Pour ses 60 ans, le Cévenol mis sur route !
Ce n'est plus que l'ombre de lui-même mais c'est un train symbolique, avec parfois les excès que cela peut induire. Le Cévenol fête en 2015 son 60ème anniversaire d'une triste façon : celle de la suppression depuis aujourd'hui du train, remplacé par un autocar.
Le Cévenol version sixties avec un X4200 tractant deux remorques Decauville, venant de quitter Clermont-Ferrand en direction de Marseille. (carte postale d'après un cliché Y. Broncard)
Cévenol : le mythe déchu
Créé en 1955, la relation autorail Le Mont-Dore - Marseille a été d'abord assurée en X2400 puis à partir de 1959 avec les X4200 panoramiques accompagnés de remorques Decauville et éventuellement d'un X2400 ou d'un X2800, matériel qui prit la relève des X4200, fragiles en 1978, mais pour une année seulement. En effet, en 1979, l'autorail est abandonné au profit d'une tranche de voitures Corail, alors en cours de livraison, reliée à une relation Paris - Clermont-Ferrand. Ainsi naît la liaison directe entre Paris, les gorges de l'Allier et les Cévennes. Le train comprenait même une voiture-bar et proposait même un service de restauration à la place en 1ère classe ainsi qu'un service d'animations à bord. Il fallait bien passer le temps.
En décembre 2007, le Cévenol est limité au parcours Clermont-Ferrand Marseille : la mise en place des voitures Téoz pour la ligne du Bourbonnais interdit "par principe" la mise en place de trains à tranches. Comme le coupon de base est composé de 7 voitures, surnuméraires hormis en période estivale, la SNCF, contre l'avis des élus locaux, supprima la liaison directe dont la fréquentation s'était il est vrai considérablement érodée au fur et à mesure des gains de temps réalisés entre Paris et Nîmes avec le TGV, notamment après l'ouverture de la LGV Méditerranée en 2001. Pire, la SNCF préférait vendre des parcours Clermont - Marseille via Lyon, pour reporter le trafic vers le TGV, certes plus rapide mais aussi plus cher et sans irrigation de la Haute Loire et de la Lozère.
Viaduc de la Malautière - 4 février 2012 - Trois voitures Corail forment la composition de la rame du Cévenol. Le train franchit l'un des nombreux viaducs de la ligne dite des 100 tunnels, mais qui comprend aussi quelques grands viaducs parmi les plus célèbres de France : Châpeauroux, Altier, Chamborigaud, autant de noms qui sonnent chez les amateurs et les défenseurs du patrimoine ferroviaire ! © Rail en Cévennes
L'année suivante ne fut guère plus glorieuse avec l'application de limitations de vitesse à 30 km/h du fait du mauvais état de la voie, sur rien de moins que les 42 km reliant Langeac à Langogne. Bilan, le trajet s'allongeait d'une heure. Il fallut attendre 2013 pour obtenir la levée partielle de ces restrictions, 8 km étant à nouveau parcourable à vitesse normale mais avec tout de même 34 km de ralentissements à 40 km/h.
Et pour couronner le tout, toujours en 2013, la SNCF limitait à Nîmes la relation, comme les 2 TER qui complètent la desserte, contredisant les propos du Président de l'entreprise qui s'était engagé devant les élus locaux. Les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent...
L'éboulement de trop ?
En avril dernier, un éboulement à Alleyras a interrompu le trafic sur la ligne des Cévennes. Depuis, le service de bout en bout nécessite un transbordement par autocar entre Langeac et La Bastide Saint Laurent les Bains, tandis que des rames TER assurent les liaisons Clermont - Langeac et La Bastide - Nîmes.
Depuis aujourd'hui, l'aller-retour Intercités est assuré par autocar de bout en bout. A la clé, un nouvel allongement du temps de parcours, avec 6h30 pour relier Nîmes depuis Clermont-Ferrand. Autant dire que les sites de covoiturage se frottent les mains, tout comme les exploitants des autocars longue distance qui vont pouvoir utiliser l'A75 pour proposer des liaisons directes entre l'Auvergne et la Méditerranée, laissant les Régions se débrouiller avec le reste.
Soyons toutefois un peu lucides : le Cévenol est aussi un symbole, celui de la politique de déménagement du territoire liée au déclin du chemin de fer dans les zones rurales, malgré la régionalisation. Il faut bien admettre que Languedoc-Roussillon et Auvergne ne comptent pas parmi les plus dynamiques en la matière. Néanmoins, depuis 2007, il eut été logique de confier l'unique TET aux Régions par souci de cohérence sur une relation qui ne compte que 3 allers-retours. Compte tenu de la vocation touristique de la liaison, l'accès à Marseille est plus que justifié, surtout en transitant par la Côte Bleue, offrant un parcours "entre mer et montagne" qui ne manquerait pas d'atouts, exception faite de la vitesse...
On pourra aussi s'étonner du délai démesurément long pour rétablir la circulation après l'éboulement d'Alleyras qui semble servir de prétexte à ces décisions. Cela fait presque 6 mois. C'est beaucoup pour un événement de portée relativement modeste, qui concerne quelques mètres cubes tombés sur la route et la voie ferrée, et environ 300 m3 de falaise à assanir. Les services de la Préfecture de Haute-Loire semblent peu motivés pour s'occuper non seulement de la voie ferrée mais aussi de la départmentale 40 elle aussi concernée par l'éboulement, d'autant plus que le terrain concerné appartient au WWF. La facture sur l'infrastructure s'élève à "seulement" 280 000 €. La facture de trop pour ceux qui veulent se débarrasser d'un mythe un peu encombrant ?
Voir le site de l'Association des élus pour la défense du Cévenol