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transportrail - Le webmagazine des idées ferroviaires
28 février 2017

Inauguration de la LGV SEA

Ce n'était pas prévu aussi tôt, mais il fallait manifestement occuper un Président de la République qui n'est pas candidat à sa succession pour montrer qu'il était encore en fonction. C'est donc aujourd'hui qu'a été inaugurée la LGV Sud Europe Atlantique, qui entrera en service le 2 juillet prochain.

Une LGV sous concession privée

Bordeaux sera à 2h04 de Paris par TGV direct, contre 3h12 actuellement. Cependant, si on revient aux temps de parcours avant les travaux, le gain net est ramené à 54 minutes puisque les meilleurs TGV reliaient Paris à Bordeaux en 2h58. Les bénéfices de la LGV se diffuseront évidemment aux lignes affluentes, vers La Rochelle, Hendaye, Arcachon, Toulouse, Tarbes.

D'un coût de 7,6 MM€ pour 340 km d'infrastructures nouvelles dont 302 km de ligne à grande vitesse à proprement parler, apte à 320 km/h, et 38 km de raccordements au réseau classique, SEA présente tout de même un coût au kilomètre deux fois plus élevé que la LGV Méditerranée selon la Cour des Comptes.

C'est la première LGV française concédée, donc hors du réseau ferré national, pour une durée de 50 ans dans le cadre d'un partenariat public-privé : le groupement LISEA est dominé par Vinci et la Caisse des Dépôts, finançant à hauteur de 50% l'investissement. Il assurera aussi l'exploitation et la maintenance de la ligne jusqu'en 2061. De son côté, SNCF Réseau reste le gestionnaire d'infrastructure des installations de raccordement entre le réseau existant (LN2 et lignes classiques) et SEA.

SEA

Deux ans après l'ouverture de la LGV Atlantique jusqu'à Tours, le projet est apparu en 1992 dans le schéma directeur des lignes à grande vitesse. Il a été lancé formellement en 2007 quand l'Etat a décidé de lancer simultanément 4 projets de lignes nouvelles : SEA, BPL, Est phase 2 et CNM, en recourant au partenariat public-privé afin de maîtriser le coût pour le système ferroviaire et promouvoir une solution de financement alors jugée porteuse d'avenir.

Outre la LGV, plusieurs projets ont été réalisés pour accompagner l'arrivée de la grande vitesse jusqu'à Bordeaux à commencer par la modification du plan de voies de Paris Montparnasse pour fluidifier l'exploitation de la tête de ligne, la mise à 4 voies de l'entrée nord de Bordeaux, la rénovation de la gare de Bordeaux et la commande de l'alimentation électrique à Rennes. Au total, 2,2 MM€ investis par SNCF Réseau pour ces aménagements et les raccordements entre SEA et le réseau existant.

Péages, niveau de desserte et bilan pour l'exploitant

LISEA percevra donc des péages pour chaque circulation, d'un coût moyen de 22 € par kilomètre. Un coût jugé élevé par la SNCF, mis en avant dans le débat ô combien enflammé sur la définition de la desserte qui sera mise en oeuvre en juillet 2017. Sur l'axe Paris - Bordeaux, la SNCF proposait 13 liaisons directes par jour et 13 avec arrêts intermédiaires, quand les élus locaux et le concessionnaire avaient signé un plan de financement fondé sur 18 liaisons directes, sans associer l'opérateur. De son côté, LISEA considérait que l'équilibre économique serait atteint à 33 circulations. Résultat, plusieurs collectivités locales, parmi les 58 signataires du plan de financement de SEA, ont décidé de suspendre leur participation au projet étant donné qu'elles ne trouvaient pas leur compte dans le schéma de desserte retenu, tandis que le consortium envisageait de se défausser sur l'Etat en cas de pertes.

Il reste donc une inconnue sur SEA : si le trafic ne permet pas de viabiliser le niveau de desserte mis en oeuvre à partir de juillet, quelles seront les décisions ? Elaguer l'offre ? La maintenir quitte à affaiblir les résultats de la SNCF ? Bref, sur qui sera exportée la contrainte ? Le concessionnaire, l'opérateur ou les collectivités ?

A l'inverse, en cas de succès au-delà des prévisions, c'est le modèle de prévision de trafic qu'il faudra revoir (ce qui serait tout de même le plus simple et le plus souhaitable finalement...). Tout dépendra de la réactivité de la clientèle et de son appréciation dans le rapport performances / qualité de service / prix du billet. Or, depuis plusieurs années, la sensibilité au temps de parcours a tendance à nettement diminuer, alors que la sensibilité au prix augmente, ce qui se traduit par le succès du covoiturage et une opinion plutôt positive sur les autocars (mais à condition d'en accepter les piètres conditions de voyage...).

Mais l'équation financière est encore brumeuse : outre le fait que la SNCF table sur 90 M€ de pertes sur cet axe au second semestre 2017, la réaffectation des 15 rames TGV EuroDuplex Océane, commandées pour sauver Alstom (dit-on) et initialement destinées aux Intercités de la Transversale Sud, viendra donc encore un peu plus augmenter la capacité de la flotte Atlantique. Celle-ci disposera déjà de 40 rames neuves et de 20 rames Duplex modernisées selon l'aménagement Océane : les 15 rames supplémentaires pourraient constituer un argument de poids pour la SNCF afin de réviser rapidement à la baisse l'offre afin de maintenir un taux de remplissage moyen acceptable selon ses critères, si les prévisions de trafic n'étaient pas atteintes. 

Di'ici au 2 juillet, date de mise en service commercial, les ventes de billets seront ouvertes dès le 15 mars. Pendant ce temps, les marches d'essai se poursuivent, tout comme sur la LGV BPL qui ouvrira le même jour mais qui n'a pas - encore ? - eu les honneurs présidentiels...

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Commentaires
J
je suis ravi de lire que les conditions d'utilisations des cars macrons sont honteux,nous rabaisser a un tel niveau est pas acceptable,on mérite mieux...............
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S
"la sensibilité au temps de parcours a tendance à nettement diminuer, alors que la sensibilité au prix augmente"<br /> <br /> Cela n'a pas de sens de dire les choses ainsi. La vraie question, c'est combien les gens sont prêts à payer pour gagner du temps.... et on peut douter que la réponse soit 0, au vu de tous les exemples, y compris hors transport où les gens veulent aller toujours + vite (télecharger sa musique, sa vidéo, faire ses courses etc...). Ou combien les gens sont prêt à faire des économies en contrepartie du temps perdu. <br /> <br /> <br /> <br /> En outre, tout ceci suppose qu'une production ferroviaire moins rapide couterait moins cher, ce qui est faux. <br /> <br /> <br /> <br /> Au cas précis de la LGV SEA, il y a une LN et de la GV. Or la LN est justifiée pour augmenter les capacités de l'axe. S'il n'y avait pas de GV, il faudrait néanmoins des péages pour payer la ligne... mais sans possibilité d'augmenter les tarifs pour les usagers faute d'amélioration du service. Bref un investissement non finançable. <br /> <br /> Avec la GV, ~50% de l'investissement est financé par les usagers... cad beaucoup + que le surcout d'investissement entre une LN et une LGV<br /> <br /> <br /> <br /> Bref, la LN est nécessaire mais non rentable. La GVF est optionnelle mais rentable. Autant avoir fait une LGV !<br /> <br /> D'autres axes sont dans le meme état de réflexion
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S
Que signifie "la SNCF table sur 90 M€ de pertes sur cet axe au second semestre 2017" ?<br /> <br /> Que si la SNCF refilait à un autre opérateur la desserte de l'axe, ses comptes s'améliorerait de 90M€ ? (et à l'heure actuelle quelle est la perte ou le gain de la SNCF sur cet axe ?)<br /> <br /> <br /> <br /> Ou bien que dans la situation avant/après LGV, sa marge diminue de 90M€ ?<br /> <br /> <br /> <br /> Et qu'est-ce que la SNCF inclue dans ses couts pour en arriver là ?
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K
Ce midi j'écoutais France Inter une discussion concernant le sujet.<br /> <br /> <br /> <br /> un des participants disait, que la LGV Tours - Bordeaux comme Dijon - Mulhouse était construite contre le vouloir de la SNCF, quand elle se ne rentabilise pas vraiment, ça était le Président de l'époque qui voulait construire ces lignes et autres.<br /> <br /> <br /> <br /> ça m'explique aussi un article je trouvais déjà quelques temps passées :<br /> <br /> <br /> <br /> http://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/20150215trib889e1d2b2/avec-les-peages-des-4-nouvelles-lgv-le-tgv-est-dans-l-impasse.html<br /> <br /> <br /> <br /> donc, la SNCF elle-même connait les problèmes de la rentabilité.<br /> <br /> <br /> <br /> Et un des participants était du Havre, je crois le maire, il disait, qu'a l'époque le voyage Le Havre - Paris prenait 1:45, au jour d'hui à cause du mauvais état des voies 2:15. En plus il disait, que l'état de la ligne est une des raisons, pourquoi le port du Havre ne peut se pas développer.<br /> <br /> <br /> <br /> Alors, ne pas vraiment la faut de la SNCF dans cette cas, mais des priorités de la politique complètement contraire aux besoins.
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V
Bordeaux-Toulouse, c'est pas que pour faire du Paris-Toulouse. Ca servira aussi à du Bordeaux-Marseille (Nice), à du Bordeaux Lyon (<5h),, à du Bordeaux-Barcelone, et aussi à du Lyon/Marseille-Pays Basque (y compris Bilbao).<br /> <br /> <br /> <br /> Je suis personnellement assez dubitatif sur les choix faits pour la Westbahn: une infra coûteuse, sans doute plus que pour une LGV V300, pour des gains de temps assez moyens.
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V
A terme, je doute que le trafic sur la LGV entre Poitiers et Bordeaux se limite à 35 trains par jour. Avec GPSO, on peut tabler sur une cinquantaine de trains quotidien environ.
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K
quand il y'a pas mal des ferrophiles ici, qu croient une LGV est beaucoup moins chère qu'une ligne à haute puissance, voici un calcul de comparaison avec le Koralmbahn (KAB), une ligne à haute puissance en Autriche, lg=135km, dont 35km dans le tunnel sous le massif du Koralm. <br /> <br /> <br /> <br /> Elle est en général dans un terrain difficile, donc la partie de 100km contenu plusieurs tunnels d'une longueur de 15km environ, des viaducs etc...<br /> <br /> <br /> <br /> V max = 250km/h, elle est conçu pour 250 trains par jour, des trains à 250km/h des IC, des TER, RER, Marchandises.<br /> <br /> <br /> <br /> 1. Calcul Koralmbahn (KAB)<br /> <br /> <br /> <br /> 1.1 Coûts : 5.2Mrd EUR (base du prix 2009)<br /> <br /> <br /> <br /> 1.2 inflation moyen : 2% de 2009 à 2016 => 6Mrd Euros<br /> <br /> <br /> <br /> 1.3 longueur : 100km de ligne + 35km de tunnel<br /> <br /> <br /> <br /> 1.4 la construction du tunnel sous le massif n'est pas à comparer, donc avec la présomption q'il coûte environ 65% plus cher qu'une ligne ferroviaire en surface il y'a le calcul suivant pour le prix X pour 1km de ligne ferroviaire :<br /> <br /> <br /> <br /> 100km pour le prix X + 35km pour le prix 1,65 X = 6.000Mio<br /> <br /> <br /> <br /> le prix pour un km de ligne ferroviaire haute puissance avec v max = 250km/h est donc :<br /> <br /> <br /> <br /> X = 36Mio Eur/km<br /> <br /> <br /> <br /> ====================================<br /> <br /> <br /> <br /> 2. Calcul Tours - Bordeaux<br /> <br /> <br /> <br /> 2.1 coûts : 7,6Mrd Eur<br /> <br /> <br /> <br /> 2.2 longuer : 340km de ligne<br /> <br /> <br /> <br /> 2.3 Prix par km : 7.600mio Eur / 340km = 22Eur/km<br /> <br /> <br /> <br /> ====================================<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> 3. Comparaison<br /> <br /> <br /> <br /> 3.1 comparaison prix Koralmbahn - Tours-Bordeaux<br /> <br /> <br /> <br /> 36Mio Eur : 22 Mio Eur<br /> <br /> <br /> <br /> 170% : 100%<br /> <br /> <br /> <br /> les coûts de construction du Koralmbahn (sans grande tunnel) sont donc 70% plus élevé que cela de la LGV Tours - Bordeaux<br /> <br /> <br /> <br /> 3.2 Quantité des trains<br /> <br /> <br /> <br /> 3.2.1 LGV : 35 TGV/jour<br /> <br /> <br /> <br /> 3.2.2 Koralmbahn :<br /> <br /> <br /> <br /> on estime pour le début :<br /> <br /> <br /> <br /> 25 trains à 250km/h et Intercité<br /> <br /> 30 trains TER, RER et autres catégories<br /> <br /> 60 trains marchandises<br /> <br /> <br /> <br /> 115 trains en totale<br /> <br /> <br /> <br /> 3.3.1 comparaison prix / utilité<br /> <br /> <br /> <br /> LGV : 22Mio Eur/km => 35 trains<br /> <br /> KAB : 36Mio Eur/km => 115 trains<br /> <br /> <br /> <br /> 3.3.2 coûts pour la utilisation prévisible :<br /> <br /> <br /> <br /> LGV : 22Mio/35trains = 0.62Mio Eur/train <br /> <br /> KAB : 36 Mio/115trains = 0.31Mio Eur/train, donc la moitié.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Conclusion : une ligne à haute puissance est surement plus chère, mais les coûts en plus se justifient facilement avec l'utilité plus élevée.
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I
Quelles sont les perspectives de concurrence des services TGV de la SNCF sur cet axe ?
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A
Inauguration fantoche, elle ne sera même pas terminée pour debut juillet, peut être fin aout, et encore, si ca ne reprend pas davantage de retard.
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S
Voilà, Vinci encaisse les juteux péages des trains circulant sur la voie ferrée qu' il a construite, et aussi les juteux péages des autocars roulant sur l' autoroute parallèle qu' il a acheté pour une poignée d' arachides... Dans le Sud-Ouest, il faudra peut-être abattre aussi les dindons (de la farce)pour juguler l' épidémie de grippe aviaire...
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K
"Or, depuis plusieurs années, la sensibilité au temps de parcours a tendance à nettement diminuer, alors que la sensibilité au prix augmente, ce qui se traduit par le succès du covoiturage et une opinion plutôt positive sur les autocars (mais à condition d'en accepter les piètres conditions de voyage...)."<br /> <br /> <br /> <br /> Ce n'est pas seulement cela. Avec l'ordinateur et WIFI ou les autres technologies de communication (ludiques) d'au jour d'hui le temps d'un parcours dévient aussi moins et moins important. Exemple classique à l'ancienne : la voiture restaurant, qui permette d'économiser du temps, ou augmente simplement le confort et l'expérience.<br /> <br /> <br /> <br /> Dit autrement : je m'en fiche, si je parcours 4h30 pour aller à Toulouse ou 5h30, s'il n'y'a pas de voiture restaurant je prends n'importe quel autre moyen de transport, notamment en famille.
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C
On ira plus vite, ça c'est sûr, et techniquement la réalisation est belle.<br /> <br /> Pour le reste, la collectivité :<br /> <br /> - soit ne gagnera rien si la clientèle répond présent, tandis que Lisea aura réalisé une juteuse opération ;<br /> <br /> - soit perdra si la clientèle n'est pas au rendez-vous, car il faudra renflouer Lisea.<br /> <br /> <br /> <br /> Privatisation des profits, collectivisation des pertes, vive le PPP !
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