorable au réseau urbain) et la position excentrée de la gare Viotte, difficile d'en faire un outil de desserte urbaine.
En revanche, la proximité de l'important centre hospitalier Jean Minjoz et de l'IUT suscite la proposition de création d'une station TER faisant coup double :
- proposer une desserte directe de ces équipements par les TER des relations Dijon - Besançon et Lyon - Lons le Saunier - Besançon - Belfort ;
- créer une correspondance TER - tramway à coût modéré (moins de 10 M€) pour faciliter l'accès aux trains depuis l'ouest de l'agglomération.
Reste une question : le nouvel arrêt Besançon Hôpital viendrait-il en plus de la gare de Franois ou en substitution ? Le débat est ouvert !
Si la proximité relative entre le terminus du tramway (en rose sur la carte ci-dessus) et la gare de Franois peut donner quelques regrets, l'alternative d'une gare nouvelle (ou de substitution) à l'hôpital de Besançon est pour le moins séduisante car probablement plus économique.
il ne faut jamais oublier : il y'a certainement des voyageurs qui perdent quelques minutes, mais il y'a beaucoup qui gagnent une demi heure (et préfèrent de prendre le train au lieu de la voiture en conséquence)