Libéralisation des TER : les Régions s'informent
Pour se forger une opinion, Régions de France a auditionné SNCF Mobilités et 7 opérateurs français et européens potentiellement intéressés par l’ouverture du marché français : Abellio, Arriva, Keolis, RATP Dev, Transdev, Thello, First Group… SNCF Réseau ainsi que Gares & Connexions ont également été reçus, tout comme l’Autorité de la Concurrence, l’ARAFER, l’EPSF, des représentants des associations d’usagers et des syndicats du personnel de la SNCF.
Il faut retenir de la synthèse des auditions quelques grandes lignes. Précisons d’abord que l’objectif n’est pas – encore – de prendre position mais de comprendre ce qu’implique l’évolution du transport ferroviaire à l’aune de l’ouverture du marché.
Premier point : la durée de la délégation de service public et la stratégie relative au matériel roulant sont liées. Si l’opérateur doit arriver avec du matériel, alors le contrat doit porter sur au moins 10 voire 15 ans. Si la Région fournit le matériel, et c’est l’opinion majoritaire des opérateurs, la durée peut être plus courte, comme sur les contrats de réseaux urbains. Pour cela, la propriété du matériel devra passer de la SNCF à la Région (même si celles-ci ont financé son acquisition en totalité).
Brumath - 4 mars 2017 - Quel statut pour le matériel actuel des TER, financés par les Régions mais propriété de la SNCF ? La reprise par l'autorité organisatrice et la mise à disposition aux futurs opérateurs semble une solution logique en vue d'une procédure plus rapide. © transportrail
Deuxième point : le lien entre l’équilibre économique du contrat et d’abord la taille des contrats. En moyenne, un volume de 1,5 millions de km-trains est considéré comme une valeur médiane compatible un modèle économique viable qui devra être confronté avec le niveau d’offre sur les lignes concernées. Au passage, les lignes mises en appel d’offres devront former des ensembles cohérents pour éviter la dispersion des moyens. Ensuite, viennent les réflexions relatives aux modalités de rémunération du délégataire, le partage du risque entre autorité organisatrice et opérateur et la politique tarifaire. Les opérateurs considèrent que plus le risque leur incombe, plus ils devraient pouvoir influer sur la définition sur sa structuration et pouvoir proposer des produits attirant les voyageurs.
Toujours en lien avec la tarification, les méthodes de distribution est un sujet encore largement ouvert. Plus délicate est en revanche la question de la confidentialité, ce qui rejoint en partie celle de la distribution. Une certaine méfiance semble régner entre les opérateurs.
Troisième point : l’infrastructure et le statut des gares. L’état du réseau et sa disponibilité constituent un sujet lourd dans le contexte français : les lignes régionales, les « petites lignes », sont potentiellement les plus faciles à ouvrir à de nouveaux exploitants car elles nécessitent peu de moyens pour les exploiter et essayer de les redynamiser. Mais ce sont aussi les lignes dont l’état est le plus préoccupant et dont la pérennité à l’horizon de l’arrivée de nouveaux opérateurs est le moins certaine. Les opérateurs soulignent aussi la question de la disponibilité de ces lignes avec notamment l’équilibre entre travaux et circulation avec là aussi de la part des opérateurs potentiels le souhait de pouvoir proposer des solutions alternatives.
Loches - 30 juillet 2014 - Quand bien même le matériel TER est moderne et performant, l'état de délabrement de l'infrastructure et la non-maîtrise par SNCF Réseau du patrimoine constitué par les lignes régionales, constitue un handicap majeur pour l'ouverture du marché. Le risque ? Que les lignes ferment avant même d'avoir étudié leurs potentialités... © transportrail
Pour les gares, la situation actuelle est unanimement considérée comme provisoire : les gares ne peuvent rester dans le giron d’un opérateur et doivent être transférées au gestionnaire d’infrastructure ou filialisées. Un avis de plus en ce sens…
Enfin, la question du personnel : il faudra d’abord distinguer le cas des salariés directement liés à la production du service de l’encadrement. Les opérateurs potentiels sont d’accord pour reprendre les employés du « premier lot » mais pas du second… comme sur les réseaux urbains. Ensuite, les opérateurs posent la question de la capacité à concilier le statut et l’introduction d’une dose de polyvalence, unanimement considérée comme un moyen de maîtriser le coût de production du service sur les lignes régionales.